UNE CRISE GRAVE EN VUE

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UNE CRISE GRAVE EN VUE
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00:05 Oui, il faut investir dans les services publics, mais attention, il faut contenir nos dépenses.
00:10 Oui, il faut taxer, mais attention, il faut attirer les investisseurs étrangers.
00:14 Oui, il faut augmenter les salaires, mais attention à la productivité, à la valeur ajoutée au patronat qui pourrait partir ailleurs.
00:21 Bref, tout ce pragmatisme, cette raisonnabilité, ce "oui mais il faut faire avec les contraintes extérieures",
00:27 tout cela est lié à un mot, la compétitivité.
00:30 On doit être compétitif, on doit être plus productif, moins cher, toujours moins cher,
00:35 alors il faut travailler plus, plus longtemps, on doit coûter moins cher à la société.
00:40 Et si ces politiques de compétitivité qui apparaissent et sont vendues comme indispensables,
00:44 et avec lesquelles nous devons composer depuis 30 ans, nous menaient finalement droit dans le mur,
00:49 l'impasse de la compétitivité, c'est le nouveau livre de Benjamin Brice, docteur en sciences politiques à l'EHESS.
00:55 Et ce 13 septembre, aux éditions Les Liens qui Libèrent, c'est là.
00:58 Bonjour Benjamin Brice.
01:03 Bonjour.
01:04 Alors dans ce livre, vous avez décidé de vous attaquer à la compétitivité, c'est pas rien,
01:07 aux politiques de compétitivité plus précisément, qui finalement dictent nos orientations socio-économiques depuis plusieurs dizaines d'années.
01:14 Pourquoi ce thème ?
01:15 Je me suis aperçu aujourd'hui, et je crois que c'est un constat qu'on est nombreux à faire,
01:20 qu'il y a une certaine impuissance politique face à de nombreux problèmes qui se posent à la société.
01:25 J'en recense en introduction la crise climatique bien sûr,
01:28 mais également le sous-investissement dans les services publics ou les inégalités entre différentes classes sociales.
01:34 Et à chaque fois quand on essaye d'avoir des politiques résolues pour résoudre ces problèmes,
01:40 ou en tout cas pour apporter des solutions, il y a un grand enjeu qui s'intercale en quelque sorte,
01:45 une sorte d'atout qui vient couper notre volonté d'agir, c'est la compétitivité.
01:49 Bien sûr qu'il faudrait agir pour l'environnement, pour les services publics, pour les inégalités,
01:54 mais le problème c'est qu'il nous faut être compétitifs dans un monde de compétition.
01:58 Justement, vous vous attaquez à cet argument dans ce livre, on va bien évidemment revenir dessus.
02:03 Il y a dû avoir une adaptation, voire un asservissement, ou même une dépendance à la mondialisation,
02:09 qui est impliquée depuis plusieurs dizaines d'années dans tous les partis,
02:12 même quand la gauche de François Hollande était au pouvoir, vous écrivez,
02:16 "son diagnostic restait fondamentalement le même que celui de ses prédécesseurs,
02:20 déficit de compétitivité des entreprises, niveau excessif des dépenses publiques, rigidité du marché du travail".
02:26 Stéphane Lefoy, porte-parole du gouvernement, ne déclara-t-il pas,
02:29 "en janvier 2014, la politique de l'offre n'est ni de droite ni de gauche, elle est nécessaire".
02:34 Comment cet argument de la compétitivité est devenu aussi imbriqué et comment on s'en sort ?
02:40 Vaste problème. Mais disons que c'est difficile de donner une date,
02:45 mais à partir des années 1970-1980, la mondialisation en quelque sorte s'est accélérée.
02:51 Quand on regarde le tout d'ouverture de la France, c'est-à-dire la part des échanges commerciaux dans le PIB,
02:57 il était relativement faible dans les années 60 et il n'a fait qu'augmenter depuis
03:01 pour arriver à des niveaux 4 ou 5 fois plus élevés qu'à l'époque.
03:06 Si on regarde les marchés de capitaux, si on regarde les investissements directs à l'étranger,
03:10 les profits des multinationales à travers le monde, etc., la mondialisation s'est réellement approfondie.
03:15 Comme en parallèle, la France et la plupart des pays européens ont fait le choix
03:20 d'une construction européenne tournée vers le libre-échange,
03:23 cette contrainte extérieure est devenue beaucoup plus forte qu'elle ne l'était, par exemple, au temps des Trente Glorieuses.
03:28 Ce que j'essaie de dire, c'est que le souci de la compétitivité est un souci légitime,
03:34 dans le sens où il y a des réalités derrière qui font que la contrainte extérieure est de plus en plus importante.
03:39 En revanche, il y a également des problèmes, et c'est ce que j'essaie de dire dans le livre.
03:43 C'est d'une part les politiques de compétitivité qui ont été menées et qui ont été plus ou moins les mêmes
03:49 au cours des derniers mandats présidentiels, que ce soit la droite, la gauche ou le centre-pouvoir.
03:54 Ces politiques de compétitivité n'ont pas porté leurs fruits.
03:58 Et la deuxième chose, c'est que l'impératif de compétitivité qui est paru tellement important à partir des années 1980,
04:05 aujourd'hui doit être relativisé avec les autres impératifs qui s'imposent à nous.
04:10 L'impératif écologique, bien sûr, qui a une implication pour la vie de notre nation,
04:15 mais également l'impératif géopolitique qui nous demande, par exemple, plus de résilience,
04:20 qui n'est pas du tout la même chose que la compétitivité, ou un certain impératif de cohésion sociale
04:25 face au défi que nous allons devoir relever dans les décennies à venir.
04:29 Remettre cette contrainte de la compétitivité au sein des différentes contraintes qui pèsent sur l'action de la France.
04:35 C'est vrai que l'argument de compétitivité a fait que ça agite un peu la peur, en fait,
04:41 en disant "oui, nous aussi on est contre la désindustrialisation, mais vous comprenez, les emplois, il faut qu'on soit compétitifs, etc."
04:47 Ça a été quand même une bonne excuse à beaucoup de politiques appliquées.
04:52 Et c'est vrai qu'on se dit, même des gens qui sont extrêmement frappés par les conséquences de la mondialisation
04:57 et de ces politiques-là, se disent "ah ben c'est vrai qu'on ne peut pas dépenser comme on veut,
05:01 parce que j'ai peur que tout s'effondre, que je n'ai pas de travail, etc."
05:04 Vous, vous nous dites que ces politiques de compétitivité, c'est finalement un échec par rapport aux nombreux défis et enjeux en cours,
05:11 vous venez de le dire, social, écologique, économique, géopolitique, vous avez listé plein d'exemples sur ces échecs.
05:18 Est-ce que vous pouvez un petit peu nous dire pourquoi ça ne marche pas ?
05:21 Alors c'est très compliqué parce que de nombreux pays ont mené des politiques de compétitivité
05:27 qui n'ont pas eu les mêmes effets que celles menées en France.
05:31 Disons que le cas de la France, c'est toujours difficile à analyser, mais le cas de la France, c'est dans les années 80,
05:37 le Parti socialiste qui est arrivé au pouvoir avec un programme qui n'était pas du tout tourné vers la compétitivité,
05:43 et qui en quelque sorte, sans doute pour une partie des dirigeants, ils avaient déjà ça en tête,
05:48 avec l'aggravation du déficit commercial, avec la pression extérieure, ont complètement changé de cap
05:54 et ont décidé de miser sur la construction européenne plutôt que la construction du socialisme.
05:59 Mais ça s'est fait, en tout cas au sein du Parti socialiste, sans que ce soit totalement assumé, et même très loin de là.
06:06 Le discours de la gauche, en tout cas du Parti socialiste, est resté très antilibéral, très anticompétitivité, etc. pendant très longtemps.
06:13 Donc des mesures ont été prises à partir des années 80 et 90 dans le sens de l'intégration européenne et de la compétitivité,
06:20 mais en même temps, le discours est toujours resté réticent. Il y a sans doute eu plus de demi-mesures que dans des pays
06:25 comme le Royaume-Uni ou les États-Unis, où là, les politiques ont été extrêmement brutales et avec des conséquences sociales encore plus dramatiques.
06:33 Mais d'autres pays comme par exemple les pays scandinaves, qui ont misé sur la compétitivité hors prix ou hors coût,
06:41 avec l'innovation, la formation, etc., ont réussi à tirer leur épingle du jeu en se spécialisant dans des industries à plus forte valeur ajoutée.
06:50 Même chose pour la Allemagne, qui avait déjà une grande spécialisation industrielle et qui, à partir des années 2000,
06:55 a fait ce qu'on pourrait appeler, pour le dire franchement, un certain dumping social vis-à-vis des autres pays,
07:01 en faisant stagner les salaires et qui a permis de conquérir d'importantes parts de marché.
07:06 Donc ce sont ces modèles que les dirigeants français ont voulu rattraper dans les dernières décennies.
07:12 Mais ça n'a pas marché. Quand on voit l'état du déficit commercial de la France, nous sommes le seul grand pays européen dans une situation qui,
07:19 on pourrait dire presque catastrophique. Donc nous consommons beaucoup plus que ce que nous produisons et ce que nous exportons.
07:27 Nous consommons de moins en moins de produits que nous fabriquons nous-mêmes.
07:32 Et en même temps, ce que j'essaye de dire, parce que le discours est de dire "bon, ça n'a pas encore marché, mais il faut aller encore plus loin pour que ça marche cette fois-ci",
07:39 c'est que d'abord, les conditions ne sont plus du tout les mêmes que celles des années 1980 et 2000.
07:44 Le dumping social peut marcher quand il est fait dans un seul pays. Quand tous le font, nous sommes tous perdants.
