Un patron pas comme les autres. Lui qui a dirigé l’un des premiers groupe alimentaire mondiaux assure n’avoir jamais sacrifié ses valeurs de partage à la recherche de profits sans limites. Pour ce natif des Alpes, passionné de montagne, il est du devoir des entreprises d’intégrer dans leur comptabilité l’état de la planète ou encore les inégalités et leurs conséquences. Une humanité qu’il doit à la relation proche et sensible qu’il a eu avec son frère, schizophrène et aujourd’hui décédé, et qui profondément marqué sa vie. Comment perçoit-il les abandons des engagements climatiques de certaines entreprises sous l’ère Trump ? La bataille d’un monde meilleur est-elle perdue d’avance ? Comment revoir les règles du capitalisme mondial pour changer les choses ? Et pourquoi l’amour de la montagne lui a-t-il été aussi essentiel pour garder les pieds sur terre ? Cette semaine, Rebecca Fitoussi reçoit Emmanuel Faber dans l’émission Un monde, un regard.Une collection de grands entretiens inspirante dans un monde en manque de repères et de modèles. Année de Production :
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00:01Si vous êtes allergique à l'économie, surtout, surtout, restez avec nous.
00:27Car si notre invité appartient à la famille des grands patrons de ce monde, il est un patron différent, un chef à part.
00:34Il a certes dirigé un groupe comme Danone, géré des dizaines de milliers de salariés, convaincu et parfois affronté de grands actionnaires.
00:41Mais il a toujours eu un style et un ton différent, peut-être plus humain.
00:47Non pas que les dirigeants d'entreprises ne soient pas humains, mais lui, ses messages humanistes, il les clame haut et fort.
00:52Il en a fait un des socles de sa vie.
00:54Il l'a très bien exprimé lors d'un discours devenu viral devant les étudiants d'HEC.
00:59C'est là que le grand public a commencé à l'identifier et à entendre sa vision des choses.
01:05L'économie ne va pas sans justice sociale à ses yeux.
01:08Le monde ne peut pas continuer de tourner si on n'y intègre pas tous ceux qui y vivent.
01:13Les riches, les pauvres, les gens dits normaux et les autres.
01:16Il ne peut pas continuer de tourner si on ne tient pas compte des enjeux climatiques et d'égalité.
01:22A-t-il alors l'impression d'être un ovni dans le monde économique ?
01:25Agacent-ils les autres chefs d'entreprise ?
01:27Posons-lui ces questions.
01:28Bienvenue dans Un Monde, un Regard et bienvenue à vous, Emmanuel Faber.
01:31Merci d'avoir accepté notre invitation ici au Sénat.
01:34Ancien PDG de Danone, je le disais, aujourd'hui à la tête d'une entité au sigle un peu barbare, ISSB.
01:39Vous aidez et vous poussez les entreprises à respecter des normes d'ordre environnemental.
01:46C'est comme ça qu'on peut résumer les choses ?
01:48Oui, sans doute, je pense, oui.
01:50Merci, Rebecca, de m'avoir invité ici, dans ce lieu historique et symbolique du futur aussi, j'espère.
01:59L'ISSB, c'est l'International Sustainability Standards Board.
02:03Je vous laisse le dire.
02:04Oui, comme ça, c'est dit une fois.
02:06Ça sert à quoi ? Ça a été créé à la COP26 à Glasgow sur le climat,
02:12lorsque les autorités de régulation financière mondiale se sont aperçues à leur rythme
02:19que la comptabilité, qui est le langage de l'économie, en fait, compte beaucoup de choses qui comptent,
02:25mais pas tout ce qui compte, et en particulier qu'elle est aveugle à un certain nombre d'éléments
02:31dont vous avez fait la liste tout à l'heure, que ce soit le changement climatique et ses risques
02:35et les opportunités stratégiques qu'il peut aussi offrir, les questions d'inégalité,
02:40qui sont l'autre côté de la tension sur toutes ces transitions.
02:44C'est-à-dire qu'il n'y aura pas de transition écologique, c'est en transition sociale.
02:48Et ça, la comptabilité n'en dit rien.
02:49Or, le langage définit la pensée, donc la pensée de l'économie,
02:54elle est définie par le langage de la comptabilité.
02:57Et donc, cet organisme a été créé pour venir visser sur la comptabilité internationale,
03:02le système comptable international, un langage comptable,
03:07mais qui ne compte pas que les euros, les dollars et le reste,
03:10mais des éléments comme le climat, les inégalités et le reste.
03:13Mais vous aurez remarqué qu'on est à une époque où le mot norme dérange,
03:16qu'on commence même à vouloir un peu se débarrasser de toutes ces normes,
03:19qu'on considère qu'on est dans un monde qui fonctionne avec trop de normes.
03:22Comment votre message est-il reçu ?
03:25Nous ne considérons pas qu'il s'agit de normes,
03:28et d'ailleurs, moi, je n'utilise pas ce mot, j'ai utilisé celui de langage,
03:32je peux utiliser aussi celui de code.
03:34Vous l'évitez exprès, le mot norme, parce que vous sentez qu'il...
03:36Parce qu'en fait, le mot norme, en français en particulier,
03:39il veut dire deux choses à la fois.
03:41La normalisation, ça sert en fait à créer des langages et des référentiels communs,
03:45mais ça crée aussi à normer au sens de dicter des comportements.
