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Surcharge cognitive, lassitude digitale, manque d'engagement : comment surmonter la fatigue learning ? Stratégies de personnalisation, nouveaux formats et implication des équipes au cœur des solutions.

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Transcription
00:00Vous regardez BeSmart4Change, nous sommes actuellement au pavillon d'Arménonville
00:11dans le cadre de l'événement YouSpring organisé par le groupe FICAD.
00:14Ensemble, on va parler de Fatting Learning, quels leviers pour remotiver les équipes.
00:19Pour ce sujet, je reçois Lidi Atiogbe, ingénieur pédagogique et Digital Learning Manager chez Kronos.
00:26Didier Bourys, directeur de la WeAcademy chez SNCF Voyageurs.
00:29Et Karine Noemi, directrice du Développement Professionnel chez AG2R La Mondiale.
00:34Lidi, le terme de fatigue d'apprentissage émerge dans les organisations.
00:40De quoi est-ce qu'on parle exactement ?
00:42La fatigue d'apprentissage, si on reprend le learning fatigue, si on reprend les deux termes,
00:48déjà apprendre, qu'est-ce que c'est ?
00:50Apprendre, c'est saisir l'information, prendre, appréhenderer, ça vient de là en latin, l'étymologie.
00:57Et donc, on prend l'information, c'est-à-dire qu'on fait un effort.
01:01On fait un effort et apprendre, ça nécessite de l'attention, ça nécessite de l'engagement,
01:06ça nécessite de la mise en pratique et un retour d'information et ça nécessite de consolider.
01:11On voit bien qu'à la fois il y a un effort et il y a quelque chose qui s'inscrit sur la durée.
01:16Et donc, il y a une fatigue qui se génère par rapport à cet effort et cette intensité.
01:21C'est normal de ressentir une fatigue liée à l'apprentissage.
01:26Ce qui est par contre en termes de fatigue, il y a la fatigue normale et il y a la fatigue anormale.
01:31C'est ce que définit l'assurance maladie sur ce terme qui est un symptôme médical finalement.
01:36Et donc, ce qui serait la learning fatigue qu'on cherche à éviter dans le cadre de notre échange,
01:42ça serait cet effort intense et prolongé d'apprentissage qui entraînerait une fatigue anormale,
01:49c'est-à-dire laquelle on ne récupère pas facilement finalement.
01:52Est-ce qu'il n'y a pas une question du coup de trop de formation dans cette notion de fatigue learning ?
01:57Il y a la question de la quantité de formation.
02:00Il y a la question de la quantité d'information dans la formation.
02:03Il y a la question du rythme.
02:04On va sûrement revenir aussi à travers les prochaines questions.
02:08Mais voilà, c'est en tout cas la solution telle qu'on l'a vue dans notre échange tout à l'heure.
02:13C'est cette nécessité d'équilibre finalement entre l'apport de contenu, les méthodes pédagogiques.
02:20C'est vraiment une question d'intensité, de prologement de cette intensité dans le temps qui ne doit pas être présente.
02:29Sinon, ça génère de la fatigue.
02:32Didier, comment est-ce que cette fatigue se manifeste concrètement chez les apprenants
02:37et comment les équipes pédagogiques peuvent-elles mieux l'anticiper ?
02:40Alors, comment elle se manifeste ? On a tous les stagiaires qui dorment pendant toutes les formations.
02:45Non, trêve de plaisanterie.
02:49En fait, aujourd'hui, dans le concept de fatigue learning, c'est un concept marketing comme il y en a plein.
02:54Est-ce que c'est nouveau ? C'est une vraie question.
02:57Et donc, est-ce qu'aujourd'hui, les choses changent ?
02:59Ce qui change, ce n'est pas forcément la difficulté d'apprentissage qui est finalement,
03:04quand on regarde que ce soit des élèves, que ce soit des professionnels,
03:08on a toujours eu la même difficulté à travers ce que Didier disait tout à l'heure.