07:49 Et deuxièmement, les autres contraintes, notamment les contraintes écologiques, géopolitiques, sociales, etc.,
07:55 font que ce qui pouvait apparaître comme raisonnable dans les années 80, on n'aura pas fini d'en parler,
08:01 en tout cas me semble totalement déraisonnable au début des années 2020.
08:06 Et après, il y a des grosses conséquences sociales à ce dumping. C'est des salaires très bas, une précarisation.
08:12 On a vu vraiment une précarisation du peuple français et même européen ces 20-30 dernières années.
08:18 Alors j'essaie de tourner ça donc vers la question du déficit commercial. Je sais que le déficit commercial n'est pas une notion très, disons,
08:26 attirante, attrayante et surtout à gauche parce qu'elle est plutôt mobilisée par les élus du centre et de la droite pour dire
08:33 « il faut faire des efforts et il faut couper les dépenses dans les services publics ». Mais la question du déficit commercial est très importante.
08:40 Parce qu'après, disons, 15 ans de réelle politique de compétitivité, disons depuis la crise de 2008, le rapport Attali, le rapport Galois, etc.,
08:48 après 15 ans de vraie politique de compétitivité, le déficit commercial atteint des niveaux records en France.
08:54 Et même si on enlève l'énergie qui fluctue, et on sait qu'aujourd'hui le coût de l'énergie a beaucoup augmenté,
09:00 le déficit manufacturier, donc vraiment pour tous les objets industriels et les produits agroalimentaires,
09:06 le déficit manufacturier bat des records en France année après année sous le quinquennat d'Emmanuel Macron.
09:12 Qu'est-ce que ça veut dire ? Plus de déficit commercial, c'est plus de dépendance vis-à-vis de l'étranger,
09:17 donc moins de résilience de notre économie et plus de dépendance vis-à-vis des fournisseurs.
09:22 Ça veut dire un problème écologique, parce que quand on préfère acheter des produits moins chers venant de pays lointains,
09:30 par exemple comme la Chine, eh bien on sait bien que non seulement l'électricité pour les produire est beaucoup plus carbonée,
09:36 mais en plus les conditions environnementales et sociales sont beaucoup moins bonnes que si c'était produit en France,
09:42 donc un coût écologique, un coût social, parce que le déficit commercial montre la désindustrialisation de la France,
09:50 moins d'emplois industriels, c'est notamment une certaine précarisation des classes populaires,
09:55 à qui on propose maintenant des emplois de service dans les métropoles souvent très précaires,
09:59 et un déséquilibre territorial, parce que la concentration dans les métropoles est un vrai problème social
10:05 pour les gens qui ne sont pas capables de se loger dans les métropoles.
10:09 Pour les ouvriers et les employés, c'est presque impossible de se loger dans les métropoles,
10:13 alors que les emplois industriels avaient comme avantage d'être dans des villes moyennes
10:17 où le coût du logement était beaucoup moins important.
10:21 Et la dernière chose de ce déficit commercial, c'est que pour contrer ce déficit commercial,
10:27 enfin en tout cas pour le financer, nous sommes obligés de nous endetter en permanence vis-à-vis du monde extérieur,
10:34 c'est-à-dire que la position de la France par rapport aux autres pays en termes de dettes n'a cessé de se dégrader au cours des 20 dernières années.
10:42 Tout ça a un coût, qu'on voit sur le déficit public, parce que le débat public est obnubilé par le déficit public,
10:48 mais c'est la traduction de ce déficit commercial qui fait que nous consommons plus par rapport à ce que nous pouvons nous payer.
10:55 Nous nous endettons pour ça, et en retour, ce sont les politiques qui ont été mises en place par François Hollande,
11:00 mais également par Emmanuel Macron, une certaine austérité du côté des services publics.
11:05 Justement, on en reparlera, mais c'est vrai que pour bien expliquer, le déficit commercial,
11:09 ça veut dire qu'on exporte, mais on importe surtout aussi énormément, et qu'on consomme beaucoup plus que ce qu'on produit.
11:16 Et Emmanuel Macron partageait ce même constat que vous en 2017, et vous disiez "moi je vais tout régler,
11:22 les politiques de ces 20 dernières années, je suis d'accord avec vous, désindustrialisation, moi je vais réindustrialiser, etc."
11:28 Quand on le connaissait, on savait que ça ne partirait pas dans ce sens-là,
11:32 mais dans le discours, en tout cas, ça pouvait partir dans ce que vous dites.
11:36 Donc le gouvernement d'Emmanuel Macron est très content lui de sa politique depuis 2017,
11:40 Bruno Le Maire déclarait encore ceci fin août.
11:43 "Depuis 2017, notre politique économique avec Emmanuel Macron donne de très bons résultats, je le cite,
11:49 une croissance cumulée a été supérieure à celle de l'Allemagne, de l'Italie, de l'Espagne.
11:53 Depuis 2017, nous avons réussi à créer 2 millions d'emplois en France,
11:57 nous sommes devenus la nation la plus attractive d'Europe pour les investisseurs étrangers,
12:01 nous avons ouvert 300 usines et créé plus de 100 000 emplois industriels.
12:06 Depuis 2017, la France a repris son destin en main et est redevenue la nation des possibles.
12:11 Assez avec le pessimisme, assez avec le dénigrement national, place à la fierté collective.
12:17 Est-ce que vous partagez cet engouement ?
12:19 C'est très bien d'avoir une fierté collective, mais je crois qu'on peut interroger les industriels,
12:26 on peut interroger les gens qui travaillent dans ces secteurs.
12:29 Effectivement, ce bilan est très exagéré, en quelque sorte.
12:34 Il y a eu sans doute de bonnes choses, c'est-à-dire que la désindustrialisation,
12:38 qui avait été encore très importante sous les mandats de Nicolas Sarkozy et de François Hollande,
12:42 a été relativement stoppée en France.
12:44 On est très loin d'une vraie réindustrialisation,
12:47 la part de l'emploi manufacturier dans l'emploi total continue de diminuer,
12:51 mais en termes d'emplois absolus, d'usines, etc., l'hémorragie est à peu près stoppée.
12:57 Mais pour les autres aspects, je crois qu'on peut être quand même un petit peu plus critique
13:01 du bilan d'Emmanuel Macron et des présidents qui l'ont précédé.
13:08 C'est-à-dire que sur le plan du chômage, il y a réellement une baisse du chômage en France,
13:13 avec la création d'emplois, ce qui est une excellente chose.
13:16 Mais il y a deux points à noter.
13:18 C'est d'une part le phénomène global du chômage, c'est-à-dire le chômage, le sous-emploi et le halo du chômage.
13:24 Sous-emploi, c'est les gens qui travaillent un peu, mais qui voudraient travailler plus.
13:28 Et le halo du chômage, c'est des gens qui ne sont pas comptés comme chômeurs,
13:31 mais qui souhaiteraient quand même travailler.
13:33 Ce phénomène reste massif en France.
13:35 C'était au début de l'année 5,4 millions de personnes, en baisse depuis le début du mandat d'Emmanuel Macron,
13:43 mais qui reste un phénomène massif.
13:45 On est très, très loin de ce que le gouvernement appelle le plein emploi.
13:48 Et la deuxième chose, c'est qu'il faut voir la qualité des emplois qui sont proposés.
13:53 C'est-à-dire que quand on regarde d'un point de vue qualitatif,
13:56 la France se classe aujourd'hui dernière en Europe en termes des conditions de travail,
14:01 notamment les conditions, les contraintes physiques, par exemple.
14:05 Sur les contraintes physiques, nous faisons moins bien que les Allemands, que les Italiens et que les Britanniques.
14:11 En termes de conditions globales, la France se classe donc très mal en Europe.
14:15 Et en plus de ça, il y a une montée de la précarité,
14:18 c'est-à-dire que la baisse du chômage de ce point de vue-là est un petit peu en trompe-l'œil.
14:22 On le voit par exemple avec les transferts sociaux,
14:24 c'est-à-dire que la baisse du chômage devrait s'accompagner d'une baisse des transferts sociaux
14:28 puisque les gens ont un travail et sont capables de gagner de quoi vivre.
14:32 Eh bien, ce n'est pas du tout ce qu'on observe.
14:34 Pendant le mandat d'Emmanuel Macron, les transferts sociaux liés à la pauvreté, au logement et au chômage
14:40 ont plutôt stagné, voire augmenté en France et n'ont pas baissé.
14:44 Donc, cette baisse du chômage doit être mise en parallèle avec la question de la précarité.
14:49 Et les dernières choses pour la situation de la France,
14:52 si on regarde la question de la cohésion sociale,
14:55 si on regarde l'état de notre démocratie ou si on regarde quelque chose comme le pouvoir d'achat,
15:00 on voit bien que dans tous ces domaines, l'échec est quand même relativement patent.
15:04 Pour prendre le pouvoir d'achat, le but normalement de la croissance économique dont se réjouit Bruno Le Maire,
15:10 c'est que le pouvoir d'achat soit un problème résolu par la croissance.
15:15 Ce dont on s'aperçoit, c'est que ce n'est pas du tout le cas.
15:18 Ce n'est pas du tout le cas parce que d'abord, les taux de croissance sont beaucoup trop faibles
15:22 pour réellement résoudre la question du pouvoir d'achat.
15:24 On ne va pas revenir à la croissance des 30 glorieuses.
15:27 Et la deuxième chose, je crois, c'est que le gouvernement prend les choses sous le mauvais angle
15:33 à prendre à chaque fois la question de la compétitivité avant tout,
15:36 parce que la question de la compétitivité pointe vers la question des exportations.
15:41 L'obsession du gouvernement, c'est que la France exporte plus auprès de nos partenaires commerciaux
15:46 pour pouvoir rétablir la balance commerciale.
