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Dans son émission média, Philippe Vandel et sa bande reçoivent chaque jour un invité. Aujourd'hui Nadia Farès, actrice et Nathalie Marchak, réalisatrice pour la série "Les Siffleurs", sur France 2.
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Transcription
00:00 Bonjour Nadia Fares, on est presque dans le sujet. Vous êtes comédienne révélée au grand public en 94, c'était "N'oublie jamais" avec Thierry Lhermine,
00:06 vous avez ensuite tourné avec Arcadi, Bernie Bonvoisin, "Les démons de Jésus", Claude Lelouch, "Homme-femme, mode d'emploi" et j'oublie pas
00:11 la série "Les rivières pourpre" de Mathieu Kassovit. C'est votre actualité,
00:14 ce sont les "Siffleurs", téléfilm en deux parties ce soir sur France 2, ce sera à 21h.
00:18 Film réalisé par Nathalie Marchak, bonjour. - Bonjour. - Les "Siffleurs", Nathalie Marchak, c'est d'abord l'histoire de Lila,
00:25 une jeune étudiante, une jeune lycéenne parisienne, qui est elle en plus de ça ?
00:30 - C'est une jeune influenceuse qui à chaque fois qu'elle se fait aborder dans la rue, en fait, plus qu'aborder, harceler,
00:35 décide de prendre un selfie avec justement le mec qui la harcèle.
00:39 Elle crée un compte, voilà, et au bout de quelques photos, elle disparaît. - Ce compte s'appelle "Les Siffleurs", d'où le titre du film,
00:45 elle n'est pas lycéenne, elle est étudiante. Alors parfois les types s'en rendent même pas compte qu'ils ont été pris en selfie par elle,
00:51 parfois ça tourne mal, exemple, c'est l'une des toutes premières scènes, ça se passe alors que Lila
00:55 marche dans la rue, il y a une voiture qui arrive avec trois jeunes types dedans.
00:59 - Tu comprends photo toi ?
01:03 - Petite salope !
01:05 - Bah voilà, y'a plus de photo. - Tu parles plus là.
01:07 - Tu veux faire la star, tu nous réponds pas.
01:10 Mais tu sais, quand je vais te baiser là, quand je vais te baiser,
01:13 quand je vais t'enfoncer ma b*** dans ton cul, tu vas kiffer, ça va te faire mal, mais tu vas kiffer, tu vas crier.
01:20 - Ça se voit, c'est une petite salope. - Bien sûr, faut l'encourager, c'est tout.
01:24 - Fais-lui peur, fais la timide. - Vas-y, enlève ta jupe, fais quelque chose.
01:27 Quoi, arrête, arrête quoi ? Arrête quoi ?
01:30 - Tu vois ce qu'il y a ? Enlève ta jupe !
01:32 - Fais pas la timide toi ! - Enlève ta jupe, t'as l'air de te parler gentiment.
01:36 - C'est chaud là, c'est chaud.
01:39 - Arrête, s'il te plaît.
01:41 - T'es sur ? - Arrête, s'il te plaît.
01:43 - Arrête, s'il te plaît.
01:45 - Arrête, s'il te plaît. - Les keufs les gars, les keufs !
01:47 - Vas-y, t'as de la chance.
01:49 - Sale pute.
01:51 - Je précise que le bip est de nous, il sera pas ce soir sur France 2.
01:55 Nathalie Marchak, cette scène, vous l'avez carrément, ou plutôt quasiment vécue quand vous aviez 19 ans.
02:00 - Oui, oui, je l'ai vraiment vécue d'ailleurs, ça me glace de l'entendre.
02:04 Et c'était très important pour moi de la filmer de façon extrêmement précise du coup,
02:08 pour aussi être avec elle tout le temps pendant cette scène.
02:11 Mais je crois que je l'ai vécue, mais plein de femmes l'ont vécue en fait.
02:13 C'est-à-dire que c'est ça dont je me suis rendu compte après.
02:15 C'est-à-dire que pendant longtemps, c'est pas la seule agression que j'ai subie.
02:18 Et c'est vrai que je n'en parlais pas, parce que finalement on se dit toujours,
02:21 bon ben c'est peut-être à moi de faire attention, etc.
02:23 Et puis au bout d'un moment, je me suis rendu compte que ça arrivait,
02:25 et que c'était arrivé à énormément de femmes.
02:27 Je crois que les chiffres, c'est pratiquement 86% des femmes.
02:30 - 86% des femmes disent avoir déjà été victimes de harcèlement de rue.
02:33 66 ont essuyé des sifflets, et ce chiffre est glaçant.
02:36 31 ont subi des attouchements, une enquête de l'IFOP de novembre 2018.
02:40 Nadia Fares, c'est là que vous entrez en scène.
02:44 Vous incarnez Marianne Kassem, c'est une capitaine de police chargée de l'enquête.
02:47 Car vous allez retrouver deux fois Lila, d'abord qui tente de porter plainte,
02:51 et ensuite dans des circonstances plus dramatiques.
