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Première partie : James André reçoit Jacques Attali, écrivain et essayiste pour évoquer l’actualité européenne et internationale.Deuxième partie : Caroline de Camaret et Thibault Henocque reçoivent Valérie Hayer, présidente du groupe Renew au Parlement européen, et Zeljana Zovko, vice-présidente du groupe PPE au Parlement européen, pour un débat sur le thème : « Les USA sont-ils toujours nos alliés ? » Année de Production :

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00:00France 24 LCP. Public Sénat présente.
00:05Générique
00:24Bonjour et bienvenue à Ici l'Europe.
00:27Aujourd'hui, pour notre grand entretien européen, nous recevons Jacques Attali, économiste, auteur, essayiste, conseiller d'État.
00:35Il a soufflé à l'oreille des présidents de la République française depuis François Mitterrand, dont il était cher pas.
00:42Il est avec moi sur ce plateau. Bonjour, merci d'être avec nous.
00:45Alors, vous avez suivi toutes les turbulences du monde depuis plusieurs décennies et vous avez écrit plusieurs livres,
00:52dont le mot de mode d'emploi que j'ai ici. Ce mode d'emploi du monde, finalement, il a peut-être changé ces dernières semaines.
00:58On se rend compte que la situation est extrêmement tendue et tumultueuse pour l'Union européenne à l'heure où les Américains, finalement, se détournent de l'Ukraine.
01:08Est-ce qu'on est vraiment à un moment pivot, charnière de l'histoire européenne ?
01:13Tout à fait, absolument vital. Ça fait très longtemps que parmi d'autres, je dis que les Européens devraient prendre conscience d'une chose fondamentale.
01:22Nous sommes seuls. Je répète cette phrase depuis au moins 20 ans. Maintenant, je pense que les Européens l'ont compris.
01:27Ce n'est pas tout à fait nouveau parce que, déjà, Obama nous avait fait défaut dans certaines circonstances et les Américains se retournent vers la Chine,
01:35qui est leur principal partenaire et leur principal ennemi. En tout cas, certains ne pensaient pas qu'il y aurait une alliance de la Russie avec les États-Unis contre la Chine
01:47en jetant l'Europe occidentale par-dessus bord. On ne pensait pas, on n'espérait pas, on ne souhaitait pas.
01:53On ne pensait pas, on ne souhaitait pas qu'un président américain trahisse ses alliés. Il vient même de dire qu'il ne va pas défendre le Japon.
02:02Et qu'on ne pensait pas qu'il se conduirait exactement comme Adolf Hitler. Alors, la question de savoir s'il est un agent russe n'est pas très intéressante.
02:13En tout cas, il se conduit comme s'il l'était. C'est tout ce qui nous suffit. Il y a une alliance Russie-États-Unis contre la Chine qui est en train de se mettre en place
02:22avec, dans les deux pays, un dictateur. Un dictateur qui s'appuie sur des oligarques qui installent la terreur. Et évidemment, ça finira mal.
02:33Pour vous, Donald Trump est un dictateur ?
02:35Il est en train de devenir. D'ailleurs, c'est assez frappant le rapprochement avec Hitler. Il y a eu un putsch raté comme Hitler. Il installe la terreur comme Hitler.
02:43Il dit plein de fausses nouvelles. Il veut déporter des gens. Il menace les juges. Et je pense que la prochaine étape, c'est qu'il passe outre les décisions de justice.
02:56L'étape suivante, ce sera qu'il dénonce et mette en prison des dirigeants démocrates. C'est exactement comme Adolf Hitler. Exactement comme Adolf Hitler.
03:07Ce lâchage des États-Unis, cette impression qu'ils veulent finalement laisser tomber l'OTAN, d'abord, est-ce que, d'après vous, c'est vraiment réel ?
03:14C'est-à-dire qu'on a l'impression que l'Union Européenne, enfin, que les dirigeants européens, essayent de ménager les États-Unis en espérant que, finalement, ce soit simplement une passade,
03:21un moment que, peut-être, en investissant plus dans leur défense, ils pourraient faire revenir les États-Unis à être plus actifs dans l'OTAN.
03:29Est-ce que vous pensez que c'est possible ou est-ce que vous pensez que, ça y est, les Américains nous ont lâchés ?
03:33Les Américains... Pas les Américains, parce qu'une grande partie des Américains ne sont pas derrière cette ligne.
03:38Mais M. Trump est un homme qui agit exactement comme les responsables de raquettes.
03:44Où vous faites ce que je vous dis, où je ne vous protège plus.
03:49Donc, même si on faisait quoi que ce soit pour lui plaire, il y aura toujours une demande supplémentaire.
03:55Vous ne faites pas assez et donc je ne vous protège plus.
03:57Donc, il est très important pour les Européens de créer aussi vite que possible, et si possible pas dans 5 ans, les conditions pour ne pas avoir à céder à ce chantage.
04:07Alors, vous connaissez bien les Russes, vous les avez pratiqués depuis de nombreuses décennies même.
04:12C'était vous, en 1991, qui aviez imposé Mikhail Gorbatchev au G7, en Angleterre.
04:19D'ailleurs, contre l'avis du Premier ministre britannique de l'époque.
04:24Quels sont, selon vous, les objectifs réels des Russes ?
04:29Parce qu'on entend beaucoup de choses. On entend qu'ils veulent simplement créer un glacis défensif.
