Opération "Wuambushu" à Mayotte : "La priorité, c'est l'arrestation des bandes criminelles qui terrorisent les Français", explique Gérald Darmanin

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Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, le 21 avril 2023 sur franceinfo.

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00:00 Vous lancez dans les tout prochains jours une opération de grande envergure à Mayotte.
00:04 Destruction de bidonvilles, expulsions de ressortissants comoriens notamment.
00:07 On parle de 10 000 expulsions sur deux mois. C'est ça votre objectif ?
00:11 Non il n'y a pas d'objectif de personne à reconduire à la frontière.
00:15 Ce qui se passe à Mayotte, je pense qu'il faut que chacun le comprenne.
00:17 D'abord c'est un territoire français avec des gens absolument formidables.
00:21 Ça pourrait être la Seychelles Mayotte.
00:22 C'est absolument magnifique pour ceux qui y sont allés.
00:24 Simplement pour plein de raisons.
00:26 Mayotte n'arrive pas à se développer.
00:28 Pour des raisons d'abord d'insécurité qui sont le fait de bandes criminelles.
00:32 Il y a une soixantaine de bandes criminelles à Mayotte qui interviennent,
00:37 commettent des homicides, empêchent les femmes d'aller à coucher,
00:40 empêchent les médecins de faire leur travail,
00:41 empêchent les français de travailler tout simplement, de vivre,
00:45 de donner leurs enfants à l'école.
00:46 Il faut d'abord que nous interpellons ces bandes criminelles.
00:48 Et vous êtes sûr que ces bandes criminelles, elles sont composées de comoriens sans papier ?
00:52 Non, il y a des français, il y a des malgaches, il y a des comoriens,
00:56 il y a des africains des Grands Lacs, il y a des maorais,
00:58 et puis je veux se dire, il n'y a aucune envie particulièrement de discuter d'une nationalité.
01:05 Ce qui nous intéresse c'est les criminels, ce n'est pas leur nationalité.
01:08 D'ailleurs j'ai eu l'occasion de dire qu'avec les comores nous travaillons très bien.
01:10 100% des personnes que nous arrêtons et qui sont délinquants étrangers,
01:14 comme je peux le faire en métropole,
01:16 sont reconduites aux comores avec l'autorisation.
01:19 Donc là les OQTF, elles vont à 25 000 reconduites ?
01:23 Il y a eu toute l'année dernière 25 000 reconduites à Mayotte.
01:27 Donc vraiment...
01:28 C'est un chiffre en plus, depuis plusieurs années c'est toujours à peu près ce chiffre là, 25 000.
01:33 Oui, mais le problème n'est pas tellement les départs que les arrivées.
01:35 Parce que c'est pour ça que nous travaillons beaucoup avec l'Afrique des Grands Lacs.
01:39 Le président de la République a fait un déplacement très récemment,
01:41 je vais m'y rendre d'ailleurs très bientôt avec Madagascar, avec les comores,
01:45 pour que nous travaillions ensemble.
01:46 Et les comores eux-mêmes subissent une immigration non contrôlée qui vient notamment aussi d'Afrique.
01:52 Le sujet premier c'est la délinquance et c'est la criminalité.
01:55 Donc il y a 1800 policiers et gendarmes au moment où nous parlons,
01:57 en ce moment même à Mayotte, qui font des opérations de police,
02:00 qui mettent fin au trafic d'armes, qui mettent fin aux cémentes criminelles.
02:04 Et sur les 60, il y en a déjà 12 qui ont déjà été interpellées depuis quelques jours
02:07 et qui sont judiciarisées comme on dit, présentées devant la justice.
02:10 Puis par ailleurs, il y a à Mayotte, des bidonvilles qu'on appelle des bangars,
02:15 qui seraient inacceptables en métropole.
02:18 Et parce que c'est loin, parce que les gens considèrent que tout ça,
02:20 après tout, ne mérite pas l'œil de la France, on a laissé faire.
02:24 Des gens sans electricité, sans gaz, des vieillards, des personnes handicapées,
02:28 des bébés qui vivent dans ces situations.
02:30 Et donc, par ailleurs, nous allons détruire sur décision de justice ces bidonvilles et reloger les gens.
02:35 La République aujourd'hui, elle détruit des bidonvilles, elle reloge les gens dans des vrais logements.