02:53 Racontez, qui est votre personnage Marianne Kassem ?
02:56 - Alors mon personnage, c'est une femme qui se cache un petit peu derrière
03:00 sa carapace, son blouson en cuir, son jean un peu...
03:04 Oui, de mec, avec une démarche un peu comme ça, masculine, une sorte de bonhomme.
03:09 Et en fait on découvre que c'est une femme qui occulte un peu sa part féminine,
03:12 parce qu'elle a aussi ses propres démons, son propre passé, ses propres traumas.
03:18 Et qu'elle va, à travers la rencontre avec Lila, être confrontée à ce choc des générations.
03:27 Parce que ça va la ramener en fait à sa propre histoire.
03:30 Et effectivement au début de la série, c'est quelqu'un qui a des propos un peu misogynes.
03:34 Quand Lila arrive au commissariat pour porter plainte,
03:38 elle fait la remarque à son jeune lieutenant en lui disant
03:42 "Ecoute, il ferait bien de mettre des jupes un peu plus longues."
03:46 Et c'est lui d'ailleurs qui la remet à sa place en lui disant
03:48 "Mais c'est complètement misogyne de dire ça."
03:51 C'est là où l'écriture de Nathalie Marchak est formidable,
03:55 puisqu'elle a évité un peu les clichés...
03:58 - Vous avez créé ce lieutenant de police plus féministe que Marianne.
04:01 - Absolument, mais je pense que c'est important.
04:03 C'est aussi emblématique de la nouvelle génération.
04:05 Il y a énormément d'hommes qui aujourd'hui ne supportent plus ces comportements.
04:09 Et c'est très important pour moi de leur donner leur place dans cette fiction.
04:12 - Quand Lila veut porter plainte, le policier qui est là de garde lui explique
04:15 que ça ne servait strictement à rien. Lila est allée porter plainte.
04:18 Vous-même, est-ce que vous l'avez fait déjà une fois dans votre vie, Nathalie Marchak ?
04:21 - Non, je ne suis pas allée porter plainte.
04:23 Et d'ailleurs, la plupart des agressions que j'ai subies à ce stade-là,
04:26 je n'en ai même pas parlé à mes parents.
04:28 Et je le dis parce que j'aimerais beaucoup que les gens regardent en famille ce soir.
04:31 Parce qu'il y a eu notamment lors des avant-premières,
04:33 beaucoup d'hommes qui ont trouvé que c'était un peu exagéré.
04:36 Et puis en fait, ils sont rentrés chez eux après.
04:38 Certains m'ont écrit en disant qu'ils avaient parlé à leur fille,
04:40 qu'ils avaient parlé à leur nièce, qu'ils avaient parlé aux femmes qui les entouraient.
04:43 Ils se sont rendus compte que c'était totalement réaliste.
04:46 Et je trouve ça très important du coup, d'en parler tous ensemble
04:50 et de lever un peu ces tabous qui font qu'aujourd'hui,
04:53 quelque part, on accepte dans la société que les prédateurs,
04:56 que les hommes soient des prédateurs, que les femmes soient des proies
04:59 et que ce soit dangereux de se promener dans la rue. Il faut que ça change.
05:02 - Je suis obligé de vous poser la question. Est-ce que vous-même, vous avez subi le harcèlement de rue ?
05:05 - Le harcèlement de rue...
05:07 Oui, j'ai eu des sifflements.
05:10 J'ai jamais subi vraiment...
05:13 Si, une ou deux fois. Si, si, en fait.
05:16 - Quand on y repense, on en trouve toujours. - C'est vrai, c'est vrai.
05:18 Il y a eu une ou deux fois où effectivement, j'ai pu avoir des comportements un peu vulgaires, agressifs.
05:24 J'ai eu la chance de ne pas avoir subi des attouchements.
05:28 Oui, oui. Après, effectivement, je l'ai dit dans quelques interviews, dans mon métier,
05:33 surtout il y a 25 ans, ça jouait un peu à la plote.
05:37 Effectivement, il y avait des mains baladeuses, il y avait des comportements qui étaient déplacés.
05:43 Voilà, c'est vrai que maintenant...
05:45 - Et est-ce que vous avez raté des rôles à cause de ça ?
05:47 - Écoutez, je ne sais pas. Certainement, oui, certainement.
05:51 Oui, oui, je pense. Oui, il y a une personne auquel je pense.
05:55 Je ne citerai pas, évidemment. Oui, je pense, peut-être, oui.
05:58 - Il y a une histoire dans l'histoire, Nadia Fares, parce que Marianne a un secret qu'elle a enfoui.
06:02 Mais je ne peux pas raconter le secret. - Non, on ne peut pas, oui.
06:04 - Et je ne peux pas non plus dire...
06:06 Il y a un twist assez incroyable que je ne peux pas raconter, malheureusement.
06:10 - Mais non, ce qui est intéressant, c'est que c'est vrai qu'on est toujours rattrapé par son passé.