04:33D'autres parlent d'attaques vers d'autres pays plus à l'ouest, si jamais ils n'étaient pas empêchés à ce stade.
04:40A votre avis, quelle est cette menace russe à ce stade ?
04:42D'abord, je continue à rêver d'une Russie démocratique faisant partie de l'Union Européenne.
04:49Je pense que c'est un rêve qu'on doit avoir, au-delà de la période Poutine.
04:54C'est une grande nation européenne, avec une culture qui est parfaitement partie de la nôtre.
05:00Peu importe de savoir ce que M. Poutine veut, il faut toujours avoir une politique qui nous prépare au pire.
05:09Et le pire est possible.
05:11Et donc, même si ça n'est que 5% des risques, il faut être prêt.
05:16Il faut être prêt à une tentative de reprendre la Moldavie, d'empêcher le résultat des élections démocratiques en Roumanie,
05:25de mettre la main sur les pays baltes, et ensuite de s'attaquer à la Pologne, et au-delà, tout ce qui vient avec.
05:33Je pense d'ailleurs que le Kazakhstan devrait faire attention aussi à son indépendance,
05:39car les Russes pourraient souhaiter mettre la main sur cette puissance contenant d'énormes richesses gazières, minières,
05:47et l'essentiel, 45% d'uranium de la planète.
05:51Donc, il ne faut pas se préoccuper de savoir si c'est vraiment sûr qu'ils veulent le faire, mais il faut se préparer quand même.
05:59Pour vous, l'allocution d'Emmanuel Macron, qu'on a vu parler à l'Elysée, qu'en avez-vous pensé ?
06:05Est-ce que vous avez trouvé que le ton était juste ?
06:07C'était absolument parfait. Il m'arrive souvent d'être critique à son égard. J'ai trouvé que c'était parfait. J'espère qu'il sera entendu.
06:13Maintenant, c'est une question de vitesse, c'est une question d'efficacité.
06:18Mettre en branle 27 pays pour faire des armes, ce n'est pas facile.
06:22C'est une question de savoir quelles armes. La solution de facilité serait d'acheter des armes américaines,
06:27ce qui serait une folie, parce qu'on sait que l'Américain contrôle la clé à chaque jour, et de ne pas se tromper d'armement.
06:34Il ne faut pas acheter les armements qu'on a simplement parce que nos marchands d'armes veulent nous en vendre.
06:39Il faut acheter et faire construire les armes dont on aura besoin dans ces guerres.
06:43On va y revenir dans quelques minutes. Je vous propose de faire le point tout de suite sur les dernières annonces de l'Union européenne.
06:48Ils ont ébauché les contours d'un plan qui s'appelle « Rearm Europe ». Voici les détails avec Sophie Samay.
06:56Réarmer l'Europe, tel est l'objectif du nouveau plan de la Commission européenne.
07:02L'Europe est prête à assumer ses responsabilités.
07:06Le plan pour réarmer l'Europe pourrait mobiliser près de 800 milliards d'euros de dépenses pour la défense,
07:13pour une Europe sûre et résiliente.
07:18Une réponse massive à la suppression des aides militaires américaines à l'Ukraine annoncée par Donald Trump.
07:24Ce plan en cinq points prévoit un assouplissement des règles budgétaires pour favoriser les investissements pour la défense européenne,
07:31appelant notamment les pays membres à investir sans se soucier de l'obligation de limiter leur déficit public à 3% de leurs produits intérieurs bruts.
07:40Si les États membres augmentaient leurs dépenses de défense de 1,5% du PIB en moyenne,
07:50cela pourrait créer une marge budgétaire de près de 650 milliards d'euros sur une période de 4 ans.
07:58Dépenser mieux, dépenser ensemble, à l'aide de prêts pour financer l'achat de missiles, de drones ou encore pour investir dans la cybersécurité.
08:07150 milliards d'euros de prêts seront ainsi mis à disposition dès 27.
08:12La présidente de la Commission européenne a aussi proposé aux pays membres d'utiliser leurs fonds destinés habituellement à financer divers projets
08:19pour réduire les inégalités entre les régions européennes.
08:22Enfin, deux leviers supplémentaires ont été évoqués par Ursula von der Leyen pour mobiliser des capitaux privés,
08:28s'appuyant notamment sur une union de l'épargne et sur la Banque européenne d'investissement, la BEI.
08:34Alors Jacques Attali, qu'est-ce que vous pensez de la réaction européenne à ce stade ?
08:38Excellente, mais encore incomplète.
08:40Tout ce qui a été dit là est parfait, il faut le faire.
08:42Mais il manque au moins 3 sinon 4 choses.
08:45Il manque d'abord d'admettre que l'Ukraine fait partie de l'Europe de la Défense.
08:50Et que c'est l'occasion d'accrocher, d'arrimer définitivement l'Ukraine dans l'Europe
08:55parce que c'est une des meilleures armées, malheureusement, d'Europe.
08:59Et ils sont en première ligne et donc ils doivent faire partie de toutes les discussions.
09:03Alors comment on fait ? On les fait rentrer en Union européenne à ce moment-là ou on les intègre ?
09:06On les intègre progressivement et évidemment comme une évidence dans l'Union européenne.
09:10Deuxièmement, et grâce à l'Ukraine, on saura mieux quelle est la nature des armes qui sont nécessaires
09:15pour ne pas se tromper, parce qu'il ne faut pas se tromper, c'est le choix des armes qui est très important.
