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00:00 Deux mois après la mort de Naël et les violences qui ont suivi dans de nombreux quartiers partout en France,
00:04 vous recevez ce matin Marie-Rouarche Franck-Reynald, le maire de Pessac,
00:07 une des communes touchées dans la métropole bordelaise.
00:09 Bonjour Franck-Reynald.
00:10 Bonjour Marie-Rouarche.
00:11 C'était donc dans la nuit du 29 au 30 juin dernier, dans trois quartiers de votre ville, un pic de violence.
00:17 Deux mois plus tard, est-ce qu'on peut dire que la situation est apaisée aujourd'hui dans ces quartiers ?
00:22 Elle a fort heureusement été apaisée dès le lendemain, puisque cette nuit a été tragique,
00:28 parce qu'elle a été émaillée de nombreuses violences et de destructions d'importance,
00:33 mais fort heureusement elle a été unique.
00:35 Nous avons diligenté un certain nombre de médiateurs, plus de 30 médiateurs,
00:40 qui sont déployés sur les quatre ou cinq nuits qui ont suivi,
00:43 et qui ont pu apaiser l'émotion sur le moment qu'ils pouvaient se manifester,
00:48 et éviter qu'il puisse y avoir un engrenage de violence qu'on a pu connaître dans certaines autres villes.
00:53 Est-ce que quelque chose a changé dans les quartiers ?
00:55 Vous parlez de ces médiateurs qui ont été déployés, est-ce que vous avez mis en place des actions spécifiques depuis cette fin juin ?
01:02 L'été ensuite est un moment d'apaisement.
01:05 Il y a un certain nombre de départs, de départs en vacances, de personnes qui ont quitté ces quartiers.
01:10 L'émotion a été grande.
01:12 Les habitants que j'avais invités dès le lendemain des émeutes à manifester leur réprobation,
01:19 le fait de ne pas simplement mettre sur de l'indifférence ou la peur,
01:22 mais de montrer que les adultes doivent aussi occuper le terrain, l'espace public,
01:26 pour montrer qu'ils ne sont absolument pas d'accord avec ce qui se passe,
01:29 et ne pas laisser non plus l'espace public comme le lieu de la confrontation entre la police et les émeutiers.
01:38 Mais c'est le lieu de l'expression citoyenne,
01:41 le lieu où les adultes aussi doivent reprendre la parole,
01:44 reprendre en quelque sorte un peu le pouvoir et l'autorité, ce terme dont on parle beaucoup,
01:48 notamment vis-à-vis des jeunes.
01:49 - Mais est-ce que ces pics de violence sont des symptômes que la politique de la ville,
01:53 les politiques mises en place dans les quartiers, sont en échec aujourd'hui ?
01:56 - Je ne pense pas. Je pense que ce ne sont pas les politiques de la ville.
02:00 Parce que les politiques de la ville ont concentré depuis des décennies beaucoup de moyens,
02:03 et à Pessac comme ailleurs d'ailleurs.
02:05 Et moi je réfute l'argument qui consisterait à dire que ces quartiers auraient été abandonnés.
02:11 En revanche, je pense que un certain nombre de valeurs ont été effectivement laissées un peu de côté,
02:17 en les laissant, je dirais, à l'exclusif développement qui pourrait être celui de l'école.
02:23 Et l'école ne peut pas tout faire.
02:24 - Alors quel type de valeurs, Franck Renaud ?
02:25 - Les valeurs, je pense que le respect, l'autorité, le mérite également,
02:30 la certitude aussi bien de la récompense lorsque justement il y a le mérite et les résultats qui vont avec,
02:36 mais également la certitude de la sanction lorsqu'il y a des comportements déviants,
02:39 et qu'on ne soit pas toujours dans la culture ni de l'excuse,
02:41 ni le fait de considérer qu'on doit être à part.
02:44 Et l'intégration aujourd'hui dans l'ensemble de notre société fait problème.
02:50 Il y a une intégration qui n'est pas suffisante.
