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NewsTranscription
00:00 Le club de la presse européen avant, révolutionnaire, soufflerait-il sur la France en ce moment ?
00:06 A lire la presse étrangère, ça ne ferait absolument aucun doute.
00:09 Bon, ça fait partie des poncifs sur les Français, vous savez, séducteurs, râleurs et régicides.
00:14 Mais par-delà les clichés, règne bel et bien en France en ce moment un climat d'insoumission.
00:19 Chez certains, une tentation anarchique, pêle-mêle.
00:22 Le hashtag tout cramé sur les réseaux sociaux.
00:24 La violence dans les manifs.
00:26 L'interdiction de rassemblement à Sainte-Sauline.
00:28 Défiée par des militants, mais alors certains que leur cause, la pureté de leur cause,
00:32 l'emporte sur le droit et sur la légalité.
00:34 Je vous citerai aussi les tentatives de délégitimation de la police.
00:38 Ces députés qui viennent assiéger des commissariats pour réclamer la libération de casseurs.
00:42 Ou encore ce chant entendu dans les cortèges.
00:44 Louis XVI, on l'a guillotiné.
00:46 Macron, on peut recommencer.
00:48 Et à l'heure un peu plus que de la simple colère, la France serait-elle prise de démangeaisons révolutionnaires ?
00:53 C'est le vendredi thématique de la rédaction d'Europe 1.
00:56 Et pour nous en parler, nous éclairer jusqu'à 9h.
00:58 J'ai le plaisir de recevoir l'historien Stéphane Courtois.
01:01 Bonjour.
01:01 - Bonjour.
01:02 - Bienvenue sur Europe 1.
01:03 Vous êtes directeur de recherche honoraire au CNRS, spécialiste de l'histoire du communisme.
01:07 Le livre noir du communisme, vous en étiez le maître d'ouvrage.
01:10 Vous avez beaucoup écrit sur Lénine, sur le totalitarisme, sur les processus révolutionnaires.
01:16 Est-ce que Stéphane Courtois, dans ce qui se passe en ce moment en France,
01:19 vous décelez les prémisses d'un processus révolutionnaire ou d'une tentation de ce genre ?
01:26 - Oh, ce serait plutôt la fin de ce processus révolutionnaire qui s'est engagé en 1789.
01:31 Ce qui est extraordinaire en France, c'est de voir à quel point nous restons.
01:35 Nous restons le pays de la révolution.
01:40 Alors évidemment 89, mais surtout 92, 93, 94.
01:44 Robespierre, la guillotine, la terreur, la Vendée, etc.
01:49 Et c'est ça qui marque.
01:51 Ça a été réactivé par François Mitterrand, le bicentenaire, le célèbre bicentenaire,
01:56 entièrement organisé par mes chers collègues historiens communistes,
02:01 qui avaient associé 1789-94 à la révolution bolchevique, bien entendu.
02:08 On se souvient du défilé où il y avait justement cette locomotive de la révolution qui avançait.
02:14 - Mais là, vous sentez une sorte de réactivation ?
02:17 - Oui, parce que là, vous avez cité par exemple la Vendée, il y a eu toute la polémique entourant ce film sur les guerres de Vendée,
02:22 et une espèce de mur d'hostilité à l'égard de ce film en disant "c'est un scandale,
02:26 la révolution a bien fait finalement d'aller tuer 700 000 Vendéens".
02:29 Je résume à gros trait ce qu'on a pu entendre.
02:31 - 700 000 non, mais au moins 250 000.
02:33 - Oui, enfin bon, c'est vrai qu'il y a eu ça.
02:36 - Mais bien sûr, mais ce qui est extraordinaire, c'est que ça continue depuis le début du 19e siècle.
02:45 Cette bataille mémorielle et historique continue,
02:49 et évidemment il y a là toute une mythologie qui nourrit complètement une partie de la politique française.
02:56 Il n'y a qu'à voir M. Mélenchon.
02:58 Alors, ce qui est intéressant, c'est que pendant très longtemps, tout ce courant d'extrême gauche, radical, anticapitaliste,
03:06 et il faut bien le dire, antidémocratique, parce que ces gens-là sont violemment antiparlementaires,
03:10 s'est appuyé évidemment sur l'expérience soviétique.
