Marseille, Méditerranée, migrants: le discours du pape Français au palais du Pharo

  • l’année dernière
Pour sa deuxième journée à Marseille, le pape François rencontre le président de la République, Emmanuel Macron et conclut les Rencontres méditerranéennes au Palais du Pharo. Il donnera ensuite une messe au stade Vélodrome. Pour la première fois depuis 500 ans, le souverain pontife est en visite dans la cité phocéenne. Il consacre son séjour à la Méditerranée et au défi migratoire, dans un contexte d'hostilité croissante envers les candidats à l'exil au sein d'une Europe tentée par le repli.

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00:00 À 10h29 en direct, le Pape François qui s'exprime pour clore les rencontres méditerranéennes,
00:04 c'est en direct du Palais du Pharaon.
00:05 Merci à tous les membres de la Carte de la Vérité de la Vérité, à participer à ces rencontres.
00:10 Merci de votre travail. Merci pour les réflexions précieuses que vous avez partagées.
00:18 Après Paris et Florence, les chemins au service des peuples méditerranéens se poursuivent.
00:24 Les responsables ecclésiastiques et civils sont encore ici réunis,
00:30 non pas pour traiter d'intérêts mutuels, mais animés par le désir de s'occuper de l'homme.
00:37 Merci, parce que vous les faites avec les jeunes, qui sont le présent et l'avenir de l'Église et de la société.
00:47 La ville de Marseille est très ancienne, fondée par des navigateurs grecs venus d'Asie mineure.
00:54 Le mythe la fait remonter à une histoire d'amour entre un marin émigré et une princesse locale.
01:01 Elle présente dès ses origines un caractère composite et cosmopolite.
01:08 Elle accueille les richesses de la mer et donne une patrie à ceux qui n'en ont plus.
01:14 Marseille nous dit que, malgré les difficultés, la convivialité est possible et qu'elle est source de joie.
01:24 Sur la carte, entre Nice et Montpellier, elle semble presque dessiner un sourire, et j'aime la considérer ainsi.
01:35 Marseille, c'est le sourire de la Méditerranée.
01:38 (Applaudissements)
01:45 Je voudrais donc vous proposer quelques réflexions autour de trois réalités qui caractérisent Marseille.
01:55 La mer, le port et le phare. Trois symboles.
02:00 La mer. Une marée de peuples a fait de cette ville une mosaïque d'espérance, avec sa grande tradition multiethnique et multiculturelle,
02:11 représentée par plus de 60 consulats présents sur son territoire.
02:17 Marseille est une ville à la fois plurielle et singulière, car c'est sa pluralité, fruit de sa rencontre avec le monde, qui rend son histoire singulière.
02:30 On entend souvent répéter aujourd'hui que l'histoire de la Méditerranée est un entrelacement des conflits entre différentes civilisations, religions et visions.
02:42 Nous n'ignorons pas les problèmes. Il y en a. Mais ne soyons pas dupes.
02:50 Les échanges entre les peuples ont fait de la Méditerranée un berceau de civilisations.
02:56 Une mer qui régorge de trésors, au point que, comme l'écrivait un grand historien français, elle n'est pas un paysage, mais d'innombrables paysages.
03:09 Ce n'est pas une mer, mais une succession de mers.
03:13 Depuis des millénaires, tout s'est engouffré, compliquant et enrichissant son histoire.
03:21 La Maré Nostrum est un espace de rencontre entre les religions abramiques, entre les pensées grecques, latines et arabes, entre la science, la philosophie et les droits, et entre bien d'autres réalités.
03:37 Elle a diffusé dans les mondes la haute valeur de l'être humain, doté de liberté, ouvert à la vérité et un mal de salut,
03:48 qui voit le monde comme une merveille à découvrir et un jardin à habiter, sous les signes d'un Dieu qui fait des alliances avec les hommes.
03:56 Un grand maire voyait dans la Méditerranée non pas une question conflictuelle, mais une réponse de paix.
04:07 Mieux encore, le commencement et le fondement de la paix entre toutes les nations du monde.
04:15 En fait, il disait, la réponse est possible si l'on considère la vocation historique commune et pour ainsi dire permanente que la Providence a signé dans les passés,
04:27 assigne dans les présents et, dans un certain sens, assignera dans l'avenir aux peuples et aux nations qui vivent sur les rives de ce mystérieux lac de Tiberia d'Elargie qu'est la Méditerranée.
