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00:00Merci à tous les trois, on va parler effectivement de gastronomie responsable, on était dans
00:08les champs, et vous expliquer comment, en plus là c'est l'heure, on commence à avoir
00:12tous faim, donc c'est super, ça va nous donner l'eau à la bouche, de parler de vos engagements,
00:18comment est-ce qu'on peut remettre, on a entendu, le luxe du rap c'est beaucoup de
00:23bon sens, et bien aussi de mettre du bon sens dans les assiettes, peut-être pour commencer,
00:28chef vous êtes à côté de moi, qu'est-ce que c'est pour vous qu'une gastronomie durable
00:31en 2025, que vous deviez définir ? Déjà merci de nous offrir votre temps, bonjour
00:39à tous, c'est l'heure du déjeuner, je vois dans vos yeux il y a déjà un peu, je pense
00:47que déjà une gastronomie responsable c'est une gastronomie que l'on partage, quand je
00:55dis que l'on partage, c'est-à-dire du dialogue avec sa brigade, je crois que c'est déjà
01:01la première chose, parler avec nos assistants, voir un petit peu leurs gestes, voir la façon
01:12dont ils découpent quelque chose, la façon dont ils goûtent quelque chose, la façon
01:17dont ils sentent quelque chose, la façon dont ils regardent quelque chose, et justement
01:22faire école, les corriger dans toutes ces manières.
01:26Parce que vous, on peut le préciser, vous êtes en cuisine midi et soir.
01:30Moi je suis dans ma cuisine midi et soir du 1er janvier au 31 décembre.
01:34Et donc ce que je veux dire c'est qu'en plus de ça, je crois que la nature a écrit
01:44quand même une poésie formidable, ce sont les saisons.
01:50Donc déjà une gastronomie responsable c'est avant tout aussi le respect de la nature,
01:56le respect des saisons, déjà ça, ça va déjà limiter beaucoup de choses parce qu'on
02:02s'aperçoit qu'aujourd'hui je trouve que, que ce soit sur les marchés, dans certains
02:08restaurants, il y a quand même beaucoup de confusion.
02:13On croise dans la casserole l'hiver avec l'été, le printemps avec l'automne, non.
02:18En ce moment on est en janvier, moi j'ai des potagers donc j'ai pas vu de tomates sur
02:23la branche.
02:24Oui avant parler des potagers, oui non.
02:26Donc vous voyez ça pour moi c'est déjà un fil conducteur, c'est très important.
02:31Et du coup en respectant ces saisons, on limite énormément de choses.
02:39Si on prend simplement le cas des emballages, en ce moment on est dans le racinaire, on
02:45a des céleris, on a des rutabagas, on a du poireau, il y a des oignons, carottes, navets,
02:51topinambours, il y a plein de choses et on fait une cuisine bien meilleure parce qu'il
02:57y a aussi un moment où, dans cette gastronomie responsable, il y a un moment où on parle
03:02santé.
03:04Mais ne nous en dites pas trop chef, votre définition est déjà suffisante, ne dévoilez
03:12pas trop la suite.
03:13Elisabeth, est-ce que vous pouvez nous donner votre définition de la gastronomie durable
03:18et responsable en 2025 pour vous, qu'est-ce que ça veut dire ?
03:22Oui alors je rejoins naturellement le chef Passard, pour nous la gastronomie durable
03:27c'est une gastronomie qui fait bon et qui fait bien.
03:31C'est pour nous la gastronomie aussi de demain, on espère au Guide Michelin qu'on
03:37aura bientôt plus besoin de devoir définir ce qu'est la gastronomie durable ou responsable
03:43parce qu'en fait ça deviendra standard.
03:45Et quand nous avons envisagé la valorisation des chefs les plus engagés en faveur d'une
03:55gastronomie plus vertueuse, c'est exactement à ça qu'on a pensé et je suis absolument
03:59ravie d'être assise à côté d'un des premiers pionniers du sujet.
04:04Merci beaucoup et je termine avec vous Hippolyte, pour vous la gastronomie durable c'est quoi ?
04:11Eh bien c'est notamment des gens comme effectivement les Bourguignons, Alain Passard, Frédéric
04:20avec lesquels on travaille en amitié et dans la même direction depuis plus de 15 ans.