03:12Par contre, ce qui change, c'est qu'aujourd'hui, on est dans un environnement de multiples sollicitations.
03:18C'est-à-dire qu'on se retrouve avec un écran qui est celui sur lequel est affichée la formation,
03:24mais éventuellement un ou deux téléphones dans la poche,
03:27plus peut-être un écran externe sur lequel est affichée quelque chose,
03:30plus toutes les préoccupations qu'on a.
03:32Donc aujourd'hui, ce qui génère cette fatigue, c'est finalement tout notre environnement habituel de travail.
03:39De plus, on se retrouve quand même dans un environnement où, à quelques exceptions près,
03:45les exceptions, c'est quand on est sur des rôles de production pur et dur,
03:49à ce moment-là, on est dégagé de notre production, la production va tourner sans nous et on va faire de la formation.
03:54Mais dans bon nombre de cas, la formation, notre travail ne s'arrête pas.
03:57C'est-à-dire qu'on est formé, mais en permanence, on peut avoir des mails qui tombent,
04:01on peut avoir des Teams qui tombent, on peut avoir un certain nombre de choses
04:04qui nous sollicitent en parallèle de la formation et qui nous préoccupent.
04:07Et c'est cet environnement de multitasking qui fait que, mécaniquement, ça se traduit par une attention qui est moins présente,
04:15qui peut entraîner certaines absences.
04:18Est-ce qu'on en a plus maintenant qu'on en avait avant ?
04:21Oui, je pense qu'on en a plus maintenant.
04:23Est-ce que c'est quelque chose qu'on doit combattre ?
04:28Ça, c'est une question que j'ai, sur laquelle j'ai beaucoup de mal à avoir une réponse.
04:33C'est-à-dire que la formation doit préparer le collaborateur à travailler dans son environnement.
04:39Son environnement sera un environnement de multiples sollicitations.
04:43Est-ce que la formation doit être une bulle isolée qui permet de travailler de manière extrêmement protégée
04:49pour être concentré sur ce qu'on a à apprendre ?
04:51Ou est-ce qu'au contraire, on doit apprendre dans un contexte de formation qui soit le plus représentatif du contexte professionnel,
04:59donc fait avec de multiples sollicitations,
05:01et d'accepter ce côté difficile de l'apprentissage pour préparer encore mieux nos salariés et nos collaborateurs ?
05:09C'est une question sur laquelle c'est difficile de choisir.
05:12Mais ce qui est sûr, c'est qu'aujourd'hui, tous nos stagiaires ont un téléphone dans la poche.
05:15Certaines personnes ont des casques dans les oreilles. En ayant les cheveux longs, on ne les voit qu'au bout d'un certain temps.
05:20Il y a quand même un environnement qui est particulier aujourd'hui.
05:23Comme un retour à l'école, finalement ?
05:25Comme un retour à l'école, avec des gens qui sont plus ou moins motivés.
05:28Parce qu'on n'a pas parlé de la motivation, mais je pense qu'on en parlera tout à l'heure.
05:32Ça peut être aussi un sujet.
05:33On va y venir.
05:34Karine, je me tourne vers vous.
05:36Chez AG2R, est-ce que vous avez été amenée à adapter vos dispositifs ?
05:40En tout cas, on cherche des solutions pour faire en sorte que l'apprenant ait envie de s'engager dans les contenus des formations.
05:53On a différentes façons d'apprendre.
05:56Suivant ses préférences, on peut être plus réceptif à une vidéo, à un contenu digital, à un intervenant extérieur, etc.
06:09On multiplie les supports de formation.
06:14On sait aussi qu'il y a des choses qui fonctionnent vraiment bien.
06:18Par exemple, sur tout ce qui est digital, le fait d'avoir un marketing, un look and feel qui soit engageant, qui change un peu de l'ordinaire.
06:30On a mis en place un escape game digital où on est dans un environnement de super-héros.
