Alain Duhamel était l’invité de 22H Max dans le cadre de la parution de son livre "Le Prince balafré: Emmanuel Macron et les Gaulois (très) réfractaires".
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00:00 [Générique]
00:03 Et c'est vous l'invité de 22h max, bonsoir Alain Duhamel.
00:05 - Bonsoir.
00:06 - Merci beaucoup d'avoir accepté de faire un accro dans votre emploi du temps
00:09 pour passer par le studio de 22h max ce soir.
00:11 - Sans éteint, sans éteint.
00:12 - Oui je sais.
00:12 - Jamais après 22h.
00:14 - Jamais après 22h, il est 22h30, merci Alain pour cette exception,
00:17 mais c'est pour la bonne cause, c'est pour ce livre
00:19 que vous publiez "Le prince balafré" aux éditions de l'Observatoire.
00:22 Vous analysez les rapports entre le président Macron et nous, les Français,
00:27 les Français très réfractaires, les Gaulois très réfractaires.
00:30 Vous allez répondre évidemment aux questions de ces quatre-là,
00:33 aux questions de la bande de 22h max, mais avant de plonger dans le livre,
00:36 pour analyser ces rapports-là entre les Français et la politique,
00:38 on a un cas d'école ce soir, un cas pratique.
00:40 Ça concerne le carburant, avec le gouvernement qui met cette nouvelle solution
00:44 sur la table, qui est de dire "désormais on pourra vendre à perte le carburant
00:48 dans les stations-service", pour faire gagner logiquement
00:51 quelques dizaines de centimes par litre, c'est en tout cas la promesse aujourd'hui.
00:54 Est-ce que c'est habile comme solution ?
00:56 On voit bien pourquoi, c'est pour éviter que ce soit l'État
01:00 qui soit perdant dans cette affaire.
01:02 Disons que ça a peut-être plus de chances de freiner une augmentation
01:08 que d'entraîner une baisse.
01:11 Donc, ça joue vraiment à la marge de la marge.
01:16 C'est un sujet, très mauvais jeu de mots, qui est à la fois très inflammable,
01:20 évidemment, on se souvient tous des Gilets jaunes,
01:22 et vous reparlez des Gilets jaunes dans le livre,
01:23 mais c'est un sujet aussi qui montre à quel point l'État est nu.
01:27 Il n'y a plus de sous dans les caisses.
01:29 C'est-à-dire que c'est assez difficile, à la fois, de réduire les déficits,
01:33 de diminuer l'endettement, de financer la transformation écologique,
01:40 de consacrer une part considérable du revenu national à la politique sociale.
01:47 Voilà, on est le pays au monde où les impôts sont les plus élevés,
01:50 où les dépenses sociales sont les plus fortes,
01:53 et où donc, fabriquer un budget, c'est encore plus difficile qu'ailleurs.
01:58 – Mais pourquoi est-ce qu'il y a cette trouille systématique
02:00 au sommet de l'État dès qu'on parle de carburant ?
02:02 – Parce que l'État, même s'il est quelquefois un peu sourd,
02:06 a quand même un minimum de mémoire, et on sait qu'il n'y a pas eu simplement…
02:11 il y a eu les Gilets jaunes, mais il y a eu avant les routiers, etc.
02:15 Le carburant, c'est un problème, si j'ose dire, inflammable en permanence.
02:20 – Oui, dans votre livre "Un défi de roue", c'est d'essayer de comprendre
02:24 pourquoi est-ce qu'Emmanuel Macron génère chez beaucoup de Français de la haine.
02:27 Vous posez ce mot-là, de la haine.
02:29 Roselyne, vous voulez en parler, on va en parler dans une seconde.
02:31 D'abord, je vous cite Alain, Emmanuel Macron a réveillé la haine,
02:35 cette maladie génétique qui depuis toujours fracture les Français.
02:39 La haine, elle était là, elle sommeillait en nous,
02:41 ou en beaucoup de Français.
02:42 – Oui, absolument, et dans l'histoire de la France,
02:45 pas simplement dans l'histoire moderne, dans l'histoire éternelle de la France,
02:49 la haine a été un de nos grands défauts nationaux permanents.
