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00:00 Salut à tous et bienvenue dans PONTUATION, le magazine consacré aux livres sur la CRTV.
00:16 École et livres font tandem, cela va sans dire.
00:24 Cela va mieux en l'éclairant, en l'expliquant, en le démontrant, on le verra tout à l'heure,
00:31 avec Sophie-François Gbopabé et Abdelibok, qui vont nous proposer ses coups de cœur
00:37 dans les programmes scolaires qui sont les livres qui lui parlent,
00:42 et en quoi est-ce que la fiction littéraire aide à la promotion, le développement de l'intelligence de l'enfant,
00:50 mais aussi son ouverture sur le monde.
00:54 Elle nous présentera aussi son tout nouveau livre, son premier essai,
00:58 "Est-ce que l'essai vaut le coup de maître ?"
00:59 C'est un coup de gueule pour une humanité plus humaine, très court mais dense.
01:06 Bienvenue dans cette émission, Madame.
01:08 Merci.
01:09 Serge Pout et bonjour à tous les téléspectateurs.
01:13 Nous sommes heureux de vous recevoir pour la PONTUATION.
01:16 Avant qu'on parle de votre essai, rentrons à l'école.
01:20 Vous êtes inspecteur-coordinateur ou vous êtes coordonnatrice.
01:25 C'est quoi votre titre, votre rôle principal, votre fonction ?
01:30 Inspecteur-coordinateur régional, chargé des lettres, arts et langues.
01:35 Donc je m'occupe de la promotion des disciplines telles que le français,
01:42 English to anglophone, espagnol, allemand, arabe, chinois, italien, latin, grec,
01:48 langues et cultures nationales et les arts.
01:50 Donc ça fait 10 disciplines, 10 groupes de disciplines
01:53 et je suis à la tête des inspecteurs chargés de ces disciplines dans la région du centre.
01:57 Entre-temps, vous écrivez. On s'intéresse aux livres à l'école
02:03 et je lis qu'ils font tandem livre et école parce que c'est l'outil
02:07 dont se servent les enseignants et les élèves pour la transmission du savoir.
02:12 Forcément, Serge, le livre est un support pour l'enseignement
02:16 et je me suis vraiment penchée sur la liste d'Emmanuelle Scholer
02:22 telle qu'elle a été publiée cette année et comme vous avez si bien relevé,
02:28 j'ai des coups de cœur là-dedans. On ne le dira jamais assez, le savoir est dans les livres.
02:34 Déjà, amener l'élève à l'éveil, l'amener à commencer à lire des petites histoires de son âge.
02:41 J'ai parlé tout à l'heure d'ancrage culturel parce que ça c'est très très important
02:46 pour l'inspecteur chargé des langues que je suis.
02:49 Parce qu'un enfant doit pouvoir retrouver dans la lecture des éléments qui le renvoient dans sa culture.
02:56 On parle de contextualisation des enseignements,
03:00 donc la littérature constitue un support de contextualisation des enseignements pour ses élèves.
03:08 Cela développe déjà son esprit de créativité parce que cette créativité artistique
03:13 que nous retrouvons dans les différents livres, créativité littéraire,
03:17 ça mène l'enfant également à se dire, mais parfois on a des idées, on se dit, on pourrait les écrire,
03:24 mais comment est-ce que cela pourrait être reçu ?
03:26 Parce qu'on a tendance à penser, quand on est seul avec son histoire, qu'elle n'est pas intéressante.
03:31 Mais quand on s'ouvre aux histoires des autres et qu'on se dit, mais ce n'est pas si extraordinaire que cela,
03:38 on se rend compte que parfois ce sont les histoires de la vie quotidienne des gens qui finissent par être des morceaux d'anthologie.
03:45 Pour qu'il y ait des ailes, il faut bien qu'il y ait des racines.
03:49 La formule des racines et des ailes, la littérature, la nôtre cambrounaise, ça enracine davantage l'enfant ?