03:50Nous, on ne dicte pas des comportements,
03:52on n'est pas un organisme souverain pour ça,
03:54on n'a pas de légitimité pour ça.
03:56Ce qu'on propose, c'est un langage
03:57sans lequel la finance mondiale n'est pas capable de travailler.
04:01Donc on propose un langage,
04:03ce sont les pays qui décident de l'utiliser ou pas
04:06et de venir le raccorder sur leur système comptable.
04:09Aujourd'hui, plus de 35 pays ont décidé de le faire,
04:12en plus de l'Europe, on pourra y revenir si vous le souhaitez,
04:14et ça couvre déjà, du coup,
04:17quand tout ça aura été mis en œuvre de façon effective dans les pays,
04:20de façon obligatoire pour les entreprises,
04:22en tout cas les entreprises cotées dans ces pays-là,
04:25la nécessité d'utiliser ce langage,
04:27et ça couvrira 60% déjà de l'économie mondiale.
04:31Donc vous vous sentez entendus, écoutés,
04:33vous sentez que votre discours leur parle ?
04:35Oui, fondamentalement oui.
04:36La Californie, aujourd'hui, est à peine assurable
04:42sur le plan des assurances habitations
04:45contre les dégâts des eaux et les incendies,
04:47et on voit bien pourquoi.
04:48La moitié de la Floride est inassurable de ce point de vue-là.
04:51Donc les assureurs ont absolument besoin
04:53de comprendre les risques sous-jacents
04:57liés à des événements climatiques extrêmes,
04:59dont on sait que le changement climatique
05:00va augmenter leur fréquence, leur violence, leur imprédibilité.
05:03Donc ce sont les drames et la réalité qui se rappellent à eux
05:04et qui les poussent à agir.
05:05Absolument.
05:07Il y a des consensus publics qui évoluent,
05:09on le voit bien, parfois violemment, fortement,
05:12mais le changement climatique, lui, il s'en fiche pas mal.
05:15Moins on va s'en occuper sur le plan des politiques publiques,
05:17plus il faudra que l'économie s'équipe
05:19avec un langage qui permette de repérer ses risques
05:22à court, moyen et long terme
05:24et dans toutes les chaînes de valeur des entreprises.
05:25Et quand vous lisez qu'une entreprise comme BP
05:27accélère sur le gaz et le pétrole
05:29et décide de sabrer ses investissements dans les énergies vertes,
05:33comment vous réagissez ?
05:34Ça va à l'inverse de ce que vous essayez de promouvoir ?
05:36Oui, ça va à l'inverse, en effet.
05:39Et de toute façon, la transition,
05:41c'est pas un chemin linéaire.
05:44Et chaque entreprise aura, à un moment ou à un autre,
05:47à décider de la vitesse à laquelle elle accélère
05:50ou au contraire, elle va freiner sa transition.
05:52Mais celle-ci qui a investi dans les énergies renouvelables,
05:54elle sera plus résiliente demain.
05:56Donc elle aura un business model qui sera plus solide.
05:59Nous, on ne parie pas sur la vertu ni le courage des gens.
06:02J'ai donné, voilà, d'autres l'ont fait.
06:05On travaille à une échelle systémique
06:06pour faire changer l'engagement de l'économie.
06:09Et quand on vous interroge sur Donald Trump
06:11et les mesures qu'il prend,
06:12vous dites qu'il faut arrêter de paniquer.
06:14Ah bon ?
06:15J'ai dit ça, moi ?
06:16Oui.
06:17Parce que je le pense, oui.
06:18D'abord, paniquer, c'est jamais une...
06:20Enfin, je veux dire, la peur n'éloigne pas le danger, quoi.
06:22Donc c'est un grand précepte en montagne.
06:26On en parlera.
06:27Oui, peut-être, oui.
06:28Mais en tout cas,
06:30ce que je pense, que j'observe,
06:34et beaucoup d'autres sont sans doute mieux placés
06:38que moi pour le faire,
06:39mais d'abord,
06:41les énergies renouvelables aux États-Unis,
06:43c'est un secteur qui représente 4 millions d'emplois,
06:47qui croit deux fois plus vite en emplois
06:48et en croissance, d'ailleurs,
06:49que le reste de l'économie.
06:51Le Texas, qui est à la fois le premier producteur
06:53d'énergie fossile aux États-Unis,
06:55est aussi le premier producteur d'énergie renouvelable.
06:57Donc, on va le dire comme ça,
06:58c'est bon pour Corporate America.
07:01Je ne pense pas qu'on voit brusquement
07:04des demandes de fermer tous ces investissements.
07:07D'accord.
07:07Mais, il y a un mec qui vient ou pas ?
07:09Mais bien sûr, il y a un mec
07:11dont on voit à quel point il est important
07:14au fur et à mesure que les semaines
07:15nous en révèlent plus
07:16sur la situation aux États-Unis.
07:19Parce qu'il est évident
07:21que faire la guerre
07:24à la notion même de changement climatique,
07:26ça ne peut pas aider
07:27la théorie du changement général,
07:30à la fois aux États-Unis
07:31et à la fois en dehors des États-Unis,
07:34compte tenu de la place des États-Unis
07:36dans les marchés financiers globaux.
07:37Néanmoins, aux États-Unis,
07:39le fédéral, ça n'est pas tout.
07:41Il y a d'une part des échelons des États-mêmes.