02:56 On parle de l'Ancien Régime, l'Ancien Régime a été traversé en permanence
03:01 par des soulèvements, des divisions, des guerres civiles, des guerres de religion,
03:07 et depuis la fin de l'Ancien Régime, donc depuis la Révolution,
03:11 on a connu 15 constitutions, donc ça veut dire que les Français
03:15 en ont envoyé balader 14, et c'est un record du monde.
03:19 On est un pays déchiré, on est un pays fracturé,
03:23 qui se retrouve et se rassemble dans des circonstances exceptionnelles très rares.
03:29 – Oui, de plus en plus rares peut-être.
03:30 – Oui, en tout cas très rares, et qui est un des pays au monde
03:36 les plus difficiles à gouverner.
03:38 – Roselyne.
03:39 – Ce livre est passionnant, je trouve qu'on devrait l'acheter
03:42 et le donner à tous les élèves dans Terminal pour avoir une vision historique.
03:46 – Très bonne idée.
03:48 Alain Valide.
03:50 – Parce que c'est un livre comme l'est Alain, mesuré, documenté.
03:55 Effectivement, le passage sur la haine m'a beaucoup interpellé,
04:00 parce que ce qui m'a frappé dans la vie politique,
04:02 que la haine soit suscitée à l'extrême gauche ou à l'extrême droite,
04:06 j'allais dire c'est assez logique.
04:08 Mais quand je vois mes anciens camarades des Républicains,
04:11 qui devraient avoir vis-à-vis d'Emmanuel Macron
04:13 une position d'opposant certes déterminée,
04:17 mais responsable et mesurée.
04:21 Ce déferlement de haine qu'on entend par exemple
04:23 chez un type comme Olivier Marlex,
04:26 montre aussi qu'il y a des choses qui se sont désagrégées dans la politique,
04:31 des structurations qui se sont désagrégées.
04:34 Et puis aussi je pense, et j'irai même encore plus loin que vous,
04:39 c'est-à-dire que c'est aussi la faillite des idéologies
04:42 qui fait que comme on ne peut plus parler aux gens,
04:45 comme le monde est trop complexe, trop émietté,
04:49 on se dit "ce type vous veut du mal".
04:52 C'est ça le discours qui continue.
04:55 C'est "ce type vous veut du mal, c'est lui qui vous hait,
05:00 donc il faut le haïr",
05:01 parce que finalement c'est beaucoup plus simple d'en appeler
05:04 que de dire "mais qu'est-ce qui se passe dans le monde".
05:07 Est-ce qu'on peut surmonter quelque chose d'aussi profond ?
05:11 – On peut surmonter parce qu'on a eu beaucoup de choses
05:14 à surmonter dans le passé,
05:15 mais c'est vrai que c'est un handicap de plus
05:19 dans une situation qui est déjà compliquée.
05:22 Vous parlez, vous avez tout à fait raison,
05:25 des haines qui traversent la classe politique,
05:27 mais moi ce qui me frappe encore plus,
05:29 parce que la classe politique je la vois quand même depuis 60 ans,
05:32 et elle est rarement consensuelle, innocente et aimable.
05:36 Mais ce qui me frappe c'est la haine chez les Français.
05:40 Ce sont les réseaux sociaux,
05:42 cette espèce de détestation universelle,
05:45 cette volonté de fraction,
05:47 cette intolérance incroyable,
05:49 le fait que l'adversaire par principe
05:52 c'est non seulement un adversaire,
05:54 mais que c'est quelqu'un par nature d'insincère.
05:57 Tout le monde se méfie de tout le monde,
05:59 et je pense que c'est un vrai handicap national.
06:02 Alors ça existe dans d'autres pays,
06:05 à ce point-là c'est vraiment rare,
06:08 notamment dans des pays d'un développement comparable au nôtre.
06:11 – En France, vous écrivez "être citoyen c'est être mécontent",
06:14 ah on en retire la citation,
06:16 "c'est être mécontent, défiant vis-à-vis du chef de l'État,
06:18 circonspect face au gouvernement,
06:19 irrité par l'administration, exaspéré par Paris".