04:27Pour moi la gastronomie durable c'est elle est avant tout merveilleuse.
04:31Et pourquoi est-ce qu'elle est merveilleuse ? Parce que c'est effectivement le propre
04:35de la gastronomie, c'est le partage.
04:37Et nous qui faisons du café, la boisson de partage, la boisson d'accueil.
04:41Comment est-ce qu'on accueille les gens ? Comment est-ce qu'on partage quelque chose
04:46d'extraordinaire qu'on va ingérer ? Eh bien en pensant aux bases et les bases c'est
04:51effectivement le sol.
04:53On oublie souvent que les produits qu'on ingère sont des produits avant tout agricoles.
04:57Et comme Frédéric l'a tout très justement rappelé, on est déjà en partage et déjà
05:02en communauté ou en coalition quand on est paysan.
05:05Donc nous on a effectivement une ferme au Pérou dont vous avez peut-être goûté les
05:09cafés et on est entouré.
05:12C'est Frédéric Munier le photographe qui disait en fait quand on est dans la nature
05:15on s'aperçoit qu'on pense observer la nature mais en fait que toute la nature, tous les
05:20êtres de la nature nous observent et savent qu'on est là, connaissent notre présence
05:24avant même qu'on y soit et qu'on fasse acte de présence.
05:27Et donc cette notion de coalition et de gastronomie durable elle est faite sur la transparence
05:32absolument, sur ce que certains appellent la traçabilité.
05:36Alors il peut y avoir de la data mais il peut y avoir aussi autre chose, c'est je reprends
05:41les mots d'Elisabeth sur faire le bon, le bien et puisqu'on est dans le luxe et que
05:48la gastronomie appartient au luxe avec Alain Passart qui exprime ça de façon absolument
05:53vertigineuse, c'est le beau également.
05:56Et le beau il est effectivement issu de la main de l'homme, des techniques mais aussi
06:02de la nature et le chef le représente assez formidablement puisqu'avec une technique
06:09incroyable, une sensibilité incroyable, il peut sublimer des produits qui viennent d'un
06:15sol et de potagers également incroyables donc nous on essaye de faire ça, Frédéric
06:19aussi.
06:20Oui on va en parler parce que vous avez une spécificité chez l'Arbre à Café, c'est
06:24que vous êtes propriétaire de vos terres donc vous êtes quelque part aussi agriculteur
06:27Hippolyte, on va en parler dans quelques instants.
06:30Chef, moi j'aimerais revenir sur une période qui a été décisive chez vous dans votre
06:37cuisine et dans votre art, c'est la crise de la vache folle dans les années fin 90 début
06:452000, ça a été un coup de tonnerre pour vous, ça vous a même fait arrêter de cuisiner,
06:51est-ce que vous pouvez nous raconter ce déclic qui a vraiment changé votre perception après
06:58de la cuisine ?
06:59Effectivement on est à la fin des années 90, 99, 2000 et il y a donc cette vache folle
07:07qui nous tombe dessus et je vis très mal cette histoire.
07:17Donc l'Arpège à l'époque était une rôtisserie, on venait à l'Arpège pour le tissu animal,
07:27on a d'ailleurs trois étoiles en 1996 avec la cuisine animale, c'est la côte de bœuf,
07:33c'est la volaille, c'est les abats, cette jolie cuisine et donc cette histoire me tombe
07:40dessus et je le vis vraiment très mal.
07:42Et pourquoi ? Expliquez-nous, qu'est-ce que ça vous...
07:44Vous savez, un cuisinier c'est aussi un homme d'émotion, parce qu'on nous a quand même
07:48fait comprendre à l'époque, Rungis, qu'ils avaient tout fait pour qu'il n'y ait pas
07:53de vache folle à Rungis mais ils n'en étaient pas sûrs et moi ça m'a laissé quelque chose
07:57de douloureux.
07:58J'étais ravi, je voyais arriver le matin des très belles pièces, je me réjouissais
08:02et après on vous dit, on n'est pas sûrs et donc j'ai pris un coup derrière la tête,
08:07ça m'a...
08:08Vous n'avez plus confiance, on parlait de traçabilité, mais c'est ça en fait, d'où
08:14viennent les produits, est-ce qu'ils sont vraiment de qualité finalement ?
