Anniversaire du Débarquement : Macron invoque-t-il l'histoire pour faire oublier la crise ?

  • l’année dernière
Parlons Vrai chez Bourdin avec Dimitri Casali, historien, auteur de “Histoire de l’armée française” (Editions Ring).

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##MIDI_ACTU-2023-06-06##
Transcript
00:00 Jean-Jacques Bourdin.
00:01 - Il est 12h13, nous recevons Dimitri Casali, historien, auteur de l'Histoire.
00:06 "Histoire de l'armée française", aux éditions Ring, Dimitri Casali.
00:10 Bonjour, merci d'être avec nous. - Bonjour.
00:12 - Je le disais, déplacement mémoriel, Emmanuel Macron.
00:15 On va dépasser le cas Emmanuel Macron.
00:18 Ce qui nous intéresse, c'est l'histoire du 6 juin 1944.
00:22 Aujourd'hui, Emmanuel Macron est à Colville-Montgomerie, dans le Calvados.
00:26 Colville-Montgomerie, 177 français y débarquèrent, le 6 juin 1944, dans le commando Kieffer.
00:35 C'est cela ? - Le fameux commando Kieffer, dont le dernier survivant, Léon Gauthier,
00:40 - On l'a vu, on l'a vu. - Voilà, est présent aux côtés d'Emmanuel Macron.
00:44 C'est le dernier survivant français du débarquement, quoi.
00:48 C'est quand même incroyable, un personnage haut en couleur.
00:51 Et c'est vrai que c'est un événement, pour moi, crucial aussi de l'histoire de l'humanité.
00:57 Il faut savoir que c'est quand même la plus grande opération amphibie de l'histoire de l'humanité.
01:04 - 150 000 soldats venus de 13 pays.
01:08 - En une journée, ils vont être débarqués sur les plages de Normandie, sur un front de 35 km.
01:13 Surtout, 5000 navires vont les soutenir, avec autant d'avions, 5000 avions.
01:20 Et c'est vrai que c'est une opération qui est réussie.
01:24 Alors, on parle toujours de massacre d'Omaha,
01:28 mais c'est un grand succès sur les cinq autres plages que sont les plages Juno, Swann, et tout.
01:35 C'est un succès total et incroyable dû à une opération d'intoxication Fortitude.
01:43 Les Allemands étaient persuadés que le débarquement aurait lieu
01:49 dans le Pas-de-Calais, donc beaucoup plus au nord.
01:51 - Donc, ils ont été surpris, ils ne s'y attendaient pas,
01:54 et les Alliés ont été chanceux.
01:57 Que s'est-il passé ce jour-là côté Allemands ?
02:00 - Incroyable. Il y a eu une chance incroyable.
02:02 Non seulement le grand Maréchal Rommel,
02:05 qui était le plus brillant de tous les stratèges,
02:08 même avec les Alliés confondus, c'était des types extraordinaires.
02:13 Et c'est lui qui avait dit que le sort de la Seconde Guerre mondiale
02:17 se jouerait sur ces plages du mur de l'Atlantique
02:20 et que ce serait la première journée, ce serait le jour le plus long
02:24 qui déciderait du sort de la guerre.
02:26 Le jour le plus long, c'est lui qui l'a inventé.
02:28 - C'est lui qui a parlé du jour le plus long ?
02:29 - Rommel, absolument.
02:30 Rommel était à Berlin pour célébrer l'anniversaire de sa femme,
02:34 et donc il est revenu crevé.
02:36 On l'a réveillé qu'à 10h du matin,
02:38 donc pratiquement le débarquement avait commencé à 0h15.
02:46 On va parachuter 26 000 hommes sur les bases arrières des lignes allemandes,
02:52 et qui vont être incroyables.
02:54 Et enfin, les 7 divisions, il y avait quand même 150 000 Allemands qui étaient prêts.
02:59 Eh bien la plupart des chefs étaient partis faire la noce à Paris,
03:02 et le chef de la 7ème division Panzer,
03:06 il était avec sa maîtresse à Paris.
03:09 - Il était avec sa maîtresse à Paris, oui d'accord.
03:11 Pendant que les Alliés débarquaient.
03:12 - Exactement.
03:13 - Et quant à Hitler, il a été prévenu en fin de matinée ?
03:15 - Oui, à la même heure que Rommel, à 10h du matin.