06:37On voit que ça fonctionne.
06:39Pas pour tout le monde, bien sûr.
06:41Mais le fait d'être dans un environnement complètement différent de son quotidien,
06:45ça permet un engagement plus important.
06:49Autre exemple, le fait de créer la formation comme un événement.
06:55On met en place, par exemple, un calendrier de l'Avent à l'approche des fêtes de l'apprentissage,
07:02ou à l'été, un summer campus ou un cahier de vacances.
07:06Finalement, on va mettre l'accent sur des contenus de formation qu'on souhaite pousser auprès de nos collaborateurs,
07:14plutôt sur des sujets de soft skills.
07:17Pour leur permettre, là aussi, de se développer dans une période qui est plus propice.
07:25On se rend compte que, justement, si on cherche des indicateurs pour se dire
07:29est-ce qu'il y a un peu moins de fatigue learning, est-ce que ça marche,
07:32on voit que les taux d'engagement et de complétion des contenus sont beaucoup plus forts dans ce cadre.
07:38Donc ça, c'est deux exemples que je peux citer.
07:41Lydie, je m'adresse à l'ingénieur pédagogique.
07:45Est-ce qu'il n'y a pas un enjeu autour du format ?
07:47Est-ce que le format, la diversité des formats, ne permet pas un peu d'éviter le fatigue learning ?
07:53En tout cas, au moins pour certains collaborateurs.
07:55En partie, ce sera toujours une question d'équilibre aussi dans notre format.
07:59Oui, de la variété, ça va aider à parler au maximum de types, de profils d'apprentissage.
08:06Donc ça, c'est sûr.
08:07Mais si on se retrouve après avec des formats qui sont trop découpés,
08:10où il n'y a pas un sens, il n'y a pas un fil conducteur entre les différents formats,
08:14on va de nouveau le fatiguer parce qu'il va devoir se replonger dans chaque format,
08:20notre apprenant, et ça va générer de la fatigue, finalement.
08:23Donc ce qui va être important, c'est la variété, mais c'est ce fil rouge,
08:26ce fil liant, conducteur entre les différents formats.
08:30Didier, on insiste beaucoup sur le fait que le numérique a été une opportunité formidable en termes de formation.
08:37Est-ce qu'il n'y a pas le risque que ça devienne aussi un piège ?
08:41Alors, c'est une opportunité, on parle de fatigue.
08:45Faire déplacer des gens d'un endroit A à un endroit B pour se former,
08:48et puis le soir revenir ou rester pendant quelques jours en déplacement, ça génère de la fatigue.
08:54Donc en ça, oui, c'est clairement une opportunité.
08:56Ça permet de mettre à disposition de chacun sur son poste de travail,
09:00à l'endroit où il est, les contenus qui vont bien.
09:03Après, je reviens au sens et au fil dont parlait Lydie,
09:07et on a vu durant le salon YouSpring plein de sujets sur l'IA,
09:11qui est la préoccupation de tout le monde parce que plein de gens y voient un intérêt,
09:14mais il ne faut pas oublier l'objectif.
09:16C'est-à-dire que l'objectif d'une formation, ce n'est pas d'être dispensé, c'est d'en créer un savoir.
09:21Et on sait très bien qu'en créant un savoir, ça ne se fait pas en deux jours,
09:24et ça ne se fait pas forcément seul derrière notre écran.
09:27Si je prends aujourd'hui, on a envie de se former au bricolage,
09:30donc sujet qu'il n'y a pas forcément à voir dans le monde professionnel,
09:33j'encourage tout le monde à aller sur Youtube et à regarder des vidéos.
09:37Je suis seul, le numérique me permet depuis chez moi d'accéder à des vidéos
09:41où je vais tout apprendre, démonter un WC, monter un parquet, je vais tout pouvoir apprendre.
09:45Et j'en parle en connaissance de cause.