07:44La Californie est en train de travailler
07:46à passer une loi
07:48qui va exiger pour les grandes entreprises
07:49l'utilisation des normes internationales
07:51et qui va du coup, sans doute,
07:54rassembler à peu près 40%
07:56des grandes entreprises cotées aux États-Unis.
07:59Donc, il y a aussi des phénomènes qui se déroulent là.
08:01Il y a aussi des choses en dessous
08:03de ce grand fracas médiatico-politique
08:06qui font que les sous-jacents
08:10que j'évoquais tout à l'heure
08:11vont demeurer des investisseurs américains,
08:14ont besoin de cette information comme les autres.
08:16Je disais en introduction
08:16que vous étiez un patron à part.
08:18Au moment de votre éviction de Danone,
08:20on a pu lire des choses comme
08:21patron atypique qui agace les milieux financiers,
08:23patron tiraillé entre ses plaidoyés
08:25pour la justice sociale
08:26et les exigences des marchés financiers,
08:28images du moine-soldat,
08:30du capitalisme responsable.
08:31Est-ce que vous vous reconnaissez
08:32dans toutes ces descriptions ?
08:33Vous êtes un peu tout ça ?
08:35Oui, sans doute un peu tout ça,
08:36mais beaucoup d'autres choses aussi.
08:38Tu imagines.
08:39Et que j'agace les milieux financiers...
08:41C'est une réalité ?
08:42Non.
08:43Non ?
08:44Non, ce n'est pas le milieu financier que j'agace.
08:46C'est ceux qui ne comprennent pas
08:47comment ça marche.
08:48Parce que je ne me retrouverai pas
08:50littéralement six mois après,
08:52alors que vraiment,
08:53je n'avais pas prévu de repartir
08:54aussi vite et aussi loin
08:56à la COP26 à Glasgow
08:59où les autorités financières mondiales,
09:01y compris sur scène,
09:03le patron de BlackRock,
09:05Larry Fink,
09:06et à la fin de la séance,
09:09une délégation vient me voir
09:11et me dit
09:11« On a pensé à vous
09:12pour diriger cet ensemble-là ».
09:14On est soutenus aujourd'hui
09:15par 90 des plus grands investisseurs mondiaux
09:19qui représentent littéralement
09:21des milliers de milliards
09:23de dollars d'actifs sous gestion.
09:26Donc, ce n'est pas les milieux financiers
09:28que j'agace.
09:28Donc, vous n'agacez pas,
09:29mais peut-être que vous êtes atypique,
09:30ça oui.
09:31Là où je suis sans doute atypique,
09:33c'est que je considère qu'en effet
09:34la nouvelle efficience,
09:36la nouvelle rentabilité,
09:38c'est la résilience.
09:39On est dans un monde
09:39qui est beaucoup trop volatile,
09:41ça avance,
09:41ça va beaucoup trop vite
09:42et trop fort
09:43pour qu'on continue à avancer
09:45comme ça trimestre par trimestre.
09:47Ce qui vous vaut
09:47cette réputation de figure
09:48de l'économie responsable,
09:49c'est ce discours
09:50« Restez dans les annales
09:51devant les étudiants d'HEC en 2016 »
09:53où vous sidérez l'Assemblée
09:55et les millions de personnes
09:56qui regarderont ensuite
09:57ce discours sur Internet.
09:58Ce jour-là,
09:58vous racontez notamment
10:00l'histoire de votre frère malade
10:01de schizophrénie
10:02au parcours un peu chaotique
10:03à cause de ces crises
10:04et vous prononcez
10:04des paroles très touchantes.
10:05Je vous cite quelques secondes.
10:07« J'ai appris à parler
10:08le langage des fous
10:09pour ne pas perdre le dialogue,
10:10découvert la beauté de ce langage,
10:11découvert que la normalité
10:12s'enferme beaucoup,
10:14découvert la beauté
10:15de l'altérité,
10:16l'amitié des SDF. »
10:17Et vous racontez
10:18que vous avez séjourné
10:19plusieurs fois
10:19dans des bidonvilles
10:20un peu partout dans le monde.
10:21Votre discours humaniste
10:23a été encensé à l'époque.
10:25On semblait découvrir
10:26que les patrons
10:27pouvaient être humains.
10:29J'imagine qu'on vous en a parlé
10:30et qu'on continue
10:30de vous en parler
10:31de ce discours.
10:32Oui, tous les jours.
10:32Tous les jours ?
10:33Comment se fait-il
10:35qu'on ait été surpris ?
10:36Qu'est-ce qui se joue ?
10:37Pourquoi vous avez
10:38à ce point surpris ?
10:39Pourquoi on a cette image ?
10:40Pour la même raison
10:41que la raison précédente.
10:42C'est-à-dire que
10:43de même que la comptabilité
10:45est étriquée
10:46à l'intérieur d'un système,
10:48les patrons
10:48dont l'enrichissement
10:49dépend de cette comptabilité
10:50sont étriqués
10:51à l'intérieur d'un système.
10:53Et donc,
10:54quand des patrons
10:57prennent des décisions
10:58qui ont pour objectif
11:00principalement le court terme
11:02et qui, au passage,
11:05leur mettent dans la poche
11:06des sommes
11:07que je continue à...
11:09À trouver astronomiques.
11:09À trouver astronomiques.
11:10Je n'arrive pas
11:11à trouver de justification
11:12à ce système-là.
11:14Oui, ça surprend.