15:49 Le problème, c'est que nous exportons plus année après année depuis longtemps,
15:53 mais nous importons de plus en plus.
15:55 C'est-à-dire que notre problème, ce ne sont pas les exportations, ce sont les importations.
15:59 Nous importons de plus en plus des produits que nous ne fabriquons plus nous-mêmes.
16:03 Donc la question qui devrait être mise au premier plan est la question de la consommation.
16:08 Dans ce livre, vous faites aussi des constats et vous dites qu'on vit au-dessus de nos moyens.
16:13 C'est un peu ce que vous commenciez à expliquer. Est-ce que vous pouvez nous raconter ça ?
16:18 Je crois que le fait d'accepter que nous vivions au-dessus de nos moyens est quelque chose d'important.
16:24 Là encore, c'est un vocabulaire qui est relativement accepté à droite,
16:30 mais la gauche est beaucoup plus mal à l'aise avec ça.
16:32 Je crois que c'est une des raisons pour lesquelles, en tout cas auprès des classes supérieures
16:38 ou auprès des médias, disons, dominants, la gauche souffre d'un déficit de crédibilité
16:43 pour cette sorte de refus de reconnaître que nous vivons au-dessus de nos moyens.
16:48 Ce qu'il faut, ce n'est pas regarder ça uniquement sous l'angle du déficit public,
16:52 comme cela est fait généralement dans le débat civique.
16:56 Il y a plusieurs aspects à prendre en compte là-dedans.
17:00 Il y a d'abord le déficit commercial, ça veut dire que nous consommons plus que ce que nous produisons.
17:05 Et a priori, la solution ne va pas venir tout le temps de la production et des exportations,
17:09 mais plutôt des importations et de la consommation.
17:12 Cela aussi à prendre sous un angle écologique.
17:15 Ça paraît évident, donc je n'insiste pas là-dessus, mais notre mode de consommation,
17:19 notre niveau de consommation n'est pas soutenable à l'échelle de la planète.
17:24 Aujourd'hui, si on prend la consommation d'un Européen, c'est 22 tonnes de matière,
17:28 en comptant les combustibles fossiles, la biomasse, les métaux et les minerais non métalliques.
17:32 La consommation d'un Africain, ça doit être 4 tonnes et la consommation d'un Indien 5 tonnes.
17:38 Si le volume de consommation d'un Européen était la norme à travers le monde,
17:43 nous serions dans des problèmes écologiques encore plus importants que ceux que nous connaissons aujourd'hui.
17:47 Donc il y a une nécessité de revoir nos modes de vie du point de vue écologique.
17:52 Et là, sous cet aspect, nous vivons effectivement réellement au-dessus de nos moyens.
17:56 Et la dernière chose, et là c'est à l'échelle de la France,
17:59 c'est je crois la question des services publics au sens large.
18:03 C'est-à-dire qu'aujourd'hui, en France, nous ne mettons pas assez d'argent pour notre projection dans l'avenir,
18:09 à savoir l'éducation, la santé, tout ce qui permet la cohésion sociale
18:13 et le classement de la France ou la projection de la France dans l'avenir.
18:18 Et nous ne mettons pas assez d'argent dans les services publics en France,
18:22 parce qu'il y a ces politiques d'austérité qui ont été menées depuis quelques temps,
18:26 et il va falloir que l'on accepte un certain rééquilibrage
18:29 entre ce que nous mettons dans notre consommation matérielle
18:32 et ce que nous mettons dans des choses aussi utiles que les services publics de santé, d'éducation, etc.
18:38 Vous dites aussi que les politiques de compétitivité, de toujours vouloir faire moins cher, etc.,
18:43 de nous aussi devoir être moins cher, vous parlez qu'il y a beaucoup de dommages collatéraux
18:48 qu'on peut forcément parfois ne pas se rendre compte avec tous les idées reçues, les clichés, etc.
18:53 Par exemple, il y a eu une hausse des impôts non progressives,
18:57 donc ceux qui sont le plus injustes envers les classes populaires, les classes moyennes.
19:02 Est-ce qu'il y a d'autres dommages collatéraux comme ça, qu'on n'a pas forcément vus à travers les lignes ?
19:07 Les dommages collatéraux, juste pour bien expliquer,
19:11 c'est que les politiques de compétitivité coûtent cher à la nation.
19:16 Parce que la principale politique de compétitivité menée,
19:19 il y en a plusieurs, j'en parle dans le livre, mais la principale, c'est la baisse du coût du travail.
19:23 Pour baisser le coût du travail en France, la politique a été de baisser les cotisations sociales
19:29 avec des allègements, des exonérations, etc.
19:32 En termes de volume, c'est à peu près trois points de PIB chaque année dans ces eaux-là.
19:37 Donc c'est quelque chose d'assez massif.
19:39 Pour financer ces cotisations sociales, ce n'est pas juste de l'argent mis dans un puissant fond,
19:45 c'est de l'argent qui sert à payer la protection sociale.
19:48 A payer pour l'hôpital public, pour les prestations de santé, pour les retraites, etc.
19:54 L'argent qu'on ne met pas là-dedans, il faut qu'on le trouve ailleurs.
19:57 Pendant un long moment, ça a été à travers des impôts, et notamment des impôts non progressifs.
20:02 Le plus connu, c'est la CSG, CSG-CRDS, c'est un impôt avec un taux fixe.
20:06 Donc mécaniquement, comme la TVA, il pèse plus en bas de l'échelle sociale qu'en haut de l'échelle sociale.
20:11 Parce qu'au nom de la compétitivité et de l'attractivité,
20:14 l'impôt sur les entreprises et l'impôt sur les revenus ont eu tendance à diminuer,
20:20 voire à disparaître quand on parle de l'ISF.
20:24 Donc là, c'est un des dommages collatéraux.
20:27 Mais depuis, comme les impôts ne peuvent pas augmenter sans fin,
20:30 et la révolte des Gilets jaunes a bien montré que le coût social est trop important d'une augmentation des impôts,
20:36 et bien la principale politique, mais qui a été menée depuis fort longtemps,
20:41 c'est une politique de maîtrise, ce qu'on appelle maîtrise des dépenses publiques.
20:45 Et cette maîtrise des dépenses publiques, qui en fait est surtout une maîtrise des dépenses de fonctionnement,
20:50 c'est-à-dire tout ce qui touche aux services publics,
20:53 est de cette manière directement liée à notre volonté de baisser le coût du travail au nom de la compétitivité.
20:59 Et juste pour avoir les ordres de grandeur en tête, parce que j'ai parlé d'austérité,
21:02 et je sais que ça fait débat, et pour justifier, et j'essaie de le faire dans l'libre, cela,
21:07 il faut savoir qu'en France, dans les 40 dernières années, les dépenses publiques en part de PIB ont beaucoup augmenté.
21:13 Mais si on prend les dépenses de fonctionnement, qui sont directement les services publics,
21:17 tous les salaires des agents de la fonction publique et tous ceux dont ils ont besoin pour travailler,
21:21 et bien ce n'a pas augmenté dans les 40 dernières années.
21:24 En 1980, à la fin du mandat de Valéry Giscard d'Estaing, on était à 18 points de PIB.
21:29 Nous sommes aujourd'hui à 18 points de PIB, mis là-dedans,
21:32 sachant qu'entre-temps, il y a quand même une petite différence,
21:34 c'est que la population a vieilli, donc l'hôpital public a de plus en plus de besoins,
21:38 c'est que l'enseignement, de plus en plus de personnes sont allées au niveau du BAC,
21:44 donc il y a de plus en plus de besoins pour l'enseignement supérieur,
21:47 qui vit une cure d'austérité, je crois, sans précédent dans l'histoire récente de la France,
21:54 et dans beaucoup d'autres domaines, que ce soit la justice, l'environnement, la défense, etc.
21:59 Nous avons plutôt à faire face à des besoins en croissance, plutôt qu'à des besoins en décroissance.
22:04 C'est intéressant parce que ce qu'on redécouvre dans ce livre,
22:07 ou même ce qu'on peut découvrir tout court,
22:09 c'est que les politiques de compétitivité qui nous sont vendues
22:12 comme pour faire des économies, parce qu'il faut faire attention, etc.
22:16 j'ai l'impression que finalement, elles nous coûtent plus cher que ce qu'elles nous rapportent.
22:19 C'est un calcul intéressant de mettre dans le débat public,
22:22 mais sur le long terme, je crois que nous sommes en train de...
22:26 Enfin, nous avons pris et nous continuons de prendre des décisions
22:29 qui nous ferment réellement des voies d'avenir.
22:33 Quand on regarde, par exemple, pour l'éducation,
22:36 le déclassement des élèves français à chaque étude internationale
22:40 depuis, disons, 10 ou 20 ans,
22:44 c'est quelque chose qui va poser problème,
22:47 même d'un strict point de vue économique, à la France dans les décennies à venir.
22:52 Il faut peut-être quand même mettre ça en relation avec le fait
22:55 qu'à la fin des années 1990, les dépenses intérieures d'éducation en France,
23:00 c'était 7,7% du PIB. En 2019, donc avant la crise du COVID,
23:06 c'était 6,6 points de PIB mis dans l'éducation.
23:13 La baisse de l'investissement éducatif a forcément des conséquences
23:18 en termes de déclassement et autres.
23:20 Pour l'hôpital public, je crois que ça ne fait plus débat.
23:22 Pour la justice, la police le constat elle-même.
23:25 Et on peut voir ça dans la plupart des secteurs de l'action publique.
23:32 Donc les économies que l'on fait sont malheureusement souvent
23:35 des économies de court terme qui risquent de nous coûter très cher sur le long terme.