02:40 - Mais renvoyer notamment aux comores ceux qui sont en situation irrégulière.
02:43 - Les personnes qui sont en situation irrégulière à Mayotte, comme dans leur Pas-de-Calais,
02:47 ils méritent d'en retourner dans leur pays.
02:48 - Mais comment s'assurer ?
02:50 - Pardon, mais il n'y a pas que des comores.
02:51 Je répète encore une fois qu'à Mayotte, il y a une immigration plus large.
02:54 Il y a des gens qui viennent de Madagascar ou qui viennent de l'Afrique.
02:58 - Mais ça ne va pas se faire quand même à la va-vite, vu le caractère massif de l'opération ?
03:01 C'est ce dont certains s'inquiètent ?
03:03 - Non, mais en fait, l'opération, elle est au long cours.
03:07 Il n'y a pas un moment où on la commence et un moment où on la termine.
03:10 Je dis dans la presse qu'elle commence lundi.
03:11 Non, elle ne commence pas lundi.
03:12 - Et que ça dure deux mois.
03:13 - Elle a déjà commencé, mais c'est faux.
03:14 Il y a à Mayotte un renforcement inédit des pouvoirs de l'État, des policiers, des gendarmes.
03:20 J'ai envoyé quatre escadrons de gendarmerie mobile de plus, une unité de CRS.
03:23 On a doublé les effectifs de la préfecture.
03:25 On a envoyé des magistrats, c'est Eric Dupond-Moretti qui l'a fait.
03:28 Des personnes de la sécurité civile pour que l'eau,
03:30 parce qu'il y a un gros problème d'eau à Mayotte, de sécheresse, soit réglée.
03:32 Bref, tous les ministères ont envoyé beaucoup, beaucoup de monde.
03:35 Et ils ne vont pas rester deux mois.
03:36 Ils vont rester le plus longtemps possible.
03:39 Et donc, ce qui compte avant tout, c'est l'arrestation de tous ces criminels
03:44 qui terrorisent Mayotte.
03:46 - Donc il n'y a pas d'objectif de reconduite aux frontières
03:48 dans le cadre de cette opération ou un bouchouc ?
03:50 - Il y a deux objectifs, je l'ai dit.
03:53 L'arrestation des 60 criminels que nous connaissons
03:56 et qui doivent être traduits dans la justice et doivent être condamnés,
03:58 je l'espère, à des peines les plus lourdes possibles.
04:00 Et quand ils sont étrangers, évidemment, par ailleurs, ils doivent être expulsés.
04:04 C'est une évidence.
04:05 Et puis, deuxièmement, il y a la destruction de 1000 bangas,
04:07 1000 logements bidonvilles, notamment autour de Mamoudzou.
04:12 - Ça, ce sont les objectifs de cette opération ?
04:14 - Il n'y a pas d'objectif de reconduite à la frontière,
04:17 sachant qu'à Mayotte, nous reconduisons toutes les personnes que nous interpellons.
04:21 Donc ce serait absurde de se donner un objectif supplémentaire.
04:23 Ce qui compte, par contre, c'est de casser l'écosystème
04:26 qui consiste à, lorsque nous expulsons des personnes, ces personnes reviennent.
04:31 Il n'y a pas très très loin entre Mayotte et les Comores,
04:34 entre les Comores et l'Afrique, entre les Comores, Mayotte et Madagascar.
04:38 Et donc pour ça, par ailleurs, le ministre des Armées déploie
04:40 un système radar extrêmement important qui n'existait pas auparavant.
04:44 La loi de programmation militaire qui sera votée par le Parlement
04:46 prévoit des moyens militaires extrêmement forts pour surveiller,
04:48 notamment aérien, l'arrivée des "quoi ça, quoi ça".
04:51 - Ces moyens n'existaient pas avant, c'est nouveau.
04:53 - Ils étaient parcellaires.
04:54 - Ça fait des années qu'on expulse 20-25 000 personnes par an et que ça augmente...
04:59 - 26 000 expulsions en 2010 et on était encore à 27 000 expulsions en 2019.
05:03 Autrement dit, il n'y a rien qui change.
05:05 - Non, ce n'est pas vrai, vous ne pouvez pas le dire.