09:19Troisièmement, il faut qu'il y ait un patron.
09:22Il faut qu'il y ait un patron de l'Europe de la Défense, ça ne peut pas être Mme...
09:27Van der Leyen.
09:28Van der Leyen parce qu'elle a d'autres choses à faire.
09:30Ça ne peut pas être non plus le président du Conseil européen parce que ce n'est pas son rôle.
09:34Ça ne peut pas être l'actuel commissaire à la Défense qui ne me paraît pas calibré pour cela.
09:39Il faut un grand patron de l'Europe de la Défense qui coordonne l'ensemble.
09:44Un vrai Xard de l'Europe de la Défense.
09:46Et il faut, et c'est le quatrième point, peut-être le plus important,
09:49que les Européens se mettent dans tous les domaines en économie de guerre.
09:53Il faut travailler dans certains domaines, 7 jours sur 7, 24 heures sur 24,
09:57parce qu'on ne peut pas attendre 5 ans pour être prêt.
10:02Le pire des scénarios, c'est que nous nous mettions en cette situation de créer une Europe de la Défense,
10:07mais que les Américains nous lâchent tout de suite,
10:09et que les Russes, sentant que dans 5 ans on sera prêt,
10:12nous envahissent le plus vite possible avant qu'on soit prêt.
10:16Emmanuel Macron en a parlé lors de son allocution.
10:19Il dit qu'il y aura des choix budgétaires à faire.
10:21Il dit aussi qu'il ne veut pas augmenter les impôts.
10:23Vous parlez d'économie de guerre, Jacques Attali.
10:27Vous êtes économiste, à quel point ça va coûter cher aux Français, aux Européens ?
10:32Comment on va financer tout ça ? Parce qu'on parle de 800 milliards d'euros.
10:35Ces 800 milliards d'euros, finalement, on va les emprunter.
10:38Oui, mais les dépenses pour l'économie de guerre
10:43ne sont pas des dépenses perdues.
10:45Développer de l'industrie militaire, c'est bon pour la technologie,
10:49c'est bon pour l'économie civile, parce que la plupart de ses techniques sont civiles.
10:52Ça crée des emplois, ça crée de la croissance.
10:54Tout ce qui se passe là est une opportunité.
10:56Pour prendre conscience que nous sommes seuls,
10:58pour accélérer dans l'Europe de la défense,
11:01pour accélérer dans l'intégration européenne,
11:03tout ça est une opportunité.
11:04Le problème, c'est que ça peut nous prendre trop de temps
11:08et inciter nos adversaires à agir avant que nous soyons prêts.
11:11Donc ce que vous êtes en train de me dire, entre guillemets, c'est que c'est une course.
11:13Il faut foncer.
11:14En fait, on pourrait dire que ce sommet du 6 mars a été une ligne de départ ?
11:18Évidemment.
11:19Et il ne faut pas dire qu'il faut 5 ans ou 10 ans pour être prêt.
11:22Il faut être prêt maintenant.
11:23Alors, en parlant d'être prêt maintenant,
11:25Emmanuel Macron parle d'étendre le parapluie nucléaire français
11:29aux autres nations européennes.
11:31Comment vous voyez ça ?
11:32Est-ce que c'est une bonne idée d'abord ?
11:34Je pense que c'est une bonne idée, mais le moins on en parle, le mieux c'est.
11:38Le président de la République française garde évidemment
11:41l'absolu contrôle du bouton nucléaire.
11:44Et de tout temps, avec François Mitterrand,
11:48nous avons souvent parlé avec le chancelier d'Allemagne
11:50sur la question de savoir si l'Allemagne est protégée par le parapluie nucléaire français.
11:56Ces conversations que nous avons eues, que François Mitterrand a eues en ma présence,
11:59sont toujours restées secrètes.
12:00Elles ont vocation à l'être.
12:02La France peut considérer que son intérêt vital va au-delà de ses frontières.
12:07Est-ce qu'il inclut l'Allemagne ? Est-ce qu'il inclut la Pologne ?
12:09Ça doit rester ambigu.
12:14On voit aujourd'hui une guerre,
12:16on a l'impression de voir une guerre quand même des Américains,
12:19en tout cas une attaque des Américains sur l'Europe.
12:21On l'a vu à la fois avec le discours de J.D. Vance
12:24lors de la conférence de Munich,
12:25on le voit avec Elon Musk qui finance des mouvements d'extrême droite en Europe,
12:28on le voit avec ces fameux droits de douane
12:31que souhaite mettre l'administration américaine.
12:33Alors comment vous interprétez ça ?
12:35Est-ce que pour vous il y a une volonté aussi réelle
12:38des Américains finalement d'affaiblir aussi l'Union Européenne,
12:40pas seulement de la lâcher mais aussi d'affaiblir ?
12:42Il ne faut pas parler des Américains.
12:44Il faut parler de l'administration Trump et des oligarques.
12:47Ces horribles gens veulent en effet détruire l'Union Européenne.
12:51Ils ont voulu dès le début.
12:53Ils disent d'ailleurs que l'Union Européenne a été faite contre eux.
12:55Ce qui est absurde.
12:57S'ils avaient pu tuer l'euro, ils l'auraient fait.
12:59Et d'ailleurs je pense qu'ils vont continuer à essayer de tuer l'euro.
13:02Ils ont essayé en poussant à la victoire électorale
13:07de l'extrême droite allemande de casser l'Union Européenne.