23:39 Et c'est pour ça qu'il est important d'insister sur la nécessité
23:42 de ne pas sous-financer les services publics.
23:44 Il faut savoir que toutes les dépenses publiques sont ajoutées au PIB.
23:47 Ce sont des dépenses qui sont comptées en ajout du PIB
23:51 et pas en moins.
23:52 Mais ce qui est intéressant pour dire ça,
23:54 les dépenses improductives et les dépenses productives,
23:57 il y a cette idée, notamment dans le gouvernement actuel,
23:59 que les dépenses dans l'économie marchande sont toujours bonnes et productives
24:03 et les autres non.
24:04 Ça veut dire que l'on préfère soutenir des emplois à bout de bras,
24:09 par exemple de livraison dans les métropoles pour livrer tout et n'importe quoi
24:12 à n'importe quelle heure pour les cadres des métropoles,
24:16 alors qu'à côté, nous faisons tout pour ne pas augmenter
24:20 le nombre d'emplois d'infirmières à l'hôpital public
24:23 qui pourtant a un bénéfice social réel.
24:26 Et je crois que ça nous amène à des choix relativement absurdes
24:29 parce que nous finançons bien sûr les emplois de livraison
24:33 à travers la prime d'activité, à travers des filets sociaux
24:36 qui ne sont pas payés par des cotisations, etc.
24:39 Donc il y a un peu un choix d'allocation des ressources
24:42 sur lequel on pourrait débattre.
24:44 Justement, il y a aussi toute une obsession autour des prestations
24:48 et des transferts vers les ménages et les entreprises.
24:51 Donc parlons-en.
24:52 Si on ne doit pas toucher aux politiques de compétitivité,
24:55 il faut bien trouver d'autres coupables.
24:57 Alors on va regarder un petit extrait.
24:58 C'est un constat qu'on peut tous faire.
25:01 Le nombre et le coût des arrêts maladie augmentent.
25:06 C'est évidemment autant d'argent qui ne peut pas aller
25:10 au financement de notre hôpital,
25:13 au financement de notre politique du médicament.
25:17 Donc je pense que tout le monde a intérêt à ce qu'on puisse
25:21 contenir les dépenses liées à ces arrêts maladie.
25:25 Une partie de la hausse, il faut le dire aussi,
25:27 est liée à l'augmentation du nombre de salariés.
25:31 C'est donc le revers, on va dire, de la bonne nouvelle
25:34 d'un taux d'activité qui est plus élevé qu'il n'a jamais été.
25:38 Mais donc je pense qu'on doit travailler ensemble
25:41 et il n'y aura pas une décision descendante
25:44 venant du gouvernement sur la bonne méthode pour y parvenir.
25:49 Mais nous devons ensemble, médecins, assurances maladies,
25:53 gouvernements, employeurs, salariés,
25:56 trouver la façon de contenir ces dépenses.
26:00 Mais en tout cas, il n'y aura pas une décision unilatérale
26:03 qui tomberait sur les entreprises.
26:04 C'est Élisabeth Banque qu'on vient de voir,
26:06 Première ministre, qui pointe du doigt les arrêts maladie
26:08 il y a quelques jours lors de la rencontre des entrepreneurs de France,
26:11 Université d'été du Medef.
26:13 Il y a aussi le projet d'augmenter la franchise médicale,
26:17 toujours dans cette idée qu'on manque d'argent
26:19 et que tout le monde doit faire un effort.
26:21 Est-ce que c'est une stratégie, ça, de pointer ce genre de choses
26:24 pour récupérer quelques sous par-ci par-là,
26:26 pour ne pas toucher au système en place ?
26:28 La question des arrêts maladie est une question sérieuse.
26:32 Et effectivement, il faut s'y pencher sérieusement.
26:35 Mais peut-être qu'il faut prendre sous l'angle du mal-être au travail
26:38 ou des problèmes, des conditions de travail,
26:41 aujourd'hui en France.
26:43 La sociologue Dominique Méda a beaucoup travaillé là-dessus,
26:46 avec les classements européens, etc.
26:48 On voit bien que la France a un vrai problème de mal-être au travail.
26:54 Je ne sais pas comment veut s'y prendre Élisabeth Banque,
26:57 mais il est à craindre que la solution choisie
27:00 soit plutôt une solution plus répressive,
27:02 c'est-à-dire rajouter une couche de contrôle,
27:05 de bureaucratie, etc.
27:07 sur la question des arrêts maladie,
27:10 plutôt qu'essayer de voir en profondeur
27:12 pourquoi est-ce qu'il y a une augmentation.
27:15 Est-ce que vraiment, c'est que les gens ont juste envie
27:17 de profiter de week-ends plus longs, etc.
27:19 ou est-ce qu'il y a un mal-être plus profond dans le pays ?
27:22 Mais il est clair que dans tous les domaines de l'action publique,
27:26 le besoin d'argent se fait sentir
27:29 et conduit à des mesures de restriction.
27:34 Il ne faut pas croire que ce soit toujours négatif.
27:37 Il y a sans doute des choses à faire
27:39 sans doute aussi de la gabegie dans les dépenses publiques
27:42 ou dans les différentes prestations, retraites, etc.
27:46 Il y a des réflexions à mener,
27:48 c'est-à-dire que l'ensemble des revenus de la nation
27:50 n'est pas extensible indéfiniment.
27:52 Il y a des enjeux de répartition
27:53 et comment les répartir au mieux.
27:55 Mais on s'aperçoit qu'il y a plusieurs angles
27:57 pour regarder ces questions-là.
28:00 Par exemple, on sait bien qu'il y a un manque de prévention
28:03 au niveau de la santé en France.
28:06 Si l'on luttait davantage contre les déserts médicaux
28:10 et contre le fait que des populations les plus vulnérables
28:13 n'aient pas accès à des médecins, à des spécialistes et autres,
28:17 cette désertification et ce manque de soins,
28:20 ce défaut de soins,
28:22 ont un coût au final pour la société.
28:25 Les économies qu'on croit faire de bout de chandelle d'un côté
28:28 ont un coût derrière comment ?
28:30 En engorgement des urgences, bien sûr,
28:32 et des pathologies qui pouvaient être soignées dès le départ
28:35 vont s'aggraver et donc vont avoir un coût encore plus important
28:38 pour la société, sans parler bien sûr de l'élément central
28:42 qui est qu'une partie de la population
28:44 se trouve dans des conditions sanitaires relativement déplorables.
28:48 C'est vrai que dès qu'il y a une volonté de faire des économies,
28:52 on va aller chercher quelques milliards par-ci par-là
28:54 sur une aide sociale, sur une allocation,
28:56 ce qui après engendre des débats
28:58 qui peuvent être parfois forcément faussés
29:00 et qui peuvent mettre toujours la faute sur les mêmes,
29:02 les classes populaires et même classes moyennes maintenant.
29:06 Et d'ailleurs vous dites qu'Emmanuel Macron donne plutôt raison
29:09 à l'anthropologue David Graeber.
29:11 Tous les pays riches emploient aujourd'hui des légions de fonctionnaires
29:13 dont la mission principale est de donner aux pauvres mauvaise conscience.
29:17 Est-ce qu'il y a un vrai travail à casser cette idée reçue
29:20 que les plus pauvres nous coûtent trop cher ?
29:22 Je ne suis pas du tout spécialiste du sujet,
29:24 mais beaucoup de sociologues, de politistes et autres
29:27 travaillent sur ces sujets et je crois que leurs conclusions
29:30 vont plutôt effectivement dans ce sens-là.
29:33 En général, quand ces sujets viennent dans l'espace public,
29:36 c'est sous l'angle de la suspicion.
29:38 Dans l'espace public, je veux dire dans la parole gouvernementale,
29:40 sous l'angle de la suspicion vis-à-vis d'une catégorie
29:43 qui maintenant s'est imposée dans le débat public,
29:45 la catégorie des assistés.
29:47 Le problème c'est que c'est un peu un serpent qui se mord la queue
29:50 parce que la dégradation des conditions de travail,
29:52 la montée de la précarité, induit une augmentation
29:55 de la dépense aux prestations sociales
29:57 qui à son tour crée un cercle vicieux
30:00 dont on a beaucoup de mal à sortir.
30:02 Le chômage de masse, ou en tout cas le phénomène général
30:05 du chômage de masse, a créé des dépendances importantes
30:08 d'une partie de la population aux transferts sociaux
30:11 qui est dommageable pour les finances publiques bien sûr,
30:13 mais également pour cette partie de la population
30:15 et je crois pour la population en général,
30:17 car ça focalise le débat public sur des sujets
30:20 qui ne sont pas les sujets les plus déterminants
30:23 de notre situation socio-économique
30:26 et ça crée des inégalités
30:29 qui sont malheureusement dommageables pour le pays.
30:32 Juste pour prendre un chiffre, dans les années 1960,
30:36 les transferts sociaux liés au logement
30:39 et au chômage et liés à la pauvreté,
30:42 c'était moins de 1 point de PIB.
30:45 Aujourd'hui, je crois, enfin en 2021,
30:48 c'était plus de 4 points de PIB.
30:50 Cette augmentation des transferts sociaux
30:52 qui est dénoncée à travers l'assistanat, etc.,
30:55 se comprend, je crois, assez bien
30:58 avec notamment le phénomène de la désindustrialisation,
31:01 de la précarité, de la métropolisation,
31:04 c'est-à-dire la concentration dans les métropoles
31:06 qui fait que le coût du logement est devenu
31:08 beaucoup plus important et qu'il faut des aides
31:10 pour les classes populaires pour se loger, etc.
31:13 Ce sont des problèmes qu'il faudrait sans doute
31:16 prendre sous un autre angle.