03:56 Ça enracine davantage l'enfant dans sa culture.
04:00 Et or, les racines c'est ce qui permet à l'enfant d'être solidement ancré avant de s'ouvrir au monde.
04:07 Comme le prescrit notre loi d'orientation de 1998.
04:12 Je voudrais vous imposer de commencer par un ouvrage qui n'est pas forcément dans votre classement,
04:18 mais c'est là, mais ce n'est pas dans l'ordre que vous avez bien voulu proposer.
04:24 C'est "Trois potes en un mari". Pourquoi je parle de ça ?
04:27 C'est parce qu'en préparant un documentaire sur Guillaume Ollonombia,
04:31 je me suis laissé dire que le contexte d'irruption, de jaillissement de cet auteur était que,
04:40 au soleil des indépendances, c'était essentiellement la littérature occidentale qui était là.
04:46 Et lui, il fait partie de ceux qui ont domestiqué, qui ont endogénéisé les veilles au niveau littéraire à travers son théâtre.
04:55 Surtout que Guillaume Ollonombia, il écrit ce livre étant en classe de seconde.
04:58 Et ça c'est très intéressant pour les élèves de savoir que, même en classe de cinquième et de quatrième,
05:04 on peut avoir un jaillissement d'une idée qui finit par devenir, comme je le disais tout à l'heure, un morceau d'anthologie.
05:10 Alors parlons de "Trois potes en un mari" qui fait justement partie de mes coups de coeur.
05:14 Je voudrais lire un extrait très court. Il s'agit de Juliette. Et qu'est-ce qu'on lui dit ?
05:21 "C'est bien, ça a marché avec le fonctionnaire. Très bien, très bien.
05:27 Il nous a versé 200.000 francs et le mariage est conclu."
05:33 Et Juliette qui dit "Conclu ? Mais vous êtes donc bien décidée à ne faire aucun cas de moi en prenant des décisions qui me concernent ?
05:43 Est-ce qu'on ne pouvait pas me consulter ? Au moins pour cette fois."
05:50 Tout le monde se regarde et on lui dit "Mais c'est un fonctionnaire, Juliette. Un homme riche."
06:01 Alors il s'agit d'un mariage. Et moi je me dis en matière de mariage,
06:06 même si dans le contexte africain on a tendance à dire que c'est une union entre deux familles,
06:12 c'est d'abord une union entre deux personnes. Mais là on ne semble pas tenir compte de la personne qu'on envoie à un mariage.
06:19 On se dit, du moment qu'il est fonctionnaire, du moment qu'il a de l'argent, du moment qu'il a versé une dette de 200.000 francs,
06:27 on ne comprend pas que Juliette ose dire non.
06:30 Et c'est pour cela qu'on se regarde en se disant "Voilà les résultats, voilà ce que devient une fille qu'on envoie à l'école.
06:37 Peut-être aurait-il été préférable que cette fille restait au village."
06:43 Parce que c'est en allant à l'école qu'on se dit, qu'on a son mot à dire quand on se marie.
06:48 Et vous voyez que c'est un problème très actuel.
06:51 Il reste actuel le problème des mariages forcés, le problème des personnes qui ne sont pas consultées au moment où on va à un mariage.
06:59 Et qu'on retrouve d'ailleurs dans Mugnal, les larmes de la patience de Jailly, Mugnal qui est en-dessus de la liste des terminales.
07:09 Oui bon, on ne va pas s'étendre sur ça.
07:11 Je ne parlerai pas.
07:12 Oui, mais on dira quand même que derrière ça, il y a que la femme est à vendre.
07:17 Le mariage devient un marché.
07:20 Envoyez rapidement d'autres ouvrages que vous nous proposez au programme.
07:25 J'ai mon coup de cœur, c'est "Père inconnu" de Pabé Mongo.
07:30 Pabé Mongo qui a célébré ses 50 ans de carrière en 2022.
07:35 Et qui est le président de l'APEC, l'association des poètes et écrivains cambronais dont je suis la secrétaire générale.
