• il y a 2 ans
Le 15 octobre, c'est la Journée Mondiale du Deuil Périnatal. En cette journée de sensibilisation, nous avons rencontré Sophie de Chivré, créatrice du podcast Au Revoir Podcast, qui nous a partagé quelques phrases à ne PAS dire à quelqu'un qui a perdu son bébé, même si l'intention n'est pas mauvaise. Elle nous explique pourquoi.

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Transcription
00:00 Quand on fait partie de l'antoine, d'une personne qui a perdu un bébé,
00:02 on est dans une position qui est quand même assez inconfortable, je dois bien l'avouer.
00:06 C'est un vrai exercice d'équilibriste de ne pas tomber dans la maladresse,
00:10 parce qu'on peut être très très vite maladroit et faire mal alors que c'est pas ce qu'on voulait faire.
00:15 [musique]
00:18 Bonjour, je m'appelle Sophie Deschivrets, j'ai 35 ans, j'habite à Caen en Normandie,
00:22 et je suis la créatrice d'En Revoir Podcast, le podcast qui porte les voix du deuil périnatal.
00:28 Là, je vais vous donner trois exemples de phrases qu'on a toutes et tous entendues,
00:32 qui ne seraient pas forcément malveillantes en tant que telles, mais qui peuvent faire beaucoup de mal.
00:36 Il y a le classique "vous êtes jeune, vous en aurez d'autres",
00:40 "t'es jeune, tu retomberas facilement enceinte" ou... Non, faut pas le dire.
00:43 On n'est pas en train de parler d'un objet qu'on a cassé et qu'on va pouvoir vite racheter.
00:47 On est en train de parler d'un bébé, et on est en train de faire le deuil d'une grossesse d'un enfant.
00:51 Il ne s'agit pas de le remplacer aussitôt.
00:54 Dites plutôt "est-ce que tu veux me parler de ta grossesse ? Si tu veux me parler de ton bébé, je suis là".
00:58 Parce qu'en plus, la personne en face de vous, peut-être qu'elle n'en aura pas d'autres.
01:01 Peut-être que la personne en face de vous, en plus, elle a déjà mis deux ans avant d'être enceinte.
01:06 Vous n'en savez rien. Donc voilà, pas deux, t'en auras d'autres.
01:09 La deuxième phrase qu'on n'a plus envie d'entendre, parce qu'elle crée des hiérarchies et des classements.
01:14 Ça s'est passé au second trimestre, ça aurait pu se passer plus tard.
01:17 Ça aurait été pire si tu avais perdu ton bébé en fin de grossesse.
01:21 J'exagère à peine. Encore récemment, il y a une personne qui m'a dit
01:24 "Moi, mon bébé, je l'ai perdu, il était vivant". Elle m'a dit "Mieux vaut maintenant que si ton bébé était plus âgé, en fait".
01:32 En gros, mieux vaut perdre son bébé à trois jours de vie plutôt qu'à quatre ans.
01:36 On n'a pas besoin qu'on nous rajoute des comparaisons déjà qu'on ne sent pas très légitimes.
01:40 Ça ne fait pas de bien du tout. Non, ça ne se fait pas. Jamais on dirait ça pour un deuil classique, en fait.
01:45 Pourquoi on dit ça pour un deuil périnatal alors qu'il s'agit d'un bébé ?
01:48 Dites plutôt "je te sens triste, je suis là pour t'écouter".
01:52 Il vaut mieux ouvrir la porte à ces émotions-là plutôt que chercher à les minimiser.
01:56 On est là pour l'écouter. C'est notre devoir de l'accueillir et de faire une place à ces émotions.
02:01 Il y a aussi quelque chose qui fait beaucoup de mal. C'est aller.
02:05 Ça fait trois mois. Secoue-toi un peu.
02:08 Là, ça fait quand même quelques semaines que tu es accouché, c'est bon, tu as fait ton deuil.
02:11 Non. Le deuil périnatal n'a pas de date de péremption. C'est l'affaire de toute une vie.
02:18 D'ailleurs, n'importe quel deuil, faire son deuil, ça voudrait dire que "paf, ça y est, c'est fini".
02:23 Le deuil périnatal, ça a des répercussions à court, moyen et long terme.
02:28 En fait, c'est comme si vous étiez en train de dire "bon écoute, c'est un bébé, c'est un tout petit deuil".
02:33 Ce n'est pas un deuil express parce que le bébé n'a pas vécu ou qu'il a vécu que quelques jours.
02:38 Si vous trouvez que la personne en face de vous, ça fait trois semaines qu'elle n'est pas sortie de chez elle
02:42 et que ça vous préoccupe, que ça vous inquiète, dites-lui plutôt
02:46 "écoute, je vois que tu restes beaucoup seule, peut-être que tu n'arrives pas à sortir, peut-être que tu n'arrives pas à aller te promener.
02:52 Est-ce que tu veux que je t'accompagne pour qu'on aille prendre l'air ensemble ? "
02:57 Ça, ça fait du bien.
02:58 En fait, en règle générale, ce qui fait du mal, ce sont les conseils non sollicités.
03:02 Tout ce qui crée un classement, qui nous enlève notre légitimité à être triste.
03:07 Mais la pire des maladresses, dans tous les cas, c'est quand même le silence.
03:11 C'est l'ami, par exemple, qui ne va donner aucun signe de vie, qui ne va même pas envoyer un petit message et qui va réapparaître six mois plus tard.
03:19 Si ça vous fait peur de vous confronter aux émotions d'une personne qui vient de deuil périnatal, je l'entends tout à fait.
03:24 Juste envoyer un petit message, comment te sens-tu ? Qu'est-ce que je peux faire pour toi ?
03:29 C'est déjà énorme, en fait. Ça brise la solitude qu'on traverse dans ce type de deuil.
03:34 Est-ce que tu as besoin que je t'emmène chez le médecin parce que tu es en postpartum et que peut-être que tu ne peux pas prendre ta voiture ?
03:40 Est-ce que tu as besoin que je vienne faire du ménage chez toi ? Est-ce que tu as besoin que je te fasse à manger ?
03:44 Voilà, prêter une oreille attentive ou proposer de l'aide concrète, c'est déjà quelque chose d'extrêmement soutenant.
03:50 Et on a juste besoin de ça.
03:52 [Musique]

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