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Viré pour avoir décrit la réalité des cités à Marseille dans Morandini Live? Un "médiateur" raconte comment il a été remercié "pour avoir trop parlé" ! - VIDEO

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00:00 Il y a quelques jours, le 23 mai dernier, en direct dans cette émission, on a eu un garçon.
00:04 Et alors je le dis d'autant plus spontanément que je l'avais dit à l'époque,
00:07 j'avais dit que j'avais apprécié son discours, qui est un discours très réaliste,
00:10 même s'il était inquiétant.
00:11 Il s'appelle Mohamed Benmedour, il est médiateur dans les quartiers nord de Marseille.
00:15 Il avait eu des propos très durs mais très réalistes sur la situation à Marseille.
00:18 Il nous disait "c'est un bordel monstrueux aujourd'hui à Marseille,
00:21 j'ai connu les fusillades quand il y avait le milieu marseillais,
00:26 mais aujourd'hui ça a changé, ça a laissé la place à autre chose.
00:29 On est entré dans les mœurs de se régler les comptes,
00:31 il nous dit également "dans notre quartier les policiers sont dépassés,
00:36 l'État est dépassé, tout le monde est dépassé".
00:38 Bonjour Mohamed Benmedour, merci d'être en direct avec nous.
00:41 Et c'est vrai, vous vous en souvenez, j'avais dit "bravo pour votre discours"
00:44 parce que c'est bien d'entendre dire les choses,
00:46 mais visiblement il y a eu des conséquences pour vous professionnellement.
00:50 Alors racontez-moi ce qui s'est passé.
00:52 – Oui bonjour Jean-Marc, je vous remercie de votre soutien.
00:56 Ce qui s'est passé en fait c'est que j'ai été en période d'essai durant un mois,
01:02 ma période d'essai s'est terminée vendredi
01:05 en tant que médiateur dans les quartiers nord de Marseille
01:08 pour la structure Adapte 13.
01:11 Entre temps, tous mes collègues ont été contactés par mon chef de service
01:16 pour savoir en fait ce que je valide sur le terrain,
01:19 il n'y a eu que des retours positifs.
01:21 Donc je suis reçu vendredi par le chef de service et le directeur adjoint de la structure,
01:27 représentant la directrice de l'Adapte 13,
01:30 et qui me dit "voilà, on fait un bilan de fin de période d'essai,
01:34 c'est concluant, on n'a que des bons retours émanant du terrain à votre égard,
01:42 mais on est très embarrassé,
01:43 on est très embarrassé parce que vous êtes intervenu à la télévision
01:48 en qualité de médiateur".
01:49 Je lui dis "ah bon ? Ce n'est pas la première fois que vous interviens dans les médias".
01:54 J'ai toujours donné mon opinion, mon point de vue sur le terrain,
01:58 et je n'ai jamais mentionné mon employeur à la télévision.
02:03 Après je ne suis pas un agent de services secrets,
02:07 je peux divulguer quand même ma profession,
02:10 donc c'est ce que j'ai fait.
02:12 Il me dit "non mais vous comprenez, c'est la même chose, c'est pareil,
02:15 là vous avez pris parti pour les habitants,
02:19 vous n'avez pas observé une neutralité,
02:23 surtout que maintenant l'organisme France Médiation,
02:28 qui gère en fait plus de 80 structures de médiation en Marseille,
02:32 va déposer un amendement,
02:34 un projet de texte de loi à l'Assemblée
02:36 pour faire reconnaître le métier de médiateur,
02:38 mais vous imaginez si demain une personne du RN est au courant de votre intervention,
02:45 elle va s'opposer au texte de loi, tatatui, patata, patata.
02:49 Ils ont aussi de surcroît remis la faute sur la préfecture
02:52 en disant que mon intervention avait dérangé la préfecture et France Médiation.
02:58 Or c'est faux.
02:59 Ce week-end, une personne avec une certaine conscience humaine,
03:05 qui fait partie d'une autre structure de médiation,
03:08 vient me voir et me dit "voilà, je te dis honnêtement moi-même,
03:11 ce qui s'est passé c'est que ma directrice de ma structure a contacté ta directrice
03:18 et a balancé ta vidéo chez Morandini pour dire qui est ce médiateur
03:26 et la directrice, lorsqu'elle a vu mon intervention chez vous,
03:30 a dit "ben c'est un médiateur de chez moi,
03:32 il va terminer sa période d'essai,
03:34 une fois que sa période d'essai sera terminée,
03:36 merci, au revoir, je serai remercié".