31:17 Ils ont souvent omis aussi tous les transferts
31:19 envers les entreprises, toutes les subventions,
31:22 tous les allègements dont on a déjà parlé.
31:26 J'ai l'impression, et vous le dites aussi,
31:28 qu'il y a un fort enjeu de classes
31:29 dans cet impasse de la compétitivité.
31:31 Je m'explique.
31:32 On croit que les classes populaires jouent un rôle moindre
31:36 dans la création de la valeur ajoutée
31:38 et sont même des boulets, en fait,
31:40 quand on parle de tous ces transferts-là,
31:42 alors que les classes supérieures sont celles
31:45 qui contribuent, en fait, finalement le plus
31:47 au fait que nous vivons au-dessus de nos moyens
31:49 sur le plan économique ou commercial,
31:52 ou alors écologique.
31:54 On le sait très bien que l'empreinte carbone
31:56 de la classe supérieure est beaucoup plus grosse,
32:01 en fait, que celle des classes populaires.
32:04 Donc, il y a un vrai aussi enjeu de classes
32:06 dans cette lutte contre les politiques de compétitivité.
32:09 Je crois qu'on commence à en prendre conscience,
32:12 mais la désindustrialisation a été un immense échec
32:16 ou problème pour les classes populaires
32:20 ou disons pour le grand nombre.
32:21 Quand je dis les classes populaires,
32:22 c'est les classes populaires au sens large,
32:24 classes moyennes incluses.
32:26 J'en parlais dans le livre précédent.
32:29 Le déséquilibre a été d'autant plus marqué
32:32 qu'une fois que les classes populaires
32:35 ne participent plus activement, disons,
32:37 à la production des biens qui nous entourent,
32:39 aujourd'hui quand même, si on prend les biens fabriqués,
32:41 c'est-à-dire l'industrie manufacturière
32:43 hors agroalimentaire,
32:44 il y a seulement un septième de la valeur
32:47 des biens que les ménages consomment
32:49 qui est made in France.
32:50 Tout le reste vient d'ailleurs.
32:52 Donc forcément, la contribution des classes populaires
32:55 à la production nationale
32:58 a été en quelque sorte complètement invisibilisée.
33:01 Et à côté de ça, la volonté de se spécialiser,
33:03 qui a été longtemps la norme,
33:05 disons dans la classe dirigeante française,
33:07 dans les services à haute valeur ajoutée,
33:10 ont énormément valorisé le travail des cadres supérieurs.
33:13 Cadres supérieurs qui, l'air de rien,
33:15 ont quand même besoin de beaucoup de personnes
33:17 dans les services, dans la construction,
33:19 dans les usines, etc.
33:22 pour pouvoir travailler.
33:24 Et ça, ça a été complètement invisibilisé
33:26 et ça participe au déséquilibre très important
33:28 entre classes sociales que l'on voit aujourd'hui en France,
33:31 qui commencent à changer, je pense,
33:33 depuis les Gilets jaunes,
33:34 où on a pris conscience que ce déséquilibre
33:36 était non seulement non durable
33:38 d'un point de vue de cohésion sociale,
33:40 mais même souvent totalement injuste
33:42 par rapport aux choix politiques qui ont été faits.
33:47 Et la deuxième chose, oui,
33:49 c'est, je crois, un point très important,
33:51 quand on se concentre uniquement sur le déficit public,
33:54 donc le déficit public,
33:56 on regarde les prestations sociales
33:58 et on a l'impression que ce sont les classes populaires
34:00 qui coûtent cher au pays,
34:02 alors que les classes supérieures rapportent énormément.
34:04 Je crois que si on regarde l'écologie,
34:07 comme vous l'avez dit,
34:09 ou même la balance commerciale,
34:11 le bilan n'est pas exactement le même.
34:13 C'est-à-dire que du point de vue écologique,
34:15 il est clair qu'il y a des différentes valeurs qui circulent,
34:19 mais si on prend les 10 % des ménages les plus aisés
34:22 et les 10 % les moins aisés,
34:24 eh bien les 10 % les plus aisés
34:26 émettent deux fois plus de gaz à effet de serre
34:28 pour l'alimentation et le logement,
34:31 trois fois plus pour les transports
34:33 et quatre fois plus pour les services
34:35 et tous les biens de consommation.
34:37 Donc ce sont eux qui ont la plus grande responsabilité
34:40 dans la situation environnementale qui est la nôtre.
34:43 Mais quand on prend le déficit commercial,
34:45 la pénétration des objets importés dans la consommation
34:51 est à peu près la même à toutes les échelles de revenus.
34:54 Mais comme les échelles de revenus supérieures
34:56 ont beaucoup plus de moyens et consomment beaucoup plus,
34:58 elles ont une responsabilité beaucoup plus grande
35:00 dans les importations.
35:02 C'est-à-dire que quand on roule dans une voiture très puissante,
35:05 il y a grande chance qu'elle soit importée
35:07 et qu'elle pèse sur la balance commerciale.
35:09 Quand on voyage très loin,
35:10 il y a de grandes chances que ça pèse sur la balance du tourisme.
35:13 Quand on achète les derniers gadgets à la mode,
35:15 ils n'ont pas été fabriqués en France, etc.
35:17 Donc je crois que c'est aussi une manière
35:19 de regarder la situation sous un autre œil.
35:23 Vous avancez et/ou soutenez des idées, des pistes,
35:26 évidemment, dans ce livre.
35:27 Ce qui est beaucoup revenu, c'est la sobriété,
35:30 donc moins consommée, différemment, etc.
35:33 et relocaliser, drastiquement baisser nos importations
35:37 avec les deux peuvent totalement faire la paire.
35:39 C'est aussi dans la bouche des néolibéraux et de l'exécutif,
35:42 ce mot "réindustrialisation", on en a parlé.
35:44 Sur le Média, on avait pas mal décrypté
35:46 le plan de réindustrialisation présenté
35:48 par Emmanuel Macron en avril dernier.
35:50 Et c'est clairement le sujet de votre livre.
35:53 L'exécutif vise des domaines de pointe,
35:55 de haute technologie,
35:56 et mise avant tout sur la compétitivité.
35:58 On va regarder.
35:59 Il y avait une forme d'incohérence dans le débat public français.
36:01 Il faut être honnête.
36:02 C'est-à-dire qu'on défendait tous l'industrie,
36:04 mais on était contre les réformes
36:06 qu'ils permettaient.
36:07 C'est-à-dire qu'on était pour l'industrie,
36:09 mais pour taxer beaucoup plus le capital.
36:11 On était pour l'industrie,
36:12 mais pour complexifier le droit du travail.
36:14 Bon, l'expérience a été faite, ça ne marche pas.
36:16 Si vous avez un droit du travail plus compliqué
36:18 que les voisins,
36:19 si vous taxez plus le travail et le capital,
36:21 vous créez moins d'emplois
36:22 parce que les industriels vont s'installer ailleurs.
36:24 Et je le dis ici avec beaucoup de clarté.
36:26 J'entends les gens qui disent
36:28 "il faudrait un tournant, ça, c'est un cela".
36:30 Ce qui marche le mieux, c'est de ne pas le casser.
36:33 Je vous le dis en toute sincérité.
36:35 Donc, j'aurai une politique de constance
36:39 sur le plan macro-économique.
36:41 Qu'a besoin de faire notre pays ?
36:43 De continuer d'être compétitif
36:45 sur le capital, le travail, l'innovation.
36:47 De continuer d'être fiable et clair sur sa stratégie.
36:50 Et d'augmenter la quantité de travail.
36:52 Et c'est dans cette stratégie
36:54 que s'inscrit la réforme des retraites.
36:56 Je le dis aussi avec beaucoup de clarté
36:58 en l'assumant de manière très claire et très tranquille.
37:01 Si la France s'est désindustrialisée
37:03 à une faiblesse par rapport aux voisins,
37:05 et les 10 points de PIB par habitant
37:07 d'écart avec l'Allemagne,
37:09 c'est que nous travaillons moins que nos voisins
37:11 dans le cycle de vie.
37:13 C'est qu'il y a moins de jeunes qui sont dans l'emploi,
37:15 c'est qu'on travaille moins dans les âges clés,
37:17 et c'est qu'on travaille moins longtemps.
37:19 Et ce n'est pas vrai qu'on réindustrialisera
37:21 si on concentre ça.
37:23 Et ce n'est pas vrai qu'on aura le modèle social
37:25 le plus ambitieux d'Europe si on dit
37:27 "c'est formidable et ça va vivre de toute éternité".
37:29 Non. Donc on doit aussi réussir la bataille
37:31 pour avoir plein d'emplois et plus d'emplois.
37:33 Mais donc on doit aussi avoir une industrie compétitive.
37:35 Donc là, Emmanuel Macron
37:37 a quand même abordé pas mal de thèmes
37:39 qui sont présents dans votre livre.
37:41 Qu'est-ce que vous en avez à dire de ce court passage
37:43 qui révèle quand même pas mal de choses ?
37:45 Alors il y a plusieurs choses.
37:47 Je crois qu'on voit effectivement
37:49 que la compétitivité, j'ai une section là-dessus,
37:51 et je crois à la colonne
37:53 vertébrale idéologique d'Emmanuel Macron.
37:55 C'est ce pour quoi il se bat.
37:57 Il a vécu
37:59 énormément de crises
38:01 pendant son quinquennat.
38:03 Les gilets jaunes, le Covid,
38:05 la guerre en Ukraine et en toile de fond
38:07 tous les problèmes climatiques
38:09 que l'on connaît.
38:11 Et sur ce point-là, je crois qu'il n'a pas du tout
38:13 varié, et c'est ce qu'il réaffirme ici,
38:15 il n'a pas du tout varié parce qu'il pense
38:17 sincèrement, je crois,
38:19 que le problème principal de la France
38:21 est un problème de compétitivité.
