Pourquoi cette tendance est dangereuse ?

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00:00 : L’histoire du true crime
05:00 : La tendance actuelle
10:30 : Les raisons du succès
14:30 : Les problèmes du true crime
20:30 : Conclusion

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Transcript
00:00 [Bruit de film]
00:02 [Musique]
00:11 [Bruit de film]
00:12 Alors comme vous, j'ai vu Making a Murderer et c'est devenu ma nouvelle obsession.
00:17 J'ai été complètement chamboulée par cette série télé.
00:22 [Bruit de film]
00:23 [Bruit de film]
00:35 Le 15 janvier 1947, Betty Bersinger se balade tranquillement à Los Angeles avec sa petite fille de 3 ans.
00:43 En passant à côté d'un terrain vague, elle voit ce qu'elle identifie dans un premier temps
00:47 comme le corps d'un mannequin de boutique laissé à l'abandon.
00:51 En s'approchant, elle se rend compte avec stupeur que loin d'être fait de plastique,
00:55 le corps qu'elle aperçoit est fait de chair, déchirée et vidée de son sang.
01:00 Elle contacte la police qui, une fois sur place, prend tout de suite conscience de l'étrangeté de la scène qui leur fait face.
01:06 Le corps est mutilé, sectionné en deux au niveau du bassin, un sourire lui est dessiné sur la bouche.
01:12 S'ouvre alors l'une des plus grandes affaires criminelles de l'histoire des Etats-Unis.
01:17 Un mois après la sortie de la série Damer sur Netflix, et alors que les affaires Dupont de Léguenès ou de Grégory reviennent constamment dans l'actualité,
01:25 j'ai décidé de revenir sur le phénomène qu'on appelle aujourd'hui "true crime".
01:29 Le true crime est un genre de documentaire qui vise à dépeindre la réalité des crimes et des criminels.
01:35 C'est assez vague et assez large, donc on va un peu revenir sur son histoire pour mieux le circonscrire.
01:41 Puis, on va essayer de comprendre ce qui nous attire tant dans ces histoires. Et enfin, quelles sont les dérives du phénomène.
01:48 Aussi, on se concentrera vraiment sur les formes médiatiques de true crime et leur impact sur l'audience.
01:54 On parlera du phénomène des tueurs en série, mais seulement comme un élément au sein des true crimes.
01:59 Si le sujet vous intéresse, Feux, un créatif, avait fait une vidéo dessus pour la chaîne du Vortex.
02:04 D'ailleurs, oui, je sais, j'ai vu, Cyrus vient de sortir exactement aussi une vidéo sur la fascination des tueurs en série,
02:11 mais qui du coup se rapproche beaucoup plus de celle d'un créatif.
02:13 Et vous verrez, il y a 2-3 éléments qu'on a en commun et 2-3 trucs d'analyse, mais globalement, la vidéo n'a rien à voir.
02:20 Bref, sur Wikipédia et dans les introductions des différents mémoires ou travaux de recherche que j'ai pu lire,
02:25 le livre "The Book of the Swindles" de Zongyong Yu, désolé pour la prononciation, écrit en 1617, est souvent considéré comme point d'origine.
02:35 Même si, je le rappelle encore, donner un point de départ à ce genre de sujet n'a pas vraiment de sens.
02:40 L'auteur y raconte différentes escroqueries qui auraient eu lieu durant la dynastie Ming et dont il salue l'intelligence.
02:46 Au Royaume-Uni, The Newgate Calendar répertorie dès 1795 les différentes affaires criminelles du pays
02:53 et rencontre un franc succès auprès de la population.
02:56 En France, les fêtes d'hiver ont toujours été un genre assez populaire.
02:59 Mais c'est en 1683, avec la création du Petit Journal, rien à voir avec l'ancêtre de Quotidien, que cela va prendre une autre ampleur.
03:07 Il s'agit d'un quotidien créé par Moïse Milot, et pour ceux qui auraient séché leur cours d'histoire, en 1863, on est sous le Second Empire.
03:16 Donc en termes de liberté de la presse, c'est pas trop ça.
03:18 Pour éviter la censure, le Petit Journal se déclare apolitique, et en profite pour développer d'autres contenus.