11:15Et donc là,
11:15ce jour-là,
11:17peut-être que les gens
11:18découvrent des trucs,
11:19mais vous parliez d'agacer.
11:20Je pense que
11:21l'agacement véritable,
11:22il arrive un peu plus tard
11:24quand je décide
11:25de joindre l'acte
11:27à la parole
11:27et que je renonce
11:28à tous les parachutes dorés
11:30dont les générations précédentes
11:32de patrons
11:33dans l'entreprise
11:34avaient largement bénéficié
11:36et continuaient
11:37à bénéficier tranquillement.
11:38Moi, ce n'est pas mon truc.
11:39Quand on est en montagne,
11:41quand on essaye d'aller loin,
11:43d'aller plus loin,
11:44de changer un peu les choses,
11:46on fait gaffe au poids du sac.
11:48Le poids du sac,
11:49c'est le poids de la peur.
11:50Eh bien, moi,
11:51ça ne m'intéresse pas.
11:53Donc voilà,
11:53j'ai renoncé ce jour-là
11:54à 25 millions d'euros.
11:56J'ai montré mes fesses,
11:57c'est clair.
11:57Et donc ça, oui,
12:00ça a agacé les uns ou les autres.
12:01Parce qu'il y a une réalité, donc.
12:03Évidemment qu'il y a une réalité.
12:03On a raison d'avoir une image
12:04un peu dégradée des patrons.
12:06Mais non, dégradée peut-être pas.
12:08Pardon,
12:08mais je pense que
12:10collectivement,
12:11individuellement,
12:13il y a
12:13un certain nombre de pratiques
12:16qui ne militent pas
12:18pour qu'on puisse s'imaginer
12:19qu'en effet,
12:21les patrons ont une vision
12:22plus large
12:23que celle qu'ils offrent
12:25dans leur comportement,
12:26dans leur pratique,
12:27dans ce qu'ils acceptent.
12:30Et quand on accepte
12:31trop de choses,
12:31moi, je considère
12:32que ça devient des compromissions.
12:33Ce n'est pas seulement
12:34des compromis.
12:35Et quand on cherche
12:36autre chose
12:38que juste l'accumulation
12:39d'un certain nombre de choses,
12:40les compromis sont essentiels
12:42et les compromissions
12:43sont impossibles.
12:44Le bien, le matériel,
12:45le pouvoir,
12:46c'est ça, la compromission ?
12:47Disons, moi,
12:49j'ai un parcours
12:49dans lequel je me suis retrouvé
12:51à 28 ans
12:53nommé directeur financier
12:54d'une entreprise cotée
12:55qui faisait 6 000 personnes.
12:57J'étais assis
12:58dans un directoire,
12:59d'ailleurs, à l'époque,
12:59ce n'était pas un comité exécutif,
13:01dans lequel les gens
13:01avaient le double de mon âge.
13:04Je me suis vite aperçu
13:05de ce qu'était le pouvoir,
13:07de ce qu'était beaucoup d'argent
13:09que je n'avais jamais demandé.
13:10Voilà,
13:11je n'ai jamais le sentiment
13:12d'en avoir eu besoin
13:13à ce point-là.
13:15Donc, ça fait très longtemps.
13:16J'ai écrit un premier bouquin,
13:17j'avais 26 ans sur le sujet.
13:18C'est juste que j'ai...
13:23Pour moi, être patron,
13:24ce n'est pas un objet
13:25qui fend soi,
13:25c'est un service,
13:28c'est une mission
13:29qui doit avoir du sens,
13:31un sens qui dépasse
13:32complètement ce que je suis
13:33et qui je suis,
13:34ce n'est pas ça le sujet.
13:36Et j'ai vu à quel point,
13:37tout jeune,
13:38même avant d'être
13:38directeur financier,
13:40j'étais en banque d'affaires,
13:42j'ai vu dans des très grosses
13:44opérations d'OPA
13:45combien le pouvoir,
13:47l'argent et la gloire
13:48étaient juste des drogues.
13:50Donc, quand on ne se soigne pas,
13:53oui, ça finit par être...
13:55Vous continuez de l'observer,
13:55j'imagine,
13:56ce monde de l'entreprise
13:57et vous voyez aussi défiler
13:58ces plans sociaux
13:59qui se répètent,
14:01des salariés en souffrance,
14:02un problème de cap,
14:04de décision aussi
14:05d'instabilité politique
14:06et géopolitique
14:07qui panique un peu aussi
14:08ce monde
14:09et des salariés qui souffrent.
14:10Vous l'observez,
14:11ça vous rend inquiet ?
14:12Plusieurs choses,
14:15Adam,
14:15ce que vous dites.
14:16Le premier,
14:17c'est que des plans sociaux,
14:19moi, j'en ai conduit,
14:20décidé,
14:22c'est toujours
14:24un dernier recours
14:25et malheureusement,
14:27parce qu'on n'a pas
14:28de boule de cristal,
14:30malheureusement,
14:30parce qu'on n'est pas seul
14:31à décider,
14:33il y a des fois
14:34où il faut que ça
14:34se mette en place.
14:35La vraie question
14:36dans ces cas-là,
14:37c'est comment on les fait ?
14:38Comment on les fait ?
14:39Et j'insiste là-dessus
14:41parce que,
14:41de nouveau,
14:43une entreprise,
14:44ce n'est pas
14:44l'emploi à vie.