09:47Mais si je ne passe pas à l'action, rien ne se passera.
09:51Donc le digital, le numérique, sans passage à l'action, rien ne se passe.
09:57C'est parce que j'ai remis en état une maison que petit à petit, j'ai appris à faire en me plantant,
10:04parce que le digital ne me prévenait pas de tout,
10:07mais parce que je me plantais et que je n'avais pas le choix, il fallait bien que les WC fonctionnent,
10:11petit à petit, les choses se sont mises en place.
10:13Donc le piège, c'est de croire que le digital, le numérique, l'IA,
10:16c'est le truc où on appuie sur un bouton et à partir de là, les contenus sont acquis,
10:20tout le monde s'y est mis et tout le monde est au point et conscient de ce qu'il a à faire.
10:24Là, c'est une erreur et c'est une sorte de croyance un peu permanente que la technologie va tout résoudre.
10:30Par contre, utiliser le digital pour atteindre des populations qui sont parfois difficiles à atteindre,
10:35qui ne sont pas forcément disponibles, utiliser le digital pour surprendre dans une formation
10:39et permettre de sortir du cours un peu magistral qu'on peut avoir dans certains cas.
10:43Donc, déstabiliser un temps soit peu, surprendre dans une formation, mais ça doit s'utiliser avec un sens.
10:48Et donc, c'est ce fil qu'il ne faut pas oublier.
10:51Moi, j'ai démarré dans le conseil il y a quelques années ma carrière.
10:56On faisait des grands dossiers sur Word au début, on a vu PowerPoint arriver.
11:00Et donc, on a des gens qui ont fait des slides, mais qui ont oublié le contenu.
11:03Il ne faut pas oublier le pourquoi on fait telle formation, le sens vraiment.
11:08Et ça, on a tendance avec la technologie à s'abriter derrière la technologie, au cas de ne pas oublier.
11:13À YouSpring, il y a un élément qui est assez intéressant et que beaucoup soulignent,
11:19c'est le lien qui est créé autour de la formation.
11:23Est-ce que le numérique, finalement, ne serait pas un frein à cette création du lien
11:28qui, au-delà du contenu de la formation elle-même, apparaît de lui-même ?
11:33Le fait de se rassembler entre collaborateurs, entre équipes.
11:36Est-ce que le numérique n'empêche pas, finalement, la création de ce lien ?
11:40Je vous donne un exemple, parce que le numérique, il est protéiforme aussi.
11:44Ça dépend de l'usage qu'on en fait.
11:47On fait une formation.
11:49Dégager des gens de la production, c'est toujours très compliqué.
11:53Nous, on essaye de mettre en place des ateliers post-formation pour échanger entre pairs.
11:58Sans digital, c'est inenvisageable.
12:01Parce qu'on ne pourra pas faire revenir les gens sur nos campus
12:04pour leur faire un atelier d'une heure ou deux pour partager entre pairs.
12:08Donc, le digital nous apporte un vrai accélérateur, une vraie simplicité.
12:12Par contre, oubliez ce que vous dites, c'est-à-dire oubliez qu'une formation,
12:16c'est un lien qu'on crée avec un formateur, un formateur qui peut être inspirant,
12:20qui peut être enthousiasmant, sur lequel on peut se projeter à un moment donné.
12:24Oubliez que la présence d'un directeur, d'un sponsor dans une formation
12:27permet à un moment donné d'incarner quelque chose.
12:30Oubliez que ce facteur humain est vecteur d'émotions
12:32et pensez que le simple écran suffira à transmettre quelque chose.
12:35C'est là qu'on fait fausse route.
12:37Donc, il faut l'utiliser, mais avec le mot équilibre dont parlait Lizzie tout à l'heure.
12:41Oui, puis on parle de plus en plus de blended learning.
12:44C'est comment finalement on inscrit ces briques digitales dans un parcours plus complet.