03:38 Et c'est ce qui se passe à l'heure actuelle.
03:39 Vous avez été viré vendredi parce que vous avez dit la vérité,
03:43 parce que ce que vous avez dit en plus,
03:44 vous n'avez pas du tout attaqué les services de la médiation,
03:47 au contraire, moi je trouvais très bien votre discours,
03:49 parce qu'il était réaliste et il montrait l'ampleur du travail que vous avez à faire.
03:52 C'est ça qui est dingue, c'est que vous avez fait un constat des lieux,
03:55 qui était de dire "la situation est grave, la situation est dangereuse sur le terrain
03:59 et nous notre boulot c'est d'essayer d'arranger ça".
04:01 C'est ça ce que vous avez dit, simplement.
04:03 Vous n'avez pas dit "la médiation ne sert à rien, on est des nuls",
04:07 vous n'avez jamais dit ça.
04:08 Et là je vois sur votre t-shirt visiblement, vous avez barré "médiateur".
04:11 Ah oui, parce qu'à l'heure actuelle,
04:14 comme me l'a mentionné le directeur adjoint de la structure,
04:17 il m'a dit "vous êtes blacklisté dans la médiation sociale à Marseille".
04:20 Donc symboliquement je montre que la médiation c'est fini pour moi.
04:23 Mais c'est jamais fini, parce que moi en dehors de mon travail,
04:26 je suis investi bénévolement,
04:28 j'aime mes quartiers, j'aime ma ville, j'aime mon pays,
04:31 donc je ferai tout pour servir la population, les habitants, donc je continue.
04:36 Dimanche, nous allons faire une marche au Vieux-Port
04:38 avec le collectif des familles des victimes
04:40 pour protester contre la violence qui se passe à Marseille.
04:43 Et dans la semaine, un comité de soutien est venu me soutenir
04:46 pour venir éventuellement manifester devant le siège de la table 13.
04:50 On ne lâchera pas la paire, on ne se laissera pas faire.
04:52 Puis moi je suis là quand j'interviens médiatiquement,
04:55 c'est pour montrer la réalité du terrain, moi je n'ai rien à gagner.
04:58 Et c'est tout, voilà.
04:59 Honnêtement, si la vraie raison c'est ça, c'est une honte, c'est honteux.
05:04 C'est un scandale même, si la vraie raison de votre licenciement,
05:07 parce que là on n'a que votre version pour l'instant,
05:09 si la vraie raison c'est parce que vous êtes intervenu pour dire la vérité,
05:12 c'est honteux Jean-Michel.
05:14 – C'est honteux parce que je pense qu'on a à tous les niveaux,
05:17 à toutes les strates politiques et administratives de ce pays,
05:20 des gens qui ont un problème avec le réel.
05:23 Le simple fait de dénoncer une réalité, ça fait de vous un extrémiste,
05:27 mais l'extrémiste n'est pas celui qui dit le réel, c'est le réel lui-même.
05:32 Et si on ne dénonce pas, si on ne met pas des mots sur le réel,
05:35 comment voulez-vous ensuite avoir une crédibilité pour agir dessus ?
05:39 Ça c'est la première chose.
05:40 La deuxième chose c'est qu'on vous a opposé Mohamed, l'argument de la neutralité.
05:44 Mais si vous étiez venu à l'émission de Jean-Marc Mordiné en disant
05:47 "la politique sécuritaire du gouvernant est magnifique,
05:50 elle procure des résultats fabuleux sur le terrain",
05:53 vous croyez qu'on vous aurait fait le reproche de la neutralité ?
05:55 Bien sûr que non !
05:56 Donc en fait on vous fait le reproche de la neutralité
05:58 parce que vous avez un discours à la fois réel,
06:00 mais comme le réel va à l'encontre de ce qu'on pense en haut lieu,
06:04 vous dérangez, c'est tout !
06:05 - Maurice Hidari ?
06:06 - Oui, toujours pareil, très calmement,
06:09 c'est machiavélique.
06:11 Dans le sens, Machiavel parlait de la parole du palais,
06:15 et on est en plein dedans.
06:17 C'est-à-dire que lorsque vous vous éloignez de la parole de la doxa de l'omente,
06:21 vous vous faites anéantir.
06:23 Moi ce qui m'intéresse, maintenant que je suis à la retraite,
06:26 j'ai beaucoup de plaisir à m'intéresser aux gens ordinaires.
