Mardi 27 juin 2023, SMART BOURSE reçoit Laurent Saint-Aubin (Gérant actions immobilier Europe, Sofidy)
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00:09 Et nous enchaînons à présent avec marché à thème, le dernier quart d'heure thématique de Smartbourse,
00:15 un quart d'heure thématique consacré aux foncières cotées,
00:18 une thématique d'investissement qui va être décryptée par Laurent Saint-Aubin.
00:22 Bonjour Laurent Saint-Aubin.
00:23 Bonjour Nicolas.
00:24 Bienvenue sur le plateau de Smartbourse, vous êtes gérant action immobilier Europe chez Sofidi.
00:30 Alors expliquez-nous, le premier semestre est presque terminé,
00:33 quel bilan peut-on tirer des performances boursières des foncières dans un contexte,
00:38 rappelons-le, de hausse des taux qui n'est pas toujours bénéfique au secteur immobilier ?
00:43 On va déjà rappeler 2022, un peu plus de 30% de baisse des foncières cotées
00:48 qui sont effectivement très corrélées aux taux
00:51 et donc dans un climat de changement d'air sur les taux, les foncières ont baissé.
00:56 2023, ce n'est pas vraiment pour l'instant le rebond, on oscille entre 0 et -10
01:04 parce que le marché a été déçu par le report des anticipations de détente des taux par les banques centrales.
01:13 On n'attend plus de baisse des taux aux États-Unis avant le mois de septembre ou d'octobre
01:19 et de baisse des taux en Europe de la part des banquiers centraux avant janvier ou février 2024.
01:25 Donc il y a un décalage de six mois qui pèse sur le secteur.
01:29 Donc la performance boursière des foncières cotées montre un certain attentisme
01:36 vis-à-vis d'un environnement de taux ou d'un environnement macro ?
01:41 Le marché est partagé. D'un côté, vous avez des valorisations qui sont extrêmement basses,
01:47 vous avez 40% de décote sur les actifs net réévalués, ce qui veut dire à peu près, compte tenu de l'effet de levier,
01:54 25% de perspective de baisse de la valeur des actifs, ce qui est quand même considérable.
02:00 Donc c'est un niveau qui n'a pas été vu depuis 2008. C'est un secteur qui est très vendu par les investisseurs.
02:08 Donc le jour où il y aura un rebond, il sera très fort et très violent.
02:12 Donc ça, c'est plutôt positif. On est plutôt confortable sur les valorisations.
02:18 Là où on l'est moins, c'est effectivement sur le fait que la croissance ralentit, mais pas autant qu'attendu,
02:24 et que l'inflation baisse, mais pas aussi vite que prévu. Donc on est dans un environnement
02:30 où finalement, on ne sait pas où les taux vont se stabiliser, ce qui a un effet très fort sur le marché de l'investissement.
02:38 Les transactions sur le marché physique ont reculé de 60% au premier trimestre.
02:44 Et les transactions sur le marché physique, c'est un peu le juge de paix qui permettra de dire
02:49 si cette décote de 25%, elle est trop forte, ce que je crois, ou finalement conforme à ce qui va arriver.
02:57 — Mais quand on regarde l'activité des grandes foncières cotées, on voit un recul de l'activité sur ces derniers mois,
03:03 que ce soit sur ces derniers semestres ou même en 2022 ?
03:05 — Non, pas de recul de l'activité. Une activité locative plutôt positive avec l'effet de l'indexation.
03:13 Les loyers, les foncières, c'est un moyen de se protéger contre l'inflation puisque les loyers sont indexés.
03:20 — Oui, bien sûr.
03:20 — Un bon rebond des foncières de commerce qui s'est confirmé, qui ont retrouvé leur niveau d'activité pré-COVID.
03:29 Mais après, les 3 autres segments qui sont le logement... Le logement souffre de son côté proxy des taux d'intérêt.
03:39 — Bien sûr. — Le bureau souffre d'interrogations existentielles...
03:43 — Sur l'avenir du travail. — ...qui ne sont pas prêts de s'arrêter. Et les secteurs de valeur de croissance,
03:49 par exemple la logistique, qui était déjà valorisée très cher, souffrent logiquement de la montée des taux,
03:56 alors que leurs niveaux d'activité sont très bons. On a un phénomène de restockage, par exemple,
04:01 de la part des industriels européens, qui favorise la logistique.