06:23 – Oui, alors en plus effectivement,
06:25 c'est pas le cœur de tout, mais la dimension Paris.
06:28 Ça c'est pour une raison historique très simple,
06:31 c'est que les révolutions se sont faites à Paris,
06:34 et qu'elles ont eu lieu à Paris,
06:37 et ensuite on les a propagées ou imposées à la province.
06:42 Et que de même que la France s'est construite autour de son État,
06:46 contrairement à la plupart des pays qui se sont construits
06:49 autour de leur nation au départ,
06:51 de même la France s'est construite et s'est révoltée autour de Paris.
06:55 Et il y a toujours eu vis-à-vis de Paris une animosité particulière,
07:00 et un des problèmes d'Emmanuel Macron,
07:02 c'est que pour des raisons qui sont d'ailleurs assez ridicules,
07:04 on en fait le parisien type alors que c'est un picard.
07:07 [Rires]
07:08 – Oui, mais vous expliquez qu'il y a d'autres raisons,
07:10 on va voir ça, mais il y a d'autres raisons pour ranimer cette haine.
07:13 – Je suis d'accord.
07:14 – Bien sûr, Noemi Allioua.
07:15 – Oui, mais alors justement, j'aimerais vous interroger
07:17 sur cet apparent paradoxe.
07:19 Comment vous expliquez que les Français,
07:21 certains d'entre eux, détestent, haïssent Emmanuel Macron,
07:24 et pourtant votent à deux reprises pour lui,
07:27 et le placent au sommet de l'État ?
07:28 Comment vous expliquez ce paradoxe ?
07:31 – Parce qu'il est détesté, mais pas méprisé.
07:34 Et que ses adversaires,
07:37 disons ceux qui se sont présentés en face de lui,
07:40 ne sont pas du même calibre.
07:41 Alors ça agace, on n'aime pas les premiers de classe,
07:45 on n'aime pas ceux qui donnent le sentiment
07:47 de faire les choses facilement, etc.
07:49 On ne les aime pas, c'est vrai partout,
07:51 c'est vrai dans une salle de classe.
07:54 Et c'est la même chose en politique.
07:56 Mais en même temps, on reconnaît qu'il a une envergure.
08:02 Alors ça n'empêche absolument ni les révoltes,
08:05 ni les protestations, ni le ressentiment.
08:07 – Il n'y a pas que de la haine, mais de la jalousie.
08:08 – Oui bien sûr.
08:09 – Donc c'est aussi faute de concurrents respectables, admirables ?
08:13 – Respectables, je ne dis pas ça, il y a des concurrents respectables.
08:15 – Appréciables en tout cas de la part des Français ?
08:17 – La question, ce n'est pas simplement avoir des concurrents respectables,
08:20 même si c'est nécessaire, mais disons des concurrents
08:24 qui donnent le sentiment d'avoir des qualités comparables
08:27 à la situation extraordinairement difficile dont on se trouve aujourd'hui.
08:31 – Mais vous disiez qu'il n'y a pas de mépris envers lui,
08:33 est-ce qu'Emmanuel Macron a pu être méprisant
08:35 à certains moments de ses 7 ans maintenant à l'Élysée ?
08:39 – Alors je ne dirais pas qu'il a pu être méprisant,
08:41 mais je dirais que malheureusement pour lui et pour les Français,
08:44 il a donné le sentiment de l'être.
08:47 – Oui.
08:47 – Et que c'est ressenti comme ça.
08:49 Alors je reprends des exemples que tout le monde d'ailleurs
08:52 a assez largement en tête, de petites phrases malencontreuses, de maladresse…
08:58 – Qui au bout d'un moment font système quand même.
09:00 – Oui, oui, mais oui.
09:01 – Et qui sont souvent exploitées hors de contexte.
09:04 – Bien sûr, et qui sont souvent déformées,
09:09 mais bon, il y a eu des phrases intempestives,
09:13 et il y a eu des comportements…
09:17 Bon, mais c'est problème ça, un, des premiers de classe,
09:20 deux, de ceux qui sont regardés comme les présidents des riches.
09:24 Les présidents des riches, c'est quand même 4 présidents
09:27 sur les 8 de la Ve République,
09:29 donc c'est vraiment aussi une de nos manies nationales,
09:32 la détestation absolue des riches.