03:18 Parce qu'il s'était couché très tard, il avait écouté du matériel.
03:21 - Donc les Allemands ont pris beaucoup de retard, ont été surpris, et donc ont perdu.
03:26 - Alors ils se sont ressaisis dans un premier temps,
03:29 parce que c'est vrai que les historiens sont unanimes.
03:32 Si les 7 divisions allemandes, on leur avait donné l'ordre de contre-attaquer aussitôt,
03:39 il est très probable que le débarquement aurait été repoussé.
03:44 - C'était évident. - Aurait échoué.
03:45 - Parce que les chars allemands déjà étaient beaucoup, très supérieurs aux Sherman,
03:50 les Tigres et les Panthères.
03:52 Les corps, les 7 divisions allemandes étaient extrêmement bien entraînés.
03:57 Alors que là, les Américains et tout, on les avait entraînés,
04:00 mais c'est surtout les Britanniques et les Canadiens qui étaient mieux entraînés que les Américains.
04:06 - Oui. Est-ce que ce débarquement réussi a été la bataille décisive de la Seconde Guerre mondiale,
04:14 de la victoire des Alliés sur les nazis ?
04:16 - C'est la grande question. Ça, c'est rendez-vous à les historiens,
04:19 débat de cette histoire. - Oui, je sais, je sais.
04:21 - Parce qu'effectivement, tout le monde dit que le sort de la Seconde Guerre mondiale,
04:26 c'est jouer sur le front de l'Est, avec des batailles comme Stalingrad, bien sûr,
04:30 qui ont brassé pratiquement plus d'un million d'hommes.
04:33 Mais le débarquement, par son ampleur dont je vous ai parlé,
04:38 la plus grande opération amphibie et aéroportée de l'histoire,
04:43 pour l'instant, on n'a pas parachuté plus de 26 000 hommes, comme les Alliés l'ont fait,
04:49 a son importance, une importance évidente,
04:51 même s'ils vont mettre pratiquement deux mois à conquérir la Normandie,
04:56 et à un prix absolument très cher pour les populations civiles françaises,
05:00 puisque pratiquement 5 000 Français vont être tués durant les bombardements, surtout,
05:07 des villes complètement de Cherbourg, mais détruites à 99 %,
05:11 c'est pour ça que je pense qu'il faut quand même parler,
05:16 même si le front de l'Est était plus important, et dans l'Emmanuel Scolaire...
05:19 - De batailles décisives. - D'une bataille décisive, avec la bataille de Normandie,
05:23 qui va coûter quand même 100 000 hommes aux Alliés, en moins d'un mois,
05:27 donc on voit que les Allemands étaient extrêmement volontaires et dévoués pour repousser les Alliés,
05:35 mais aussi, c'est quand même notre histoire proche, notre histoire locale,
05:40 le président Macron va décorer Léon Gauthier tout à l'heure,
05:45 mais aussi les villes d'Avranches, c'est notre histoire, c'est l'histoire de France, le 6 juin 1944,
05:53 donc je pense qu'il faut quand même ne pas oublier de célébrer ce grand jour.
05:57 - Qu'on oublie, dans les écoles par exemple, est-ce qu'on oublie ?
06:01 - Oui, c'est mon grand combat, et je suis scandalisé que le 6 juin 1944 ne soit pratiquement plus appris
06:08 en classe de 3ème en particulier, au même titre que le 25 août 1944, c'est la libération de Paris,
06:14 ce sont des dates, et ces dates-là ne sont plus apprises, souvenez-vous, pour le 8 mai 1945,
06:19 on a fait un immense sondage auprès des jeunes pour savoir ce qu'éveillait le 8 mai 1945 auprès des jeunes,
06:25 et pas un a su répondre à cette question, s'il y a vraiment une montée de l'ignorance historique
06:31 auprès de nos enfants qu'il faut combattre, et je vous remercie de faire cette émission sur le 6 juin 1944,
06:36 en ce jour de grève, etc., on parle surtout d'autres sujets annexes,
06:41 non, il faut avant tout parler de notre histoire et de notre mémoire,
06:45 parce que c'est comme ça que ça nous permettra d'affronter l'avenir,
06:48 si on veut marcher vers le futur, il faut toujours retourner à ses racines.
