Santé publique France (SPF) a annoncé mercredi 16 avril 6 morts "liés au chikungunya" à La Réunion. Plus de 33 000 cas ont été confirmés depuis le début de l'année. Regardez l'analyse de Odile Launay, professeur en maladies infectieuses à l'université Paris cité.
Regardez Les trois questions de RTL Petit Matin avec Jérôme Florin du 17 avril 2025.
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00:00RTL au coeur de l'actu
00:03Au coeur de l'actu sur l'île de la Réunion ce matin, c'est l'un des principaux titres de ces dernières heures.
00:09Le bilan de l'épidémie de Chikungunya est monté à 6 morts depuis le début de l'année.
00:14Plus de 100 000 personnes pourraient avoir été touchées.
00:17La Réunion compte 900 000 habitants.
00:20Bonjour Odile Lenay.
00:21Bonjour.
00:22Vous êtes infectiologue et professeur des universités à l'université de Paris.
00:26On rappelle d'abord ce que c'est, ça s'attrape par une piqûre de moustique.
00:30Le Chikungunya c'est un virus, c'est un arbovirus qui est transmis par une certaine catégorie de moustiques qu'on appelle le moustique tigre.
00:37Et ça se manifeste comment ? Quels sont les symptômes ?
00:39Alors ça se manifeste comme une infection virale.
00:42Ça peut être très peu symptomatique, voire asymptomatique, mais ça peut entraîner de la fièvre.
00:48Et surtout, la caractéristique de cette infection, c'est des manifestations articulaires, rhumatologiques,
00:55avec des douleurs qui peuvent être extrêmement invalidantes.
00:58Et dans des conditions plus particulières, on peut avoir des atteintes méningo-encéphaliques,
01:04c'est-à-dire des atteintes neurologiques, cérébrales.
01:07Et c'est ce qui inquiète aujourd'hui, c'est ces manifestations qu'on voit chez des tout petits nouveau-nés nourrissons
01:14qui ont des formes particulièrement sévères de cette infection.
01:18On le disait, il y a eu six morts depuis le début de l'année.
01:20Et ce sont des personnes fragiles à la base ?
01:22Oui, les décès qui ont été observés sont essentiellement des sujets âgés,
01:26ce qui justifie de la campagne de vaccination aujourd'hui qui cible en priorité cette population
01:31et les personnes qui ont ce qu'on appelle des comorbidités,
01:34c'est-à-dire finalement des maladies chroniques qui vont augmenter le risque de faire des formes graves.
01:39Le vaccin, justement, il y a un vaccin, mais la campagne de vaccination a commencé le 7 avril seulement.
01:44Pourquoi si tard ? Puisque l'épidémie de chikungunya a commencé en août dernier.
01:48Alors, c'est un nouveau vaccin. C'est un vaccin qui, pour l'instant, n'a jamais été utilisé au moment d'une épidémie.
01:56C'est un vaccin vivant.
01:57Donc, il n'y avait pas de vaccin avant ?
01:59Il n'y avait pas de vaccin avant, donc c'est nouveau.
02:01Ce vaccin disponible, c'est un vaccin qu'on appelle un vaccin vivant qui induit une réponse immunitaire.
02:07Donc, la protection aujourd'hui n'est pas vraiment confirmée chez l'homme,
02:12mais il sera très probablement efficace.
02:14On a des données chez l'animal qui montrent une grande efficacité de ce vaccin,
02:19mais il entraîne des symptômes comme le chikungunya,
02:22qui sont liés à la réplication de cette souche vaccinale.
02:27Et un deuxième vaccin va être disponible très prochainement,
02:31qui, lui, est un vaccin qu'on peut appeler sous-unitaire,
02:33donc qui n'entraîne pas de réplication de la souche vaccinale,
02:36avec, dans ce qu'on sait de ce vaccin, peut-être des effets indésirables
02:42qui seront moins fréquents et moins importants.
02:45Alors, on a amorcé une décrue, semble-t-il.
02:47L'activité a ralenti aux urgences.
02:49Ça veut dire que le pire est passé ?
02:50Oui, alors, c'était les prévisions de l'équipe de l'Institut Pasteur,
02:56qui avait modélisé que le pic de l'épidémie devait être observé à la mi-avril.
03:04Et c'est aussi les observations de Santé publique France
03:06qui voient une diminution depuis maintenant une semaine
03:09du nombre des consultations chez le médecin généraliste ou aux urgences.
03:14Odile Lenay, aucun cas de chikungunya n'avait été signalé à la Réunion depuis 2010.
03:19Pourquoi il avait disparu ?
03:20Alors, on connaît ce virus, on sait qu'il évolue comme ça par épidémie.
03:26Donc, à la Réunion, il y avait une très grosse épidémie en 2009-2010
03:30avec une proportion importante de la population qui avait été infectée,
03:34des grosses mesures pour démoustiquer la Réunion.
03:38Et en fait, on pense qu'à la fois la chaleur,
03:42mais aussi les plus importantes qu'a connues l'île de la Réunion
03:47et le fait qu'on a maintenant une population qui n'avait pas été préalablement infectée,
03:52toutes ces raisons expliquent probablement la nouvelle épidémie.
03:56Mais c'est tout à fait habituel avec cette infection virale.
03:59Donc là, c'est en train de se terminer.
04:00Il n'y aura pas de reprise dans les semaines ou les mois qui viennent ?
04:03Non, a priori, l'épidémie va régresser et on considère qu'en vaccinant les personnes
04:09les plus fragiles, on va arriver finalement à la fin de cette épidémie.
04:14Ça ne veut pas dire que ça ne reviendra pas dans le futur.
04:17On sait aussi qu'il y a maintenant des cas à l'île Maurice,
04:20il y a des cas aussi à Mayotte.
04:22Et l'inquiétude, c'est voir ce virus disséminer ailleurs.
04:27Pourquoi pas en métropole, puisqu'on a des moustiques qui peuvent transmettre ce virus,
04:31mais surtout aussi en Antiguillane où les conditions sont tout à fait propices
04:36à la circulation de ce virus ?
04:39Oui, c'est vrai qu'on voit de plus en plus ces moustiques-tigres.
04:41Ça voudrait dire qu'on pourrait avoir une épidémie en métropole ici ?
04:46Alors, il y a une surveillance organisée en France sur ces moustiques-tigres.
04:51Et effectivement, on n'est pas du tout à l'abri de voir en métropole
04:54certains cas d'arbovirus, le chikungunya, mais aussi la dengue.
04:59Donc ça, ça fait partie des inquiétudes qu'on peut avoir,
05:03l'émergence de ce type d'infection virale aussi en métropole.
05:07Merci beaucoup Odile Lenay, infectiologue.
05:09Merci d'avoir été notre invitée ce matin sur RTL.
05:12Bonne journée, les 6h.
05:13Merci à vous.