03:24 Le Quotidien est vendu à l'unité et se doit donc de fidéliser son lectorat.
03:29 Les différents crimes qui rentrent dans l'actualité permettent une proximité éditoriale avec l'audience.
03:34 C'est ainsi que va naître la première rubrique fêtes d'hiver.
03:37 En 1869, l'affaire Traupman, un homme accusé d'avoir tué une famille entière, passionne la France
03:44 et permet au Petit Journal de faire fortune en atteignant les 500 000 exemplaires.
03:49 Mais, loin de s'arrêter à une rubrique fêtes d'hiver, le True Crime va continuer son expansion par le biais des magazines, notamment.
03:55 True Crime Detective, par exemple, était l'un des plus populaires.
03:58 A la fin du XXe siècle, c'est l'affaire Doji Simpson, joueur de football américain, accusé d'avoir assassiné Nicole Brown et Ronald Goldman.
04:06 Le procès est diffusé à la télévision et pour vous donner un ordre d'idée, d'après ce que j'ai pu lire, 57% des américains auraient regardé le jugement final en direct.
04:16 D'ailleurs, avant d'entrer dans l'analyse, n'hésitez pas à me dire, vous, quelle est votre consommation de True Crime ?
04:20 Est-ce que vous écoutez des podcasts ? Est-ce que vous lisez des articles ? Est-ce que vous regardez des youtubeurs ?
04:25 Ou aucun, au contraire, vous aimez pas trop le True Crime, c'est pas trop votre truc ?
04:28 Moi, perso, c'est pas trop mon truc. J'en regarde très très peu.
04:31 Je regarde quelques docus Netflix, mais jamais sur des tueurs en série, c'est plutôt sur l'arnaqueur de Tinder, par exemple, j'ai trouvé ça plutôt bien.
04:39 Free Identical Strangers.
04:41 Mais ça implique rarement des histoires de meurtre un peu trop macabres.
04:44 Là, c'est pas trop trop mon truc.
04:46 Je pense que c'est pas mal de lui mettre des limites, et donc moi-même, je me force à mettre des limites sur ma consommation de True Crime, et donc elle reste extrêmement limitée.
04:53 Mais dites-moi la vôtre en commentaire.
04:55 Loin d'avoir faibli, cette passion se confirme de jour en jour.
04:58 Une étude sur plusieurs milliers d'américains en 2019 révélait que 40% d'entre eux se disaient intéressés par le sujet du True Crime, et 22%, donc quasiment un quart, très intéressés.
05:09 Le True Crime est l'exemple parfait du format qui a subi de nombreuses remédiations, comme je l'avais mentionné dans ma vidéo sur le business des youtubeurs.
05:17 C'est un sujet qui s'adapte à tous les médiums.
05:19 En France, actuellement, il est particulièrement populaire sur Youtube, avec de nombreuses têtes d'affiches comme Victoria Charlton ou encore Feldup, qui cumulent des centaines de milliers d'abonnés et des millions de vues en restant uniquement sur cette thématique.
05:33 Mais aux Etats-Unis, c'est aussi par Reddit que passe la pratique.
05:36 En effet, les subreddits, qui sont donc des sortes de mini-forums au sein du réseau social sur le True Crime, sont légion.
05:42 Les fonctionnalités et l'interactivité simplifiée de la plateforme permettent l'échange de la part d'utilisateurs qui peuvent chacun faire part de leur théorie sur l'affaire en question.
05:51 En France, on avait connu ça, notamment pour l'affaire Dupont-Ligonnès, qui avait passionné les enquêteurs du web sur différents forums.
05:57 Enfin, c'est surtout l'émergence des podcasts qui a permis au genre d'entrer dans une autre dimension.
06:02 Aujourd'hui, selon une étude de Cheryl et Lindsey, il existerait pas moins de 1152 podcasts individuels différents de True Crime, il s'agirait du troisième genre le plus populaire dans le pays de l'oncle Sam.
06:15 Cet engouement n'est pas complètement étranger au carton du podcast Seriol.
06:20 A moins d'être un adepte de True Crime, vous n'en avez sûrement jamais entendu parler.
06:24 Pourtant, il a été le podcast le plus téléchargé sur iTunes pendant longtemps, et a même été racheté par le New York Times.