04:42 Lac de Tiberia, ou mer de Galilée, un lieu où, à l'époque du Christ, se concentrait une grande variété de peuples, de cultes, de traditions.
04:56 C'est justement là, dans la Galilée des Chantiers, traversée par la route de la mer, que se déroula la plus grande partie de la vie publique de Jésus.
05:06 Un contexte multiforme et à bien des égards instable fut le lieu de la proclamation universelle de béatitude.
05:15 Au nom d'un Dieu, Père de tous, qui fait lever son soleil sur le méchant et sur le bon, il fait plévoir sur les justes et sur les injustes.
05:22 C'était aussi une invitation à élargir les frontières du cœur en dépassant les barrières ethniques et culturelles.
05:30 Voici donc la réponse qui vient de la Méditerranée.
05:36 Cette mer pérenne de Galilée invite à opposer la convivialité des différences à la division des conflits.
05:47 La marée Nostrome, au carrefour du nord et du sud de l'Est et de l'Ouest, concentre les défis du monde entier comme un témoigne.
05:58 Ce sont 5 rives sur lesquelles vous avez réfléchi.
06:01 L'Afrique du Nord, le Proche-Orient, la mer Noire et Gé, les Balkans et l'Europe latine.
06:09 Elle est à l'avant-poste des défis qui concernent tout le monde.
06:13 Nous pensons aux défis climatiques, la Méditerranée représentant un autre spot où les changements se font sentir plus rapidement.
06:24 Ce qu'il est important de sauvegarder, les maquis méditerranéens, est qu'ils ont un lien unique de biodiversité.
06:36 Bref, cette mer, environnement qui offre une approche unique de la complexité, est un miroir du monde.
06:42 Et elle porte en elle une vocation mondiale à la fraternité.
06:46 Une vocation unique, seule voie pour prévenir et surmonter les conflits.
06:54 Frères et sœurs, sur la mer actuelle des conflits, nous sommes ici pour valoriser la contribution de la Méditerranée,
07:05 afin qu'elle redevienne un laboratoire de paix.
07:09 Car telle est sa vocation, être un lieu où des pays et des réalités différentes se rencontrent,
07:19 sur la base de l'humanité que nous partageons tous, et non d'idéologies qui opposent.
07:26 Oui, la Méditerranée exprime une pensée qui n'est pas uniforme, ni idéologique.
07:34 Mais polyhédrique et adhérente à la réalité.
07:39 Une pensée vitale, ouverte et conciliante.
07:42 Une pensée communautaire. Voilà le mot.
07:48 Comme nous avons besoin de cela dans les circonstances actuelles,
07:52 où des nationalismes archaïques et belliqueux veulent faire disparaître les rêves de la communauté des nations.
08:01 Mais, rappelons-le, avec les armes on fait la guerre, non la paix.
08:06 Et avec l'avidité du pouvoir, on revient toujours au passé, et on ne construit pas l'avenir.
08:16 Par où donc commencer pour enraciner la paix ?
08:20 Sur les rives de la mer de Galilée, Jésus commençant par donner de l'espérance aux pauvres, les proclamant bienheureux.
08:28 Il écouta leurs besoins, il soigna leurs blessures, il leur annonça avant tout la bonne nouvelle du royaume.
08:36 C'est de là qu'il faut répartir du cri souvent silencieux des derniers, et non des premiers de la classe,
08:43 qui élèvent la voix même s'ils sont bien lotis.
08:48 Répartons l'Eglise et les communautés civiles de l'écoute des pauvres,
08:54 qui sont embrassés et non pas contés, car ils sont des visages et non des numéros.
09:01 Les changements de cap de nos communautés consistent à les traiter comme des frères dont nous devons connaître l'histoire,
09:09 et non pas comme des problèmes gênants les renvoyant chez eux.
09:15 Il consiste à les accueillir, non les gâcher, à les intégrer, et non à s'en barrasser, à leur donner de la dignité.
09:26 Et comme je le répète, Marseille, c'est la capitale de l'intégration des peuples.
09:31 [Applaudissements]
09:38 Aujourd'hui, la mer de la coexistence humaine est polluée par la précarité qui blesse même la planète de Marseille.
