Arrestation de Klaus Barbie en Bolivie : le journalisme est aussi une affaire de doigté
Chaque jour, Bruno Donnet regarde la télévision, écoute la radio et scrute les journaux ainsi que les réseaux sociaux pour livrer ses téléscopages. Ce mardi, il s'intéresse à la méthode du journaliste Ladislas de Hoyos pour confondre Klaus Barbie en Bolivie.
Retrouvez "Télescopages, Bruno Donnet décrypte l'actualité vue par les médias" sur : http://www.europe1.fr/emissions/telescopages
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00:00 - Dans un instant, nous recevons le producteur Erwan Lelouet qui présente un nouveau numéro
00:05 de la collection Archives Secrètes sur la face cachée des idoles des années 60, à
00:09 voir vendredi sur la 3.
00:10 Mais d'abord, c'est l'heure des télescopages de Bruno Donnet.
00:13 Bonjour Bruno !
00:14 - Bonjour Philippe !
00:15 - Tous les jours, Bruno, vous décortiquez ici la mécanique médiatique.
00:17 Et ce matin, au lendemain de la célébration de Jean Moulin, vous avez eu envie de nous
00:21 raconter l'histoire d'un des plus jolis coups du journalisme et de la télévision.
00:25 - Oui, ça n'a pas pu vous échapper Philippe.
00:26 Hier, Emmanuel Macron s'est déplacé à la prison de Montluc pour y rendre un hommage
00:30 à l'un des grands héros de la Résistance.
00:33 - Jean Moulin et six de ses compagnons étaient arrêtés et incarcérés à Montluc.
00:37 - Il a rappelé qu'à cet endroit, Jean Moulin a été torturé jusqu'à la mort par les
00:42 officiers de la Gestapo et dans son discours, le président de la République n'a pas manqué
00:46 de citer un nom.
00:47 - Chaque jour, les séances de torture infligées par Klaus Barbie se faisaient plus violentes.
00:53 Le nom de Klaus Barbie qui fut donc le bourreau de Jean Moulin mais également celui de plusieurs
00:58 milliers de résistants et de déportés juifs pendant l'occupation.
01:02 Alors, en entendant parler de Klaus Barbie hier, j'ai eu envie de vous raconter l'histoire
01:05 absolument magnifique qui a permis son arrestation.
01:09 Car c'est la ruse et l'opiniâtreté d'un journaliste de la télévision française,
01:13 la dislas de Hoyos, qui ont permis de confondre Klaus Barbie.
01:16 Je vous explique.
01:17 Après la guerre, Klaus Barbie s'est enfui en Amérique du Sud.
01:20 Après un court passage par le Pérou, il a finalement trouvé refuge en Bolivie où
01:24 il a vécu planqué pendant plus de 20 ans sous une fausse identité, celle d'un certain
01:29 Klaus Altman.
01:30 Seulement voilà, en 1972, une folle rumeur court les rédactions parisiennes.
01:35 Altman et Barbie ne seraient en fait qu'un seul et même personnage et Barbie se trouverait
01:40 donc en Bolivie.
01:41 Au terme de longues négociations avec les autorités du pays, le journaliste la dislas
01:46 de Hoyos parvient à décrocher un entretien avec Klaus Altman.
01:50 Pourquoi ? Parce que la Bolivie souhaite tordre le coup à cette persistante rumeur.
01:55 Les conditions de l'entretien sont draconiennes.
01:57 Le journaliste ne dispose que de quelques minutes.
01:59 Il doit soumettre ses questions préalablement au ministère de l'Intérieur et s'exprimer
02:04 exclusivement en espagnol.
02:06 La dislas de Hoyos s'exécute et M.
02:08 Klaus lui explique donc droit dans les yeux ce qui lui tient à cœur de dire au téléspectateur
02:13 français.
02:14 « Je ne suis pas Barbie, je vous l'ai dit, je suis Klaus Altman.
02:20 »
02:21 Toutefois, prenons son courage à deux mains, la dislas de Hoyos va contrarier le plan bolivien.
02:27 Il va désobéir aux consignes et posera à Klaus Altman une petite question en français.
02:32 « N'êtes-vous jamais allé à Lyon ? »
02:33 Et là, celui qui est censé n'avoir jamais posé les pieds en France et ne pas comprendre
02:38 un traître mot de notre langue va lui répondre du tac au tac.
02:41 « Je ne suis jamais allé à Lyon.
02:46 »
02:47 Voyant le climat se tendre autour de lui et les autorités boliviennes s'assombrir,
02:51 la dislas de Hoyos va alors détendre l'atmosphère en faisant répéter à Klaus Altman d'autres
02:56 phrases très à son avantage en français.
02:59 « Je ne suis pas un assassin.
03:00 Je n'ai jamais torturé.
03:01 »
03:02 Mais le meilleur est à venir car la dislas de Hoyos a faumanté un stratagème absolument
03:14 diabolique.
03:15 Il a emporté avec lui des photos, des clichés de Jean Moulin.
03:18 Il va alors les sortir de sa poche, les tendre à Altman et lui demander de s'en saisir.
03:23 Altman le fait, il prend les photos à pleine main, affirme qu'il n'a jamais vu Jean Moulin
03:27 et rend ces images à son propriétaire.
03:29 Seulement voilà, en touchant ces photos, Altman vient d'y déposer ses empreintes digitales.
03:35 Le piège de la dislas de Hoyos a parfaitement fonctionné et s'est refermé, pont, sur
03:40 les doigts de M.
03:42 Klaus.
03:43 Dans un retour en France, le journaliste fera analyser les empreintes par un labo qui conclura
03:47 qu'Altman et Barbie ne sont en fait qu'un seul et même homme.
03:51 Le journalisme, cher Philippe, marque quelques fois l'histoire de ces empreintes.
03:55 Extraordinaire histoire, je connaissais cette histoire, je ne connaissais pas le coup de
03:59 la photo et des empreintes.
04:00 Incroyable.
04:01 Et alors si vous ne connaissez pas, je parle aux plus jeunes auditeurs, auditrices d'Europe
04:04 1, si vous ne savez pas qui est la dislas de Hoyos, vous l'avez déjà vu, il est une
04:07 star des bêtisiers, il est sur la place rouge et c'est lui qui dit « Dis donc René, t'arrêtes
04:11 de gueuler ! »
04:13 C'est la distance de Hoyos.
04:16 Merci beaucoup Bruno Donnet.