09:34 En Italie, ils ont, je ne dis pas qu'ils aient raison,
09:37 mais ils ont admiré Berlusconi parce que c'était un exemple de réussite
09:41 venu d'en bas.
09:42 – Et Trump est adoré par les américains.
09:45 – Et les Allemands adorent les chefs d'entreprise qui réussissent,
09:49 et les Anglais acceptent des inégalités
09:52 qui nous feraient ériger des barricades en permanence.
09:55 Bon, on est quand même un peuple particulier,
10:00 avec un grand esprit critique, avec une longue mémoire historique.
10:04 Moi, j'en reviens toujours à la définition de Tocqueville
10:08 pour les Français, ce peuple brillant et dangereux.
10:13 – Marcelo, sur les petites phrases.
10:14 – Oui, alors, pour l'avoir suivi un peu sur le terrain
10:17 pendant quelques années, il y a un truc qui est quand même
10:19 assez étonnant chez Emmanuel Macron, c'est que quand, par exemple,
10:22 il y a des gens qui l'attendent sur une visite, etc.,
10:24 il se déplace souvent, pour serrer les mains, de ceux qui le sifflent
10:29 ou qui le contestent, c'est-à-dire qu'il a quelque chose chez lui,
10:32 une volonté de convaincre, c'est un séducteur,
10:36 et il se dirige vers ceux qu'il n'a pas séduit.
10:38 Et du coup, est-ce qu'il n'y a pas un mécanisme qui s'alimente,
10:41 c'est-à-dire entre ce qu'il peut susciter et le fait que lui-même
10:45 braque les projecteurs sur ceux qu'il n'a pas su convaincre ?
10:48 – C'est un bagarreur, c'est quelqu'un qui n'a pas peur des conflits,
10:54 et c'est quelqu'un qui aime bien se mesurer aux difficultés,
10:57 en pensant sans doute qu'il peut les surmonter,
11:00 mais c'est vrai qu'il n'a pas peur.
11:03 – C'est plutôt une qualité.
11:06 – C'est plutôt une qualité, mais d'ailleurs, plusieurs de ses prédécesseurs
11:09 n'avaient pas peur non plus, y compris dans des circonstances
11:13 quelquefois très dangereuses.
11:14 – Souvenez-vous, la gifle dans la Drôme, il est giflé,
11:18 un officier de sécurité le traite vers l'arrière
11:21 et il veut retourner vers la personne qu'il a agressée.
11:23 Est-ce que c'est pas un homme qui veut être aimé par-dessus tout ?
11:26 – Pas par-dessus tout, il aimerait bien être aimé sûrement,
11:30 d'ailleurs c'est le cas de la plupart des gens, mais enfin…
11:32 – C'est un travers humain, c'est répondu.
11:34 – Il peut passer par la bagarre.
11:35 – Oui, mais en particulier chez les politiques,
11:38 c'est quelque chose qui est assez utile d'essayer d'être aimé.
11:42 Disons qu'il a une conception assez particulière de la séduction,
11:47 c'est vrai qu'intellectuellement il est impressionnant,
11:52 il a une capacité d'absorption des dossiers qui n'est pas très fréquente,
11:56 et non seulement d'absorption, mais ce qui n'est pas le cas de tous,
11:58 de compréhension des dossiers,
12:00 après quoi il prend des décisions qui ne sont pas toujours les meilleures,
12:03 ça c'est autre chose.
12:04 Mais bon, de même il travaille comme je crois aucun président n'a travaillé,
12:08 y compris à des heures complètement intempestives,
12:11 pas simplement pour les coucheteaux comme moi, mais pour les gens d'hier.
12:14 Bon, il est foncièrement atypique,
12:18 et c'est vrai que c'est quelqu'un qu'on ne peut pas réduire à une définition simple.
12:23 – Avant de parler de 2027, Pablo voulait vous interpeller.
12:27 – Oui, moi je pense, malgré tout le respect que je vous dois,
12:30 et que j'ai d'ailleurs pour vous,
12:31 je pense que vous prenez le problème à l'envers,
12:34 dans votre livre et aussi au cours des débats que nous partageons.