09:48 Et là où il y a précarité, il y a criminalité.
09:51 Là où il y a la pauvreté matérielle, éducative, professionnelle, culturelle, religieuse,
09:56 les terrains des mafias et des trafics illicites sont libres.
10:01 L'engagement des seules institutions ne suffit pas.
10:08 Il faut un sursaut de conscience pour dire non à l'illégalité et oui à la solidarité,
10:17 ce qui n'est pas une goutte dans la mer, mais c'est l'élément indispensable pour purifier les eaux.
10:24 En effet, le véritable mal social, ce n'est pas dans l'augmentation des problèmes
10:34 que les déclins de la prise en charge qui aujourd'hui approche des jeunes livrés à eux-mêmes,
10:46 proie facile de la délinquance et de la prostitution, qui s'en fait charge ?
10:52 Qui est proche des personnes rendues esclaves par un travail qui devrait les rendre plus libres ?
10:58 Qui s'occupe des familles effrayées qui ont peur de l'avenir et d'émettre au monde des nouvelles créatures ?
11:07 Qui écoute les gémissements des personnes âgées, seules, isolées,
11:13 qui au lieu d'être valorisées sont parquées dans la perspective faussement digne d'une mort douce
11:24 qui est en réalité plus salée que les eaux de la mer ?
11:28 Qui pense aux enfants jamais nés, rejetés au nom d'un faux droit au progrès
11:34 qui est au contraire une régression des besoins de l'individu ?
11:40 Aujourd'hui, nous avons les drames de confondre les enfants avec des petits chiens.
11:48 Mon secrétaire me disait qu'en passant par la place Saint-Pierre,
11:53 il avait vu des personnes qui portaient dans la poussette des enfants.
12:01 Et en fait, ce n'étaient pas des enfants, c'étaient des petits chiens.
12:04 Et ça, ça n'annonce pas quelque chose de bon.
12:10 Qui regarde avec compassion au-delà de ses frontières pour entendre les cris et les douleurs
12:15 qui montent d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient ?
12:18 Combien de personnes vivent plongées dans la violence et souffrent de situations d'injustice et de persécution ?
12:25 Je pense à tant de chrétiens souvent contraints de quitter leur terre
12:31 ou de vivre sans que leur droit soit reconnu, sans qu'ils juissent d'une citoyenneté à part entière.
12:39 S'il vous plaît, frères et sœurs, engageons-nous pour que ceux qui font partie de la société
12:47 puissent en devenir les citoyens de plein droit.
12:51 Et puis, il y a un cri de douleur qui résonne à plus que tout autre
12:56 et qui transforme la Mare Nostrum en Mare Mortum.
13:01 La Méditerranée, berceau de la civilisation, devient tombeau de la dignité.
13:07 C'est les cris étouffés des frères et sœurs immigrants,
13:12 auxquels je voudrais consacrer mon attention en réfléchissant sur la deuxième image que Marseille nous offre, celle de son port.
13:24 La mer d'abord, le port.
13:27 Le port de Marseille est depuis des siècles une porte grande ouverte sur la mer, sur la France, sur l'Europe.
13:35 C'est d'ici que beaucoup sont partis chercher du travail, un avenir à l'étranger.
13:40 C'est d'ici que beaucoup ont franchi la porte du continent avec des bagages chargés d'espérance.
13:47 Marseille, un grand port, est-elle une grande porte qui ne peut pas être fermée ?
13:53 Plusieurs ports méditerranéens, en revanche, se sont fermés.
13:57 Et deux mots ont résonné alimentant la peur des gens.
14:01 Invasion et urgence.
14:03 Et on ferme les portes.
14:05 Mais ceux qui risquent la vie en mer n'envahissent pas.
14:10 Ils cherchent de l'hospitalité, de la vie.
14:14 Quant à l'urgence, le phénomène migratoire n'est pas tant une urgence momentanée,
14:20 toujours bonne, suscitée par une propagande alarmiste.
14:25 Mais c'est un fait de notre temps, un processus qui concerne, autour de la Méditerranée,
14:32 trois continents et qui doit être géré avec une sage prévoyance,
14:39 avec une responsabilité européenne capable de faire face aux difficultés objectives.
14:44 Je regarde ici sur la carte les ports, les ports privilégiés pour les migrants.