02:52 Et je pense que c'est quelque chose aujourd'hui qui est admis de manière assez générale.
02:55 - Mais à votre échelle de maire de la commune de Pessac,
02:58 comment est-ce que vous pouvez œuvrer pour ramener ces valeurs que vous évoquez dans les quartiers de votre ville ?
03:02 - Alors comme je le disais, les moyens ont été mis et sont mis sur l'ensemble des équipements publics,
03:09 sur les moyens donnés aux associations, aux centaures socios, aux associations sur l'ensemble de ces quartiers.
03:14 Ça c'est quelque chose qui était déjà fait, qui continuera d'être fait,
03:17 parce qu'il ne faudrait pas tirer prétexte de ces émeutes
03:21 pour sanctionner l'immense majorité de jeunes qui n'ont absolument pas participé à ces émeutes.
03:26 Donc il faut qu'on continue.
03:28 Je pourrais le développer tout à l'heure, mais on doit le faire et on va le continuer de le faire.
03:31 On a des équipements publics d'importance sur ces quartiers,
03:36 mais également, il nous faut, une fois que les moyens sont là, et ils le sont, et continueront de l'être,
03:42 il nous faut pouvoir réinvestir l'espace public en collaboration avec les autres institutions,
03:46 et avec les familles, avec les parents, avec je dirais l'ensemble de la communauté éducative.
03:50 Il faut que nous puissions témoigner auprès des enfants
03:53 qu'il y a des choses qui ne peuvent pas être admises dans une société organisée
03:58 et dans une société républicaine, laïque, telle que la nôtre.
04:01 - Franck Rennal, le maire de Pessac, est notre invité ce matin sur France Bleu Gironde.
04:05 Et vous pouvez aussi prendre la parole dès maintenant.
04:07 Vous nous dites, selon vous, justement, qu'est-ce qu'il faudrait améliorer dans ces quartiers
04:10 après les violences causées deux mois après la mort de Naël.
04:13 Vous prenez la parole maintenant, 0556 19 10 10 sur France Bleu Gironde.
04:17 - Franck Rennal, vous avez été reçu à l'Elysée après ce pic de violences,
04:20 avec d'autres maires de communes touchés.
04:22 Et à cette occasion, Emmanuel Macron a dit qu'il faut réfléchir à l'après.
04:25 Alors on y est, dans l'après ? Est-ce que les solutions émergent déjà ?
04:29 Vraiment, concrètement ?
04:31 - Les solutions, comme je vous le disais, les solutions de mon point de vue.
04:35 Et du point de vue de beaucoup de maires qui sont exprimés devant Emmanuel Macron.
04:40 Alors, tous les maires ne disaient pas la même chose.
04:42 Mais certains, avec lesquels j'étais parfaitement en accord, disaient
04:45 il nous faut reparler de, justement, l'intégration républicaine, le mérite républicain,
04:50 l'ascenseur social que doit constituer l'accès par l'école.
04:53 Et nous avons, sur Pessac, mais ailleurs également, nous avons des arguments.
04:57 Nous avons un corps enseignant qui est très mobilisé,
04:59 qu'il nous faut relégitimer, vis-à-vis notamment des parents.
05:01 Ça n'est pas vrai d'ailleurs que dans les quartiers politiques de la ville.
05:04 C'est vrai, je pense, un peu partout.
05:06 Il peut y avoir, je ne dirais pas un mépris,
05:10 mais il pourrait y avoir une non-reconnaissance à la juste valeur
05:13 que constitue le corps enseignant.
05:15 Et il nous faut redonner cette autorité.
05:18 L'instituteur, c'est un mot maintenant qui est un peu suranné,
05:20 mais le professeur des écoles, la maîtresse, on va dire, ou le maître,
05:23 doivent être relégitimés aux yeux des enfants.
05:27 Et c'est vrai dans le primaire, c'est vrai aussi au niveau du collège.
05:30 Ce sont des âges qui sont charnières, l'entrée dans l'adolescence.