06:30 En 2014, et narré par Sarah Quenning, comme son nom l'indique, il se décline sous forme de série qui reprend une grande enquête.
06:37 La première saison se concentre sur le meurtre d'A.E. Min Lee, une étudiante américaine tuée en 1999, pour lequel son ancien copain, Adnan Syed, avait été condamné malgré le fait qu'il clamait son innocence.
06:50 Pour vous donner une idée de l'engouement, le processus juridique de l'affaire est même relancé suite au podcast, et la condamnation d'Adnan Syed est même annulée.
06:58 Il sort donc de prison libre 23 ans après.
07:01 Enfin, un dernier acteur dont on parle assez peu sur la chaîne a contribué massivement à l'avènement actuel de True Crime, Netflix.
07:09 Making a Murderer est une série documentaire qui retrace l'histoire d'un jeune américain accusé à tort d'agression sexuelle et de meurtre.
07:15 Sorti en 2015, le documentaire est suivi en 2017 par la série Mindhunter, réalisé par nul autre que Davin Fincher, qui met en scène les débuts des profilers face à des tueurs en série qui ont marqué l'histoire.
07:27 On peut se demander alors si Netflix a profité du succès du True Crime, ou si inversement, il l'a en partie engendré.
07:33 Ce qui est sûr, c'est que le True Crime représente de loin le genre le plus présent parmi les documentaires de la plateforme, comme le montre cette étude de The Ringer et encore plus depuis 2020.
07:42 Il représente des succès massifs pour Netflix, mais surtout, sont extrêmement peu coûteux à produire.
07:48 Difficile de connaître le budget d'un film comme Extremely Wicked, Shockingly Evil and Vile, qui raconte l'histoire de Ten Bundy, interprété par Zac Efron.
07:56 Ni même de la série Dammer avec Evan Peters.
07:59 Mais une chose est sûre, leur grand succès sur Netflix les rend bien plus rentables qu'un Red Notice ou The Grey Man, dont les budgets faramineux ralentissent la croissance du studio en comparaison.
08:09 Et encore plus si on compare au budget des documentaires.
08:12 Enfin, le True Crime est complètement sorti de ses niches avec désormais des œuvres méta, qui adaptent le True Crime en soi.
08:19 Et non plus seulement les crimes et les tueurs en série.
08:21 C'est le cas de la série Disney+, Only Murders in the Building, avec Selena Gomez qui rencontre un franc succès et qui narre l'histoire de voisins qui se lancent dans un podcast de True Crime après un événement étrange dans leur immeuble.
08:33 Enfin, un épisode récent des Simpsons a également repris cette trame narrative, avec Lisa Emarch qui se lance dans un projet de podcast autour d'une histoire criminelle.
08:41 "Listen, I won't say a word but my favorite podcast just dropped a new episode tonight."
08:47 Si je devais vous recommander un documentaire True Crime à regarder, ça serait The Thin Blue Line.
08:59 Alors je ne suis pas expert du True Crime, mais en tout cas celui-là, j'ai vu, il date de 1988 et il est exceptionnel.
09:05 Il revient sur l'affaire Adams, à savoir un homme qui a été condamné à mort pour un meurtre d'un policier.
09:13 Et c'est un documentaire qui a été tout simplement révolutionnaire parce que c'est lui qui a lancé la mode des reconstitutions.
09:19 Ça peut paraître complètement évident pour nous parce que c'est un élément qu'on a infraordinarisé.
09:24 Ça nous paraît tout à fait banal et à l'époque ça ne l'était pas du tout.
09:27 D'ailleurs ça a empêché le documentaire de gagner des grands prix.
09:30 Et donc je vous le conseille, c'est vraiment un des piliers du genre.
09:33 Retour à notre affaire de Los Angeles.
09:35 Le corps démembré est rapidement identifié.
09:37 Il s'agit d'Elizabeth Short.
09:39 C'est une jeune femme âgée de seulement 22 ans, originaire de Boston,
09:43 et issue d'une famille ruinée par la Grande Dépression de 1929,
09:47 qui venait de s'installer à Hollywood dans l'espoir de devenir actrice.