06:13 Très souvent, on a des traumas de l'enfance qu'on n'ose pas.
06:16 On met la poussière sous le tapis, mais on est souvent rattrapé après, surtout quand on devient mère.
06:21 Voilà, on évolue et puis il va se passer des circonstances qui vont nous ramener à notre propre histoire.
06:26 C'est le cas de Marianne Kassem.
06:28 Et c'est vrai que ce personnage va avoir...
06:35 Elle a un arche, Marianne Kassem, qui est vraiment chouette,
06:38 parce que, comme je disais tout à l'heure, elle démarre un peu bonhomme.
06:41 Et grâce à cette nouvelle génération, elle va ouvrir,
06:46 elle va laisser la place à la vérité et à la rencontre aussi avec Charles Berling, bien sûr.
06:51 - Nathalie Marchal, vous disiez que quand il vous est arrivé ce qui vous est arrivé,
06:54 vous n'avez parlé à personne, pas même à vos parents.
06:57 Est-ce que vous en avez parlé à vos parents depuis,
06:59 ou est-ce qu'ils l'ont découvert à la lecture des interviews que vous avez données pour ce film ?
07:04 - Malheureusement, mes parents sont décédés.
07:05 - Ah, pardon.
07:06 - Non, il n'y a pas de problème.
07:07 Donc, ils ne l'ont pas découvert à cette occasion,
07:09 mais j'ai regretté de ne pas leur en avoir parlé.
07:11 Ce qui m'intéressait aussi, pour parler justement de toute cette génération de femmes,
07:15 c'est que moi j'ai été marquée par des femmes plus âgées qui parfois m'ont dit "mais écoute, c'est bon".
07:20 Il y en a même une un jour qui m'a dit qu'elle avait subi une agression extrêmement grave à l'âge de 13 ans.
07:25 Elle m'a dit "mais voilà, c'est pareil pour tout le monde, c'est bon, on ferme sa gueule et puis on avance".
07:28 Et j'avais envie aussi de m'adresser à cette génération de femmes,
07:31 et de leur dire "ce n'est pas parce que vous, vous avez malheureusement subi tout ça,
07:34 et elles se sont battues pour plein d'autres choses".
07:36 Et je veux rendre hommage aussi à cette génération qui s'est battue pour le droit à l'avortement,
07:39 pour la liberté sexuelle, etc.
07:40 Mais ce n'est pas parce que vous, vous avez souffert ces choses-là,
07:43 que la génération qui arrive doit souffrir la même chose.
07:45 - Depuis l'été 2018, le harcèlement de rue est sanctionné d'une amende de 90 euros,
07:49 1500 euros si la victime a moins de 15 ans.
07:52 A votre connaissance, est-ce qu'il y a des cas sanctionnés chaque année ?
07:54 Et si oui, combien ?
07:55 - La difficulté c'est d'en apporter la preuve, déjà.
07:58 - D'où ma question, est-ce qu'il y a des cas ?
08:00 - Je ne sais pas, je ne peux pas vous répondre, je n'ai pas les statistiques.
08:04 Je n'ai pas l'impression que ce soit énormément sanctionné.
08:06 Moi, quand je parle, notamment, j'ai travaillé aussi avec des associations,
08:10 je suis beaucoup, on va dire, le travail de ces associations,
08:12 notamment "Dis bonjour sale pute", "Y a nous toutes",
08:15 il y en a plein qui travaillent sur le terrain.
08:16 Les victimes ont du mal à raconter,
08:18 elles ont toujours l'impression de ne pas être prises au sérieux,
08:20 d'où cette scène dont vous parliez, où elle va porter plainte.
08:22 Il y avait eu le hashtag aussi "Double peine".
08:24 On voit bien que c'est compliqué.
08:25 - On l'a vu, pardon moi, dans l'actualité très très récente,
08:27 il y a cette dame, ce n'est pas du harcèlement de rue,
08:28 mais cette dame qui a été tuée par son conjoint il y a deux jours
08:31 et qui avait porté plainte très peu de temps avant.
08:33 Et la plainte n'a pas été reçue, il ne s'est rien passé.
08:35 - Oui, je pense que les plaintes ont du mal à être entendues.
08:37 - Effectivement.
08:38 - Très souvent, et d'ailleurs on le voit dans la série,
08:40 ils disent "s'il n'y a pas eu acte physique, on ne peut pas prendre votre plainte".
08:45 C'est d'ailleurs ce qui est très bien montré dans la série.
08:49 Ou alors une main courante pour qu'il y ait une trace.
08:52 - La Première Ministre a annoncé des mesures justement à l'occasion de cette journée du 8 mars.
08:56 Merci beaucoup Nadia Fares, merci beaucoup Nathalie Marchal.
08:59 Je rappelle, les siffleurs téléfilmes sont en deux parties.
09:02 À voir ce soir sur France 2 à 21h avec un guest dont je ne peux pas donner le nom.
09:07 Merci d'avoir été avec nous en direct sur En Bain.

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