07:42 Rassurez-vous, ce n'est pas pour cela.
07:44 Voici le texte.
07:46 Nous habitions une case située sur la deuxième rangée des cases du quartier.
07:51 C'était donc une cuisine.
07:53 Les maisons d'habitation étaient situées sur la première rangée.
07:57 Nous n'avions pas de maison principale.
07:59 Cette cuisine elle-même n'était qu'un long rectangle en terre battue, ouvert en son milieu par une porte de bois.
08:07 Alors, il vous dit, de côté droit le salon, c'est-à-dire un espace vide, portant quelques bancs et parts,
08:14 et une étagère pour la vaisselle en aluminium, en fonte ou en bois.
08:19 Avec un panneau, on avait délimité une sorte de chambre qui comportait un lit de bois,
08:25 avec un matelas de paille, plus deux oreillers.
08:29 Chambre mystérieuse.
08:31 Chambre sacrée dans laquelle mon frérot et moi n'avions pas le droit d'entrer.
08:36 Nous dormions sur l'un des lits en bambou à côté du foyer.
08:39 Alors, il y a un problème.
08:41 C'est que tout aurait bien pu se passer, sauf qu'il y a un monsieur qui vient assez régulièrement et qu'on le fait appeler papa.
08:49 Ce qui m'intriguait, dit-il, beaucoup à cause de ses manières de piquer assiette,
08:53 mais aussi à cause d'un autre monsieur, trapu, cou sur ses jambes,
08:58 cossu des fesses, assez négligé d'apparence, qui nous rendait régulièrement visite,
09:04 et qu'on me faisait également appeler papa.
09:07 On a un jeune enfant qui se retrouve dans une maison qui décrit le contexte de nos maisons d'alors.
09:13 Parce que devant, on avait ce qu'on appelait le salon, ou la maison des hommes,
09:20 et derrière, il y avait les maisons des femmes, c'est-à-dire la cuisine.
09:24 Mais dans le cas d'espèce, il n'y a pas de maison d'hommes, puisque c'est une femme qui vit avec ses enfants.
09:31 Sauf que cette chambre mystérieuse accueille de temps en temps des hommes qui entrent, qui ressortent,
09:36 il y en a qui ressemblent à maman, il y en a qui ne viennent que de nuit,
09:39 et tout le monde est appelé papa là-dedans.
09:41 Finalement, qui est mon père?
09:44 - Question recherche du père, recherche de ses repères aussi.
09:49 - Et de ses racines.
09:51 - Parce que chaque enfant, de mon humble point de vue, a quand même le droit de savoir qui est son géniteur.
09:56 - Alors là, invitation au téléspectateur d'aller parcourir, si vous êtes parent, le roman "Père inconnu",
10:05 sachant que ce n'est pas écrit pour l'école, c'est un roman écrit par Pabé Ngongo, qui est d'ailleurs un auteur assez prolifique.
10:12 - Je vais vous donner rapidement le dernier livre avant qu'on passe à votre série.
10:18 - Si je prenais le dernier livre, je prendrais "Les champs de la forêt" de Lucien Ayanoa.
10:24 Précisément, il y a un texte qui dit "la parole, vos contrats",
10:28 parce qu'on ne doit pas dire des choses n'importe comment,
10:31 et on doit faire très attention aux pactes ou aux conventions que l'on prend.
10:36 Ici, il s'agit d'un homme qui fait un contrat, une sorte de contrat avec un revenant,
10:41 sauf qu'il s'agit d'une ligne de piège, et ils ont créé une ligne de piège,
10:45 et ils s'entendent à ce que tout animal mâle sera pour l'homme,
10:50 et tout animal femelle, tout ce qui sera femelle sera pour le revenant.
10:56 Toutes les prises jusque-là, il n'y a que les mâles.
10:59 Elephant, bélier, tout, il n'y a que les mâles.