14:46On est dans un monde
14:47extrêmement ouvert
14:48en termes de concurrence.
14:49On se trompe.
14:50Des générations de gens
14:51se trompent.
14:52Moi, y compris,
14:53je me suis trompé
14:53sur des trucs,
14:54sur le timing
14:55à laquelle
14:55des évolutions
14:56de concurrence
14:57vont se passer,
14:58des évolutions
14:59de marché,
14:59etc.
15:00Donc,
15:00des ajustements,
15:01il faut en faire.
15:02La vraie question,
15:03c'est qu'en fait,
15:03un salarié,
15:05et d'ailleurs,
15:07à commencer par des ouvriers,
15:09des employés,
15:09mais vraiment des ouvriers
15:10en particulier,
15:12sont infiniment plus engagés
15:13vis-à-vis de leur entreprise
15:14que n'importe quel patron.
15:16Mais j'en suis persuadé.
15:17Je veux dire,
15:18le patron,
15:18il sort en plus
15:19avec ses parachutes dorés
15:21et le reste,
15:21il retrouve un poste ailleurs
15:23et c'est terminé.
15:23des gars
15:26qui rentrent
15:27à 25 ans
15:28ou 20 ans
15:29dans une usine,
15:32ils sont là,
15:33ils se marient,
15:34ils construisent une maison,
15:35ils s'endettent,
15:36ils ont leurs gamins,
15:37ils n'ont pas d'employabilité
15:38au-delà du bassin d'emploi.
15:40Eh bien,
15:40c'est ces gens-là
15:40qui sont attachés
15:41à leur boîte.
15:42Beaucoup plus.
15:43Donc,
15:43un plan social
15:43doit les respecter.
15:44C'est ça qu'il dit ?
15:44Absolument.
15:45Et c'est là
15:47qu'en effet,
15:47en 2020,
15:49le plan
15:50qui s'appelait
15:51Local First,
15:52qui est redonné
15:53de l'autonomie
15:54au pays
15:54et au territoire,
15:55parce que je pense
15:56que c'est absolument nécessaire,
15:57je ne crois pas
15:58au modèle pyramidal
15:58des multinationales,
16:00avait cette particularité,
16:02c'était que
16:03les 20%
16:04dans tous les pays
16:05des salariés
16:05les moins bien payés
16:06de chaque pays
16:07ne perdraient pas
16:09son boulot.
16:10C'est-à-dire que
16:10même si son poste
16:11est concerné
16:11par cette réorganisation,
16:13les salariés
16:14sont conservés
16:14dans l'entreprise,
16:15formés au métier de demain
16:16et restent dans l'entreprise
16:17mieux préparés pour demain.
16:20C'est devenu désormais,
16:22alors que certains
16:24me l'ont joyeusement
16:25reproché à l'époque,
16:26c'est devenu désormais
16:27un accord mondial
16:29entre Danone
16:30et ses syndicats
16:31qui a été signé
16:31l'année dernière.
16:33C'est devenu désormais
16:34la norme.
16:35Donc,
16:36les plans sociaux,
16:37on les évite
16:37autant qu'on peut,
16:38mais de nouveau,
16:39la question de l'équité
16:41et comment on fait les choses,
16:42elle est posée
16:43sur la forme.
16:43fondamentale.
16:44Elle est fondamentale.
16:45J'ai une archive
16:46à vous proposer,
16:47c'est un rituel
16:48dans cette émission,
16:48Emmanuel Faber,
16:50je vais la mettre
16:50entre vos mains,
16:51évidemment,
16:51et je vais la décrire
16:52pour les gens
16:52qui nous écoutent.
16:53Je ne sais pas
16:53si vous reconnaissez
16:54la comme ça.
16:54Oui, vous reconnaissez.
16:55Alors, je le dis
16:55pour les gens
16:56qui nous écoutent,
16:56il s'agit d'une très
16:58ancienne photo
16:59d'un petit village
17:00qui s'appelait
17:01Saint-Bonnet,
17:02vue générale
17:03qui date de 1895
17:04et ce petit village
17:05est devenu
17:05Saint-Bonnet-en-Champsort
17:07en 1988.
17:08On est là
17:09dans les Hautes-Alpes
17:10précisément
17:11d'où vous venez,
17:11Emmanuel Faber.
17:12C'est votre village
17:13et il a dû changer
17:16quand même
17:16par rapport
17:17à cette photo,
17:17j'imagine.
17:17Il a un peu grandi,
17:18mais quand j'y étais,
17:20il y avait 1000 habitants.
17:22Et j'en parle
17:23parce que cette enfance
17:24dans la montagne,
17:25elle a été très importante
17:26pour vous,
17:26elle vous a même structuré,
17:28vous l'écrivez,
17:29vous dites mon identité
17:29s'est construite
17:31avec la montagne,
17:32ça c'est dans votre livre
17:33qu'on peut lire
17:34Ouvrir une voie.
17:35On a l'impression
17:35que toute votre vie
17:36a été comme une randonnée
17:38et que finalement
17:39ça vous a aidé aussi
17:40cette formation
17:42dans la montagne
17:43et à traverser
17:44les tempêtes
17:44parfois houleuses
17:45dans le monde économique.
17:48Oui,
17:49oui,
17:49elle m'a aidé
17:50à faire plus que ça,
17:51elle m'a aidé à vivre.
17:53Je pense que
17:54je vis en montagne
17:56intérieurement.