38:23 Même si, et je crois
38:25 qu'il est important de mettre ça davantage
38:27 au débat public, ce qui devrait
38:29 nous sauter aux yeux, ou ce qui devrait sauter aux yeux
38:31 peut-être pas d'Emmanuel Macron
38:33 mais au moins de
38:35 son entourage ou de ses soutiens,
38:37 c'est qu'il y a quand même un contraste très fort
38:39 entre l'effort de compétitivité
38:41 que l'on fait et le fait que notre balance
38:43 industrielle et même
38:45 uniquement balance manufacturière
38:47 hors énergie se dégrade
38:49 aujourd'hui en France.
38:51 Et ce que l'on voit quand
38:53 Emmanuel Macron parle de réindustrialisation,
38:55 c'est effectivement que pour lui
38:57 la réindustrialisation c'est dans une optique
38:59 d'exportation. Il faut que la France
39:01 se positionne sur
39:03 les secteurs à plus forte valeur ajoutée,
39:05 l'hydrogène, le cloud,
39:07 le quantique, ou tous
39:09 les batteries, etc.
39:11 Ce sont des choses importantes, sans doute,
39:13 et la France, enfin, il faudrait
39:15 analyser entre les contraintes géopolitiques,
39:17 écologiques, etc. Mais il y a sans doute
39:19 des choses à faire. Mais ce qui est
39:21 oublié, c'est l'ensemble
39:23 du reste des industries. Et c'est pour ça que je préfère
39:25 parler de relocalisation.
39:27 Relocalisation, c'est produire
39:29 les biens dont nous avons besoin
39:31 et que nous consommons. Donc pas dans
39:33 une optique d'augmentation des exportations,
39:35 mais plutôt de baisse des importations.
39:37 C'est une
39:39 quelque chose qui peut être tout à fait associée
39:41 à la sobriété, et je crois que c'est pour ça qu'il faut
39:43 associer sobriété matérielle
39:45 et relocalisation
39:47 industrielle. Parce que
39:49 la relocalisation, la production locale
39:51 a des avantages d'un point de vue
39:53 écologique, moins de transport,
39:55 mais surtout une
39:57 électricité bas carbone en France,
39:59 qui n'est pas le cas chez la plupart de nos partenaires,
40:01 et des normes environnementales
40:03 beaucoup plus contraignantes
40:05 que ce qui se fait ailleurs.
40:07 Il y a une époque où,
40:09 à la Rochelle, étaient raffinés
40:11 les terres rares qui sont
40:13 aujourd'hui raffinées en Chine. Bon,
40:15 pour nous, ça ne nous change rien parce qu'on continue
40:17 de consommer les mêmes produits. Mais pour l'environnement,
40:19 d'une manière globale, même s'il y avait
40:21 des pollutions à la Rochelle, elles étaient
40:23 sans doute moindres que ce qui se fait en Chine,
40:25 où les normes environnementales sont beaucoup
40:27 moins importantes. Et la
40:29 dernière chose, c'est que tout le mouvement
40:31 de délocalisation et donc de production
40:33 dans des pays où, disons, les prix ne
40:35 reflètent pas la réalité écologique
40:37 et sociale du travail fourni,
40:39 ces délocalisations nous ont
40:41 permis de surconsommer, de surconsommer
40:43 des voitures plus
40:45 sophistiquées, plus grosses, de voyager plus loin,
40:47 de consommer plus de vêtements, etc.
40:49 Ce qui, je veux dire,
40:51 a sans doute des avantages.
40:53 Mais aujourd'hui, dans un monde avec autant
40:55 de tensions géopolitiques, des besoins de résilience
40:57 et les problèmes écologiques, nous sommes
40:59 obligés d'ouvrir les yeux sur
41:01 les défauts qu'a une
41:03 telle surconsommation. Et bien,
41:05 la relocalisation permet justement d'aller
41:07 dans le sens inverse parce que relocaliser,
41:09 c'est-à-dire produire dans des conditions
41:11 écologiques et sociales
41:13 beaucoup plus dignes, mais accepter
41:15 le fait que les produits n'aient plus
41:17 un surcoût lié
41:19 au fait que les emplois sont
41:21 locaux et profitent
41:23 à l'économie locale.
41:25 Donc c'est pour ça que je fais la distinction
41:27 entre réindustrialisation telle que
41:29 l'entend le gouvernement dans une optique de
41:31 compétitivité et d'exportation
41:33 et la relocalisation dans une
41:35 optique de sobriété matérielle
41:37 et de réduction des importations via
41:39 un changement du côté de la consommation.
41:41 Comment composer, par exemple, avec les pays du
41:43 Sud avec lesquels on échange énormément
41:45 sans mettre à mal leur
41:47 économie à eux ?
41:49 C'est un point important et il faut bien sûr
41:51 que les politiques de relocalisation soient
41:53 pensées dans une optique globale parce
41:55 que nous ne sommes pas seuls au monde
41:57 et tout ce qui touche des partenaires commerciaux
41:59 a un impact. Il faut
42:01 néanmoins se rendre compte que les deux plus
42:03 grands déficits commerciaux de la France, ce sont
42:05 la Chine et l'Allemagne.
42:07 Ce sont les deux pays avec lesquels
42:09 nous importons le plus de biens
42:11 par rapport à ce que nous exportons.
42:13 L'Allemagne engrange des
42:15 excédents faramineux depuis 20 ans
42:17 et je pense qu'elle n'a pas de problème de ce côté-là.
42:19 La Chine engrange également
42:21 des excédents faramineux
42:23 et s'en sortira
42:25 très bien avec ou sans
42:27 le déficit vis-à-vis de la France.
42:29 En revanche, pour des pays d'Asie du Sud
42:31 ou pour des pays d'Afrique, là il y a une vraie
42:33 réflexion à avoir sur comment
42:35 à la fois nous sommes capables de relocaliser
42:37 certaines
42:39 industries, sachant que la relocalisation
42:41 ne touchera de toute façon qu'une partie des industries
42:43 parce que nous ne sommes pas capables de tout produire
42:45 loin de là et ce n'est même pas désirable.
42:47 C'est une partie bien sûr de la production
42:49 industrielle. Mais voir comment
42:51 dans ces pays avoir des vraies politiques
42:53 sachant que le monde
42:55 va vers
42:57 une situation beaucoup plus tendue,
42:59 comment on aide ces pays,
43:01 comment on travaille avec eux pour qu'ils soient
43:03 capables également de devenir plus résilients,
43:05 c'est-à-dire eux-mêmes moins dépendants
43:07 de mono-exportation comme on a
43:09 souvent imposé à beaucoup de pays,
43:11 et eux-mêmes capables de produire davantage
43:13 ce dont ils ont besoin pour leur
43:15 consommation intérieure. Vous parlez donc,
43:17 vous mettez aussi énormément en avant,
43:19 dans la même veine que la relocalisation,
43:21 la sobriété matérielle. Est-ce que
43:23 ça c'est entendable aujourd'hui pour
43:25 les Français de dire "vous consommerez moins"
43:27 alors que c'est des fois le petit plaisir du fin
43:29 de mois quand on n'a pas beaucoup d'argent, ou alors
43:31 sachant que les classes populaires sont
43:33 déjà dans la sobriété matérielle contrainte,
43:35 comment un peu faire
43:37 accepter ce discours,
43:39 ou même le porter tout simplement ?
43:41 C'est un problème très compliqué,
43:43 et vous aurez remarqué que personne
43:45 ne semble porter ça directement dans
43:47 le débat public aujourd'hui.
43:49 Et pour beaucoup de raisons légitimes,
43:51 à commencer par la question du pouvoir d'achat,
43:53 qui est une question réelle. Prenons le problème
43:55 du pouvoir d'achat. Comment le gouvernement
43:57 compte régler le problème du pouvoir d'achat ?
43:59 Par la croissance. Par la croissance
44:01 économique, plus de croissance économique
44:03 pour produire des biens, et donc pouvoir consommer
44:05 plus de biens, etc. Le problème,
44:07 c'est que la croissance économique
44:09 est relativement à tonne, et ne
44:11 va pas revenir au niveau qu'on connaissait
44:13 dans les Trente Glorieuses, à 3, 4,
44:15 ou 5 %
44:17 de croissance chaque année.
44:19 Ce n'est pas envisageable. Et quand
44:21 on regarde l'état du monde actuel, on a
44:23 plutôt tendance à penser que dans les décennies
44:25 à venir, le coût de l'énergie risque
44:27 d'augmenter, et les contraintes,
44:29 par exemple,
44:31 les contraintes géopolitiques, les tensions
44:33 avec la Chine, ou les problèmes sur les
44:35 approvisionnements, risquent peut-être au contraire
44:37 de jouer à la baisse sur la croissance.
44:39 Donc, ça ne me paraît pas crédible
44:41 sur le long terme de résoudre
44:43 le problème du pouvoir d'achat
44:45 de ce côté-là. Il y a
44:47 un autre aspect qui sont les dépenses contraintes,
44:49 avant tout le logement. Là, il y a bien sûr
44:51 des politiques d'aménagement du territoire,
44:53 des politiques de réindustrialisation sur lesquelles
44:55 il faut réfléchir, et c'est un point très
44:57 important sur lequel le
44:59 gouvernement devrait davantage
45:01 s'investir, la question des dépenses
45:03 contraintes. Mais ensuite,
45:05 l'immense majorité de ce que l'on consomme,
45:07 ce sont les besoins de consommation.
45:09 Et ce qu'il faut comprendre, ou ce qu'il faut
45:11 à nouveau comprendre, c'est que les besoins de consommation
45:13 ne sont pas donnés dans l'absolu.