03:14 C'était magnifique, la prise du palais d'hiver 1917, Lénine,
03:18 alors pour les uns Trotsky, pour les autres Staline, mais enfin bon, à la fin tout le monde se retrouvait.
03:23 Mais l'ennui c'est qu'après l'effondrement de l'URSS en 1991,
03:28 et puis surtout l'ouverture des archives,
03:30 qui a révélé ce qu'était réellement ce type de régime,
03:34 et les historiens ont travaillé quand même.
03:36 - Parce qu'il y avait eu les révélations de Khrouchev en 1956, dénonçant les crimes de Staline.
03:40 - C'était de fausses révélations, si on relit bien son discours.
03:45 Il accusait Staline d'un certain nombre de crimes,
03:48 à l'égard d'un certain nombre de dirigeants communistes injustement réprimés, etc.
03:52 Mais il n'avait pas fait la moindre allusion à toute la grande terreur à laquelle il était d'ailleurs mêlé,
03:59 parce que Khrouchev était un homme qui était couvert de sang des pieds à la tête quand même, il faut le dire.
04:03 Comme tous ses camarades du bureau politique.
04:07 Donc voilà, alors quand l'URSS s'est effondrée, quand les archives se sont ouvertes,
04:13 quand on a, vous avez évoqué le livre noir du communisme, qui a été quand même,
04:16 qui a fait sauter un gros tabou, il faut bien le dire,
04:19 je rappelle quand même que ce livre a été publié à plus d'un million d'exemplaires,
04:24 et a connu 26 traductions dans le monde entier.
04:27 C'est donc qu'il y avait une attente,
04:29 une attente de découvrir ce qu'étaient réellement ces régimes communistes.
04:33 Et donc, et encore, nous n'avions les archives, ou un début d'archives que pour l'URSS,
04:38 et pour certains pays d'Europe de l'Est, évidemment, on n'avait pas les archives chinoises, ni nord-coréennes, etc.
04:43 - Mais malgré toutes ces révélations, Stéphane Courtois,
04:45 on détecte des signes d'une sorte de nostalgie stalinienne.
04:49 Je vais vous prendre, par exemple, ce qui s'est passé cette semaine à l'Assemblée nationale,
04:51 le vote d'une résolution reconnaissant l'holodomor.
04:54 Dans l'Ukraine, dans les années 30, l'holodomor c'est la famine organisée systématiquement justement par Staline.
05:01 Vous avez des députés communistes qui ont refusé, qui ont même voté contre la reconnaissance de ce génocide.
05:07 - Ah oui, non mais, donc on a...
05:10 Alors, l'effondrement de l'URSS a évidemment fait tomber le mythe,
05:17 le fameux mythe de la grande révolution prolétarienne mondiale, etc.
05:22 Mais, il y a toujours des îlots de résistance, d'une part,
05:25 vous évoquez les communistes, et même, on n'a pas encore le résultat du congrès de la CGT,
05:31 mais bon, on sait très bien qu'en ce moment même, au sein de la CGT,
05:35 les gens qui ont mis en minorité M. Martinez se réclament pour certains du stalinisme,
05:41 ce qui est quand même extraordinaire.
05:43 Mais, cette mythologie soviétique étant quand même largement tombée,
05:48 des gens comme M. Mélenchon se rattachent, et on l'a vu lors des manifestations,
05:54 se rattachent à la révolution française, d'où la guillotine.
05:56 - Mais alors, quel est le lien, Stéphane Courtois, qu'on peut tendre,
05:59 entre d'un côté, cette nostalgie de l'URSS,
06:03 et les feux de poubelle qu'on voit dans Paris,
06:06 la violence extrême qu'on a pu voir à Sainte-Soline encore ce week-end,
06:11 est-ce qu'il y a une filiation idéologique entre ces mouvements anciens,
06:15 et ce que l'on voit actuellement, et ce discours de réactivation de la violence
06:18 comme outil légitime de l'action politique ?