17:59C'est-à-dire,
18:00ça veut dire quoi ?
18:01C'est-à-dire que je ferme
18:02les yeux
18:02et je suis en montagne.
18:05Il y a un alpiniste
18:06des Hautes-Alpes
18:08qui s'appelle
18:08Lionel Daudet
18:09qui a écrit un bouquin
18:09qui s'appelle
18:10La montagne intérieure
18:11qui est, dit-il,
18:13la seule
18:13que l'on n'escaladera jamais
18:15mais moi j'y vis
18:16dans cette montagne intérieure.
18:18Donc,
18:19ouais,
18:20comment dire,
18:24à l'aune
18:25de ce qu'on vit
18:26en montagne,
18:27la toute petitesse
18:29de ce qu'on est
18:29dans ces espaces
18:31infinis,
18:31verticaux,
18:32horizontaux,
18:33de neige,
18:34le froid,
18:35la solitude.
18:36J'ai fait une traversée
18:37de 60 kilomètres
18:38en deux jours
18:39il y a dix jours
18:40du Keras
18:41qui est une région
18:43très très sauvage.
18:44J'ai rencontré
18:44un loup,
18:45j'ai rencontré
18:45des chamois,
18:46j'ai rencontré
18:47des oiseaux,
18:48j'ai rencontré
18:48deux, trois personnes
18:49au passage.
18:49Mais c'est une immersion
18:51dans le vivant
18:51qui est...
18:53Vous ne sortez pas
18:54indemne de ça.
18:54Vous étiez seul ?
18:55C'était en solitaire ?
18:55Oui, j'étais seul,
18:56ouais.
18:56À ski.
18:58Vous ne sortez pas
18:59indemne de ça.
19:00Et moi,
19:00je n'ai jamais cherché
19:01à en sortir indemne.
19:02Quand j'avais 18 ans,
19:04j'ai préparé
19:04mon premier degré
19:06de monitorat de ski
19:07parce que je ne savais pas
19:08encore ce que j'allais faire.
19:09Je trouvais que j'étais
19:09bon élève,
19:10donc je suis parti en prépa.
19:12Mais du coup,
19:13ce que je veux dire,
19:14c'est que ce n'est pas juste
19:15en plus la montagne pour moi.
19:17J'y vis intérieurement,
19:20j'y réfléchis,
19:20j'y pense,
19:21j'y suis.
19:22Et du coup,
19:24quand je suis dans la vallée,
19:26entre guillemets,
19:26dans la vie de tous les jours,
19:28évidemment que ça colore
19:29le regard qu'on a
19:30sur les choses,
19:30c'est évident.
19:31Et ce village,
19:32bah oui,
19:33d'avoir des copains
19:36qui sont juste là
19:37au nord du village
19:38et avec qui on allait faire
19:41véler les vaches
19:42quand ils étaient adolescents
19:43et qu'on était par là,
19:45c'est pareil.
19:46Ça me ramène
19:47juste à une réalité
19:50qu'on peut vite perdre
19:51de vue
19:52quand on est au G7,
19:53au G20,
19:54à l'ONU,
19:54au COP
19:55et à tous les grands machins.
19:56Ça fait relativiser.
19:57Ce sont vos parents,
19:58je crois,
19:58qui vous initient très tôt
19:59à la randonnée.
20:00Votre père adorait la nature
20:01et les feux de camp.
20:02Votre mère vous a transmis
20:03le goût de la géographie.
20:04Vous dévoriez vous-même
20:05les livres d'explorateurs,
20:07d'aventuriers,
20:08de montagnards.
20:09À la lueur de celui
20:10que vous êtes aujourd'hui,
20:11quel conseil donneriez-vous
20:12au petit garçon
20:13que vous étiez ?
20:13Qu'est-ce que vous lui diriez
20:14avant qu'il ne se lance
20:15dans la vie ?
20:16Ce que j'ai dit
20:20aux jeunes à HEC,
20:21en fait.
20:23Mon frère n'aurait pas été là.
20:25Je pense que je serais tombé
20:27comme beaucoup
20:30dans ce piège
20:31de ce qu'est
20:34l'entre-soi
20:35de l'argent,
20:37du pouvoir
20:37et du reste.
20:39Donc vous diriez
20:40au petit garçon
20:41attention.
20:42Oui, absolument.
20:44Reste bien les pieds sur terre.
20:45Ouais, ouais, ouais.
20:47Oublie pas la montagne.
20:52Alors j'ai des photos
20:53maintenant à vous proposer.
20:54Ça fait aussi partie
20:55des rituels
20:56de cette émission.
20:57La première photo
20:57que je voudrais vous montrer,
20:58c'est celle de Bernard Arnault,
20:59patron de LVMH,
21:00qui a fait polémique
21:01en critiquant la fiscalité
21:02sur les entreprises en France.
21:04Il dénonce une surtaxe
21:05qui pénaliserait
21:05la compétitivité
21:06des entreprises tricolores,
21:08face aux géants américains
21:09et chinois notamment.
21:10Certains ont d'abord
21:11jugé ses propos indécents,
21:12puis il a été rejoint
21:13par d'autres patrons
21:14qui ont dit
21:14bah oui, mais attention,
21:15qu'est-ce que vous avez pensé
21:16de tout ça ?
21:16Qu'est-ce que vous en pensez, vous ?