14:49 C'est la Chypre, la Grèce, Malte, l'Italie, l'Espagne.
14:56 C'est les portours méditerranéens et ils accueillent des migrants.
15:02 Le Marais Nostrum crie justice avec ses rivages où d'un côté règne l'opulence,
15:08 le consumérisme, le gaspillage, et de l'autre, la pauvreté, la précarité.
15:14 Là encore, la Méditerranée est un reflet du monde.
15:18 Le Sud se tourne vers le Nord avec beaucoup de pays en développement,
15:22 un proie à l'instabilité, au régime, aux guerres et à la désertification
15:27 qui regardent les plus essées dans un monde globalisé où nous sommes tous connectés,
15:33 mais où les fossés n'ont jamais été aussi profonds.
15:37 Pourtant, cette situation n'est pas une nouvelle de ces dernières années.
15:43 Ce n'est pas ce pape venu de l'autre bout du monde, le premier à la percevoir
15:48 avec urgence et préoccupation.
15:51 Non, ça fait plus de 50 ans que l'Église en parle de manière pressante.
15:57 [Applaudissements]
16:00 Le Concile Vatican II venant de ses conclures,
16:09 Saint Paul VI, dans l'encyclique "Populorum progressio" écrivait
16:15 "Les peuples de la faim interpellent aujourd'hui de façon dramatique
16:19 les peuples de l'opulence."
16:22 L'Église tressaille devant ce cri d'angoisse et appelle chacun
16:27 à répondre avec amour à l'appel de son frère.
16:32 Le pape Montigny est numéro 3 des voires des nations les plus développées
16:36 et racinées dans la fraternité humaine et surnaturelle.
16:40 Le devoir de solidarité, c'est-à-dire l'aide que les nations riches
16:45 doivent apporter aux pays en voie de développement.
16:49 Le devoir de justice sociale, c'est-à-dire les redressements
16:56 des relations commerciales défectueuses entre peuples forts et peuples faibles.
17:01 Et le devoir de charité universelle, c'est-à-dire la promotion d'un monde
17:06 plus humain pour tous, partagé où nous tous nous aurons quelque chose
17:13 à donner et à recevoir sans que les progrès des uns soient un obstacle
17:18 au développement des autres.
17:21 À la lumière de l'Évangile et de ses considérations,
17:26 le pape Francis, en 1967, soulignait le devoir de l'accueil
17:33 sur lequel il écrivait ainsi.
17:37 Nous ne saurions trop insister.
17:41 Et 15 années auparavant, Pidouze avait encouragé à cela
17:47 en écrivant "La famille des Nazareth en exil, Jésus, Marie et Joseph
17:51 émigrent en Égypte" sont les modèles, les exemples et les soutiens
17:55 de tous les émigrés et pèlerins de tous les temps, de tous les pays,
18:00 de tous les réfugiés, de toutes conditions,
18:05 qui, poussés par la persécution ou par le besoin,
18:08 se voient contraints d'abandonner leur patrie,
18:12 abandonner les personnes qui leur sont chères
18:15 et se rendre en terre étrangère.
18:19 Certes, nous voyons tous les difficultés d'accueil.
18:29 Les migrants doivent être accueillis, protégés ou accompagnés,
18:37 promus et intégrés.
18:39 Si on n'arrive pas jusqu'au bout, le migrant reste à la marge
18:44 de la société, accueillis, accompagnés, promus et intégrés.
18:50 Voilà donc le style attendu.
18:55 [Applaudissements]
18:59 Il est vrai que ce n'est pas facile de suivre ce style
19:07 ou d'intégrer des personnes qui ne sont pas attendues,
19:10 mais les critères principaux ne peuvent pas être
19:13 les moyens de son propre bien-être,
19:15 mais la sauvegarde de la dignité humaine.
19:17 Ceux qui se réfugient chez nous ne doivent pas être considérés
19:21 comme un fardeau à porter.
19:24 Si nous les considérons comme des frères,
19:26 ils nous apparaîtront surtout comme des dons.
19:29 Demain, la journée mondiale du migrant et du réfugié
19:32 sera célébrée.
19:34 Laissons-nous toucher par l'histoire de tant de nos frères
19:37 et sœurs en difficulté, qui ont le droit tant d'émigrer
19:41 que de ne pas émigrer.