06:29 Et je pense que la vérité viendra des gens ordinaires,
06:33 c'est-à-dire que ces gens qui ont cette forme de noblesse du cœur
06:38 liée au travail, au labeur...
06:41 - Mais aussi à la connaissance de la réalité.
06:43 C'est ce qu'a Mohamed et c'est sa force.
06:44 C'est la connaissance du réel.
06:46 Il ne parle pas de politique, il ne fait pas de politique.
06:48 L'idée juste, moi je suis sur le terrain au quotidien
06:50 et je vois à quel point c'est le bordel,
06:52 c'est le mot qu'il employait, c'est pour ça que je le remploie,
06:54 à quel point c'est le bordel, il faut qu'on se batte.
06:56 Mais on ne peut pas virer quelqu'un pour ça.
06:58 - Mais c'est vrai que je vous ai dit que c'est machiavélique
07:00 pour son premier but, c'est-à-dire ne pas s'écarter de la parole du palais.
07:05 - Martin Gargnon, là-dessus, rapidement.
07:07 - Oui, rapidement, je vais essayer d'être assez rapide.
07:10 Pour moi, de ce que vous dites, parce que je ne connais pas le cas,
07:12 puisque je n'étais pas à l'émission,
07:14 pour moi, vous êtes plutôt un lanceur d'alerte.
07:16 Et le problème, c'est qu'en France, et pas qu'en France,
07:18 lorsque vous dénoncez un problème, vous devenez le problème.
07:21 C'est ça qui est problématique.
07:22 Je vais vous dire une chose, en politique,
07:24 on en crève au quotidien de refuser de vouloir voir les choses
07:28 telles qu'elles sont dans la réalité sur le terrain.
07:31 Moi, je suis sur le terrain tous les jours,
07:33 et c'est justement cette volonté de ne pas vouloir voir les problèmes du réel
07:39 qui nourrit les discours et les solutions extrêmes.
07:42 Donc, au vu de ce que vous dites, visiblement,
07:44 il y a un lien de causalité directe entre les propos que vous avez tenus à l'antenne...
07:48 - Mais on va les appeler, on va les appeler pour avoir leur version.
07:52 - Les sollicitations pour votre travail sur le terrain,
07:54 et à mon sens, vous êtes plutôt un lanceur d'alerte,
07:56 et on a besoin de gens comme vous,
07:58 qui sont des capteurs de signaux faibles sur le terrain au quotidien,
08:01 pour construire collectivement des solutions efficaces.
08:04 - Estelle, rappelle-moi ça.
08:05 - D'abord, je trouve ça totalement anormal.
08:09 Ce gars, il a dit ce qu'il voyait,
08:12 et c'est à partir d'une réalité qu'on peut trouver des solutions.
08:15 En plus, on le met à la porte à un moment où on a
08:19 besoin d'encore plus de médiateurs
08:22 qui connaissent le contexte, qui connaissent les jeunes,
08:27 qui connaissent l'administration.
08:29 - On a besoin des deux.
08:31 - On a besoin aussi de médiateurs,
08:33 il n'y a pas que la police qui peut régler tout,
08:35 parce que lui, il est avec les adolescents,
08:37 c'est un travail de longue haleine,
08:39 et on a besoin de lui.
08:40 C'est une erreur tactique, en plus.
08:42 - Merci, Mohamed.
08:43 Mohamed, vous nous tenez au courant, bien évidemment,
08:45 parce que vous avez vu, on ne va pas vous lâcher au sens positif du terme.
08:48 Vous nous tenez au courant, bien évidemment,
08:50 s'il se passe des choses, et nous, on va appeler
08:52 du côté de la médiation pour savoir quelle est
08:54 leur version à eux, s'ils ont la même version que vous,
08:57 mais honnêtement, voilà, j'espère vraiment
08:59 que ce n'est pas ça. J'espère vraiment, parce qu'autrement,
09:02 c'est un scandale.
09:02 - J'espère qu'ils vous diront la vérité.
09:04 J'espère qu'ils vous diront la vérité, parce que, clairement,
09:07 c'est pas en monnaie ultraposante d'éliminer.
09:09 - Merci, Mohamed Benouidou, merci,
09:12 ex-médiateur, donc, des quartiers nord de Marseille.
09:15 Autre sujet, le harcèlement scolaire dont je voulais qu'on parle
09:18 aujourd'hui, l'annonce a été faite hier.

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