21:18Que chaque fois
21:19qu'on parle
21:20de fiscaliser les entreprises,
21:22les discours sont
21:23à peu près les mêmes.
21:24Enfin, c'est pas du tout nouveau.
21:25C'est, voilà.
21:27C'est-à-dire ?
21:28Ouais, c'est-à-dire ?
21:29Bah sur le fait
21:29qu'il ne faut pas trop taxer
21:30les entreprises,
21:31qu'il y a trop de taxes,
21:33qu'il y a des questions
21:33de compétitivité.
21:35Au bout du bout,
21:35moi je pense que
21:36on ne fera pas
21:37la transition
21:38à laquelle les entreprises
21:41ont besoin d'être associées
21:42parce que c'est elles
21:43qui paieront aussi
21:44le prix du changement climatique,
21:45des inégalités,
21:46de l'insécurité
21:47et du reste.
21:48Et pour beaucoup,
21:49elles le savent très bien.
21:50On ne le fera pas
21:51sans un État
21:52qui est capable
21:52de planifier,
21:53d'inventer,
21:53de regarder,
21:54de réinventer
21:55la façon dont
21:55les politiques publiques
21:56sont menées d'ailleurs.
21:58Et le langage,
21:59un langage de l'économie
22:01qui permet de parler
22:02le langage de la transition,
22:03ce qu'on est en train
22:03de faire à l'échelle internationale,
22:04c'est nécessaire
22:05mais c'est pas suffisant.
22:06Il faut ça en plus.
22:07Pour faire ça,
22:08il faut des impôts.
22:09Donc pour moi,
22:10la question de combien d'impôts,
22:12elle est intéressante.
22:13Mais la question essentielle,
22:14c'est qu'est-ce qu'on en fait ?
22:15J'ai une deuxième photo
22:16à vous proposer.
22:17Elle illustre
22:17la remise en question
22:18des étudiants
22:20des grandes écoles
22:21et notamment
22:22des étudiants d'AgroParisTech
22:23dont on se souvient.
22:24Récemment,
22:25ils ont aussi manifesté
22:26lors d'un forum d'entreprise
22:27sur leur campus
22:27où sont présents
22:28des multinationales
22:29qu'ils ne souhaitent plus voir
22:30comme Total Energy,
22:31Nestlé,
22:33Danone ou LVMH.
22:34Les écoles d'ingénieurs
22:35servent en général
22:35les intérêts
22:36des grosses industries,
22:37dénoncent-ils.
22:38C'est évidemment pas
22:39la première fois
22:39que ça se passe
22:40et quel regard
22:40vous portez sur ça ?
22:41Vous leur trouvez du courage ?
22:42Vous leur dites
22:43allez-y foncez
22:44ou attention
22:44à ne pas tout mélanger ?
22:45Je ne crois pas
22:47qu'il y ait de système.
22:49J'ai repiqué un truc
22:51qui m'avait beaucoup frappé
22:52dans un livre précédent
22:54qui est que
22:54quand on est dans un embouteillage,
22:56on n'est pas dans un embouteillage.
22:57On est l'embouteillage.
22:58Je suis là
22:59comme tous ceux qui sont là.
23:00J'ai pris ma voiture ce matin
23:01et si j'attends
23:02une heure
23:04à l'entrée de Paris,
23:06c'est parce que
23:06j'ai pris ma voiture ce matin.
23:07Je suis l'embouteillage.
23:08Tous, on l'est tous.
23:10Il n'y a pas de fatalité.
23:13À partir de là,
23:15je pense que
23:15pour que les choses changent,
23:17il faut des gens
23:19qui sont contre le système
23:21et donc je pense qu'il en faut.
23:24Il faut des manifs,
23:25il faut absolument,
23:26il faut faire bouger les choses,
23:27il faut de l'activisme,
23:28c'est indéniable.
23:29Deuxièmement,
23:30je pense qu'il faut
23:31qu'il y ait un changement
23:33au milieu même.
23:34C'est-à-dire,
23:34on ne va pas y arriver
23:36si on se dit
23:37qu'on peut se passer
23:38de la finance.
23:38Non,
23:39on ne peut pas se passer
23:40de la finance.
23:41On ne peut pas se passer
23:42aujourd'hui
23:42des énergies fossiles.
23:44On ne peut pas,
23:44on va pouvoir,
23:45mais on ne peut pas aujourd'hui.
23:46Donc,
23:47il faut aussi des gens
23:48qui,
23:48très doués,
23:49très formés,
23:50restent à l'intérieur
23:51et trier en permanence
23:53pourquoi il reste.
23:55Pourquoi je reste ?
23:56Est-ce que c'est une compromission
23:57ou est-ce que c'est un compromis ?
23:58Parce que vous ne transformez pas
23:59des choses aussi complexes
24:01que les organisations
24:02qu'on a construites
24:03depuis 100 ans
24:04si vous ne les comprenez pas
24:06et si vous ne les avez pas gérées.
24:08Et c'est là que les parcours
24:10de personnes
24:13qui innovent
24:14sur les systèmes économiques
24:16à l'intérieur même
24:17des grandes entreprises
24:18sont nécessaires.
24:19Et donc,
24:19ces jeunes,
24:21d'autres de leurs mêmes promos
24:22doivent aussi rester.
24:23C'est aussi important
24:24qu'ils restent
24:25pour aider à transformer
24:26les choses de l'intérieur.