11:02 Jusqu'au jour justement où il y a un éléphant, et c'est un éléphant mâle,
11:06 l'homme a voulu partager un certain nombre de fois avec son ami revenant,
11:11 mais le revenant lui a dit "la parole, vos contrats".
11:14 Et quand il s'agit d'un éléphant, l'homme appelle tout le monde pour dépaisser
11:18 et transporter la viande au village, sauf qu'il oublie la pipe dans la fosse.
11:24 Et à ce moment-là, il envoie donc son épouse, la première,
11:28 "Va me chercher ma pipe dans la fosse."
11:31 Dès qu'elle entre, le revenant lui dit "Passe derrière moi."
11:35 "Tu m'appartiens désormais."
11:37 Ne l'envoyant pas revenir, il envoie la deuxième, même sort.
11:41 Toutes ces sept femmes sont alignées derrière le revenant.
11:44 Il finit par se dire "Il se passe quelque chose.
11:47 Pourquoi mes femmes ne reviennent-elles pas?"
11:50 Et arrivé sur le lieu, il trouverait sept femmes, ses sept épouses,
11:54 alignées derrière le revenant.
11:57 "Mais mon ami, on avait dit que toute femelle qui se retrouverait ici m'appartiendrait."
12:03 "Mon ami, la parole vaut contre elle."
12:06 C'est pour dire qu'il faut éviter un certain nombre de pactes et qu'il faut savoir tenir parole.
12:10 Un enfant de la classe de sixième doit pouvoir se dire que le mensonge n'est pas bon,
12:15 mais aussi, et on va y venir, que les alliances avec des gens, des personnes douteuses...
12:21 Alors, vous ne vous limitez pas à écrire des romans, des recueils de poèmes.
12:26 Là, vous venez de sortir un essai.
12:29 Est-ce que l'essai vaut le coup de maître?
12:32 On verra tout à l'heure, ce n'est pas à nous de juger.
12:35 Il est intitulé "Coup de gueule ou pour une humanité plus humaine".
12:40 Il a l'Afrique pour horizon, horizon de pensée. Pourquoi?
12:45 Pour deux choses. L'Afrique a deux défis à relever.
12:49 Le défi premier me semble être celui de son identité culturelle.
12:54 Et le deuxième défi me semble être celui de la vision,
12:59 comment faire pour que l'Afrique devienne effectivement émergente.
13:04 A partir de là, on est bien obligé de faire un état de lieu,
13:07 et c'est ce qu'on a fait, un état de lieu de l'Afrique actuelle depuis les indépendances.
13:12 Où allons-nous? Qu'est-ce qu'on a fait jusque-là?
13:15 Qu'est-ce qui n'a pas marché? Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour réorienter la vision de l'Afrique
13:20 pour que finalement elle devienne émergente?
13:23 Donc voilà ce qui me pousse à écrire.
13:25 - L'article du discours il rame à contre-courant de ce qu'on entend ces derniers temps.
13:31 De belles mélodies sur une Afrique enchantée ou enchanteresse.
13:38 On lui prédit carrément une belle sortie du tunnel difficile, obscur, avec les dates mêmes...
13:48 - 2035?
13:49 - Voilà, 2035, 2050 même, on voit que l'Afrique, il n'y a que du bon pour elle.
13:56 Vous vous dites "attention".
13:58 Pourquoi est-ce que vous êtes inquiète pendant que les gens sourient sur l'Afrique
14:03 et pendant que les convoitis se font entendre?
14:07 - Il y a un problème de prise de conscience.
14:09 Lorsqu'on vous dit "tout va bien, vous allez sortir et que vous dormez sur vos lauriers",
14:14 vous pouvez vous retrouver dans une situation très incommodante.
14:17 Les Etats africains, d'une manière générale, sont indépendants depuis 1960.
14:22 Et on nous classe comme des pays en voie de développement.