12:50Donc, par exemple, le fait d'avoir des journées présentielles
12:55et ensuite des temps en distanciel.
12:58Mais il peut y avoir aussi des pre-work.
13:01Donc, arriver en formation avec un contenu minimum, un vernis
13:06que l'ensemble des apprenants ont pris connaissance.
13:11Et ensuite, après la formation présentielle, avoir des temps de partage entre pairs,
13:18soit sur la mise en pratique de certains contenus.
13:21Donc, comment ça s'est passé dans mes équipes après avoir tenté telle ou telle action
13:26et également de co-développement.
13:29Et ça, ça peut se faire bien sûr en présentiel, mais ça marche très bien aussi en distanciel.
13:34Une fois que justement la connexion a eu lieu,
13:37une fois qu'il y a eu ce lien qui a été établi en présentiel,
13:41le digital finalement peut prendre la suite et permet vraiment ces ancrages.
13:45Alors, on l'a bien compris.
13:47Vous avez assez insisté dessus.
13:49La notion d'équilibre, elle est fondamentale.
13:52Lydie, qui est garant de cet équilibre dans la formation ?
13:55Est-ce que c'est le concepteur, le manager ou l'apprenant lui-même ?
13:59Les trois à la fois, vous allez me dire, je suppose.
14:01Oui, c'est une affaire de tous.
14:03La fatigue d'apprentissage, l'efficacité de l'apprentissage, c'est avant tout l'apprenant.
14:08Moi, je dis toujours aux formateurs que je forme, qui apprend ?
14:12Ce n'est pas vous qui apprenez, c'est lui.
14:14C'est son cerveau, c'est son cerveau à lui qui va se développer.
14:17Forcément, il faut réussir à faire en sorte qu'il soit acteur de son apprentissage
14:21et qu'il gère lui-même, qu'il sache mesurer.
14:23Dans quel état de fatigue je suis à ce moment-là ?
14:26Mais tu le disais tout à l'heure, Didier, dans la conférence,
14:28tout le monde n'a pas cette maturité et cette capacité à auto-analyser sa façon d'apprendre,
14:34auto-analyser son niveau de fatigue d'apprentissage et réguler son propre plan d'apprentissage.
14:39L'apprenant ne peut pas le laisser seul face à tout ça.
14:42C'est pour ça que les solutions e-learning où il n'y a que le contenu qui est à disposition,
14:46ça ne fonctionne pas et ça perd d'efficacité parce qu'il y a besoin de cet accompagnement.
14:52L'accompagnement, il est fait par le formateur bien sûr sur le temps de formation,
14:56par son expertise parce que lui, il va venir le diriger, il va venir consolider,
15:00il va venir mettre de l'histoire, de l'anecdote, de l'émotion sur ce contenu.
15:04Il va le faire vivre, il va le rendre vivant, il va le raccrocher au sens de l'objectif.
15:08Mais le manager est absolument clé aussi parce qu'il y a cette question
15:12de comment je me prépare avant de venir en formation.
15:16Si j'arrive les mains dans les poches en mode, vas-y, balance-moi ton contenu, l'expert.
15:21Ben non, ça ne marche pas, il faut qu'on vienne préparer et là, le manager a un rôle clé.
15:26A la fois dans le brief formation, pourquoi tu vas faire cette formation,
15:30qu'est-ce que ça va t'apporter, comment je le raccroche à notre entretien annuel
15:34et à notre plan de développement de compétences et puis le temps post-formation
15:38pour accompagner ce difficile passage à l'action de notre apprenant ?
15:43Si je peux me permettre, aujourd'hui, est-ce qu'il vaut mieux une formation
15:49sur un sujet peut-être anecdotique mais sur lequel le collaborateur a envie vraiment
15:54de développer des compétences ou est-ce qu'il vaut mieux le former sur quelque chose
15:57dont il n'en a rien incarré, entre guillemets, mais sur lequel le manager est convaincu ?