06:21 On parlait de ce Andréas Malm, qui défend l'idée d'un léninisme écologique,
06:26 en fait, les vieilles idées s'accrochant quelque part aux tendances nouvelles.
06:29 - Oui, d'ailleurs, ce qui est important dans cette expression, c'est le léninisme,
06:34 parce que tout le logiciel révolutionnaire, radical, et totalitaire,
06:38 parce que c'est surtout là-dessus qu'il faut insister,
06:42 c'est une pensée totalitaire, qui a mené un régime totalitaire,
06:46 le premier régime totalitaire de l'histoire d'ailleurs,
06:48 et donc ça c'est tout à fait fondamental,
06:51 et ces gens s'inscrivent dans cette logique,
06:55 parce que c'est vers ça qu'ils veulent aller,
06:58 ils veulent nous imposer d'abord en parole,
07:01 un certain nombre d'opinions, vous l'avez dit, leur causer juste,
07:06 à partir du moment où leur causer juste,
07:08 les gens qui ne sont pas d'accord avec eux sont forcément dans l'erreur,
07:11 et ça renvoie directement au marxisme d'ailleurs,
07:14 cette pensée scientiste,
07:16 on a un parallèle entre la pensée scientiste du marxisme,
07:20 nous expliquant que le sens de l'histoire c'est que le capitalisme c'est fini,
07:24 et qu'on va vers le socialisme et le communisme,
07:26 et ces gens écologistes qui nous expliquent eux aussi que,
07:30 à cause du réchauffement climatique,
07:32 toute notre vie doit entièrement changer,
07:34 les paysans doivent arrêter de faire ceci, les industriels cela,
07:37 et même les citoyens de prendre une douche !
07:40 - Et ça ce serait du carbo-fascisme,
07:42 expression employée par Edwi Plenel que citait Eugénie Bastia y'a quelques minutes.
07:45 - Oui absolument,
07:47 ces gens là ont trouvé une cause,
07:50 qu'ils présentent comme une cause universelle,
07:53 qui touche le monde entier,
07:54 ça remplace la grande révolution prolétarienne mondiale,
07:57 c'est une cause universelle.
07:58 - Donc il y a une radicalisation de l'écologie,
08:00 et une écologisation de l'ultra-gauche en fait.
08:03 - Absolument, parce qu'ils ont érigé un thème,
08:08 en thème majeur, absolu,
08:11 auquel tout le monde doit se soumettre,
08:13 et on a des climatologues qui nous annoncent de gigantesques catastrophes,
08:18 exactement comme Lénine annonçait que le capitalisme,
08:21 et Marx annonçait que le capitalisme allait s'effondrer,
08:24 c'était il y a 200 ans,
08:26 - Le pari de l'apocalypse quelque part.
08:28 - Absolument, le chantage à l'apocalypse est tout à fait efficace parfois.
08:34 - Alors un autre aspect du problème Stéphane Courtois,
08:37 cette propagation du bruit révolutionnaire,
08:40 ce climat d'insoumission dans les manifs,
08:42 qui parfois vire un peu à la proto-insurrection,
08:44 est-ce que ça n'est pas aussi rendu possible par une faiblesse du pouvoir ?
08:48 Je vais vous citer Jean-Louis Bourlange, député modem dans le Figaro,
08:50 cette semaine qui parlait de "crise de la décision publique".
08:54 - Oui c'est tout à fait clair.
08:56 Bon, on imagine le général de Gaulle aujourd'hui,
08:59 ça ne se passerait pas comme ça.
09:03 - Pourtant le pouvoir est actuellement ferme sur ses jambes,
09:05 quand vous entendez Gérald Darmanin repousser d'une main
09:08 l'idée des violences policières,
09:09 ou Emmanuel Macron être sans concession sur ces points-là.
09:11 - Et ça ce sont des paroles.
09:13 Je vous rappelle qu'en 1968,
09:15 le général de Gaulle au bout de quelques semaines
09:17 a viré son ministre de l'Intérieur.
09:20 - J'étais maouiste en 1968, je précise.