09:50 L'affaire est surnommée le Dahlia Noir, sûrement en référence à sa chevelure noire,
09:55 à une fleur qu'elle portait dans les cheveux,
09:57 ou simplement en référence au film Le Dahlia Bleu, qui possède quelques similitudes avec l'histoire.
10:02 Le cas fait alors grand bruit,
10:04 à tel point que plus d'une cinquantaine de suspects se désignent eux-mêmes en se disant coupables du meurtre,
10:10 sûrement en quête de célébrité.
10:11 Et alors que l'affaire piétine, les enquêteurs reçoivent une lettre où il est inscrit
10:16 « Voici les effets du Dahlia. Une lettre suivra. »
10:19 avec la carte de sécurité sociale, le certificat de naissance et des photos d'Elizabeth.
10:25 Maintenant qu'on a bien vu quelle forme pouvait prendre le phénomène du true crime,
10:29 et qu'on a pu mesurer son impact et son grand succès, il convient de répondre à la question « Pourquoi ? »
10:35 Alors, j'espère que vous êtes bien attentifs, car on est très loin des explications simplistes
10:39 qu'on a l'habitude de trouver dans certains articles sur le sujet.
10:42 Les causes sont plus nombreuses, et surtout parfois complexes.
10:45 Tout d'abord, si on s'intéresse à la démographie du public de ce contenu,
10:48 on remarque qu'il est en grande majorité féminin.
10:51 En effet, d'après l'étude menée par Vickery et Freilay,
10:54 73% des consommateurs de true crime sont des consommatrices.
10:58 On peut alors légitimement se demander la ou les raisons
11:01 qui expliquent cette forte surreprésentation des femmes dans le public.
11:05 Dans la même étude que j'ai mentionné plus tôt, un élément de réponse est apporté.
11:08 Les femmes seraient plus inclines à consommer ce contenu,
11:11 car cela leur permettrait de développer des techniques de défense.
11:14 En effet, si selon l'INSEE c'est bien les hommes qui sont le plus victimes de crimes et d'homicides,
11:19 les femmes craignent plus les agressions,
11:21 et sont plus inclines à chercher des moyens de s'en protéger visiblement.
11:24 Et de manière générale, le rapport au danger a une place importante pour le true crime.
11:28 Pour John Mayer, un neurologue, c'est l'activation des amygdales
11:32 qui procure l'association de danger et d'instinct de survie
11:35 qui explique la passion de certains pour les faits divers.
11:38 Comme je le rappelais plus tôt, les faits divers se sont toujours reposés sur la notion de proximité.
11:42 C'est arrivé près de chez vous, c'était des kidams, ça aurait pu être vous.
11:46 Et à la fois, le danger reste extrêmement lointain à travers l'écran.
11:50 C'est le même mécanisme que pour les films d'horreur ou les attractions à sensations fortes.
11:54 L'être humain est en recherche perpétuelle d'émotions très fortes,
11:57 et les crimes et horreurs narrés dans les histoires de faits divers s'y prêtent totalement.
12:01 A mon avis, ce n'est pas pour rien que le true crime a connu une croissance particulièrement importante en 2020 durant le confinement.
12:08 Alors que le monde faisait face à un danger menaçant et sans précédent,
12:11 le true crime venait ironiquement rassurer les individus anxieux,
12:14 en leur apportant une petite dose d'adrénaline,
12:17 mais qui finit quasiment toujours par un retour à l'ordre comme on va le voir.
12:20 David Greene, un chercheur, avance aussi l'idée d'une fascination morbide,
12:24 qui est un peu la pensée réflexe lorsque l'on pense aux raisons du succès de ce phénomène.
12:29 Si les accidents de voiture entraînent des ralentissements sur la route,
12:32 c'est bien parce qu'une grande partie des automobilistes ralentissent pour observer le désastre.
12:37 De même, le biais de négativité, qui est très fort et dont on a déjà parlé,
12:40 illustre parfaitement ce phénomène.
12:42 On est plus intéressé par un documentaire sur un criminel fou que par un bienfaiteur dédié à une cause.
12:48 Sur un plan plus social, le true crime est devenu un phénomène d'une telle ampleur
12:52 qu'il est désormais un objet de socialisation.
