Et si la femme, bien loin de sortir de la cuisse de Jupiter ou de la côte d’Adam, était née de la consommation ? Drôle d’histoire. On peut la faire remonter au XVIe siècle, l’époque où les femmes paraissent dans l’espace public, à la table du seigneur ou dans les premières auberges ; dans les représentations plastiques des écoles artistiques comme dans la littérature de la Renaissance. Et déjà, les premiers regards sur les femmes qui consomment sont peu sympathiques, au point que tout usage est aussitôt assimilé à un excès. Excès de beauté pour l’une (Diane de Poitiers), abus de pouvoir pour l’autre (Catherine de Médicis). Toujours et déjà femmes fatales. Plus populaires, les femmes qui cèdent à la boisson (« prises » de boisson) finissent en «combustion humaine spontanée».
Le grand siècle de la consommation débute à la fin du XIXe siècle. C’est aussi celui de la femme qui s’émancipe par ses consommations, que l’ « on » (la rumeur, les hommes) va forcément considérer comme excessives. Le temple de la consommation, ici le grand magasin, sert d’écrin à tous les excès. La lecture de Zola fait bien sûr le bonheur des dames. «Lionne» au XIXe, « garçonne » début XXe, voici que la femme devient «féministe», volant en cela un qualificatif médical. «Hystérique», «excentrique», «morphinée», «alcoolique», la femme s’émancipe et le jugement s’alourdit. Mais définir sa culpabilité n’est-ce pas en rester à la négation de son identité ?
Didier Nourisson
Le grand siècle de la consommation débute à la fin du XIXe siècle. C’est aussi celui de la femme qui s’émancipe par ses consommations, que l’ « on » (la rumeur, les hommes) va forcément considérer comme excessives. Le temple de la consommation, ici le grand magasin, sert d’écrin à tous les excès. La lecture de Zola fait bien sûr le bonheur des dames. «Lionne» au XIXe, « garçonne » début XXe, voici que la femme devient «féministe», volant en cela un qualificatif médical. «Hystérique», «excentrique», «morphinée», «alcoolique», la femme s’émancipe et le jugement s’alourdit. Mais définir sa culpabilité n’est-ce pas en rester à la négation de son identité ?
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