13:10Ils vont essayer.
13:11D'ailleurs les Chinois, les Russes et les Américains
13:13ont intérêt à la destruction de l'Union Européenne.
13:15Et donc il nous faut être solides.
13:17Alors justement dans ce contexte, on a quand même des divisions politiques
13:20au sein de chaque pays.
13:21Ensuite il y a 27 pays.
13:22On a vu notamment la Hongrie de Viktor Orban
13:25qui est quand même sur une posture plutôt pro-russe
13:28dans cette crise que nous traversons.
13:30Est-ce que c'est possible de mettre tout le monde ensemble ?
13:35Est-ce que vous croyez que ça peut fédérer ?
13:36Ce n'est pas grave.
13:37Il faut avancer avec ceux qui veulent.
13:39Si on n'a pas la Hongrie, on n'a pas la Hongrie.
13:41Ce n'est pas tragique.
13:42Et même si on en perd deux ou trois au passage,
13:45ce n'est pas grave.
13:46Il faut mettre ensemble ceux qui veulent avancer.
13:48Est-ce que ces tarifs,
13:50est-ce que ces droits de douane qui vont être imposés
13:52à l'Union Européenne,
13:53ça a été annoncé par l'administration Trump ?
13:56Annoncé après...
13:57Oui, alors après est-ce qu'ils vont le faire ou pas ?
13:58Voilà.
13:59Mais en admettant qu'ils le fassent,
14:00est-ce que ça fait plus de mal aux Américains ou aux Européennes ?
14:02Bien sûr que ça fait de mal aux Américains.
14:04Ça fait beaucoup de mal aux Américains.
14:05Tout ça va couler l'économie américaine.
14:08Vite ou pas, j'en sais rien.
14:10C'est pourquoi d'ailleurs, et c'est très inquiétant,
14:12parce que si ça arrive de couler l'économie américaine,
14:14la fuite vers la guerre sera encore plus nécessaire
14:17pour tenir ce qui est arrivé avec Hitler
14:19et ce qui arrive toujours quand...
14:21Ce qui arrive d'ailleurs aussi avec la Chine,
14:23qui est dans une situation économique extrêmement incertaine
14:26et qui fonce vers le militarisme pour les mêmes raisons.
14:28Il y a une sorte de...
14:31vertige vers la guerre des États-Unis et de la Chine
14:34parce qu'ils ont des grands problèmes intérieurs.
14:36Mais alors justement dans ce contexte,
14:38l'Union Européenne, si effectivement
14:40l'administration va au bout de son idée de 25%,
14:43vous êtes économiste,
14:45est-ce que c'est quelque chose...
14:46Certes, ça va abîmer l'économie américaine,
14:48mais ça va faire énormément de dégâts dans l'économie européenne aussi, non ?
14:50Oui, énormément.
14:51Mais il faudra...
14:53Je pense même qu'il faut arriver à penser cela autrement.
14:57Je pense qu'il faut en arriver à penser
14:59à boycotter l'économie américaine.
15:01À ne pas faire d'affaires avec eux.
15:03À ne pas s'installer avec eux.
15:05À ne pas, quand on est un chef d'entreprise française,
15:07aller se montrer dans le bureau de monsieur Trump,
15:10ou allemand.
15:12À boycotter, il faudra peut-être en venir là.
15:14Après tout, c'est ce que font certains Canadiens
15:17et certains Mexicains,
15:18qui en appellent au boycott des produits américains.
15:20Donc, droits de douane ou boycott,
15:22c'est une autre façon de voir la même évolution.
15:25Je vous poserai aussi une autre question,
15:27vous êtes économiste.
15:28Les fameux 200 milliards d'avoirs russes gelés,
15:31est-ce que vous êtes en faveur de les saisir ou pas ?
15:34Non.
15:35Je pense que ce serait quelque chose
15:37qui remettrait en cause l'état de droit
15:39et qui pourrait menacer l'euro.
15:417 Français sur 10, aujourd'hui, en France, sont inquiets.
15:45Craignent que cette guerre déborde les frontières de l'Ukraine
15:48et qu'on se retrouve avec une guerre, finalement, sur le continent.
15:51Vous, c'est quelque chose.
15:52Alors, vous me dites qu'il faut se préparer au pire.
15:54Mais vous êtes aussi un féru d'histoire,
15:55un grand connaisseur des anciennes civilisations.
15:57On le voit, d'ailleurs, dans ce livre,
15:58Le Monde de l'Emploi.
16:00Est-ce qu'ils ont raison d'avoir peur, vraiment ?
16:02Bien sûr, dans ce livre, je disais,
16:03un scénario d'une guerre entre les Etats-Unis et la Chine,
16:07en abandonnant l'Europe, ce scénario est connu.
16:10Il est vraisemblable.
16:11Donc, il ne faut pas le craindre.
16:13Il ne faut pas désespérer.
16:14Il faut considérer que c'est une chance.
16:16C'est une chance de nous unir davantage,
16:18de prendre en charge notre destin,
16:20d'attirer les talents qui traînent les Etats-Unis,
16:23de développer des industries qu'on n'a pas encore développées,
16:26de nous tourner vers l'Afrique,
16:28qui est quand même le continent dont la population va doubler en 20 ans
16:32et qui a un potentiel formidable pour l'Europe.
16:35C'est une chance, si on sait le saisir.