12:54 Kayleigh Bueling a fait de nombreuses recherches sur le sujet,
12:57 et dans une étude, elle révèle que 60% des personnes interrogées disent en parler régulièrement avec des proches.
13:04 C'est souvent des sujets de débat où chacun peut apporter son opinion sans que la discord soit trop importante.
13:10 Aussi, cet aspect social et interactionnel inhérent au true crime permet plus facilement à ces contenus d'émerger.
13:16 Le public de ces programmes est particulièrement engagé,
13:19 car le documentaire, le podcast ou la vidéo qui raconte une histoire criminelle
13:23 poussent l'audience à donner son avis sur le jugement, ou sur le tueur.
13:27 Il suffit de voir l'embrasement de Twitter après la sortie de Dammer,
13:30 ou à chaque fois qu'un sosie de Dupont de Légonnès est repéré en ligne.
13:33 Chacun essaye de recoller les morceaux.
13:36 Catherine Ramsland, actrice et professeure de psychologie, compare cela à un puzzle à résoudre.
13:42 Dominique Califa, quant à lui, appelle cela le paradigme indiciaire.
13:46 A savoir, l'idée selon laquelle la réalité est faite de traces, d'événements qu'on peut recomposer.
13:52 Le contenu true crime est alors extrêmement satisfaisant.
13:55 Il reproduit quasiment étape par étape le processus d'une enquête, d'indices, d'interprétations,
14:00 déjà prêts à être assimilés par l'audience.
14:02 Il y a donc la satisfaction de suivre une affaire criminelle, et de trouver le coupable,
14:06 sans avoir les difficultés et les complications qui y incombent.
14:09 On a donc compris d'où vient le true crime, comment il se développe actuellement,
14:13 et sur quel mécanisme psychologique il repose.
14:16 On va alors pouvoir désormais se pencher sur les problèmes posés par ce phénomène, qui n'est pas si innocent.
14:21 Tout d'abord, les récits, et les images parfois trop choquantes,
14:24 peuvent avoir un effet sur la santé mentale des personnes qui consomment ce contenu.
14:28 Cela peut créer des traumatismes, ou créer une humeur négative.
14:31 Et cela compte aussi pour les créateurs.
14:34 Felddupp parle régulièrement des difficultés qu'il a à faire face au contenu auquel il est exposé,
14:39 qui est très graphique, choquant, et semble avoir porté atteinte de manière profonde à sa santé mentale.
14:44 De plus, l'accumulation de ces histoires peut pousser certains à essayer d'aller toujours plus loin dans le gore et le morbide.
14:50 Il faudrait toujours plus, alors l'objectif va être de chercher une affaire encore plus trash.
14:54 Ce n'est pas forcément systématiquement le cas chez les créateurs de contenu, mais c'est une tendance qu'on peut craindre.
15:00 Aussi, on a montré l'impact des plus grands contenus true crime sur le déroulement des affaires judiciaires.
15:05 Quand des milliers, voire des dizaines de milliers d'internautes décident de se pencher sur une affaire,
15:09 même avec la meilleure volonté du monde, il en sort souvent un brouhaha dont il est difficile de se réjouir.
15:15 D'ailleurs, au sujet de l'interférence que peut avoir le public, et même la sphère médiatique,
15:21 au sein des procès et des affaires criminelles, je vous conseille un documentaire Netflix,
15:26 "Procès médiatiques", qui revient sur ces procès qui ont marqué l'histoire des médias,
15:30 et dans lesquels les médias ont eu un rôle vachement important.
15:33 Je ne vais pas vous citer tous les documentaires true crime qu'ils ont fait, ils en ont fait plein,
15:37 mais en tout cas, celui-là est intéressant pour réfléchir à cette question,
15:40 à savoir quelle est la place, encore une fois, du public, de l'audience des médias dans ces affaires criminelles.
15:46 Loin de moi la volonté de relancer le débat sur ce procès,
15:49 mais on a bien vu les dérives de l'emballement médiatique sur les affaires qui deviennent publiques,
15:53 avec le procès Johnny Depp et Humber Heard.
15:56 Pour une affaire qui a pu être relancée et mise au clair grâce aux enquêteurs du web,
16:00 combien, au contraire, était entravé ?