12:37 – Quand vous débattez ensemble.
12:38 – Exactement, je pense que le problème, je relisais propos de Alain,
12:43 pas vous le philosophe, le petit Alain.
12:48 Et lui, il disait, il se moquait, il appelait ça même des sottises,
12:53 ces gens qui pensent que les grands hommes d'État sont des hommes qui ont des visions.
12:58 Il disait "tout ça, ça n'existe pas, tout ça c'est du flan, etc.
13:03 On ne peut pas faire de la politique comme on résout un problème d'algèbre".
13:06 Voilà ce qu'il disait.
13:07 Et vous, en fait, vous faites un peu la même chose.
13:09 C'est-à-dire que vous cherchez la vision chez Emmanuel Macron,
13:13 comme s'il avait la possibilité de résoudre plein de problèmes,
13:18 parce que, je pense, vous êtes un fervent défenseur de la Ve République.
13:22 Or, le problème, le verre est dans le fruit.
13:25 C'est-à-dire qu'on n'a toujours pas, on est passé de la monarchie à la République,
13:29 en reproduisant exactement les mêmes mécanismes,
13:32 en donnant à des personnes la possibilité de faire tout et n'importe quoi.
13:38 Moi, je pense que vous devriez inverser la focale
13:40 et ne pas parler du regard des Français sur la vision d'Emmanuel Macron,
13:45 mais regarder ce qu'il se passe dans la société.
13:47 C'est beaucoup plus intéressant, je pense, qu'Emmanuel Macron,
13:49 et juste la résultance, en fait, de ce qui se passe dans la société.
13:53 – Bon, si je m'appelais Pablo, c'est sans doute ce que je penserais.
13:56 Mais il se trouve que ce n'est pas le cas.
13:59 Alors d'abord, Alain, puisque vous citez Alain,
14:01 Alain était un remarquable professeur,
14:04 c'était un détestable analyste politique.
14:07 Et en particulier, quand les conflits sont devenus vraiment sérieux,
14:12 il a été lamentable.
14:14 – Il n'a pas choisi le bon camp.
14:15 – Oui, oui.
14:16 – Je vous l'accorde, en 1937, vous avez d'accord.
14:18 – Vous n'allez quand même pas me dire qu'être municois,
14:20 c'est la preuve de grande perficacité, surtout pour un esprit aussi brillant.
14:24 – Ça, c'est pour la référence que vous avez choisie.
14:26 Débrouillez-vous, Pablo.
14:28 – Vous les travaillerez davantage.
14:30 – On peut quand même citer Alain, si vous voulez.
14:33 Je ferai attention aux références que vous utilisez.
14:35 Je verrai si les curriculums sont bien perçus.
14:38 – Il y en a quelques-unes dans le livre,
14:39 vous pouvez en parler si vous voulez, ça ne me gêne pas.
14:42 Ensuite, on n'est pas d'accord sur la Ve République.
14:44 – Oui, on n'est pas d'accord sur la Ve République.
14:47 – Mais sur la vision, j'ai censé une vision.
14:49 – Attendez, si à la fois vous m'apostropez
14:53 et qu'en même temps je ne peux pas vous répondre.
14:55 Bon, la Ve République, elle a été construite
15:01 pour rendre à l'exécutif la possibilité de gouverner.
15:04 C'est pour ça qu'elle a été construite.
15:06 Et c'est vrai qu'avant, ça ne se passait pas du tout comme ça,
15:11 ça se passait même très mal.
15:13 Et qu'aujourd'hui, si on quittait la Ve République,
15:16 je suis persuadé qu'on retrouverait dans un…
15:20 – Une pétouillère ?
15:22 – Oui, enfin, ce serait ce qu'était la IVe République à la fin,
15:26 c'est-à-dire quelque chose qui n'est pas un objet d'admiration
15:30 et quelque chose qui n'est pas non plus un objet susceptible
15:34 d'entraîner les Français.
15:36 Bon, la Ve République, elle n'entraîne pas toujours les Français,
15:38 tant s'en vaut.