16:01A titre personnel, je pense qu'il vaut mieux se former sur les choses
16:06sur lesquelles on a envie de développer des compétences.
16:08C'est bien la responsabilité à un moment de l'apprenant et du manager de trouver ce chemin.
16:13Après, le formateur, entre guillemets, il est dans son rôle et il est dans sa mission,
16:16mais il y a bien une responsabilité partagée à un moment donné de bien identifier collectivement
16:20le sujet vers lequel on veut se former.
16:22Il y a trop de formations qui sont vues comme des formations un peu obligatoires,
16:25un peu obligées, tu n'es pas bon donc tu dois te former,
16:28qui sont vues vraiment comme une contrainte plus qu'une opportunité.
16:30C'est là où ce lien collaborateur-manager est important pour en faire vraiment
16:35un levier d'opportunité.
16:37Karine, comment est-ce qu'on sensibilise et on accompagne non seulement les formateurs,
16:41mais aussi les responsables pédagogiques, afin vraiment d'intégrer cette vigilance
16:45dans leurs pratiques ?
16:47Je crois que le monde de la formation a depuis toujours été beaucoup en mouvement,
16:50en évolution. Les formateurs, les concepteurs pédagogiques évoluent
16:57avec l'évolution de ce contexte de formation.
17:02Ce qui est évident, c'est qu'il faut requestionner, repenser ces contenus
17:07très régulièrement, ne pas se reposer sur ses acquis, se dire
17:11« Tiens, ce programme, il marche super bien, on peut continuer comme ça. »
17:17C'est vraiment à chaque fois se reposer la question.
17:20Et puis il y a une période maintenant qui commence à être un peu plus loin de nous,
17:23mais qui était celle du Covid, où finalement l'ensemble des concepteurs pédagogiques,
17:29des formateurs, ont dû très très rapidement repenser leur modalité de formation
17:34pour continuer à former. Nous, on a vécu cette période où on devait lancer
17:39un très gros programme de management, ça a continué.
17:42On a fait, évidemment, vous vous en doutez là pour le coup, beaucoup en distanciel.
17:47Et puis de la même manière, quand on a repris une vie plus normale,
17:51c'est comment, là aussi, on rééquilibre tout ça, on réinjecte du présentiel,
17:57comment les contenus aussi, finalement, peuvent être présentés de manière
18:02plus ou moins détaillée, avec plus ou moins de mise en pratique d'exemples
18:06pour que ça fonctionne. Et aujourd'hui, avec l'IA, on se requestionne aussi
18:12de la même manière sur comment de plus en plus personnaliser les parcours.
18:16Dès le départ, pouvoir faire en sorte que l'apprenant ait une évaluation
18:22de ses compétences, comme un des piliers d'apprentissage de Stanislas Dehaene,
18:28qui est, finalement, le retour d'informations. Et donc, régulièrement,
18:33pouvoir proposer aussi aux collaborateurs à quel niveau il en est, quelque part,
18:39de son apprentissage et débloquer les contenus qui conviennent.
18:43Je pense qu'on a la chance, dans le monde de la formation, d'avoir des personnes
18:50qui ont cette habitude de se requestionner régulièrement pour faire évoluer leurs pratiques.
18:56Didier, côté direction ou financeur, est-ce que cette fatigue est prise au sérieux ?
19:02Est-ce qu'on ne minimise pas un peu la fatigue ?
19:06Je pense que le concept de fatigue learning n'est pas forcément connu.
19:11Je pense que dans ce salon USpring, on est dans un entre-soi de gens
19:16habilités à la formation. Je ne suis pas sûr que le concept soit forcément appréhendé.
19:21La préoccupation d'un dirigeant, c'est, je pense, qu'il y a une vraie prise de conscience
19:26de l'importance de la formation. Je n'ai jamais entendu un dirigeant le remettre en cause.
19:31Par contre, il y a une volonté que ça prenne le moins de temps possible.