05:33 Et on voit bien d'ailleurs, à travers certains jeunes
05:35 qui ont pu être identifiés dans les émeutes,
05:39 qu'il y a là un moment qui peut être particulièrement fragile
05:42 dans la vie des adolescents.
05:43 Et c'est là que le rôle de l'école, le rôle des parents,
05:46 doit être véritablement renforcé.
05:48 - Fr. Crenel, on a entendu ce matin un de vos adjoints sur France Bleu Gironde
05:51 parler des regrets qu'ont exprimés certains jeunes.
05:53 C'est effectivement des services publics pour beaucoup
05:55 et pris pour cible, notamment dans le quartier de Sèges, pardonnez-moi,
05:58 qui portent d'ailleurs toujours aujourd'hui les stigmates de ces violences.
06:02 Kevin Blondel, notre reporter, a rencontré hier une habitante du quartier de Sèges.
06:07 Maryse, elle est membre du comité de quartier et elle a un message pour vous.
06:10 - Je dis qu'il faut se dépêcher pour remettre en état
06:13 parce que ça donne vraiment une mauvaise image.
06:15 Rien n'a changé, rien n'a été fait.
06:17 Rien n'a été réparé, c'est resté dans l'état.
06:20 Apparemment, il y a eu des constatations, des dégradations,
06:23 mais tout est resté comme ça et franchement, c'est minable.
06:26 Ça ne donne pas envie, le quartier.
06:28 Déjà qu'il n'était pas terrible, ça dévalorise encore un peu plus.
06:31 C'est quand on voit ça, on n'a vraiment pas envie de venir.
06:34 Ils ont mis des barricades pour cacher un peu,
06:36 mais on n'a pas commencé à faire quoi que ce soit.
06:39 - Est-ce que vous pouvez expliquer ce matin, Franck Renal, à Maryse,
06:41 qui habite au quartier de Sèges, pourquoi est-ce qu'aujourd'hui
06:44 on voit encore ces tôles brûlées, ces dégradations ?
06:48 - Alors, il y a une raison technique, qui est tout simplement celle
06:50 que les expertises, parce qu'on est sur le centre commercial de Sèges.
06:54 Il y a eu des incendies aux deux extrémités.
06:57 Structure métallique de l'ensemble du bâtiment,
06:59 un bâtiment qui est tout en longueur, mais structure métallique commune,
07:01 avec aujourd'hui des experts, des experts en haussature de bâtiment,
07:05 en ingénierie, véritablement de construction,
07:07 qui sont en train de déterminer s'il ne faudra pas détruire
07:10 la totalité du centre commercial pour le reconstruire,
07:12 du fait de la fragilité de la structure elle-même.
07:15 Donc c'est le bâtiment lui-même qui aujourd'hui l'impose,
07:18 et je pense qu'il ne faudrait pas non plus,
07:20 et j'entends ce que dit Maryse, mais je pense qu'il faut maintenir les services,
07:23 c'est ça notre priorité, notamment vis-à-vis des commerçants,
07:25 les services publics, mais également les services commerciaux.
07:27 Mais il ne faut pas non plus imaginer qu'on va, en deux mois d'été,
07:31 effacer ce qui s'est passé pendant une nuit de meute,
07:34 même si elle a été unique, elle a été intense,
07:36 et ce sont plusieurs millions d'euros de dégâts qui doivent être réparés.
07:40 Donc c'est quelque chose, je pense, il ne faut pas le laisser en état,
07:43 c'est une évidence, mais il ne faudrait pas non plus considérer que,
07:46 allez, on va tout effacer et on va recommencer comme si de rien n'était.
07:49 Si vous aussi vous avez été touché par ces dégâts,
07:53 dans des quartiers, dans le département de la Gironde,
07:56 suite à la mort de Naël, avec ces émeutes qui ont peut-être touché votre quartier,
08:00 venez témoigner ce matin, venez nous raconter,
08:02 et puis dites-nous, qu'est-ce qu'il faudra améliorer dans ces quartiers
08:04 après ces violences que vous avez peut-être constatées,
08:07 05 56 19 10 10, vous pouvez témoigner en direct sur France Bleue Gironde ce matin.