06:52 - Bah évidemment, évidemment, donc quelques mots sur ces français qui ont débarqué,
06:58 parce que très peu de français ont débarqué. - 177.
07:00 - 177, ce commando Kieffer c'est tout ! - Et le commandant Kieffer...
07:04 - Sur 150 000 ! - Incroyable, bah oui, parce que...
07:07 - Pourquoi ? Il venait de Londres, évidemment, il était à Londres.
07:11 - Alors le général de Gaulle avait de graves problèmes avec Roosevelt surtout,
07:16 et Eisenhower, après ça s'est arrangé, mais il voulait pas de français dans le débarquement.
07:23 - Mais pourquoi ? - Parce que Roosevelt ne voulait supporter pas le général de Gaulle,
07:29 qu'il prenait pour un... - Il voulait peut-être que ça soit une victoire américaine, non ?
07:33 - Voilà, et quand même je tiens à dire que sur les 156 000 hommes qui vont débarquer,
07:37 99 000 sont anglo-britanniques, et il n'y a que 57 000 américains,
07:43 donc toujours grâce à leur soft power cinématographique,
07:47 ils font croire que ce sont eux qui ont remporté la victoire.
07:49 Certes, logistiquement, l'intendance et l'armement des bâtiments est américain,
07:54 mais heureusement qu'il y avait ces 100 000 anglo-britanniques,
07:56 et ces 177 français qui vont se rattraper, de toute façon, le 15 août 44,
08:02 où là il y a la première armée française qui débarque avec Delattre de Tassigny
08:07 et le maréchal Jumers en Provence, le débarquement de Provence du 15 août,
08:11 où là il y a 280 000 français, dont la moitié d'ailleurs sont l'armée d'Afrique du maréchal Jumain,
08:18 composée beaucoup de pieds noirs et de soldats maghrébins aussi,
08:24 il faut aussi leur rendre hommage.
08:26 - Bah évidemment, aussi leur rendre hommage, et même des soldats d'Afrique,
08:30 enfin d'Afrique subsaharienne ou d'Afrique, ou du Sénégal, évidemment.
08:36 Dimitri Casali, donc 177 qui était à Londres auprès de De Gaulle, le commandant Kieffer.
08:44 - Un héros, un héros ! - Oui c'est un héros !
08:48 - Ah oui, c'est un personnage en couleur fantastique, et tout, d'ailleurs avant de partir,
08:53 avant de débarquer, il dit à ses hommes "vous êtes 177, regardez-vous, dites-vous adieu,
09:00 je pense que la plupart de vous, vous allez mourir".
09:03 - Et alors ? - Et alors, bah y'en a qu'un !
09:06 Non, y'en a que 47 je crois qui sont morts, donc finalement...
09:10 - Il en restait 130. - Voilà, il en restait 130, et surtout...
09:14 Mais tous ont été blessés, pratiquement tous sur les 177 ont été blessés.
09:18 Donc on voit l'intensité des combats, ils ont, eux, on leur a confié la mission de libérer le casino d'Austréam,
09:26 et ils ont réussi bien sûr à... - Avec ce pont, mais je vois très bien le lieu.
09:32 - Voilà, le pont... - Pegasus, c'est ça ?
09:34 - Pegasus, c'est un peu plus loin, mais voilà. - Ah c'est un peu plus loin, Pegasus.
09:37 - Mais c'est vrai qu'ils se sont très très bien conduits, et après ils ont poursuivi dans les rangs de la première armée française,
09:45 et heureusement ça fait du bien, Léon Gauthier a cette phrase terrible, terrible, vous avez vu dans son interview,
09:50 où il dit "oui j'étais mal accepté après à mon retour à la paix civile parce que très peu de français avaient participé à la guerre".
09:58 - Oui. - Eh oui, il y avait eu que 400 000... - Comment très peu de français ? Et tous les français qui étaient résistants ?
10:04 - Voilà, il voulait dire par là qu'il y avait 400 000... - Dans les lignes allemandes ?
10:08 - Oui. - Derrière les lignes allemandes ? - Il y a eu 500 000, 400, 500 000 résistants,
10:13 mais par rapport aux 8 millions de combattants de la première guerre mondiale,
10:17 il voulait dire qu'il y en a très peu qui ont servi dans l'armée française frandise.
10:22 - Oui, à ce moment-là. - Oui, à ce moment-là. - Mais il y avait plus de...