19:44 Et ne nous enfermons pas dans l'indifférence.
19:47 L'histoire nous appelle à un sursaut de conscience
19:51 pour prévenir un naufrage des civilisations.
19:56 L'avenir, en effet, ne sera pas dans la fermeture,
19:59 qui est un retour au passé, une inversion de marche
20:03 sur le chemin de l'histoire, contre les terribles fléaux
20:09 de l'exploitation des êtres humains.
20:12 La solution n'est pas de refouler, mais d'assurer,
20:15 selon les possibilités de chacun, un grand nombre
20:18 d'entrées légales et régulières, possibles grâce à un accueil
20:23 équitable de la part du continent européen,
20:27 dans le cadre d'une collaboration avec les pays d'origine.
20:32 Dire "ça suffit" est au contraire "fermer les yeux".
20:37 Tenter maintenant de se sauver se transformera en tragédie
20:42 demain, quand les générations futures nous remercieront
20:47 pour avoir su créer les conditions d'une intégration incontournable,
20:53 alors qu'elles nous accuseront pour n'avoir favorisé
20:57 que des assimilations stériles.
21:01 L'intégration est pénible, mais clairvoyante.
21:06 Elle prépare à l'avenir qui, qu'on le veuille ou non,
21:10 se fera ensemble ou ne se fera pas.
21:13 (Applaudissements)
21:19 L'assimilation, qui ne tient pas compte des différences
21:25 et reste rigide dans ses paradigmes, fait prévaloir
21:31 l'idée sur la réalité et compromet l'avenir en augmentant
21:35 les distances et en créant la gaietisation,
21:39 provoquant hostilité, intolérance et souffrance.
21:43 Nous avons besoin de la fraternité comme du pain.
21:47 Le mot même "frère", dans sa dérivation indo-européenne,
21:52 révèle une racine liée à la nutrition et à la subsistance.
21:56 Nous ne nous soutiendrons qu'à nourrissons d'espérance
22:04 les plus faibles, en les accueillant comme des frères.
22:07 N'oubliez pas l'hospitalité, disent l'écriture.
22:12 Et de l'Ancien Testament, on répète la veuve,
22:18 l'orphelin et l'étranger, les trois devoirs de la charité,
22:24 assister la veuve, assister l'orphelin,
22:27 assister l'étranger, le migrant.
22:31 A cet égard, le port de Marseille est aussi une porte de la foi.
22:36 Selon la tradition, les saints Marthe, Marie et Lazare
22:42 ont débarqué ici et ont sémé l'Évangile sur cette terre.
22:47 La foi vient de la mer, comme l'évoque la suggestive
22:52 tradition marseillaise de la Chandeleur,
22:55 avec la procession maritime.
22:58 Lazare, dans l'Évangile, est l'ami de Jésus,
23:01 mais c'est aussi le nom du protagoniste d'une parabole
23:04 très actuelle qui ouvre les yeux sur l'inégalité
23:09 qui ronge la fraternité et nous parle de la prédilection
23:14 du Seigneur pour les pauvres.
23:17 Eh bien, nous, les chrétiens qui croyons au Dieu fait homme,
23:23 homme unique, inimitable, qui sur les rives
23:26 de la Méditerranée s'est dit chemin, vérité et vie,
23:30 nous ne pouvons pas accepter que les voies de la rencontre
23:33 soient fermées.
23:35 Ne fermons pas les voies de la rencontre, s'il vous plaît.
23:39 [Applaudissements]
23:44 Nous ne pouvons pas accepter que la vérité du Dieu archant
23:49 l'emporte sur la dignité de l'homme,
23:52 que la vie se transforme en mort.
23:55 L'Église, en confessant que Dieu, en Jésus-Christ,
23:59 s'est uni à tout homme en quelque sorte,
24:03 croit avec Saint Jean-Paul II que son chemin est l'homme.
24:09 L'Église adore Dieu et sert le plus fragile,
24:14 adore Dieu et sert le plus fragile,
24:17 qui sont ses trésors, adorer Dieu et servir son prochain.
24:21 Voilà ce qui compte, non pas l'importance sociale
24:25 ou la richesse, un chiffre, mais la fidélité au Seigneur
24:29 et à l'homme.
24:31 Ce témoignage chrétien...
24:36 J'ai presque terminé, excusez-moi.