14:26 Or, être sur une voie qui mène, dit-on, au développement pendant 60 ans,
14:32 et continuer à y marcher, il est peut-être temps qu'on s'arrête et qu'on se demande
14:37 si cette voie qu'on a empruntée depuis 60 ans mène effectivement au développement
14:42 ou alors il est question, je vais me répéter, de questionner cette voie et se demander
14:47 ce n'est pas temps de changer.
14:49 C'est plus cette prise de conscience de l'Afrique par les Africains.
14:54 C'est de cela qu'il s'agit dans cet essai.
14:57 - Qu'est-ce que vous pointez comme étant aujourd'hui le lourdeur de l'Afrique
15:03 au plan culturel, même au plan des frontalités?
15:06 - Je commencerai par le plan culturel, qui me semble fondamental.
15:10 J'ai parlé de reconstituer ou de reconstruire l'identité africaine.
15:16 Parce que nous ne pouvons pas nier notre passé.
15:18 C'est en niançant son passé qu'on peut mieux se projeter.
15:22 Nous avons été colonisés.
15:24 Et lorsque le colon arrive, l'histoire du Cameroun, l'histoire de l'Afrique,
15:27 que ce soit au Ghana, que ce soit en Tanzanie, l'histoire de l'Afrique est claire.
15:34 Et lorsque le colon arrive, nous avons un Dieu.
15:37 Nous avons une culture.
15:38 Nous avons nos habitudes à nous, mais on se comporte comme si l'Africain n'avait pas de Dieu,
15:44 l'Africain n'avait pas de culture, et on procède à une superposition de cultures.
15:48 Aujourd'hui, nous nous rendons compte que, avec le niveau de scolarisation que nous avons pu atteindre,
15:56 il y a beaucoup d'éléments à reconstruire.
16:00 Aussi, par le règle de l'identité culturelle de l'Afrique à reconstruire.
16:05 - Alors comment, en concrète, on fait quoi?
16:07 - Déjà, nous sommes dans un musée.
16:09 Ça commence par là.
16:10 Au lieu que nous soyons, je ne sais pas, dans un centre où on nous montrera des choses construites par des occidentaux,
16:17 parce qu'on a tendance à penser que ce qui est modèle nous vient d'ailleurs.
16:21 On y est arrivé jusqu'aux expressions.
16:24 Qui vous dit que "yosh"?
16:25 Qui vous dit que "womaw" n'est pas une expression?
16:28 C'est quand on dira "purée" ou c'est quand on dira "mince" que ce sera une expression.
16:33 Nous avons nos expressions.
16:34 Nous avons nos cultures.
16:36 Nous avons nos langues qui véhiculent notre culture.
16:39 Et je parle de langue.
16:41 Peut-être on a ma qualité d'inspecteur coordonnateur des langues.
16:44 Il y a un moment, pas très récent, on ne pouvait pas se retrouver dans un cadre scolaire et parler la langue, notre langue.
16:53 On vous mettait un espace de collier au cou comme si vous aviez pêché.
16:57 Et on nous faisait croire que nos langues, c'était hanté de les parler.
17:02 Aujourd'hui, nous réalisons qu'en perdant nos langues, nous perdons nos cultures, Serge.
17:07 Et il est question de les revaloriser.
17:10 Alors, comment?
17:12 Je sais qu'Antadiope écrit dans "Nation agriculture" depuis 1960.
17:18 Ils sont l'avertisseur.
17:21 On en est à parler contre vous, mais on n'avance pas.
17:24 D'une manière générale, il démontre que l'Afrique ancienne, en fait, était noire.
17:30 Et lorsque l'on vous dit que les gens sont allés puiser en Égypte,
17:35 et qu'on se rend compte que l'Égypte ancienne était noire,
17:38 il y a une prise de conscience de la valeur même de l'Africain.
17:41 Parce que nous devons savoir que la science dont on parle est venue de nous.
17:46 Je n'irai pas parler d'Ésop, ainsi de suite.
17:50 Nous savons qu'il y a eu, comme je parlais de superposition de cultures, je dirais même mensonges.