16:37Et très rapidement, parce qu'il reste moins d'une minute dans le temps long,
16:40est-ce qu'il pourrait voir les Etats-Unis finalement s'auto-isoler
16:43et perdre leur puissance ?
16:46Ils sont en train de le faire.
16:47Ce qui se passe avec Trump, c'est qu'il a décidé de prendre acte
16:50du fait que les Etats-Unis n'ont plus les moyens d'être la superpuissance
16:53qui domine la planète, mais de ne s'occuper que d'elle-même.
16:56En cela, il a déjà signé le déclin américain.
16:59Jacques Attali, je vous remercie d'avoir pris part à cette interview
17:03et je vous propose de continuer à suivre l'Europe à Bruxelles,
17:06où nos équipes vont aller à la rencontre des députés européens
17:10et leur demander si les Etats-Unis sont encore nos alliés.
17:19Bienvenue au Parlement européen,
17:21qui regarde avec le plus grand scepticisme,
17:24voire avec une inquiétude existentielle de l'autre côté de l'Atlantique.
17:29Les Américains sont-ils encore nos alliés ?
17:32La question était dans toutes les têtes lors du dernier sommet de crise,
17:36le 6 mars, à Bruxelles.
17:38L'Union européenne a émergé de la Seconde Guerre mondiale
17:41avec la certitude que ces démocraties seraient toujours protégées
17:45par l'ami américain.
17:47Or, changement de cadre radical à la Maison-Blanche,
17:50Donald Trump estime que l'Union européenne a été créée
17:54pour emmerder les Etats-Unis, je cite.
17:56Résultat, Caroline, les 27 se voient lâcher
17:59dans leur soutien à l'Ukraine, qu'ils estiment pourtant vital
18:02pour défendre le continent contre Poutine,
18:04le président américain qui dit aussi vouloir annexer le Groenland,
18:08un pays appartenant au royaume du Danemark
18:10et par conséquent territoire d'outre-mer associé à l'Union européenne.
18:14Enfin, Donald Trump a annoncé des droits de douane supplémentaires
18:18de 25 % contre l'Union européenne,
18:20comme le Canada et le Mexique le subissent déjà.
18:23Quelle réponse des 27 et de la Commission sur tous ces chapitres ?
18:26Nous en parlons avec nos deux invités.
18:28Valérie Ayé, bonjour, merci d'être avec nous.
18:30Présidente du groupe Rignon, groupe centriste,
18:33ici au Parlement européen,
18:35qui correspond en France d'ailleurs
18:37à le groupe d'Emmanuel Macron, on va dire ça comme ça.
18:40Svetlana Zovsko, bonjour.
18:42Vous êtes eurodéputée croate,
18:44vous appartenez au groupe du Parti populaire européen
18:47ici à Bruxelles, dont vous êtes d'ailleurs la vice-présidente.
18:50Valérie Ayé, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale,
18:53effectivement, les Américains étaient nos alliés,
18:56nos amis, nos grands frères protecteurs.
18:59Est-ce qu'après ce début d'administration Trump,
19:02il faut se faire une raison, ils ne sont plus nos alliés ?
19:05Je le crois profondément.
19:07Les Etats-Unis, sous Donald Trump, ne sont plus nos alliés aujourd'hui.
19:10Et c'est un renversement historique, vous l'avez dit.
19:13Depuis la Seconde Guerre mondiale,
19:15on avait une alliance, une architecture de paix,
19:19basée sur une très bonne coopération entre les Etats-Unis et l'Europe.
19:23Les Etats-Unis et l'Europe partageant ces mêmes valeurs
19:27du monde occidental, de la liberté,
19:30assises autour et sur le multilatéralisme
19:33et le respect de l'État de droit et de l'ordre international établi.
19:37Aujourd'hui, vous en avez fait la liste.
19:39Vous avez fait la liste de tous les points de tension,
19:42d'opposition, de menaces que fait peser Donald Trump,
19:45que font peser Donald Trump et son entourage
19:48sur l'Europe, sur le continent européen,
19:50d'un point de vue de notre sécurité, d'un point de vue commercial,
19:53d'un point de vue de notre intégrité territoriale.
19:55C'est la nouvelle réalité, c'est d'une brutalité inouïe, sans nom.
19:58Et d'ailleurs, j'ajouterais par ailleurs qu'il y a un agenda idéologique,
20:01puisque J.D. Vance, le vice-président américain,
20:04est venu chez nous, à Munich, pour attaquer notre modèle démocratique.
20:08Madame Zovko, les anciens pays communistes,
20:11comme le vôtre à Croatie, ont toujours été plutôt atlantistes,
20:15c'est-à-dire attendaient beaucoup, en matière de défense
20:18et de soutien de leur démocratie, de l'hyperpuissance américaine.
20:22Est-ce que vous êtes d'accord, aujourd'hui,
20:25qu'ils ne sont plus nos amis ni nos alliés, ces Américains ?
20:29Moi, je viens de Croatie, où Croatie a valu beaucoup,
20:33a respecté les alliés et les gens qui nous avaient sauvés pendant la guerre.
20:38Et les États-Unis, ils ont participé
20:41dans la sauvegarde de l'Union d'Europe,
20:45au moment où il y avait le fascisme,
20:48et après le communisme, le totalitarisme.
20:51Et donc, il faut vraiment faire beaucoup de patience
20:56et faire beaucoup d'attention, ce qu'on dit, sur les États-Unis.