24:39 C'est pour vous soulager.
24:43 Ce témoignage chrétien est même héroïque parfois.
24:49 Je pense par exemple à Saint Charles de Foucault,
24:52 le frère universel, au martyr de l'Algérie,
24:56 mais aussi à tant d'opérateurs de la charité d'aujourd'hui.
25:01 Dans ce style de vie scandaleusement évangélique,
25:05 l'Église retrouve le port sûr auquel accoster
25:10 et d'où repartir pour tisser des liens avec les personnes
25:15 de tous les peuples, en recherchant partout les traces
25:19 de l'Esprit et en offrant ce qu'elle a reçu par la grâce.
25:23 Voilà la réalité la plus pure de l'Église.
25:26 Voilà, écrivait Bernano, l'Église des Saints,
25:30 ajoutant que tous ces grands appareils de sagesse,
25:33 de force, de souple, de discipline, de magnificence
25:37 et de majesté n'en a rien en soi si la charité ne l'en est pas.
25:42 J'aime exalter cette perspicacité française,
25:47 génie croyant et créatif,
25:51 qui a affirmé ses vérités à travers une multitude
25:55 de gestes et d'écrits.
25:58 Sans cesser, Darle disait, si tu as la charité,
26:02 tu as Dieu, si tu as Dieu, que ne possèdes-tu pas ?
26:06 Pascal reconnaissait que l'unique objet de l'écriture
26:09 est la charité et que la vérité hors de la charité
26:14 n'est pas Dieu, elle est son image
26:17 et une idole qui ne faut point aimer ni adorer.
26:21 Et Saint Jean Cassien, qui est mort ici, écrivait que
26:25 tout ou même ce qu'on estime utile et nécessaire
26:29 vaut moins que ce bien qu'est la paix et la charité.
26:34 Il est bon donc que les chrétiens ne soient derrière personne
26:39 en matière de charité et que l'évangile de la charité
26:43 soit la magnum carta de la pastorale.
26:46 Nous ne sommes pas appelés à regretter les temps passés
26:50 ou à redéfinir une importance ecclésiale.
26:54 Nous sommes appelés au témoignage.
26:58 Non pas broder l'évangile de parole, mais lui donner de la chair.
27:05 Non pas mesurer la visibilité, mais nous dépenser dans la gratuité
27:10 en croyant que la mesure de Jésus est l'amour sans mesure.
27:15 Saint Paul, l'apôtre des nations, qui passa une bonne partie de sa vie
27:21 à traverser la Méditerranée d'un port à l'autre,
27:25 enseigna que pour accomplir la loi du Christ,
27:30 il faut porter mutuellement les fardeaux les uns des autres.
27:35 Chers frères évêques, ne chargeons pas les personnes de fardeaux, s'il vous plaît.
27:42 Ne chargeons pas les personnes de fardeaux,
27:46 mais soulageons leur effort au nom de l'évangile de la miséricorde
27:51 pour distribuer avec joie le soulagement de Jésus
27:56 à une humanité fatiguée et blessée.
28:01 Que l'Eglise ne soit pas une série de prescriptions.
28:10 Que l'Eglise soit un port d'espérance pour les personnes découragées.
28:16 Ouvrez le cœur, s'il vous plaît.
28:21 Que l'Eglise soit un port de ravitaillement
28:26 où les personnes se sentent encouragées à prendre les larges dans la vie
28:32 avec la force incomparable de la joie du Christ.
28:36 Que l'Eglise ne soit pas à douane.
28:40 Que l'Eglise ne soit pas à douane.
28:43 Rappelez les seigneurs, tout le monde est invité.
28:48 Et j'en viens ici à la dernière image, celle du phare.
28:53 Le phare illumine la mer et fait voir le port.
28:59 Il illumine la mer et fait voir le port.
29:03 Quelles traces lumineuses peuvent orienter les capes des Eglises méditerranéennes ?
29:10 En pensant à la mer qui unit tant de communautés croyantes différentes,
29:15 je pense que l'on peut réfléchir sur des parcours plus synergiques.
29:20 Peut-être en évaluant aussi l'opportunité d'une conférence des évêques
29:25 de la Méditerranée ecclésiale, comme le cardinal a dit.
29:30 Pour des échanges qui donneraient une plus grande représentativité ecclésiale à la région.