17:56 Parce qu'à un moment donné, on nous a fait croire que ce que nous pouvons avoir de bon ne peut venir que d'ailleurs.
18:02 Alors qu'à un moment, on est venu puiser chez nous,
18:05 et on est revenu nous revendre ce qu'on avait pris chez nous,
18:09 en nous mettant de la peinture blanche, et même de la peinture rose paillettes princesse,
18:14 pour que ça fasse très joli, et que nous consommions comme quelque chose de magnifique, ce qui vient de nous.
18:21 D'accord, pour ce constat, c'était à des lieux.
18:24 On résout ça comment ? La question est, comment ce peut, depuis 1960 ?
18:29 On résout comment ? On fait comment pour faire une sorte de conversation,
18:36 de mettre les langues en commun ?
18:40 Comment on résout ça au petit niveau de notre cellule familiale ?
18:45 Comment on fait ?
18:47 Alors, au niveau de la cellule familiale, il y a quelque chose de simple.
18:50 Nous, aujourd'hui, dans nos maisons, nous parlons le français à nos enfants.
18:54 Apprenons à parler nos langues maternelles à nos enfants.
18:58 Ceux qui ont l'avantage d'avoir deux parents qui ont deux langues maternelles différentes,
19:05 je dis avantage, parce que si moi, je suis une fille du centre, une fille bassa,
19:11 et que j'épouse un gars du nord, je dis n'importe quoi,
19:15 nous devons dans notre maison parler et le fufuldé et le bassa.
19:20 Ça nous donne un avantage sur les autres.
19:22 Parce que ça nous permet d'avoir même deux cultures, en plus du français et de l'anglais,
19:28 qui sont les langues officielles. Là, je suis revenu un peu au niveau du Cameroun.
19:31 Multiculturalisme...
19:34 Bilinguisme et multiculturalisme.
19:37 Vous pointez aussi, parmi les obstacles à l'évolution de l'Afrique,
19:42 ce comportement, cette tendance qui veut qu'on privatise le bien public,
19:47 qu'on priorise l'intérêt personnel au détriment de l'intérêt commun.
19:51 C'est très bien, parce qu'en fait, c'est une donnée, c'est de l'observation.
19:56 Et vous savez que j'ai commencé mon essai par une fable,
19:59 de la fontaine, la génisse, la chèvre, la brebis, en société avec le lion.
20:04 Et vous comprenez que lorsque les quatre se disent, chacun de nous,
20:08 chaque fois que nous aurons un animal, nous allons le partager en quatre.
20:13 Ici, c'est la chèvre qui a l'animal.
20:19 Et comme il appelle les autres, le lion dit, ok, il partage en quatre.
20:23 La première, comme il est lion, c'est la mienne, je suis lion.
20:26 La deuxième, je suis le plus fort, c'est ma part.
20:29 Comme je suis la troisième, c'est parce qu'il est le plus vaillant.
20:33 Il prend la troisième, si quelqu'un d'entre vous prétend la quatrième,
20:36 je l'étrangle d'abord.
20:38 Voilà comment le lion se retrouve en train de prendre les quatre quarts,
20:41 d'où l'expression, se tailler la part du lion.
20:44 Qu'est-ce qui se passe en Afrique ?
20:46 Serge, observez lorsqu'il y a une nomination.
20:48 Mais si on nomme quelqu'un aujourd'hui, c'est tout le village,
20:51 c'est tout le quartier qui vient.
20:53 Parce qu'on voit les intérêts qui sont liés à un poste de responsabilité,
20:56 personne ne pense au travail.
20:58 Parce qu'on se dit, on va gagner, ce qui est, nous, pour le public,
21:02 c'est-à-dire que l'ordinateur principal ou délégué reçoit quelque chose
21:08 pour le fonctionnement du service.
21:10 Et il se trouve malheureusement souvent que ce qui a été donné pour l'intérêt public
21:14 est utilisé pour les intérêts purement privés.
21:17 Et ça, ça plombe le développement de l'Afrique d'une manière générale.