19:36Notamment pour des acteurs de production. Je pense que pour des managers,
19:40c'est un peu différent. Parce que là, on est bien conscient qu'il y a de la matière molle,
19:43il y a quelque chose. Mais la capacité à être opérationnel rapidement,
19:46c'est une préoccupation de tous les instants, une préoccupation de performance.
19:50Je pense que la difficulté aujourd'hui des dirigeants, ce n'est pas forcément
19:56d'être conscient ou pas de la fatigue learning. La difficulté aujourd'hui,
20:02c'est de réussir à faire le tri entre ce qui est essentiel pour tenir un poste
20:10par rapport à une capacité de disponibilité pour la formation.
20:14Quand j'ai créé la OUI Académie, j'avais pris contact avec une responsable d'une académie
20:18pour m'inspirer un peu. Je lui avais dit la principale difficulté dans la formation,
20:23c'est le lean. Le lean parce que ça empêche d'avoir du temps pour se former.
20:27Et le lean parce que ça empêche d'avoir du temps pour des gens qui forment.
20:31Ce truc-là est assez vrai et montre bien que la structuration de nos organisations
20:37sans temps dédié, sans temps garanti à la formation est un vrai problème
20:41pour s'organiser et dispenser. Or, on est dans un monde qui évolue de plus en plus.
20:46On est dans un monde où les technologies n'arrêtent pas de changer.
20:48On est dans un monde où jusqu'à présent, quand on faisait le même métier,
20:52notre métier changeait, il s'améliorait. Aujourd'hui, il ne s'améliore plus,
20:55il évolue, il change du tout au tout. Donc, ça nécessite cette formation.
20:59Il faut qu'on arrive à construire des modules de formation qui permettent
21:03au fil du temps de s'adapter, de renouveler sa pratique en prenant le moins de temps possible.
21:07Ça, nos dirigeants nous le demandent et à nous de résoudre cette clôture du cercle.
21:12C'est intéressant, vous l'avez dit. Si on essaie de sortir un peu de cet entre-soi
21:18YouSpring, quelles sont les conséquences concrètes du Fighting Learning ?
21:23Qu'est-ce que ça peut provoquer ? Je pense que ça peut être intéressant
21:26d'évoquer le sujet, Lydie. Oui, oui. Moi, j'en parlais tout à l'heure.
21:30Si il y a trop de fatigue, il y aura une inefficacité d'apprentissage.
21:35Forcément, on ne veut pas ça en tant que formateur ou en tant que responsable de formation.
21:39Ça peut entraîner de la démotivation. C'était aussi le thème de notre table.
21:44Est-ce que cette fatigue ne va pas entraîner la démotivation ?
21:48Quand on nous prépare, on se dit aussi la démotivation quelque part.
21:52Est-ce que je ne ressens pas plus la fatigue quand je suis démotivée ?
21:55On voit bien que c'est un peu la poule et l'œuf. On ne sait pas trop entre la motivation
21:58et la fatigue qui démarrent. Je mettais en avant aussi le bien-être du salarié,
22:05de l'apprenant, parce qu'il y a six facteurs de risque psychosocial.
22:09Un des facteurs, c'est le rapport Golak qui met en avant ces six facteurs.
22:14Un des facteurs, c'est l'intensité et le temps de travail.
22:17Cette question de l'intensité, de l'apprentissage, du temps qu'on accorde
22:21pour pouvoir se former, mettre à jour nos compétences en permanence,
22:26si on n'en prend pas soin, on ne prend pas soin de notre collaborateur.
22:30C'est un vrai sujet.
22:31Finalement, on sort vite de l'aspect learning. Ça a des conséquences qui vont beaucoup plus loin.
22:37Il y a quelque chose qui est assez amusant, c'est qu'on sait relativement bien dire
22:43combien coûte la formation, combien coûte le learning.
22:46On sait beaucoup plus difficilement indiquer combien coûte la non-compétence.