10:24 - Oui, les autres étaient plutôt collaborateurs ? - Alors, ils étaient, pour dire... attentistes.
10:31 - Attentistes, oui, d'accord. Vous êtes gentil, Dimitri. - Attentistes, on l'a bien vu.
10:34 En avril 44, ils acclament Pétain à Paris, et le 25 août 44, c'est la descente des Champs-Elysées par le Rondeau-Gueule,
10:43 où tous les français sont résistants de la 25e heure aussi, il faut le dire, aussi.
10:49 - Mais l'armée française n'existait plus ? - Non, enfin, il y avait cette armée d'Afrique,
10:54 - Il y avait l'armée d'Afrique. - Voilà, avec le maréchal Juin, qui s'est...
10:57 et surtout, qui a triomphé à Garigliano, en Italie.
11:02 Là, les français étaient vraiment la grande victoire des alliés en Italie,
11:06 c'est le maréchal Juin qui l'a remporté à Garigliano, et ça, il faut le dire aussi, ouais, mais c'était souvent...
11:13 - C'est vrai parce qu'on parle beaucoup du débarquement en Normandie, mais très peu du débarquement en Provence.
11:18 - En Provence, jamais, pratiquement jamais. - Pratiquement jamais.
11:21 Et encore moins de cette campagne d'Italie avec Monte Cassino, Garigliano, qui sont quand même des batailles.
11:27 Et c'est pour ça que, comme vous le disiez tout à l'heure, beaucoup d'historiens pensent que tout s'est joué à l'Est, sur le front de l'Est d'ailleurs.
11:34 C'est l'armée soviétique qui a conquis Perler.
11:37 - Est-ce que ce 6 juin, ce débarquement n'a pas été mis en scène par les américains ?
11:42 Est-ce que ça ne fait pas partie du mythe américain ?
11:44 - Un peu, grâce à leur soft power cinématographique, c'est vrai que ces films magnifiques, que sont le jour le plus long et tout,
11:51 leur ont permis de tirer la couverture à eux.
11:54 Et ça c'est bien dommage, parce que c'est vrai qu'ils oublient souvent les britanniques, les français, mais les anglais, pareil.
12:01 Pour Dunkerque, les britanniques ne parlent jamais, dans les films anglais,
12:08 même les films américains bien sûr, sur Dunkerque, ne parlent jamais du sacrifice des deux divisions françaises
12:13 qui ont permis aux anglais de rembarquer.
12:18 Et ça, nous ne savons pas faire.
12:20 On ne sait plus faire de films historiques, parce que sinon c'est mal vu.
12:26 - Oui, l'héroïsme à Dunkerque des français, des soldats français.
12:29 - Mais vous savez, il y a une phrase magnifique de Winston Churchill qui rend hommage à l'armée française,
12:34 et il dit "l'armée française est celle qui a remporté le plus de victoires de toute l'histoire de l'humanité".
12:40 Et ça, en France, il faut le redire, en 2023, grâce surtout à Napoléon, à Louis XIV,
12:48 en nombre net de victoires, c'est l'armée française qui a remporté le plus de victoires de toutes les guerres militaires de l'histoire de l'humanité.
12:57 Et donc on voit que cette âme héroïque, courageuse, qui faisait quand même le panache français,
13:04 aujourd'hui il aurait bien besoin d'être redoré, d'être remis en avant dans l'éducation nationale.
13:09 Et vous savez que toute cette histoire militaire, comme je vous le disais tout à l'heure,
13:12 est soigneusement bannie des programmes d'histoire scolaire,
13:18 parce qu'aujourd'hui, c'est pas politiquement correct d'apprendre la guerre, les batailles de Napoléon, tout ça,
13:25 il faut absolument le taire, parce que la guerre c'est mal, alors bien sûr que la guerre c'est mal.
13:30 Mais quand on voit aujourd'hui, et c'est ça la leçon de l'histoire, qu'il y a une guerre en Ukraine,
13:35 à 2000 kilomètres de chez nous, il vaut mieux réconcilier la nation française avec son armée,
13:45 ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui.
13:47 - Merci Dimitri Caseli d'être venu nous voir, historien auteur de "Histoire de l'armée française",
13:53 audition Ring, merci beaucoup.
13:55 - Merci à vous.
13:56 - A 12h27, André Bercoff.
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