21:20 Ça fait longtemps qu'on dit que la chèvre broute là où elle est attachée.
21:23 Ça n'a jamais changé.
21:25 Mais la chèvre broute là où elle est attachée,
21:27 ça veut dire que les autres chèvres ne devraient pas brouter.
21:31 Je vais dire quelque chose d'assez...
21:34 La chèvre broute là où elle est attachée.
21:37 Il y a à côté des autres chèvres qui devraient aussi brouter.
21:40 En fait, l'idée c'est quoi?
21:42 Lorsque les dirigeants africains mangent du riz avec la fourchette,
21:47 ils ne doivent pas le faire sur un panneau,
21:51 pour récupérer même les miettes qui seraient tombées.
21:55 Parce que même dans la Bible, on parle de dix mains,
21:58 c'est le dixième.
22:00 Donc on ne demande pas forcément que tout soit mis pour les autres
22:05 et rien pour celui qui a le poste de responsabilité.
22:08 Mais il doit pouvoir penser.
22:10 Est-ce qu'on donne aux autres sans avoir de nos chèvres?
22:12 Le chèvre n'a pas, n'est-ce pas?
22:14 Il faut peut-être aussi sortir la politique du ventre,
22:18 des miettes aussi.
22:20 On comprend bien dans le partage de la félicité,
22:24 que ce soit aussi le bien de chacun.
22:27 Et dans cet ouvrage, il y a ce qu'il ne faut pas faire,
22:30 c'est ce que vous venez de décrire à travers les tas d'élus,
22:33 mais aussi ce qu'il faut faire.
22:35 Parce qu'il faut faire, en pages 43 et suivantes,
22:38 la professionnalisation en offrant,
22:41 son qualitatif et puis la créativité comme avenir de l'Afrique.
22:46 Ici, c'est "on ne parle plus des autres qui sont responsables".
22:50 Oui, on a une situation difficile,
22:52 mais nous avons en nous les ressources ou potentiels.
22:55 Comment est-ce qu'on me sort logique?
22:57 Moi, je commencerais vraiment en allant dans votre sens pour dire
23:00 que les problèmes de l'Afrique sont androgènes.
23:02 Nous ne pouvons pas penser au développement de l'Afrique
23:05 en prenant des solutions étrangères.
23:07 Nous devons penser nous-mêmes.
23:09 C'est pour cela que j'ai commencé par le nécessaire ressaisissement,
23:12 en pages 37 dont vous parlez.
23:14 Il est temps que quelqu'un se dise,
23:17 il n'est jamais trop tard pour bien faire.
23:20 Si jusque-là, je ne me suis pas bien comportée
23:23 en matière de gestion, en matière de vision même de l'Afrique,
23:27 pour que nous sortions enfin de ce sous-développement
23:30 ou alors que nous soyons enfin le pays émergeant,
23:34 que nous appelons de tous nos vœux, il y a une chose à faire.
23:37 Nous allons parler, à page 43, de la professionnalisation.
23:42 Il faut qu'il y ait une adéquation entre ce que nous, éducateurs,
23:47 ce que nous enseignons et ce que nous attendons de l'apprenant de demain.
23:53 De temps en temps, on a encore l'impression,
23:55 heureusement, on est en train de parler au niveau secondaire
23:57 comme supérieur de cette professionnalisation,
24:00 parce qu'à un moment donné, on a eu des enseignements tellement théoriques
24:03 que quelqu'un qui avait fini son cursus scolaire
24:06 pouvait simplement vous dire, je suis titulaire d'une licence.
24:09 Être titulaire d'une licence sans être capable de faire quelque chose,
24:14 c'est que vous n'êtes pas capable d'entrer et d'être productif.
24:20 Vous n'êtes pas fixé au sol et vous ne pouvez pas être productif pour l'association.
24:25 Professionnalisation comme première chose.
24:28 Nous avons parlé de créativité, la créativité au niveau africain.