16:03 Il y a aussi un problème de fétichisation et de glorification des tueurs en série.
16:07 Après la série Dammer, ses lunettes ont été vendues 150 000 euros aux enchères,
16:11 et on a vu plusieurs tweets ou TikTok fleurir décrivant une forme d'empathie d'une partie du public.
16:16 Pourtant, la série essaye au maximum d'avoir une distance avec son personnage principal.
16:19 Pareil, on ne peut que grincer des dents en voyant la vente de produits dérivés à l'effigie de Jeffrey Dammer
16:25 dans un bar auparavant fréquenté par le psychopathe,
16:28 ainsi qu'un parcours permettant de retracer les différents lieux des crimes.
16:32 Et quel meilleur exemple du problème que peut poser la glorification de ces tueurs en série
16:38 que, encore une fois, la série Dammer ?
16:40 Dernièrement, on a vu passer aussi sur les réseaux sociaux des soirées à l'effigie de Jeffrey Dammer.
16:46 Bon, alors on peut penser ce qu'on veut, des soirées à l'effigie des tueurs en série...
16:51 Imaginaire !
16:52 Mais autour de Jeffrey Dammer, c'est quand même difficile de ne pas y voir un manque de respect envers les victimes.
16:58 C'est qu'en fait, il y a toute une esthétisation, une espèce de romantisation qui me dérange un peu.
17:04 C'est-à-dire que pour le coup, c'est très bien réalisé, c'est sexy,
17:07 le Evan Peters, il donne presque envie, et moi, éthiquement, moralement, il se passe un truc en moi qui fait que...
17:13 Le meilleur exemple de cette dérive a d'ailleurs sûrement eu lieu en France par le biais de Stéphane Bourgoin,
17:19 autoproclamé spécialiste en criminologie, qui a squatté pendant très longtemps les plateaux TV et les librairies,
17:24 racontant les anecdotes de ses rencontres avec les plus grandes tueurs en série de l'histoire.
17:28 Jusqu'à ce qu'un collectif et que le YouTuber Clément Freze mettent à jour ces mensonges,
17:34 et ce qui ressemble même à une forme de mythomanie.
17:36 Contrairement à ses affirmations, il n'avait pas été formé par la cellule spéciale du FBI,
17:41 ni même obtenu des inveux d'un criminel.
17:43 Dans le même temps, il en avait profité pour mettre sur pied un business florissant,
17:47 qui lui a sûrement rapporté plusieurs milliers d'euros.
17:49 Aussi, selon moi, le true crime peut amener à une impression illusoire de connaissances en psychologie,
17:54 ou même en criminologie.
17:56 Il y a certes un vrai savoir qui se développe avec l'accumulation des connaissances sur le sujet,
17:59 mais en se focalisant sur des cas spécifiques, et en dehors des normes,
18:03 on peut avoir l'impression de mieux comprendre la psychologie humaine de manière globale.
18:07 Or, ça ne semble pas être le cas.
18:09 Après, il n'y a pas d'études vraiment sur le sujet,
18:12 et je pense que ça pourrait être intéressant pour savoir si les adeptes de true crime
18:15 ont effectivement plus de connaissances en psychologie par exemple que le reste de la population.
18:19 Aussi, le contenu true crime, en se focalisant sur la figure mystique,
18:23 quasi mythique du tueur en série, met de côté les victimes,
18:27 qui pourtant sont celles qui ont vécu ses horreurs et leur famille.
18:30 Que penser du cousin d'une victime de Dameur qui affirme ne pas avoir donné son accord pour que la série ait lieu ?
18:35 Les informations sont publiques, mais le deuil est un processus complexe,
18:38 et la mise en scène médiatique de ces événements peut freiner ce dernier.
18:41 Un autre problème que je n'ai pas évoqué sur le true crime,
18:45 c'est évidemment la possibilité de créer des copycats.
18:49 Après une étude, 22% de criminels en prison qui auraient été interrogés
18:54 admettent avoir essayé de commettre un copycat crime.
18:58 Donc copycat, en gros, c'est s'inspirer d'un crime qui a déjà existé,
19:02 ou d'une série ou d'un film, pour le commettre.