24:27Et puis,
24:28la dernière chose,
24:29vous citiez HEC,
24:30mais j'ai aussi
24:31un peu plus récemment
24:33partagé deux,
24:33trois idées
24:34devant des élèves
24:36de Sciences Po.
24:38Moi,
24:38je suis persuadé
24:39que vous soyez d'ailleurs
24:42activiste
24:42ou que vous soyez
24:44activiste de l'intérieur,
24:45on va dire,
24:45ou en train de changer
24:46le système de l'intérieur.
24:48Ce qui est important,
24:49c'est de ne pas rester
24:50trop longtemps,
24:50c'est-à-dire de ne pas
24:52rester au centre.
24:52On finit toujours
24:53par être au centre
24:54d'un groupe de copains,
24:55d'un groupe de collègues,
24:56d'un groupe d'entreprises,
24:57de présidents de je ne sais pas quoi.
24:59Non,
25:00quand c'est ça,
25:01ça finit par ne pas bouger.
25:03Donc,
25:03ce qui est important,
25:03c'est de se déplacer.
25:04C'est le mouvement,
25:05c'est de revenir
25:05vers la périphérie des choses,
25:07là où ça frotte
25:08avec d'autres mondes,
25:09là où ça frotte
25:09entre les activistes du climat
25:10et les entreprises
25:11de l'industrie fossile.
25:14Oui,
25:14là,
25:15il se passe vraiment
25:15des choses intéressantes.
25:16je pense que c'est
25:17beaucoup plus une question
25:17de posture,
25:19de mouvement,
25:20au fond,
25:20que de savoir vraiment
25:22où est-ce que vous devez être,
25:23parce qu'il y a vraiment
25:24besoin de toutes les postures.
25:25Une dernière photo,
25:27il s'agit d'Inox Tag,
25:28le youtubeur
25:29aux 9 millions d'abonnés.
25:31Il a explosé les compteurs
25:31avec ce documentaire,
25:32Kaizen,
25:33où on le voit préparer
25:34son ascension de l'Everest.
25:35Vous l'avez vu ?
25:36Non,
25:36je ne l'ai pas vu.
25:37Il en a beaucoup entendu parler.
25:38Beaucoup entendu parler ?
25:39Parce que ça a beaucoup fait parler
25:40dans le monde de l'alpinisme,
25:41notamment,
25:41disant,
25:42oui,
25:42que c'est une opération
25:43de promotion pour soi
25:44plutôt qu'une promotion
25:46de l'alpinisme.
25:47Vous en pensez quoi ?
25:49Ni l'un ni l'autre,
25:50à va dire.
25:50Non,
25:51vous n'avez pas d'avis.
25:51Non,
25:52oui,
25:52je n'ai pas d'avis.
25:53C'est-à-dire que ce n'est pas
25:53du tout mon approche.
25:55Moi,
25:56je pense que j'ai une approche,
26:00comment dire,
26:01très incarnée de la montagne.
26:05Pour moi,
26:06c'est spirituel,
26:07c'est charnel,
26:08il se passe des trucs.
26:10On touche le rocher,
26:11il y a le granit,
26:12ça brille.
26:14Aucun rocher ne se ressemble.
26:17La neige,
26:17elle bouge,
26:18elle vit.
26:19J'ai à la fois une pratique verticale
26:22et assez courte.
26:23Et oui,
26:24il m'est arrivé de participer
26:26à des ouvertures de voie.
26:30Il y a une dimension d'accomplissement,
26:33mais pas forcément d'exploit.
26:35Et donc,
26:36je n'ai jamais eu l'intention
26:37de faire l'Everest.
26:38Je n'ai pas l'intention
26:39de faire le Mont-Blanc.
26:40Je n'ai jamais fait le Mont-Blanc.
26:41Je recherche d'autres choses
26:45en montagne.
26:45C'est une pratique
26:47dont je ne suis pas très proche
26:49de ça,
26:49je pense.
26:51J'ai une dernière question
26:52qui est en lien
26:52avec le lieu dans lequel
26:53nous sommes,
26:54Emmanuel Faber.
26:54Nous sommes entourés
26:55de quatre statues
26:56qui représentent
26:56chacune une vertu.
26:58Vous avez ici
26:58la sagesse,
26:59la prudence,
27:00la justice
27:00et l'éloquence.
27:01Est-ce qu'il y a une
27:02de ces vertus
27:02que vous avez envie
27:03de défendre aujourd'hui ?
27:04Sagesse,
27:05prudence,
27:05justice,
27:06éloquence ?
27:07Ou qui vous parle ?
27:12Ou qui vous représente ?
27:13Oui,
27:13mais s'il devait y en avoir une,
27:15je pense que ce serait la justice.
27:19Mais la justice
27:21est inatteignable.
27:22Et donc,
27:23s'il y a une vertu
27:24pour l'atteindre,
27:24c'est juste l'audace.
27:25Une autre vertu
27:28n'est pas ici.
27:29Mais elle est sous-jacente.
27:30Merci beaucoup
27:31d'avoir été avec nous aujourd'hui,
27:32Emmanuel Faber.
27:33Merci à vous
27:33de nous avoir suivis
27:34comme chaque semaine.
27:35Émission à retrouver
27:35en replay
27:36sur notre plateforme
27:37publicsena.fr
27:38et bien sûr,
27:39en podcast.
27:39Vous le savez maintenant.
27:40A très vite.
27:41Merci.