08:11 La ville de Pessac a rapidement réorganisé les services touchés
08:15 après ces dégradations, notamment ceux proposés dans la Maison France Service.
08:18 Est-ce qu'on peut imaginer que ces services vont revenir dans le quartier,
08:22 dans un avenir plus ou moins proche ?
08:24 On ne sait pas l'imaginer, c'est une certitude.
08:26 C'est un engagement que j'ai pris vis-à-vis des habitants,
08:30 j'ai rencontré Maryse et les membres du comité de quartier,
08:32 j'ai rencontré des habitants, et ça a été un engagement dès le lendemain.
08:36 C'est de faire en sorte d'abord d'assurer la continuité du service,
08:38 la plateforme des services, la Maison France Service dont vous parliez,
08:41 a accueilli l'an dernier 9 000 personnes.
08:43 C'est quand même considérable, et c'est un service qui est utile,
08:46 utile à toute la population.
08:48 Nous l'avons réinstallé au sein de l'hôtel de ville,
08:51 fort heureusement grâce à la dématérialisation de toutes les démarches,
08:54 on a pu récupérer la totalité des dossiers,
08:56 même ceux qui avaient été brûlés, je dirais, les dossiers papiers ne nous ont pas manqué.
08:59 Mais il faut pouvoir réinstaller, et nous sommes en discussion avec Domofrance
09:03 pour pouvoir disposer d'un nouveau local, de nouveaux locaux
09:06 qui seraient accessibles au cœur de Sège,
09:08 pour pouvoir réinvestir complètement ce service public.
09:11 C'est vrai pour la Maison France Service, c'est vrai pour La Poste,
09:13 mais ce sont vrais également pour les services commerciaux,
09:16 qui font défaut aujourd'hui.
09:17 Un boulanger est obligé de fermer, une épicerie est obligée de fermer,
09:20 la caisse d'épargne était intégralement brûlée.
09:22 La Poste, je le disais, est obligée désormais d'aller chercher son courrier ou ses mandats,
09:26 ou de faire les opérations courantes que La Poste offre, la banque postale,
09:29 est obligée d'aller les faire dans un autre quartier.
09:31 Donc toute la population est aujourd'hui impactée par ça.
09:34 Un restaurant, un restaurant asiatique, qui venait d'ouvrir trois mois auparavant,
09:37 qui a été également détruit.
09:38 C'est quand même toute une vie locale qui s'est retrouvée fragilisée,
09:41 et dont il nous faut assurer maintenant le maintien.
09:43 Et je rencontre l'ensemble des commerçants le 12 septembre prochain,
09:46 pour faire le point sur les démarches assurancielles.
09:48 L'État, qui a dit qu'il compléterait ce que les assurances ne pourraient pas donner,
09:52 et puis la mairie, évidemment, qui doit assurer non seulement l'assistance,
09:56 mais également les possibilités de réinstaller ses services,
09:59 ses activités sur le quartier.
10:01 - Et vous recevez la visite du préfet Étienne Guyot dans le quartier de Sèges le 19,
10:04 signe que l'État est à vos côtés.
10:06 - Oui, et en plus la nouvelle préfète déléguée à la sécurité, à l'égalité des chances.
10:09 - Signe que l'État est à vos côtés dans ces démarches.
10:11 - Oui, tout à fait.
10:12 Monsieur le préfet Guyot est venu sur Pessac voir les dégâts,
10:16 dès le lendemain matin, et nous a assuré de son soutien.
10:20 Et il n'a pas failli, je dirais, dans ce soutien depuis lors.
10:23 - Merci beaucoup, Franck Renal, maire de Pessac, d'avoir été avec nous ce matin,
10:27 pour parler des suites de ces violences,
10:29 qui ont émaillé les nuits de la fin du mois de juin,
10:32 après la mort de Naël Ananter.

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