08:16Oui, oui, tout à fait, c'était devenu douloureux, j'ai déserté mon restaurant pendant plusieurs
08:21mois, j'avais confié la maison à mes assistants parce que je ne pouvais plus toucher, je ne
08:26pouvais plus regarder, j'avais plus de créativité par rapport au tissu animal et donc la
08:32porte s'est vraiment fermée et il y a une fenêtre qui s'est ouverte que je ne connaissais
08:37pas bien dans ma vie, une lumière comme ça qui est arrivée, c'est le végétal.
08:41Qui est arrivé comment, quand ?
08:42J'ai une passion depuis toujours pour la couleur et je me suis aperçu que dans mon métier,
08:50la couleur c'était le jardin et c'est là où donc j'ai acheté trois fermes et engagé
08:56une douzaine de jardiniers pour être totalement sûr de ce que je mets dans la casserole et
09:02donc vous voyez, effectivement à l'époque, tous mes confrères, la presse, mes clients
09:10me disaient « tu vas tout perdre, les étoiles et tes clients ». Moi j'étais l'homme
09:16le plus heureux du monde, j'avais retrouvé, je dirais à travers le légume j'avais retrouvé
09:22une joie de vivre, un plaisir et les seuls qui ont suivi, c'est le Michelin.
09:28Ils m'ont préservé mes étoiles alors que tout le monde disait que j'allais les perdre.
09:32On a travaillé, je suis reparti en apprentissage et puis on a défini une cuisine légumière
09:40qui est un peu atypique.
09:42Je dirais que j'ai mis au service du légume tout mon savoir-faire de la cuisine animale.
09:47J'ai commencé à flamber un oignon, j'ai commencé à fumer une pomme de terre, un
09:52céleri rave, à cuire une betterave en croûte de sel et aujourd'hui c'est le grand bonheur
09:59parce que nos légumes arrivent tous les matins, 100% naturels, ça sort de terre tous les
10:07matins.
10:08Alors de deux potagers, donc dans l'heure et au Mans, à côté du Mans dans la Sarthe.
10:12Et un verger sur la baie du Mont-Saint-Michel.
10:15Voilà et donc on a cette chance fabuleuse de définir une cuisine qui nous fait rayonner
10:24parce que je crois qu'il n'y a rien de plus beau que de savoir ce qu'on met dans la casserole.
10:28Mais c'est pas si simple, vous me disiez que proposer du légume, les gens sont friands
10:36mais vous proposez aussi un menu avec un peu de viande quand même.
10:39On a une petite côte d'agneau qui se balade comme ça.
10:43Mais quel menu marche le mieux ?
10:46On va dire que c'est 50-50 à peu près.
10:50Mais il faut s'adapter à une culture aussi, c'est ça, c'est pas si évident en France
10:55de proposer que du légume non plus, c'est pas si simple.
10:58Je crois qu'on n'est pas prêts encore.
11:01Si mes grands-parents revenaient, ils me diraient mais elle est où la viande ? Il y a des villes
11:07qui sont prêtes dans le monde comme New York, Berlin où le vegan et tout ça, c'est
11:11en place.
11:12Paris, c'est encore difficile mais bon, ça ne me gêne pas, on a retrouvé des belles
11:16filières.
11:17Il y a de la belle qualité sur de la volaille, de l'agneau et même sur le bœuf aujourd'hui.
11:22C'est derrière nous.
11:23Mais je reste quand même dans cette cuisine légumière que je trouve très artistique.
11:30C'est une cuisine qui a beaucoup de fantaisie.
11:33C'est une cuisine où il y a la couleur, c'est la peinture, c'est la couture.
11:41Je vais plus loin avec le végétal qu'avec l'animal.
11:46Merci beaucoup chef.
11:48Elisabeth, vous observez au sein du Guide Michelin des tendances de fond, des chefs
11:53qui se responsabilisent, qui ont une conscience peut-être plus engagée sur les questions
12:00de responsabilité, de durabilité, de provenance des produits.
12:05C'est quelque chose que vous constatez ces dernières années ?
