Pass Rail : «La mesure n'est pas encore claire», estime Arnaud Aymé

  • l’année dernière

Arnaud Aymé, spécialiste des transports chez Sia Partners, répond aux questions d'Alexandre Le Mer. Ensemble, ils reviennent sur la création du "Pass Rail".
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00:00 - Europe 1 bonjour ! - Jusqu'à 7h ! - Alexandre Lemer, on bline Roche !
00:04 - Europe 1, il est 6h42.
00:06 - Le Congrès des Régions de France ouvre ses portes demain à Saint-Malo.
00:10 Au menu des échanges, la question du pass-rail, cette promesse du gouvernement.
00:15 L'organisation des transports interurbains revient effectivement en région.
00:18 Le projet complet va être détaillé.
00:20 Le projet de ce pass-rail est donc à l'occasion de ce Congrès des Régions.
00:23 - Alexandre Lemer, vous recevez pour en parler Arnaud Aimé, spécialiste des transports à SIA,
00:28 partenaire du cabinet de conseil en stratégie et management.
00:31 - Bonjour Arnaud Aimé. - Bonjour Dimitri.
00:34 - On va rappeler d'abord Alexandre Lemer, mais c'est pas très grave.
00:37 - Bonjour Alexandre, je me réveille juste.
00:39 - On va rappeler d'abord ce qu'est le pass-rail, en quelques mots.
00:43 Il possède plusieurs formules, mais dans le principe c'est un peu toujours la même idée, Arnaud Aimé.
00:49 - Oui, alors je serais un peu mal à l'aise pour le résumer puisque la mesure n'est pas encore très claire.
00:54 Et quand on écoute le ministre Clément Beaune ou le président de la République, Emmanuel Macron, c'est pas exactement la même chose.
01:00 - Alors, pas ce qui va se faire en France, mais sur le principe, voilà, en quoi ça consiste sur le principe ?
01:04 - Sur le principe, ce serait un abonnement mensuel qui permet d'utiliser tous les trains intercités et tous les trains régionaux TER
01:13 avec un tarif donc très réduit, de l'ordre de 49 euros par mois.
01:18 Donc largement subventionné, on sait pas trop si c'est par l'État ou par les régions, avec une utilisation illimitée.
01:26 - Bon, est-ce que ce pass-train, quels qu'en soient ses contours précis, est-ce que c'est 49 euros par mois, est-ce que c'est plus, est-ce que c'est moins ?
01:33 Est-ce qu'il a des chances en tout cas d'aboutir d'ici à l'été prochain ?
01:37 Ainsi que le premier ministre des Transports, ça paraît un peu court, non ?
01:40 - Alors, tout dépend du périmètre qu'on lui donne.
01:43 Les trains intercités, par exemple, eux sont sous la maîtrise de l'État. C'est l'État qui est organisateur de ce réseau-là.
01:50 Donc pour utiliser les trains intercités, c'est tout à fait possible.
01:53 Par contre, dès lors qu'on veut étendre aux trains régionaux, au TER, ça devient plus difficile.
01:57 - Et voilà !
01:57 - Parce que les trains TER sont sous la maîtrise des régions.
02:00 Et donc il faut s'accorder avec chacune des régions pour que ce pass-rail permette d'utiliser aussi le réseau régional.
02:07 Et pour ça, il faut s'accorder sur combien d'argent l'État met au pot et combien d'argent chaque région met au pot également.
02:14 - Parce que le problème, enfin le problème, c'est un avantage aussi, c'est de la délocalisation.
02:18 En France, ce sont effectivement les régions qui ont la main sur le financement des trains régionaux.
02:22 Or, en la matière, Arnaud Aimet, c'est chaque région qui fixe librement son propre tarif sur les TER.
02:30 - Effectivement. Chaque région est complètement souveraine. C'est la décentralisation.
02:34 - Et donc on a vu fleurir ces dernières années des tarifs adaptés à chaque région.
02:41 Alors quand on regarde avec un point de vue national, on peut se dire que c'est très complexe.
02:46 Mais cela dit, en fait, il y a assez peu de voyageurs qui cherchent à parcourir l'ensemble de la France avec une succession de trains régionaux.
02:54 Et donc les tarifications, elles conviennent généralement aux régions parce qu'elles sont adaptées à chaque clientèle régionale avec des tarifs souvent avantageux.
03:03 Donc l'intérêt d'ajouter à ça une tarification nationale, il ne fait pas du tout consensus.
03:11 Donc ça rend les régions, les conseils régionaux d'autant plus dubitatifs.