04:05 — Donc on a une sorte de paradoxe entre la performance boursière de ces actifs et l'activité réelle des entreprises
04:12 qui constituent ces actifs. — Alors paradoxe pour l'activité, moins paradoxal pour la situation bilancielle.
04:21 Les foncières sont des sociétés qui ont l'habitude de s'endetter. Elles financent leurs travaux de rénovation,
04:30 leurs politiques d'acquisition avec de la dette. Le taux d'endettement des foncières est de l'ordre de 40% aujourd'hui.
04:37 — Et donc là, ça leur coûte beaucoup plus cher. — Elles ont profité de la période extraordinaire de taux négatifs
04:43 pour être très actives sur les marchés financiers, allonger la durée de leur dette et abaisser le coût moyen de leur dette.
04:50 Mais petit à petit, au fur et à mesure des tombées d'échéances, le coût de la dette va augmenter.
04:55 Et il y en a un certain nombre, pas la majorité. Les foncières sont plutôt solides financièrement.
05:01 Mais il y a quelques exceptions, en particulier en Scandinavie, où vous avez des foncières
05:06 avec des niveaux d'endettement très élevés et qui s'accroissent à mesure que les valeurs d'actifs baissent.
05:10 Donc ça, c'est un... Les foncières très endettées, il faut pas y aller.
05:15 — Ce qui pose la question de l'autre côté, de la capacité à faire passer des hausses de prix, du pricing power, finalement, de ces sociétés.
05:22 Alors avec aussi, effectivement – vous l'avez rappelé – le sujet des valorisations des actifs détenus par les foncières,
05:29 pour voir effectivement comment sélectionner une foncière qui pourrait un peu mieux tirer son épingle du jeu dans un contexte plus complexe.
05:37 — La question du pricing power est assez simple. Quand vous détenez un actif immobilier rare où la demande est supérieure à l'offre,
05:45 vous avez cette capacité de passer l'indexation, de la maintenir quand le bail arrive à expiration et même d'aller au-delà.
05:52 Donc vous avez certains segments où ça fonctionne à plein, la logistique urbaine, le stockage pour les particuliers,
06:00 où on a des hausses de loyers qui atteignent 10% par an. — D'accord. Le stockage pour les particuliers, la pièce en plus, quoi.
06:09 — Donc ça, c'est un secteur qui est pas réglementé, où il y a une demande qui est très supérieure à l'offre, où il y a un fort retard de l'Europe
06:15 par rapport aux États-Unis, qui est un secteur très intéressant. Vous avez aussi dans les secteurs les plus traditionnels
06:21 une bonne performance des centres commerciaux de destination. — D'accord.
06:26 — Les très grands centres sur lesquels on a des millions de visiteurs. — Donc ceux où on va passer la demi-journée, voire la journée.
06:33 C'est ce qu'on appelle un centre commercial de destination. — Oui. Ou alors les centres de flux, ceux dans lesquels on est forcé de passer
06:38 quand vous prenez l'avion, vous êtes forcé de passer dans un centre commercial. — D'accord. Bien sûr.
06:42 — Quand vous allez prendre le RER au Forum des Halles, vous êtes forcé de passer dans le centre d'Unibay, qui affiche quand même
06:49 plus de 50 millions de visiteurs par an. Donc ça, c'est des centres qui sont incontournables pour les marques et où les hausses de loyers
06:55 se font sans problème. Le bureau de cœur central des affaires résiste bien. Et tout ce qui n'est pas ce que je viens de décrire, par contre, souffre.
07:05 — Oui, parce qu'on disait effectivement que les loyers sont indexés sur l'inflation. Encore faut-il avoir les clients qui acceptent
07:11 ces hausses de loyers supplémentaires. Et c'est là où on voit le pricing power, même lorsque le cadre réglementaire
07:19 permet automatiquement normalement une hausse de prix. — Alors à court terme, mécaniquement, les hausses de prix sont passées.
07:25 Il n'y a pas de problème. Par contre, quand le bail arrive à terminaison, le locataire peut demander un retour en arrière
07:35 de son niveau de loyer sans partir. Donc ça, c'est quelque chose qui se pose particulièrement dans le domaine des bureaux,
07:42 où vous avez des locataires qui veulent moins d'espace et des loyers plus faibles. Donc c'est la double peine.