21:01Même Normandie, qui est pleine de tombeaux des soldats américains,
21:08est une souvenir française.
21:11Les États-Unis de Donald Trump, c'est les mêmes États-Unis
21:14où on a changé de cap ?
21:15Oui, tout à fait.
21:16Ce sont les États-Unis qui ne sont pas les élitistes,
21:19qui ne sont pas les diplomates,
21:21mais ce sont les États-Unis qui sont changés avec le temps,
21:24qui changent.
21:25Il ne faut pas jamais dire que les États-Unis ne sont pas nos alliés.
21:29S'ils ne sont pas les États-Unis, qui sont nos alliés ?
21:32Alors, Valérie Ayé, il ne reste pas moins que les Européens,
21:34en tout cas, assistés et sidérés au Seine.
21:36On peut qualifier d'humiliante, affligée au président ukrainien,
21:40Volodymyr Zelensky.
21:41L'annonce de la suspension de l'aide militaire américaine
21:44est venue confirmer ce que beaucoup craignaient.
21:46Est-ce qu'on peut dire que Trump est devenu
21:48une forme d'allié objectif de Vladimir Poutine ?
21:50Complètement.
21:51Aujourd'hui, le camp de Donald Trump, c'est le camp de Vladimir Poutine.
21:54Vous disiez, à juste titre, et d'ailleurs, on s'attendait
21:57à ce que les États-Unis se réorientent leur stratégie
22:01et leurs intérêts géopolitiques.
22:03Ça a déjà été fait sous Trump I, sous Obama même et sous Biden.
22:06Ça, c'est la réalité du changement d'orientation des États-Unis
22:09à laquelle nous nous attendions.
22:11Mais ce qui est fondamentalement nouveau avec Donald Trump,
22:13c'est qu'il est très agressif et qu'il y a un renversement d'alliance.
22:16On a vu que Trump, il y a trois semaines, nous a fait savoir
22:19qu'il avait eu Vladimir Poutine au téléphone,
22:22qu'ils avaient trouvé un deal, que ce deal se ferait
22:24sur le dos des Ukrainiens sans que les Européens
22:27ne soient jamais consultés.
22:29Il y a dix jours, il y a eu une résolution qui a été votée
22:31aux Nations unies pour la première fois sur la question
22:34de la guerre en Ukraine.
22:35Les États-Unis se sont désolidarisés des Ukrainiens
22:38et des Européens.
22:39Ils ont voté contre une résolution rappelant simplement
22:42des éléments factuels sur la situation de la guerre en Ukraine.
22:45Et à l'inverse, ils se sont retrouvés à voter
22:48avec la Chine, avec la Corée du Nord, avec la Russie.
22:53Donc oui, il y a un renversement d'alliance.
22:55Et aujourd'hui, Donald Trump a bien plus à faire
22:57avec Vladimir Poutine qu'avec les Ukrainiens
23:00et les Européens.
23:01C'est un problème majeur.
23:02Il faut qu'on crée les conditions de notre propre sécurité.
23:06Ça ne veut pas dire pour autant qu'il faut couper les ponts
23:08avec l'administration américaine.
23:10Il faut continuer de discuter avec Donald Trump.
23:12On a un intérêt majeur à continuer à discuter
23:15et c'est de le convaincre que l'intérêt des Américains
23:18reste le fait de continuer à aider l'Ukraine, bien sûr.
23:22Et pour le dimanche, il a annoncé, et c'est bien ça,
23:25Mme Zofko, qu'il n'arrêtait d'aider l'Ukraine
23:28financièrement, militairement.
23:31Est-ce que vous sentez d'ailleurs que les 27 sont prêts,
23:34d'un certain point de vue, avec des dirigeants pro-Trump
23:36comme le hongrois Victor Orban, l'italienne Georgia Meloni,
23:39sont prêts à prendre le relais, à aider tout seul l'Ukraine,
23:43à se substituer aux États-Unis pour constituer
23:45cette fameuse force de défense européenne
23:48pour sécuriser notre territoire, l'Europe ?
23:52Georgia Meloni était toujours à côté d'Ukraine.
23:55Il faut retenir ça.
23:58Et c'était elle qui était à l'Ukraine,
24:01qui a visité Zelensky et qui s'est offert comme un pont.
24:07Mais je trouve qu'il faut avoir un pont réel à l'Union européenne,
24:11qu'il faut avoir quelqu'un qui vienne comme président
24:15de la Commission, Ursula von der Leyen,
24:17qui peut discuter aussi sur notre responsabilité
24:22pour prendre beaucoup plus sur le budget,
24:25sur la défense, et aussi pour expliquer
24:28ce qu'on a fait avec l'aide de l'Ukraine
24:32et comment on va faire un plan stratégique
24:35après pour la reconstruction de l'Ukraine.
24:38Donc on peut et on doit remplacer les États-Unis ?
24:41Non, jamais. Jamais pour le temps.
24:45Maintenant, qui va nous protéger de force nucléaire ?
24:48Est-ce que la France va nous aider nucléairement ?
24:50Je pose une question, qu'est-ce qu'on fait
24:52si demain les États-Unis sortent de l'OTAN ?
24:54Peut-être que ça arrivera.
24:56En tout état de cause, on doit se préparer au pire.
24:59Les Européens ont eu ce premier électrochoc en 2022
25:03avec l'invasion russe en Ukraine.