29:37 En pensant aux ports et au thème migratoire,
29:42 il pourrait être fructueux de travailler à une pastorale spécifique encore plus reliée,
29:48 afin que les diocèses les plus exposées puissent s'assurer
29:53 une meilleure assistance spirituelle et humaine,
29:57 et assister donc à les soeurs et frères qui arrivent dans les besoins.
30:02 Le phare dans ce prestigieux palais qui emporte le nom me fait enfin penser surtout aux jeunes.
30:09 Ce sont eux la lumière qui indique la route de l'avenir.
30:13 Marseille est une grande ville universitaire qui abrite 4 campus,
30:19 35 000 étudiants qui les fréquentent, 5 000 sont étrangers.
30:26 Alors, par où commencer à tisser des liens entre les cultures, sinon par l'université ?
30:36 Là, les jeunes ne sont pas fascinés par les séductions du pouvoir,
30:43 mais par le rêve de construire l'avenir. Il ne faut pas anéantir ce rêve.
30:50 Les universités méditerranéennes sont des laboratoires, des rêves, des chantiers d'avenir
30:57 où les jeunes grandissent en se rencontrant, en se connaissant et en découvrant des cultures et des contextes.
31:03 On n'a pas ainsi les préjugés, on guérit les blessures, on conjure des rhétoriques fondamentalistes.
31:12 Faites attention à tous ces fondamentalistes qui sont prêchés, qui sont très à la mode.
31:19 Des jeunes bien formés et orientés à fraterniser pourront ouvrir des portes inespérées de dialogue.
31:26 Si nous voulons qu'ils se consacrent à l'Évangile et au service de la politique,
31:30 il faut avant tout que nous soyons crédibles, oubliant nous-mêmes, libérés de l'auto-référentialité,
31:41 prêts à nous dépenser sans cesse pour les autres.
31:44 Mais les défis prioritaires de l'éducation concernent tous les âges de la formation.
31:49 Dès l'enfance, en se mixant avec les autres, on peut surmonter beaucoup de barrières et de préjugés
31:58 en développant sa propre identité dans les contextes d'un enrichissement mutuel.
32:06 L'Église peut bien y contribuer en mettant en disposition ses réseaux de formation
32:10 et en animant une créativité de la fraternité.
32:14 Frères et sœurs, le défi est aussi celui d'une théologie méditerranéenne.
32:21 La théologie doit s'enraciner dans la vie.
32:29 Une théologie de laboratoire ne marche pas.
32:33 Donc une théologie méditerranéenne qui développe une pensée qui adhère au réel,
32:43 maison de l'humain et pas seulement des données techniques,
32:47 à mesure d'unir les générations reliées en mémoire et avenir,
32:51 et promouvoir avec originalité les chemins œcuméniques entre chrétiens
32:58 et les dialogues entre croyants de religions différentes.
33:05 Il est beau de s'aventurer dans une recherche philosophique et théologique
33:10 qui, en puissant aux sources culturelles méditerranéennes,
33:13 redonne espérance à l'homme, mystère de liberté, un mal de Dieu et de l'autre,
33:19 pour donner un sens à son existence.
33:21 Il est également nécessaire de réfléchir sur le mystère de Dieu
33:25 que personne ne peut prétendre posséder ou maîtriser,
33:30 et qui, au contraire, doit être soustrait à tout usage violent et instrumental,
33:40 conscient que la confession de sa grandeur présuppose en nous l'humilité des chercheurs.
33:45 Chers frères et sœurs, je suis content d'être ici à Marseille.
33:50 Une fois, M. le Président m'avait invité à visiter la France
33:54 et je lui ai dit « Il est important que vous veniez à Marseille ».
33:58 Je vous remercie de votre patience, de votre goutte patiente et de votre engagement.
34:14 Allez de l'avant, courageux, soyons une mère de bien
34:19 pour faire face aux pauvretés d'aujourd'hui avec une synergie solidaire.
34:25 Soyez un port accueillant pour embrasser ceux qui cherchent un avenir meilleur.
34:30 Soyez un phare de paix pour anéantir à travers la culture de la rencontre
34:35 les abîmes ténébreux de la violence et de la guerre.
34:38 Merci beaucoup.
34:40 (Applaudissements)
34:45 (...)
35:13 (...)

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