15:39 Mais il n'empêche que, malgré des difficultés,
15:42 et ce qui se passe en ce moment,
15:44 c'est quand même le point extrême des difficultés institutionnelles,
15:47 puisqu'on a une majorité relative.
15:48 On ne peut pas imaginer pire pour gouverner.
15:51 Mais la Ve République étant ce qu'elle est, on y arrive,
15:53 enfin, ils y arrivent quand même.
15:56 Bon, alors vous dites, vous vous intéressez en gros,
16:00 vous vous intéressez aux gouvernants
16:02 et vous ne vous intéressez pas aux gouvernés.
16:04 C'est ce que vous me dites.
16:05 – C'est bien résumé.
16:06 – Bon, ben je suis désolé, soit vous avez lu le livre trop vite,
16:10 soit vous avez lu ce qui est possible
16:12 avec un grand préjugé idéologique de départ.
16:15 Je pencherai plutôt pour la seconde explication.
16:19 Et ben oui, mais à partir de ce moment-là,
16:21 c'est évident que vous ne trouverez que ce que vous avez envie d'y trouver.
16:25 Les rapports entre Emmanuel Macron et les Français,
16:29 c'est autant sur les Français que sur Emmanuel Macron.
16:32 Et c'est autant sur ce qui s'est passé entre Emmanuel Macron et les Français,
16:36 pas simplement ce que lui a fait,
16:38 mais la façon dont les Français ont réagi.
16:40 – Ils l'ont reçu, absolument.
16:41 Il faut qu'on parle de 2027, évidemment.
16:43 Marine Le Pen est-elle la grande favorite de l'élection ?
16:46 Avant que vous répondiez, je voudrais qu'on l'écoute, Marine Le Pen.
16:48 Elle a été interrogée ce soir au JT de TF1,
16:50 on va attendre le TF1 pour savoir si, en 2027,
16:53 elle pourrait laisser sa place à Jordan Bardella par exemple.
16:55 Écoutez sa réponse.
16:57 – Pour l'instant, tant que je n'en ai pas décidé autrement,
17:00 je suis la candidate naturelle de mon corps en la présidentielle.
17:05 – Candidate naturelle ?
17:06 – Oui.
17:07 – Ça, ok. Est-ce qu'elle est la favorite, clairement ?
17:09 – En tout cas, moi, je ne dirais pas la grande favorite.
17:11 Elle est en ce moment en flèche.
17:14 Je rappelle que la dernière élection présidentielle
17:18 et celle d'avant, au début de la campagne, elle était en flèche.
17:22 C'est elle qui d'abord démarrait la première
17:24 et qui ensuite avait les intentions de voix, au départ, les plus élevées.
17:28 Bon, pour le reste, il ne faut pas tourner autour du pot.
17:31 Elle est aujourd'hui renforcée.
17:34 Elle est renforcée par les circonstances,
17:36 elle est renforcée par l'impopularité de l'exécutif
17:39 et elle est renforcée par les erreurs de la nupes.
17:42 Donc, elle est renforcée.
17:44 Est-ce qu'elle est pour autant irrésistible ?
17:46 Ça n'est pas évident.
17:48 Ça n'est pas évident d'abord parce que d'être en flèche depuis le départ,
17:52 c'est souvent être une cible et qu'on voit bien que,
17:55 par exemple, on va lui infliger et ce sera normal.
17:59 Le spectacle de madame Meloni en Italie qui dit
18:02 que vous tenez, avant d'être élue et avant de prendre le pouvoir,
18:05 exactement les mêmes propos que Marine Le Pen
18:08 et qui est obligée maintenant de les remettre dans son sac
18:12 et de trouver autre chose.
18:13 - Et on parlera de Lampedusa dans un instant.
18:14 - Donc, oui, ça, ce sera difficile pour elle.
18:20 Et puis, comme aujourd'hui, on prend vraiment en considération
18:25 l'hypothèse selon laquelle elle peut gagner.
18:27 C'est vrai qu'il y a une hypothèse réelle selon laquelle elle peut gagner.
18:30 Je pense qu'on va aussi regarder d'un peu plus près ce qu'elle propose.