45:15 Il y a, à la fin
45:17 des années 1970,
45:19 la satisfaction des Français vis-à-vis de leur pouvoir
45:21 d'achat était deux fois plus élevée qu'en
45:23 2019, avant la crise du Covid
45:25 et tous les problèmes qui en ont résulté.
45:27 Alors qu'à l'époque,
45:29 on consommait beaucoup
45:31 moins en volume, on voyageait moins loin,
45:33 les voitures étaient plus petites, etc.
45:35 Qu'est-ce qui s'est passé ? La différence,
45:37 ce n'est pas
45:39 le volume de consommation,
45:41 c'est le volume de consommation ou ce que l'on
45:43 peut se payer par rapport à ce que la société
45:45 nous pousse
45:47 à acheter.
45:49 Le problème que l'on a en France depuis la crise de 2008,
45:51 c'est que le pouvoir d'achat stagne
45:53 plus ou moins, surtout en bas de l'échelle sociale,
45:55 alors que le coût
45:57 du logement a tendance à augmenter.
45:59 Le pouvoir d'achat donc
46:01 stagne, mais en même temps, les besoins
46:03 n'arrêtent pas d'être
46:05 augmentés, d'être renouvelés,
46:07 etc. à travers la communication,
46:09 la publicité, la comparaison
46:11 et autres. C'est-à-dire qu'il y a
46:13 beaucoup de nouvelles
46:15 dépenses liées, par exemple, aux numériques
46:17 qui viennent s'ajouter aux
46:19 autres dépenses, ou quand on prend la voiture,
46:21 la voiture entre 2010 et
46:23 2020, le coût des voitures a
46:25 augmenté plus vite que le SMIC, et donc
46:27 le nombre de mois de SMIC nécessaires pour
46:29 s'acheter une voiture a augmenté,
46:31 du fait de l'électronique, du fait du volume
46:33 des voitures, du fait des normes de sécurité
46:35 et de beaucoup d'autres choses.
46:37 Ce qu'il faut, et ce qui me paraît
46:39 nécessaire, c'est de revoir
46:41 nos besoins de consommation. Et pour
46:43 ça, il faut se rendre compte que la consommation
46:45 n'est pas un domaine
46:47 qu'il faut uniquement laisser au libre
46:49 jeu du marché, car cela va de plus
46:51 en plus, c'est de plus
46:53 en plus en décalage avec nos intérêts collectifs,
46:55 quand ça se traduit par du déficit
46:57 commercial, par une empreinte environnementale
46:59 trop forte, ou par
47:01 des délocalisations. Il faut, au
47:03 contraire, reprendre et re-réfléchir
47:05 à ces questions des besoins, pour
47:07 les mettre en équation
47:09 avec nos moyens, des moyens qui sont, et qui
47:11 resteront, malheureusement, relativement
47:13 limités, même si la croissance
47:15 est peut-être la plus forte
47:17 en France par rapport à nos
47:19 voisins européens. Alors, cette
47:21 obsession avec la compétitivité est le tout
47:23 moins cher, c'est le fil rouge pour toutes les
47:25 réformes menées, notamment celles de
47:27 la Casse sociale et du Code du Travail. On pense
47:29 bien évidemment à la réforme des retraites, qui a
47:31 fortement ébranlé le pays, et dont l'opposition
47:33 était quasi majoritaire, d'ailleurs. Et
47:35 Olivier Dussopt, ministre du Travail, disait, début
47:37 2023, "Aucune réforme depuis 1981
47:39 n'a suscité
47:41 d'adhésion". Est-ce que ce n'est pas un problème
47:43 démocratique ? Il me semble que
47:45 la compétitivité, c'est un de mes chapitres,
47:47 effectivement, pose un vrai problème
47:49 démocratique. C'est-à-dire que, depuis
47:51 les années
47:53 1980, si vous voulez, le tournant
47:55 de la rigueur et autres,
47:57 les élites françaises ou les dirigeants français,
47:59 les gouvernants français, se sont
48:01 persuadés qu'il nous fallait plus de compétitivité,
48:03 plus d'intégration dans la mondialisation,
48:05 une meilleure spécialisation dans
48:07 la division internationale du travail, etc.
48:09 Mais, ils n'ont pas
48:11 réussi à en convaincre les Français,
48:13 ou en tout cas de moins en moins. On l'a
48:15 vu avec le référendum de Maastricht
48:17 en 1992,
48:19 les ouvriers et les employés
48:21 ont majoritairement voté contre.
48:23 On l'a vu en 2005, où là, c'est la population
48:25 française dans son ensemble qui a majoritairement
48:27 voté contre. Malheureusement,
48:29 les gouvernants sont restés
48:31 persuadés que nous n'avions pas le choix, il n'y avait
48:33 pas d'alternative, la contrainte extérieure,
48:35 économique extérieure, est trop forte,
48:37 donc il faut continuer dans cette voie.
48:39 Et c'est de là que date, disons, la division
48:41 ou le gouffre le plus en plus important
48:43 entre ce que veut
48:45 une majorité de la population
48:47 française, particulièrement dans les classes
48:49 populaires, et ce que pense
48:51 nécessaire le gouvernement.
48:53 Ça se voit dans le fait qu'il n'y a plus
48:55 de référendum en France, cela se voit
48:57 dans le fait que les majorités sont quand même
48:59 très faibles et les côtes de popularité
49:01 s'effondrent juste après
49:03 l'élection, et cela se voit dans le fait,
49:05 par exemple, on l'a vu avec François Hollande, que
49:07 la distance entre les promesses de campagne
49:09 et la réalité, parce que
49:11 comme l'a dit
49:13 Stéphane Le Foll, la politique de l'offre
49:15 n'est ni de droite ni de gauche, mais nécessaire.
49:17 Et François Hollande a dit à peu près la même chose,
49:19 la politique de l'offre
49:21 ce n'était pas mes promesses, mais c'était
49:23 une nécessité. Bon, quand la nécessité
49:25 s'impose, la place démocratique
49:27 devient de plus en plus
49:29 insignifiante.
49:31 La population française n'est toujours pas
49:33 convaincue par l'intégration,
49:35 la mondialisation, etc.
49:37 Donc le déficit démocratique,
49:39 malheureusement, tant que
49:41 l'obsession de la compétitivité
49:43 restera première chez nos gouvernants,
49:45 risque de se maintenir. Justement,
49:47 pour cette nécessité, est-ce que,
49:49 vous ne pouvez évidemment pas lire dans la tête
49:51 de nos dirigeants, mais est-ce que les dirigeants
49:53 étaient convaincus
49:55 que c'était la nécessité pour le bien
49:57 de l'intérêt général, ou est-ce que
49:59 ils sont convaincus que c'est la nécessité pour garder
50:01 le système établi, qui est quand même très bénéfique
50:03 pour les classes supérieures
50:05 et les grandes entreprises ?
50:07 Les deux ne vont jamais l'un sans l'autre.
50:09 Dans toute société
50:11 politique, où la politique
50:13 est discutée publiquement, il y a
50:15 à la fois une volonté d'intérêt
50:17 général et des intérêts de classe.
50:19 Les deux se mélangent
50:21 de diverses manières. Je dirais
50:23 qu'il me semble,
50:25 c'est discutable, mais que la plupart
50:27 de nos dirigeants ont à cœur de défendre
50:29 l'intérêt général, ont à cœur de défendre
50:31 en tout cas la manière dont ils pensent
50:33 l'intérêt général, mais que
50:35 les intérêts de classe ont
50:37 tendance à biaiser sans doute
50:39 la manière dont ils voient
50:41 l'intérêt général. On l'a vu pour la
50:43 désindustrialisation. La désindustrialisation
50:45 a été vécue très douloureusement
50:47 par toute une partie du pays en France,
50:49 mais comme c'est la partie la moins représentée
50:51 au niveau
50:53 des dirigeants, et la moins
50:55 en contact avec les dirigeants,
50:57 et bien, quand je dis les dirigeants,
50:59 c'est au sens large, même les journalistes,
51:01 les chercheurs, les intellectuels,
51:03 etc., c'est la partie de la population
51:05 qui avait le moins de rapports
51:07 avec cette
51:09 classe dirigeante, et bien,
51:11 ça a mis beaucoup
51:13 de temps à émouvoir
51:15 le personnel politique.
51:17 Il a fallu attendre beaucoup de drames
51:19 et notamment les Gilets jaunes, le
51:21 Covid et la
51:23 guerre en Ukraine pour qu'il soit
51:25 devenu consensuel de dire que la
51:27 désindustrialisation a été une vraie catastrophe
51:29 pour le pays. Donc vous parlez aussi, on y vient,
51:31 de responsabilités politiques, notamment
51:33 de la gauche, que l'impasse de la compétitivité
51:35 se compose du tripartisme,
51:37 le fait que les partis politiques se sont perdus,
51:39 gauche-droite confondue, montée du RN, etc.,
51:41 des médias dominés par les classes supérieures,
51:43 des différentes crises, mais que cela
51:45 n'efface pas une donnée majeure,
51:47 la responsabilité des oppositions, en particulier
51:49 RN et NUPS, dans le dysfonctionnement
51:51 actuel de notre régime politique,
51:53 et vous dites qu'il y a un problème au niveau de la
51:55 crédibilité économique du côté
51:57 de la NUPS, notamment la France Insoumise,
51:59 pouvez-vous nous expliquer ça ? Nous entrons dans
52:01 un terrain politique
52:03 compliqué, et ce que je vais dire,
52:05 c'est mon opinion,
52:07 qui est ayée par
52:09 ce que j'ai étudié,
52:11 mais ce n'est pas une opinion
52:13 d'expert, en quelque sorte. Quand on regarde l'état
52:15 du rapport de force aujourd'hui, j'ai
52:17 l'impression quand même que ce qui
52:19 aujourd'hui fait que
52:21 la NUPS ou la NUPES,
52:23 comme on voudra, semble avoir aucune
52:25 chance de parvenir à gagner
52:27 les élections de 2027, c'est
52:29 que sa base électorale est
52:31 trop ténue. La stratégie,
52:33 notamment chez LFI, c'est de se dire
52:35 "nous allons conquérir les classes populaires".