07:49 — Donc l'immobilier de bureau, aujourd'hui, c'est quelque chose qu'on regarde avec prudence ? — Oui. C'est le mot « prudence ».
08:00 — C'est le mot. Bon. Et alors effectivement, quand on regarde ce premier semestre de performances,
08:06 à quoi est-ce qu'on peut s'attendre pour le reste de l'année ? Effectivement, quand on voit des prévisions,
08:10 que ce soit des prévisions des analystes, des économistes ou ce que nous disent les banques centrales sur l'environnement
08:16 de taux élevé dans lequel on va rester, il faut s'attendre à ce que ce soit une année encore en demi-teinte
08:22 pour les performances des foncières cotées. — Alors j'ai pas de boule de cristal. — Bien sûr. Oui, oui, oui.
08:30 — Le secteur fonctionne traditionnellement par explosion de valorisation. Donc au moment où on aura vraiment l'impression
08:39 que l'inflation cœur ralentit et va se rapprocher de la limite sainte des 2%, que les banques centrales vont arrêter de monter les taux,
08:52 ça sera un moment très très très important, un pivot. — Bien sûr. — Encore une fois, ça doit s'accompagner de 2 choses.
08:59 La première, c'est qu'on ait une reprise des transactions. On a un certain nombre d'actifs qui sont en vente, là, actuellement.
09:07 Il y a eu un rebond des mises en vente. Encore faut-il que les transactions se réalisent.
09:12 — C'est ça, parce que là, on a effectivement des actifs mis en vente, mais avec des prix peut-être toujours élevés.
09:20 Et du coup, un marché qui est un peu figé. — Il y a un écart entre les attentes des vendeurs et les attentes des acheteurs.
09:26 — Et il n'y a pas eu de pales l'un vers l'autre pour le moment. On est toujours dans ce...
09:29 — On a eu quelques transactions, mais qui sont pas forcément significatives. On a eu quand même des transactions sur le résidentiel en Allemagne.
09:37 On a Hamoundi, qui a annoncé un programme de cession de bureaux d'1,5 milliard en Europe. Donc on a des choses qui, pour l'instant,
09:45 n'ont pas abouti. Puis le troisième élément, qui est quand même important, c'est que... Est-ce que les banques vont continuer de financer l'économie ?
09:54 Les banques sont plus fragiles qu'avant. Les dépôts à vue ont tendance à se réduire parce que les particuliers avisés peuvent aller les placer
10:06 en dépôts court terme. — Bien sûr, oui. — Donc les dépôts à vue coûtent plus cher. En même temps, on voit quand même que la conjoncture
10:14 économique se dégrade. Donc ça donne pas forcément envie aux banques de financer à fond l'économie, ce qui pose aussi un problème
10:21 pour les secteurs endettés. Donc c'est les trois clés qui conditionnons un rebond qui, à mon sens, est inéluctable, compte tenu encore une fois
10:29 de la valorisation extrêmement faible d'aujourd'hui. — Un mot sur les valorisations. Effectivement, alors on voit que là, on est sur une période
10:35 un peu figée entre niveau d'attente entre vendeurs et acheteurs. Est-ce qu'une baisse des prix des actifs pourrait permettre un redémarrage
10:45 ou un rebond de la performance des foncières cotées ? — Les foncières cotées anticipent 25% de baisse des prix. Les indications qu'on a eues
10:57 sur les quelques transactions qui ont eu lieu, on est plutôt aux alentours de 8, 10%. Donc ça peut continuer un peu. Je dirais qu'à mon avis,
11:07 la fauchette réaliste, c'est une baisse des prix comprise entre 10 et 15%, ce qui implique un potentiel de rebond pour les foncières,
11:14 surtout dans un contexte où les taux rebaisseraient, qui est absolument tout à fait significatif.
11:22 — Merci beaucoup, Laurent Saint-Aubin, de nous avoir accompagné dans le dernier quart d'heure thématique de Smart Bourse.
11:27 Je rappelle que vous êtes gérant actions immobiliers Europe chez Sofidi. Merci beaucoup. Merci à vous également de nous avoir suivis.
11:34 Je vous rappelle que vous pouvez retrouver le replay de Smart Bourse sur bsmart.fr, que vous pouvez également nous écouter en podcast
11:41 sur toutes les plateformes de podcast. Et quant à moi, je vous donne rendez-vous demain à 12h30 en direct sur Bsmart. À demain.
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