09:22 - Pas encore, mais j'y allais tout droit.
09:24 En tout cas je participais complètement au mouvement.
09:27 Je rappelle que lors d'un conseil des ministres,
09:29 pendant le mouvement,
09:30 le général de Gaulle, obligé de rentrer en urgence de l'étranger
09:33 où il était en visite officielle,
09:35 à la fin du conseil des ministres,
09:36 s'adresse au ministre de l'Intérieur et lui dit avec sa voix inimitable,
09:40 "Monsieur le ministre de l'Intérieur,
09:42 vous devez savoir qu'en cas d'émeute,
09:44 le ministre doit savoir donner l'ordre de tirer."
09:47 Inutile de vous dire que le ministre de l'Intérieur disparaît sous la table.
09:50 Bon, le général évidemment faisait un petit numéro,
09:53 mais quelques semaines plus tard,
09:55 il l'a évacué, il l'a remplacé par M. Marcelin
09:58 qui était un vieux gaulliste et un résistant,
10:01 un sérieux résistant de la Deuxième Guerre mondiale,
10:04 qui lui a pris des mesures beaucoup plus sévères.
10:06 Moi je me souviens quand même,
10:08 effectivement vous l'avez rappelé, militant maoïste à plein temps
10:11 entre 68 et 72,
10:13 je peux vous dire que la répression de l'époque
10:17 était quand même beaucoup plus féroce que celle d'aujourd'hui.
10:19 - Mais quelque part on voit que la violence...
10:21 - Simplement, les policiers, les CRS, les gardes mobilistes
10:25 savaient qu'ils étaient couverts par le pouvoir.
10:27 Alors qu'aujourd'hui, il est très clair
10:30 que notre police sait parfaitement
10:32 qu'elle ne sera pas couverte s'il se passe quelque chose.
10:34 - En même temps on voit que la violence ça paye,
10:36 Stéphane Courtois, regardez le projet d'aéroport
10:38 à Notre-Dame-des-Landes, il a été abandonné,
10:40 le projet de barrage de Syvins a été abandonné,
10:42 Sainte-Sauline,
10:44 il y a de fortes chances que ce soit le cas si par hasard
10:46 le décédant, le manifeste entre la vie et la mort
10:48 venait à passer de vie à trépas,
10:50 voilà, la violence ça paye.
10:52 - Oui, et ça peut payer dans les deux sens,
10:54 parce que dans l'Haut-et-Garonne
10:56 il y a ce fameux barrage
10:58 qui avait été autorisé par une préfète
11:00 et que les paysans
11:02 ont construit eux-mêmes
11:04 de manière rapide,
11:06 et qui a été maintenu.
11:08 Et je rappelle que
11:10 la FNSEA, la grande centrale syndicale paysanne
11:12 tenait son congrès
11:14 ces derniers jours,
11:16 et que sa présidente
11:18 qui vient de laisser la place,
11:20 Mme Lambert, a tenu hier un discours
11:22 extrêmement dur à l'égard des gens
11:24 qui voulaient justement
11:26 commencer à saboter
11:28 les bassines, etc., en disant
11:30 "maintenant ça suffit".
11:32 Et donc il n'est pas impossible que face
11:34 à quelques milliers de manifestants
11:36 écolos radicaux, on voit apparaître
11:38 quelques centaines
11:40 de tracteurs avec des gens
11:42 très décidés qui vont
11:44 les virer, je n'en sais rien.
11:46 Mais c'est en partie ce que cherchent
11:48 ces militants.
11:50 Il ne faut pas s'en cacher,
11:52 ils cherchent la guerre civile.
11:54 - Merci beaucoup Stéphane Courtois pour vos lumières.
11:56 Et j'envoie à tous vos ouvrages nombreux,
11:58 le livre noir de Vladimir Poutine,
12:00 le dernier, "Lénine, l'inventeur du totalitarisme",
12:02 le bolchevisme à la française,
12:04 le livre noir du communisme, et tant d'autres.
12:06 Merci d'être venu nous voir ce matin dans le studio d'Europe 1.
12:08 Stéphane Courtois, bonne journée à vous.