25:06En réalité, cette guerre avait commencé bien avant, en 2014.
25:10Aujourd'hui, on est face à une réalité du monde
25:13qui est brutale mais à laquelle il faut qu'on s'adapte.
25:15Et donc ça veut dire s'attendre et se préparer au pire.
25:18Ça veut dire aider l'Ukraine, accélérer les livraisons d'armes
25:21et munitions pour permettre à l'Ukraine
25:23d'être dans la meilleure situation possible
25:25au moment de la négociation.
25:26Ça veut dire préparer très sérieusement
25:28les conditions de la paix et les garanties de sécurité
25:31pour les Ukrainiens et pour l'Europe.
25:33Et donc avancer sur l'Europe de la défense,
25:35se mettre en économie de guerre
25:37pour faire passer le message à nos ennemis
25:41que nous assumons d'être une puissance militaire.
25:43Sur la question de la dissuasion nucléaire,
25:45le président de la République française, Emmanuel Macron,
25:47a déjà rappelé la doctrine française,
25:49à savoir que les intérêts vitaux de la France
25:51dépassent les frontières nationales
25:53et ont même une dimension européenne.
25:54Il a appelé à avoir un débat à l'échelle européenne
25:56avec nos partenaires,
25:58en offrant la possibilité que nos partenaires européens
26:01bénéficient de l'effet de la dissuasion nucléaire.
26:04Vous parliez d'électrochoc, on va en évoquer un autre.
26:07Dans son discours de l'Union devant le Congrès américain,
26:10Donald Trump a réaffirmé ses prétentions sur le Groenland
26:14visant directement un territoire relevant de l'Union européenne
26:17avec une formule ambiguë.
26:19J'ai également un message à adresser
26:22à l'incroyable peuple du Groenland.
26:24Nous soutenons fermement votre droit
26:27à décider de votre propre avenir.
26:29Et si vous le voulez,
26:31nous vous souhaitons la bienvenue aux Etats-Unis d'Amérique.
26:34Nous avons besoin du Groenland pour notre sécurité nationale
26:37et même internationale.
26:39Et nous travaillons avec toutes les parties concernées
26:41pour essayer de l'obtenir.
26:43Mais nous en avons vraiment besoin pour la sécurité internationale.
26:46Et je pense que nous allons l'obtenir.
26:48D'une manière ou d'une autre, nous l'obtiendrons.
26:50Alors, des élections au Groenland auront lieu le 11 mars prochain.
26:54On comprend que Donald Trump ait tenté de les influencer.
26:57Il appelle une forme de référendum d'autodétermination
27:00qui serait défavorable au Danemark.
27:02Eliana Zoffko, il peut faire la pluie et le beau temps en Europe
27:05et remettre en cause nos territoires ?
27:07Non, il ne remet pas le territoire en question.
27:10Moi, j'étais avec la commission des affaires étrangères
27:13il y a quatre ans au Groenland,
27:16où il y avait la question de ce référendum prendre place.
27:19Et vous savez, la plus grande base des Etats-Unis
27:23est placée militairement là-bas, au Groenland.
27:26Et la plus grande menace pour les Etats-Unis, c'est la menace chinoise.
27:31Toute la stratégie que les Etats-Unis prennent en ce moment,
27:35c'est la stratégie de cette menace chinoise qu'ils ont dans sa doctrine.
27:41Et qu'est-ce qu'on va faire, ce Groenland,
27:44avec ce référendum d'autodétermination,
27:48s'il obtient le vote pour et s'il décide d'aller avec les Chinois ?
27:53Donc, il vaut mieux qu'ils aillent aux Etats-Unis, vous dites,
27:55et qu'ils fassent exactement ce que leur demande Trump,
27:58à savoir rejoindre les USA ?
28:00Non, je pense que le mieux, c'est qu'ils restent avec les Danois.
28:02Et il y a cette provision dans sa constitution
28:05d'avoir le référendum sur l'autodétermination.
28:10Et ils ne font pas partie de l'Union européenne,
28:14ils ne décident pas, ils sont sous l'état de Danemark.
28:20Mais s'ils décident d'aller avec quelqu'un d'autre après ce référendum,
28:25qu'est-ce qu'on va faire ?
28:26Qu'est-ce qu'on répond, nous, les Européens,
28:28par rapport aux Danois qui sont véritablement très inquiets,
28:31des déclarations américaines ?
28:32D'abord, je voudrais revenir sur les propos de Trump.
28:34Il commence en disant que le peuple hollandais a le droit à la liberté
28:39et il termine avec des menaces, en disant qu'on a besoin de ce territoire
28:42et tôt ou tard, on l'obtiendra.
28:44C'est ça la réalité, là encore,
28:46de celui que vous considérez comme un allié pour l'Union européenne.
28:50C'est tout l'inverse aujourd'hui.
28:52Ils ont le droit de l'autodétermination.
28:55Bien sûr, et le gouvernement danois le reconnaît, d'ailleurs.
28:59Donc la question de l'indépendance du Groenland,
29:02elle n'est pas nouvelle.
29:03Elle est là depuis des décennies.
29:05Aujourd'hui, il y a des élections demain qui étaient prévues,
29:10mais les Groenlandais aujourd'hui et les Danois
29:14sont extrêmement inquiets par cette menace
29:17que fait peser Donald Trump sur leur territoire.