03:15 C'est-à-dire que d'une part, ils devraient contribuer fortement à cette mesure qui est onéreuse.
03:19 C'est beaucoup de subventions. - C'est l'axe à coince.
03:22 - Oui, c'est l'axe à coince. La région Haute-France par exemple, présidée par Xavier Bertrand,
03:27 a déjà dit "très bien, très bonne idée ce passerelle", mais c'est l'État qui paye, certainement pas la région.
03:33 - Voilà, il y a un peu un jeu là-dessus, surtout si c'est une mesure voulue seulement par l'État,
03:39 peut-être davantage pour des raisons politiques, médiatiques, que pour des raisons de mobilité décarbonée.
03:45 Surtout que les régions, elles regardent, comme le fait l'État, l'exemple allemand qui peut être vu aussi comme un contre-exemple.
03:52 C'est-à-dire que l'Allemagne a mis en place ce type de pass. - Le Deutschland-Ticket.
03:57 - Pardon ? - Le Deutschland-Ticket en allemand.
03:59 - En allemand dans le texte. - En allemand dans le texte.
04:03 Qui a été considéré comme un succès si on regarde le nombre d'abonnements qui ont été achetés, plus de 10 millions.
04:09 Par contre, si on regarde l'impact sur la route, c'est-à-dire combien de voitures ont été ôtées des routes,
04:15 dans quelle mesure le trafic automobile a diminué au profit du ferroviaire.
04:19 - On n'a pas de report massif. - C'est un objectif écologique, et c'est très faible.
04:21 - Oui, oui. - Quand on demande aux gens qui profitent de ce Deutschland-Ticket,
04:25 s'il n'y avait pas eu ce pass-rail, est-ce qu'ils auraient utilisé leur voiture ou pas, est-ce qu'ils auraient pris le train ou pas,
04:34 il y a seulement 8% des clients qui disent "s'il n'y avait pas eu cette mesure tarifaire, j'aurais utilisé la voiture".
04:39 Bon, ça fait très très cher, comme mesure publique.
04:42 - C'est pas suffisant pour lâcher la bagnole, pour paraphraser Emmanuel Macron et Arnaud Aimet.
04:48 - Exactement. Et si les Français aiment la bagnole, comme le dit aussi Emmanuel Macron,
04:53 c'est pas parce que le train est cher en fait.
04:55 S'ils préfèrent en partie la voiture, c'est que la voiture c'est plus souple,
04:59 et donc si on veut que le transport public soit plus compétitif face à la bagnole, il faut plutôt un choc d'offres.
05:04 - Un choc d'offres. Donc on n'a pas assez de liaisons, il y a beaucoup de lignes d'ailleurs,
05:08 les fameuses lignes du quotidien qui ont fermé, beaucoup de desserts qui ont fermé ces dernières années.
05:13 - Alors, elles ont fermé même avant les années 2000.
05:17 Depuis le début des années 2000, les trains TER sont sous maîtrise des régions,
05:21 et donc là il y a à nouveau une augmentation, mais si on veut que ce soit compétitif par rapport à la voiture,
05:25 en fait il faudrait améliorer encore la desserte, accélérer, avoir des fréquences plus fortes de trains,
05:33 et puis élargir aussi les plages horaires pour que ça devienne aussi souple que la voiture.
05:37 C'est le choc d'offres qui est attendu par les automobilistes, davantage que rabouter encore plus les prix.
05:42 - On vous écoute, et les auditeurs qui vous écoutent quand vous dites "élargir les plages horaires",
05:45 on pense aussi à l'amélioration de la ponctualité, là aussi il y a un petit peu de travail Arnaud Aimet.
05:51 - Quand on écoute, il peut y avoir un choc de ponctualité, surtout que le réseau, l'infrastructure française,
05:56 est dans certaines régions tout à fait vieillissante, quand on part avec nos voisins européens,
06:01 où l'État central finance davantage la rénovation du rail,
06:06 mais le vrai sujet c'est plutôt la fréquence des trains,
06:10 tout comme la fréquence des bus ou des autres réseaux de transport public.
06:14 C'est aussi les plages horaires qui permettent d'avoir à nouveau un train comme un bus,
06:18 une fois qu'on a terminé le travail, et qu'on n'a pas peur de devoir rentrer en taxi ou pire à pied.
06:23 - Bientôt un passrail, un pass-train en France, le train illimité moyennant abonnement,
06:28 on va en découvrir les contours, les détails précis dans les jours qui viennent.
06:32 Merci Arnaud Aimet, spécialiste des transports à Sia Partners,
06:35 cabinet de conseil en stratégie et management. Merci à vous.

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