22:51Mesurer cette non-compétence, finalement, c'est très difficile de se battre
22:55puisqu'on voit la formation comme un coût.
22:57Alors que si on était capable d'évaluer l'impact de la non-compétence,
23:00on pourrait l'évaluer par rapport à un gain.
23:02Ça, c'est très difficile.
23:04Quand on parlait de sensibilisation au manager, on dépasse le sujet de la fatigue.
23:08On est vraiment sur la capacité de former et de rendre opérationnels nos agents,
23:13nos collaborateurs.
23:14Aujourd'hui, quand on parle de service client, on est tous en concurrence.
23:19Et j'ai beau être SNCF, je suis en concurrence.
23:21On est tous en concurrence.
23:23Et quelque part, c'est le service qui fait la différence.
23:26On le voit dans plein de métiers.
23:27C'est la capacité à créer la différence, à créer l'effet mémoire, à créer la préférence.
23:32Et donc, si on n'est pas capable d'amener nos collaborateurs à porter ce message-là,
23:37on perd énormément d'argent.
23:39C'est ce truc-là qu'il faut réussir derrière la fatigue learning.
23:42La conséquence, c'est qu'on rate des formations, on passe à côté des formations,
23:46on dépense de l'argent pour rien.
23:48Alors qu'on ferait mieux peut-être d'en consacrer un petit peu plus,
23:51mais d'avoir une efficacité nettement plus importante sur l'ensemble de nos collaborateurs.
23:55Karine, sur ces conséquences ?
23:57Oui, je rebondissais sur ce que disait Lydie.
24:01Finalement, on parle de fatigue learning,
24:04on s'inscrit vraiment dans un contexte global de fatigue cognitive.
24:11On sait aujourd'hui que les collaborateurs passent en moyenne 7 heures de leur semaine en réunion,
24:1815 heures pour les managers, ce sont des moyennes.
24:21Si on regarde les mails, c'est minimum une centaine de mails par jour à traiter.
24:26Et on sait qu'on a des contextes et des positions où il y en a bien bien plus.
24:31Et en parallèle, on a une durée d'attention qui chute inexorablement.
24:36Donc être en capacité de capter l'attention d'une personne dans ce contexte-là,
24:43c'est vraiment ça, c'est comment dans les 5 premières minutes,
24:47finalement, et avec le sens bien sûr, avec une préparation en amont,
24:53l'apprenant est du coup dans des meilleures dispositions pour pouvoir se développer.
25:01Karine, je reste avec vous.
25:03Est-ce que la formation de demain sera compatible avec les objectifs de performance
25:08qu'on assigne de plus en plus à ces dispositifs ?
25:11Je l'espère.
25:13Effectivement, la formation de demain, je le disais tout à l'heure,
25:17elle doit s'adapter et nous on fait beaucoup le lien,
25:22moi je fais beaucoup le lien entre les tendances d'évolution des métiers et des compétences et la formation.
25:28Donc finalement, si on arrive à pluguer ensemble ces deux volets,
25:33c'est-à-dire si on réussit à faire en sorte que la formation soit toujours en réponse aux évolutions qu'on identifie,
25:44là ça peut fonctionner.
25:46Et je dirais que c'est au-delà de la pure formation,
25:49nous on parle beaucoup dans nos métiers du modèle 70-20,
25:54finalement on apprend beaucoup plus quand on est « on the job »,
25:58c'est-à-dire que quand on pratique, c'est là où finalement les compétences s'ancrent plus.
26:04Donc au-delà de toutes les merveilleuses formations qu'on pourra déployer,
26:08c'est comment finalement on arrive à imbriquer tout ça dans un vrai parcours,
26:14donc au bon niveau, au bon moment, sur les bonnes compétences.
26:19Je vous remercie pour cet agréable échange.
26:21Merci à vous.
26:22A très bientôt sur Bismarck for Change.

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