29:19Et on voit bien l'intérêt que Donald Trump a
29:21ou que cette île commence à avoir,
29:23parce qu'avec malheureusement la fonte des glaces,
29:26il y a probablement des mines,
29:27un accès aux matières premières critiques qui sera facilité,
29:30et puis il y a ces routes commerciales
29:32avec la présence chinoise.
29:34Soyez honnêtes, les Danois sont beaucoup plus verts,
29:37écologistes, respectueux de l'environnement
29:39que le sont les Américains de Donald Trump.
29:41Ils ne veulent pas en faire la même chose.
29:42Évidemment.
29:43Le Groenland est un territoire membre d'un État membre
29:46de l'Union européenne.
29:47C'est inadmissible qu'un de nos partenaires s'en remette
29:52et attaque l'intégrité territoriale d'un territoire souverain.
29:56Deux, il faut qu'on aide davantage les Groenlandais
29:59d'un point de vue économique, d'un point de vue de la sécurité.
30:02Et puis je crois profondément qu'on a besoin
30:05d'avoir en Europe une stratégie arctique
30:08avec les Groenlandais, avec les Islandais,
30:11avec les Norvégiens, sur les éléments de sécurité,
30:14de défense, sur la lutte contre le changement climatique également.
30:17À mon avis, Donald Trump ferait mieux
30:20de s'engager dans une discussion diplomatique sereine
30:24avec l'Union européenne et avec ces États-là
30:27pour véritablement avoir une stratégie
30:29pour contrer l'influence à la fois russe et chinoise.
30:32Alors voilà pour le Groenland.
30:33Il nous reste un petit peu de temps pour évoquer le volet commercial.
30:36Donald Trump annonce des droits de douane massifs
30:39qui concerneraient aussi l'Union européenne.
30:41Zeljana Zovko, quelle devrait être la réponse des 27 et de la Commission ?
30:46Je pense l'union très vite entre Ursula von der Leyen et Donald Trump
30:51pour parler comme la dernière fois Juncker
30:54a fait les concessions pour l'Union européenne
30:57parce qu'on a un grand déficit sur les marchandises
31:00du côté des États-Unis.
31:03Et je pense que c'est inévitable
31:06que ce levier sur l'acier et l'aluminium qui va être levé.
31:12Mais sur les autres choses, il faut négocier très vite
31:15et il faut trouver les points communs
31:18et ne pas entrer dans la guerre des mots
31:22et ne pas rompre les ponts avec l'allié qu'on a besoin.
31:27Parce que l'autre allié stratégique pour l'Union européenne,
31:31le chinois, il vous donne des cadeaux.
31:36Mais il faut se méfier des cadeaux
31:39qui ne sont pas avec une bonne intention.
31:44Je trouve qu'il faut faire tout pour refaire les ponts
31:47avec les États-Unis, avec l'administration Trump.
31:51Vous dites qu'il faut parler avec les Américains, etc.
31:55On a l'impression que c'est tellement les Européens
31:59qui ont arrêté le dialogue.
32:01C'est côté américain qu'on impose unilatéralement
32:04des droits de douane supplémentaires.
32:06Est-ce qu'il faut tenter de négocier ?
32:08Tenter de négocier jusqu'où ?
32:10Est-ce que des éléments d'échange, c'est
32:12on vous achète plus d'armes, on lâche un peu l'Ukraine ?
32:16Ou est-ce que ça doit rester sur le commerce pur ?
32:19Et dans quelle stratégie, avec un bras de fer ou pas ?
32:22D'abord, il faut rappeler que personne n'a intérêt à la guerre commerciale.
32:25Ni nous, les Européens, ni Donald Trump, les Américains.
32:28Parce que ça veut dire très concrètement,
32:30moins d'accès, parce que s'il y a une guerre commerciale
32:33qui est engagée, il faudra qu'on réagisse.
32:35Il faudra qu'on réagisse extrêmement fermement
32:38par des tarifs douaniers, par une réduction de l'accès
32:41des entreprises américaines à nos marchés publics.
32:43Parce qu'on ne va pas se laisser marcher dessus, rouler dessus.
32:45Au contraire, on est un marché de 450 millions d'Européens,
32:48un de consommateurs, le marché le plus riche au monde
32:50et le plus dynamique au monde.
32:52Je doute que les entreprises américaines acceptent
32:54dans la durée que Trump les prive de certains marchés.
32:57Et puis ça veut dire pour les consommateurs américains,
32:59des hausses de tarifs.
33:0050% des produits de consommation américains
33:02viennent de l'extérieur des frontières,
33:04ne sont pas produits aux États-Unis.
33:06Donc ça aura un impact majeur sur le consommateur américain.
33:09Moi je pense qu'il faut qu'on joue le rapport de force.
33:11Il faut que nous abandonnons la logique des élites
33:15de Washington et de Paris.
33:17Il faut vraiment aller chez les ouvriers,
33:21chez les gens pauvres aux États-Unis
33:25pour voir à qui s'adresse Donald Trump
33:28quand il part, quand il fait tout ça.
33:30Ce sont les gens, les classes abandonnées.
33:33Et c'est ça ce qu'il fait et c'est ça son discours
33:36et c'est ça qu'il faut vraiment comprendre pour parler avec eux.
33:39Merci à vous d'avoir été très bien représentés
33:43toutes les interrogations des Européens
33:47sur notre relation aux États-Unis de Donald Trump.
33:51Merci Caroline et bonne suite de programmes sur nos chaînes.

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