52:37 C'est quelque chose qui est dit depuis longtemps,
52:39 au moins dix ans, ça a peut-être donné
52:41 quelques succès par-ci
52:43 par-là, mais on s'aperçoit quand même
52:45 que ça ne suffit pas, et c'est même très loin de suffire.
52:47 Et je ne vois pas ce qu'il va faire
52:49 que d'ici 2027, ça va suffire.
52:51 Qu'est-ce qui manque aujourd'hui dans l'électorat
52:53 de la gauche ? Ce sont
52:55 les cadres et les retraités
52:57 qui sont partis chez
52:59 Emmanuel Macron en 2017.
53:01 Donc les cadres et les retraités, d'ailleurs, chez les retraités
53:03 et c'est quelque chose d'intéressant, c'est
53:05 classe populaire et classe supérieure
53:07 confondus. Autant l'électorat
53:09 d'Emmanuel Macron est très clivé
53:11 socialement chez les actifs,
53:13 autant chez les retraités,
53:15 les retraités votent massivement
53:17 du côté d'Emmanuel Macron ou pour la
53:19 droite, mais classe populaire
53:21 et classe supérieure confondues.
53:23 J'ai l'impression en tout cas que pour cet
53:25 électorat qu'on pourrait appeler, si vous voulez,
53:27 de centre-gauche ou l'ancien électorat PS
53:29 qui est parti du côté d'Emmanuel Macron,
53:31 sans cet électorat, j'ai beaucoup de mal à voir
53:33 comment la gauche pourrait
53:35 l'emporter en 2027.
53:37 C'est-à-dire qu'à mon avis,
53:39 et je sais que ça ne fait pas consensus, ce qu'il manque
53:41 aujourd'hui à la gauche, c'est un
53:43 pôle social-démocrate ou un
53:45 pôle qu'on pourrait dire de centre-gauche
53:47 qui, d'un côté,
53:49 ait compris le problème
53:51 du mandat de François Hollande,
53:53 et compris le problème de l'obsession de la compétitivité.
53:55 Et je veux dire, tout mon livre est tourné
53:57 là-dessus, en quoi est-ce qu'il faut une rupture,
53:59 une véritable rupture, avec
54:01 les conceptions
54:03 qu'ont eues les dirigeants du Parti
54:05 socialiste au moins depuis les années 80,
54:07 une rupture réelle du fait de l'état
54:09 du monde et du fait de l'état de la société.
54:11 Mais en même temps, il est
54:13 important de récupérer cet électorat-là
54:15 si l'on ne veut pas
54:17 ce qu'on va donner, avoir une alternative,
54:19 quoi de plus, entre, disons, le centre-droite
54:21 et l'extrême-droite.
54:23 Et pour ça, je crois que l'enjeu de la crédibilité
54:25 économique est majeur.
54:27 La notion de crédibilité économique a très
54:29 mauvaise presse, notamment à gauche, parce que
54:31 crédibilité économique = déficit
54:33 public = politique d'austérité
54:35 = compétitivité, etc.
54:37 J'essaye de montrer que ce n'est pas le cas.
54:39 J'essaye de montrer même que la
54:41 politique sociale et économique
54:43 d'Emmanuel Macron ne me paraît pas spécialement
54:45 crédible et qu'en tout cas, on peut
54:47 essayer de le montrer. Mais l'enjeu
54:49 de la crédibilité économique est clair
54:51 parce qu'aujourd'hui, si
54:53 cet électorat préfère voter pour
54:55 Emmanuel Macron plutôt que pour
54:57 LFI ou plutôt que pour la NUPES,
54:59 c'est parce qu'ils ont l'impression
55:01 qu'il y aurait une catastrophe économique
55:07 à avoir la gauche au pouvoir.
55:09 Je ne parle que des sujets
55:11 socio-économiques, mais il y a bien sûr aussi
55:13 beaucoup d'autres sujets qui s'articulent à ça, identitaires
55:15 et autres, qui viennent complexifier tout ça.
55:17 Et ce que j'essaye de dire dans ce livre,
55:19 c'est qu'il me semble que
55:21 le reproche adressé à
55:23 la NUPES ou au programme
55:25 économique de LFI n'est pas
55:27 complètement, disons,
55:29 abusif. C'est-à-dire
55:31 que quand on lit le programme de la NUPES,
55:33 il y a à la fois
55:35 la volonté de miser sur la
55:37 consommation populaire et en même
55:39 temps des exigences écologiques
55:41 et des exigences de
55:43 protectionnisme importantes.
55:45 Mais ce que l'on a pour sûr,
55:47 c'est la consommation populaire,
55:49 150 milliards
55:51 de consommation populaire, tout de suite
55:53 par décret, et ensuite des
55:55 négociations pour plus de protectionnisme
55:57 et des changements de mode de consommation, etc.
55:59 Mais on a d'un côté
56:01 quelque chose qui va arriver tout de suite, et de l'autre
56:03 des projets de long terme qui vont dépendre
56:05 de nos partenaires et de beaucoup d'autres choses.
56:07 150 milliards de consommation
56:09 populaire en plus, ça va se traduire
56:11 par quoi ? Ça va se traduire par davantage
56:13 de déficit commercial, comme
56:15 en 1980, sauf que
56:17 en 1980, nous étions en excédent,
56:19 aujourd'hui on est en fort déficit, donc notre situation
56:21 est beaucoup moins avantageuse qu'à
56:23 l'époque, et par davantage
56:25 d'empreintes écologiques, parce
56:27 que plus on consomme en volume, plus
56:29 l'empreinte écologique est élevée.
56:31 Et c'est pour ça que je crois que nous aurions
56:33 intérêt à réfléchir autrement,
56:35 réfléchir en termes de sobriété matérielle
56:37 et de relocalisation industrielle,
56:39 pour avoir à la fois une rupture
56:41 avec les politiques de compétitivité,
56:43 la possibilité d'un rééquilibrage
56:45 nécessaire et même indispensable
56:47 des rapports entre les différentes
56:49 classes sociales en France, déséquilibrés en faveur
56:51 des classes supérieures, mais en même
56:53 temps quelque chose qui me paraisse plus crédible
56:55 du point de vue géopolitique, du point de vue
56:57 écologique et du point de vue économique
56:59 pour la France. Vous voudriez
57:01 que ce qu'il propose à long terme soit
57:03 dans le court terme en même temps que
57:05 la relance de la consommation ? Il me semble
57:07 que les deux choses à mettre en
57:09 priorité en avant, c'est la question de la
57:11 consommation. Il faut que la consommation revienne
57:13 à un enjeu de débat démocratique.
57:15 Il n'y a pas de raison que la production,
57:17 le gouvernement
57:19 et la main dessus disent "on va travailler
57:21 deux années de plus, on doit faire ci, on doit
57:23 faire ça" et que la consommation, chacun est libre de faire
57:25 ce qu'il veut, ce qui est en fait une démission
57:27 face au marché ou aux grands groupes internationaux.
57:29 Il faut que la consommation rentre
57:31 dans le débat collectif parce que
57:33 il y a des enjeux de nos intérêts collectifs
57:35 majeurs qui se jouent à travers
57:37 la consommation et la question de la
57:39 relocalisation industrielle parce que je crois que la question
57:41 de la relocalisation industrielle qui s'accorde
57:43 très bien avec la sobriété
57:45 matérielle, la relocalisation industrielle
57:47 est ce qui permet
57:49 d'avoir une acceptabilité
57:51 populaire à quelque chose
57:53 qui est quand même un effort, c'est-à-dire
57:55 revoir nos modes de consommation, bien sûr en
57:57 commençant de l'échelle sociale, bien sûr
57:59 un effort collectif, etc. mais un
58:01 effort quand même. La relocalisation
58:03 industrielle, ça permet d'avoir
58:05 plus d'emplois, des emplois sur les territoires
58:07 donc pas seulement en métropole,
58:09 moins de déficit commercial et donc plus
58:11 de rentrée fiscale à travers les cotisations sociales
58:13 etc. qui vont permettre de
58:15 réinvestir enfin dans les services
58:17 publics qui est un des reproches
58:19 majeurs et totalement justifiés
58:21 formulés par les classes populaires,
58:23 classes moyennes incluses, à l'égard
58:25 des politiques sociales actuelles.
58:27 En tout cas, merci beaucoup.
58:29 Benjamin Fabri, je pense qu'on a fait le tour.
58:31 Si vous voulez aller un petit peu plus loin,
58:33 vous pouvez évidemment lire le livre en entier, donc "L'impasse de la compétitivité".
58:35 Et merci à vous,
58:37 chez vous, d'avoir suivi cet instant éco-estival.
58:39 La rentrée approche
58:41 à grands pas et pour nous,
58:43 cette année, le Média, ce sera à la
58:45 télé la rentrée, mais surtout avec
58:47 vous, d'ici la fin du mois d'octobre,
58:49 vous aurez enfin un Média libre et indépendant,
58:51 populaire, des luttes. Le chantier
58:53 comme le défi sont immenses.
58:55 Spectateurs, abonnés, donatrices et sociaux,
58:57 je vous dis à très vite.
58:59 [Musique]
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59:06 ♪ ♪ ♪
59:08 ♪ ♪ ♪
59:10 Merci à tous !
59:12 Merci à tous !

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