19:06 C'est un problème ultra régulier dans la pop culture,
19:09 Tales from the Creek a fait une bonne vidéo sur le sujet,
19:12 mais c'est un problème aussi qui touche le true crime.
19:14 Parce qu'en fait, à force de glorifier, comme on l'a vu, ces figures des tueurs en série,
19:18 ou ne serait-ce que de s'y intéresser, de les mettre en avant,
19:21 d'en faire les vedettes de shows télé, de documentaires, voire même maintenant de films,
19:26 et bien ça peut pousser certaines personnes qui avaient une prédisposition à passer à l'acte.
19:31 On peut penser par exemple à Charles Monson, qui est l'exemple le plus souvent cité,
19:35 mais qui est un artiste raté, qui est une personne qui cherchait la reconnaissance, la gloire,
19:40 ce qui pourrait donner des idées à d'autres.
19:42 Donc je ne suis pas du tout en train de dire que les true crime créent des tueurs en série.
19:46 Ce serait faux, il n'y a pas vraiment d'études qui appuient ça.
19:49 Mais par contre, il y a des études qui montrent bien qu'effectivement,
19:52 les true crime peuvent être l'élément déclencheur,
19:54 en tout cas cet emballement autour des faits divers et des criminels,
19:58 ça peut être l'élément déclencheur chez certaines personnes instables pour passer à l'acte.
20:03 Et ça aussi, c'est assez problématique.
20:05 Enfin, les faits divers pour Roland Barthes maintiennent l'ordre établi.
20:10 Ils ont été développés pour éviter la censure,
20:12 et surtout, ils mettent le plus souvent en scène un retour à l'ordre,
20:16 en racontant la sortie de la norme d'un individu qui commet des crimes,
20:20 puis son arrestation, son emprisonnement, voire sa mort.
20:23 Si le système d'enquête est parfois remis en question,
20:26 le plus souvent, les forces de l'ordre sont créées comme les héros,
20:29 permettant d'arrêter les individus récalcitrants.
20:31 Pour moi, le true crime doit aller plus loin,
20:33 et commence d'ailleurs à aller plus loin, comme on le voit avec le podcast Serial,
20:36 bien plus que les criminels,
20:38 dont il est intéressant de se pencher sur la psychologie, mais qu'on a déjà vu.
20:41 Il doit traiter le système, la société, et même la justice
20:45 qui engendre ces individus et les différents rouages du processus d'enquête et judiciaire qui amènent à ceci.
20:50 C'est un travail de vulgarisation qui est fait, mais souvent à une échelle individuelle,
20:54 pour chaque cas, alors qu'il faudrait selon moi,
20:57 élargir plus régulièrement la focale pour offrir une vraie réflexion, quasiment méta.
21:02 Le true crime est alors devenu un objet de pop culture comme un autre,
21:06 un objet de consommation, un objet de divertissement, d'entertainment.
21:10 On se posait la question sur la légitimité de la pop culture à s'emparer des histoires d'individus
21:15 ayant vraiment existé dans ma vidéo sur les biopics,
21:17 ou même dans la capacité de la pop culture à s'emparer de la figure du diable
21:21 dans ma vidéo sur les artistes qui ont vendu leur âme au diable,
21:24 et pour moi c'est encore le même processus qu'on observe avec le true crime.
21:27 Aucun coupable ne sera jamais attrapé pour le meurtre d'Elizabeth Short.
21:32 Les détectives privés continuent à travailler d'arrache-pied sur l'affaire.
21:35 Le suspect qui revient le plus souvent est George Hill O'Dell,
21:38 accusé par son propre fils policier dans un livre sorti en 2003.
21:41 Et si le mystère plane encore sur ce meurtre, cela ne l'a pas empêché de s'inscrire dans la culture populaire.
21:46 Des romans, au film réalisé par Brian De Palma, à une référence obscure dans Spider-Man,
21:51 le Dahlia noir est devenu un mythe,
21:54 qui représente selon moi parfaitement l'importance dans la pop culture prise par le true crime.
21:59 Qui êtes-vous ?
22:01 Mais dans les ombres, se trouve un mauvais monstre.
22:10 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
22:13 "La vie est une aventure"
22:18 *Bruit de pet*

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