24:33 Qu'est-ce que c'est même que cette créativité dont on parle ?
24:36 Regardez, nous sommes dans un contexte, nous savons que nous avons un problème.
24:40 Je prends le problème des poubelles.
24:42 Vous êtes partis de chez vous ce matin, n'est-ce pas ?
24:45 Est-ce que vous pouvez faire 200 mètres sans voir des tas d'immondices ?
24:49 Comment résoudre le problème des poubelles ?
24:52 Est-ce qu'on ne peut pas nous se dire qu'il n'y a plus ceci ?
24:56 Peut-être que les gens se mettent ensemble, qu'on trouve un moyen de ramasser.
25:00 En fait, je veux dire des solutions qui viendraient de nous.
25:03 Et je parlerais également de l'économie de marché.
25:06 Donc on parlait depuis les années d'avant, les indépendances.
25:10 Les problèmes de l'Afrique.
25:12 Il y a un pays qui produit de l'huile d'arachide.
25:16 Un pays qui produit du maïs.
25:18 Un pays qui produit du plantain.
25:20 Au niveau du camp, nous pouvons déjà, au moins au niveau africain,
25:24 avoir la résolution à nos problèmes, avant de nous tourner vers l'étranger.
25:29 Vous disiez, chez nous, de quoi transformer l'ordure en orduleur.
25:35 Encore que même cette ordure peut se transformer en compost
25:40 et nous donner un engrais naturel pour que nous ayons un meilleur plantain,
25:45 de meilleurs oranges.
25:46 Utilisons ce que nous avons pour pouvoir améliorer notre quotidien.
25:52 Pour revenir sur Poubelle, tout à l'heure, et la créativité,
25:57 juste un petit rappel, c'est le nom de quelqu'un.
26:00 Monsieur Poubelle.
26:02 Il a eu juste le génie de mettre des corbeilles,
26:06 désormais, c'était en France,
26:09 de mettre à disposition des corbeilles dans lesquelles on mettrait les détritus.
26:14 Et en son hommage, en son honneur, on a dit, on a appelé ça Poubelle.
26:19 Donc la Poubelle, c'est un hommage à quelqu'un qui a été créatif.
26:24 Et on peut donc avoir ici chez nous des exemples comme ça.
26:27 On a eu Ayawundé Kamden Jérôme,
26:32 c'est un homme en blanc à doigts,
26:35 des gens qui ont décidé d'améliorer l'environnement
26:39 simplement en allant trouver autour d'eux des choses importantes.
26:43 Merci d'être venu partager avec nous le fruit de vos réflexions.
26:49 Quand une poète romancière cesse dans la réflexion,
26:55 la ponctuation varie.
26:58 Est-ce qu'on ponctue différemment,
27:01 qu'on soit en poésie, dans le roman ou dans une œuvre de réflexion ?
27:05 Je dirais d'emblée que la ponctuation varie.
27:09 Dans mes recueils de poèmes, je me laisse souvent aller
27:13 dans vraiment une écriture automatique.
27:16 Là, dans le cadre de l'essai, comme c'est quelque chose de scientifique
27:19 qui m'a demandé beaucoup de lecture pour pouvoir y arriver,
27:23 on fait attention à chaque mot,
27:26 on fait attention à chaque signe de ponctuation
27:29 parce qu'il a une valeur très très précise.
27:32 On n'est plus là dans l'imaginaire, dans le domaine de la fiction.
27:36 On n'est plus dans la fantaisie.
27:38 Là, on rentre dans un domaine purement scientifique.
27:41 Une virgule, c'est une virgule, un point, c'est un point.
27:45 Ici, c'est le point ou le point à la ligne ?
27:48 Je crois que c'est un point-virgule parce que la suite arrive.
27:52 Est-ce que c'est un coup d'essai ?
27:54 Coup de maître ?
27:56 À vous de juger, chers téléspectateurs.
27:59 C'était Ponctuation sur la SIR TV.
28:01 Des lectures à tous.
28:03 [Musique]