18:35 Alors, je sais bien qu'il y a des gens qui seront enthousiastes
18:38 parce qu'elle leur dira on peut baisser les impôts, bloquer les prix,
18:41 donner du travail à tout le monde, interdire aux immigrés d'entrer en France
18:45 et être populaire partout.
18:47 Il y a aussi des gens qui se diront qu'elle les prend pour des imbéciles.
18:52 - Et vous ?
18:54 - Je ne les prends pas pour une imbécile.
18:55 Je les prends pour dangereuses, c'est autre chose.
18:57 - Mais c'était la question que j'allais vous poser.
18:58 Est-ce que ça vous fait, comment dire, ça vous fait mal de voir Marine Le Pen
19:03 après avoir suivi toute la course de la Ve République,
19:05 avoir connu tous les présidents ?
19:06 Est-ce que ça vous fait mal aujourd'hui de voir Marine Le Pen parmi les favoris ?
19:10 - Disons que si la dernière élection présidentielle à laquelle j'assistais,
19:15 la prochaine par hypothèse, se terminait par la victoire de Marine Le Pen,
19:20 je ne prendrais pas ça pour l'apothéose de ce que j'aurais vécu.
19:23 Ça, c'est certain.
19:25 Elle peut gagner, elle a le droit de gagner.
19:28 Il y a beaucoup de gens qui ont envie qu'elle gagne
19:31 avec des arguments qui ont souvent été utilisés dans les campagnes présidentielles du jour,
19:36 du genre "c'est son tour" ou bien "on ne l'a jamais essayé", etc.
19:42 Et puis il y aura aussi, j'imagine, j'espère d'ailleurs,
19:46 un examen critique de ce qu'elle propose.
19:49 Examen critique de ce qu'elle propose, c'est-à-dire un populisme souverainiste.
19:54 - Alors c'est quoi l'alternative à Marine Le Pen dans l'élection de 2027 ?
19:59 Est-ce que vous pensez qu'il peut y avoir une coalition structurée autour d'un programme crédible,
20:06 une coalition centre-droite-centre-gauche qui ramasserait ce qui restera des macronistes, LR,
20:14 et une partie raisonnable du Parti socialiste ?
20:18 Ça peut marcher ?
20:19 Parce que je suis assez sidéré de voir qu'on n'en voit absolument pas les prémices.
20:25 - À trois ans et demi d'une élection présidentielle, on voit,
20:31 notamment pour le centre et le centre-droit, on voit rarement une unanimité se dégager.
20:40 Vous connaissez ça par cœur.
20:42 Il y a souvent eu au minimum deux candidats du même camp.
20:47 Et bon, je pense d'abord qu'il ne faut pas enterrer Jean-Luc Mélenchon ou François Ruffin.
20:53 - Non, ils s'en occupent.
20:54 - Ils font ce qu'ils peuvent, mais enfin, ils n'empêchent. Ils existent.
20:59 D'autre part, il faut prendre en considération Marine Le Pen.
21:03 Et je pense que ce qui va se jouer entre, disons,
21:07 ce qui commence immédiatement à la droite de la NUPES
21:09 et ce qui se termine à l'arrivée vers Marine Le Pen, tout l'entre-deux,
21:15 la question est de savoir si, au départ, on n'y coupera pas.
21:19 Il y aura quatre ou cinq candidats, dont deux qui n'auront rien à faire là-dedans,
21:23 mais qui néanmoins compliqueront les choses.
21:25 La question sera de savoir si quelqu'un ou quelqu'une se dégagera suffisamment
21:31 pour apparaître comme une alternative à Marine Le Pen,
21:34 ou si jusqu'au bout, il y aura quelqu'un qui sera à 15 %,
21:38 puis quelqu'un qui sera à 8 %, etc.
21:41 Moyennant quoi, si c'est ça, si il y a deux ou trois candidats qui...
21:45 – Eh bien, à ce moment-là, ça sera entre Jean-Luc Mélenchon
21:49 ou François Ruffin et Marine Le Pen.
21:52 – Le prince balafré, c'est aux éditions de l'Observatoire.
21:54 Merci Alain Duhamel.
21:55 Merci d'être venu ce soir en direct sur 22h max, en direct sur BFM TV.
21:59 Merci à vous.