05:08 Ce qui est différent, en revanche, c'est sûr,
05:10 c'est que le droit doit changer sur la terre de Mayotte.
05:13 - Il a déjà changé le droit du sol.
05:15 Il a été restreint en 2018. Ça a changé quoi, Gérald Darmanin ?
05:18 - On va le voir, parce que, pardon, mais le principe du droit du sol...
05:20 - Ça fait 5 ans qu'il a été changé.
05:21 - Oui, mais vous vous consacrez que les gens deviennent en général majeurs
05:25 à leur majorité, donc laissez un petit peu de temps quand même au droit de s'appliquer.
05:29 - Alors ça doit changer quoi ?
05:30 - Alors, qu'est-ce qui se passe ?
05:32 Il y a dans notre pays des dispositions qui consistent à évoquer le fait
05:36 que quand on est sur un territoire, avec quelques conditions quand même,
05:39 on a la nationalité de ce territoire quelques années après à sa majorité.
05:43 À Mayotte, nous avons restreint, à la demande d'Emmanuel Macron,
05:46 de façon je crois très courageuse, ce droit du sol.
05:48 Aujourd'hui, il faut que l'un des deux parents soit français,
05:51 soit légalement sur le territoire français, donc à Mayotte,
05:54 et que cela ait été fait 3 mois avant la naissance de l'enfant.
05:58 Je pense que c'est une restriction très importante qui va produire des effets.
06:01 Cependant, j'ai proposé au président de la République et à la Première ministre,
06:05 et avec les élus de Mayotte, que nous allions encore plus loin.
06:07 C'est-à-dire que moi je souhaite que les deux parents soient légaux ou français
06:12 au moment de la naissance de l'enfant, depuis plus de 9 mois avant la naissance de l'enfant,
06:16 donc avant l'idée, évidemment, de faire un enfant.
06:19 - Mais ça change quoi concrètement ?
06:20 - Ça change quand même...
06:21 - En quoi ça fait reculer la criminalité ou les problèmes des Mahorais ?
06:25 - Mais à l'hôpital de Mayotte, cher monsieur, 80% des naissances
06:27 ne sont pas les naissances d'enfants français
06:31 ou qui sont Mahorais légalement installés sur le territoire de Mayotte.
06:34 Il y a 900 naissances en dehors de l'hôpital, par ailleurs,
06:39 puisque ce sont les pompiers qui, dans les bangas, dans les bidonvilles,
06:42 pour les parturriantes, font naître les enfants.
06:46 Ce qui pose des problèmes, évidemment, de santé publique énormes.
06:49 Et Mamoudzou est la première maternité d'Europe.
06:52 Donc ça change quoi ?
06:54 Ça change que manifestement, ceux qui veulent venir à Mayotte,
06:57 ils viennent pour notre système de santé en partie.
06:59 On peut les comprendre, bien évidemment, et souhaitent fuir la misère,
07:03 les difficultés pour ce qui est de l'Afrique des Grands Lacs,
07:05 parfois l'islamisme, et on peut aussi là où le comprendre.
07:08 Mais simplement, la démographie à Mayotte,
07:10 qui est passée officiellement de 65 000 personnes il y a 30 ans
07:12 à quasiment 300 000 aujourd'hui,
07:14 fait que tous les services publics dysfonctionnent.
07:16 L'école ou les enfants, il faut quand même savoir ça.
07:18 Les enfants à Mayotte, ils n'ont pas tous des écoles,
07:21 ou alors ils vont à l'école une demi-journée par jour,
07:23 parce qu'il faut faire tourner, si je veux dire, les enfants dans les salles de classe.
07:26 Il n'y a pas assez d'eau à Mayotte.
07:28 Il n'y a pas la possibilité de se soigner correctement.
07:30 On doit quand même aux Mahorais, qui sont des Français comme les autres,
07:33 le service public d'un département français.
07:36 C'est le président Chirac, c'est le président Sarkozy
07:37 qui a voulu que Mayotte soit un département français.
07:39 Et donc, de Paris, il est facile de dire
07:42 "Oh là là, attention, attention, les opérations de police,
07:44 tout ça est bien difficile",
07:46 mais à Mayotte, je crois qu'ils attendent le retour de la France et de l'État,
07:49 et nous les avons entendus.

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