12:08Oui, alors ce n'est pas récent et c'est vrai que nous, il nous a fallu du temps au
12:13Guide Michelin pour vraiment trouver la solution pour les valoriser.
12:16Le chef Passard le disait, l'innovation et finalement la capacité d'un chef à sublimer
12:25sa créativité en restant fidèle à ses valeurs, c'est quelque chose qu'on a toujours fait.
12:30Mais en maintenant, en disant à l'arpège, ça vaut trois étoiles et il n'y a pas de doute,
12:36on était à notre sens pas encore assez audibles, pas encore assez puissants ou assez sonores
12:42pour pouvoir dire, vous savez, vous pouvez expérimenter le luxe dans la gastronomie
12:47mais aussi vivre quelque chose d'unique et qui peut vous ouvrir un univers que peut-être
12:55que vous n'auriez pas envisagé en cuisine.
12:58Et donc c'est pour ça qu'on a créé l'Etoile verte en 2020, elle est là pour vraiment
13:04mettre en valeur ses pionniers, ces gens les plus audacieux qui ont vraiment décidé
13:10de sortir des sentiers battus, avoir un parti pris qui parfois peut dérouter le consommateur,
13:18c'est vrai, mais qui au bout de deux ans a dépassé tous mes espoirs pour être vraiment
13:26honnête parce que les clients désormais nous la réclament.
13:28Combien de restaurants sont étoilés ? Sachant qu'il n'y a pas trois Etoiles vertes,
13:32c'est une pour tout le monde, je précise, tout le monde peut en avoir une ou pas.
13:38Combien il y en a actuellement de restaurants ?
13:40Il y en a 500 dans le monde, sur 17 000 restaurants dans le Guide Michelin, donc c'est vraiment
13:45la crème de la crème.
13:46Ce sont vraiment les chefs qui nous ont transportés et lorsque nous sommes sortis du restaurant,
13:55je dis nous mais ce sont vraiment les inspecteurs et les inspectrices du Guide Michelin, sont
13:59sortis en étant grandis, en étant non seulement heureux du moment qu'ils avaient passé,
14:05c'était délicieux, c'était savoureux, l'équipe, pas simplement le chef, mais l'équipe
14:12en salle était aussi en capacité de transmettre cette émotion et de la faire pleinement vivre
14:19au qu'on vive et puis aujourd'hui, c'est très touchant de voir comme la performance
14:27finalement a été revue.
14:28Oui, c'est génial d'avoir une étoile ou peut-être deux, peut-être trois, je suis
14:32très heureuse quand certains chefs disent mais moi, j'espère avoir l'étoile verte
14:38plus que ma deuxième étoile ou la troisième, ça je trouve que c'est, je rebondis sur
14:43ce que disait Sandrine un peu plus tôt, je trouve que c'est remettre la performance
14:48au bon endroit.
14:49Juste quelques mots sur les critères d'attribution de cette étoile verte pour qu'on puisse
14:54en savoir un peu plus.
14:56Il n'y en a pas et c'est volontaire, je suis, au début on l'a fait, on a fait une
15:05belle grille à cocher, il fallait cocher toutes les cases pour pouvoir avoir cette
15:09étoile verte et en fait, on s'est aperçu très vite qu'en faisant ça, on excluait
15:17pour des raisons tout simplement financières de nombreux restaurants qui avaient cette
15:22audace, ce panache, cette envie chevillée au corps et qui avaient fait des choses incroyables
15:28mais voilà, qui ne cochaient pas toutes les cases et en fait, on est reparti sur le terrain,
15:33on a réexpérimenté tous ces restaurants et on a vraiment choisi ceux qui avaient été
15:40le plus loin dans la démarche qui était la leur, que ce soit dans le sourcing des
15:45produits, que ce soit dans les économies d'énergie, que ce soit dans le gaspillage
15:49alimentaire ou dans la collaboration avec leur écosystème de proximité et avec une
15:57attention particulière aussi aux équipes, à bien appliquer le principe de symétrie
16:04des attentions, c'est bien de prendre soin de ses clients, c'est aussi bien de prendre
16:09soin de ses équipes et en fait, en faisant ça, on avait la possibilité de pouvoir donner
16:15l'étoile verte certes à des restaurants de palaces, à des restaurants 3 étoiles soutenus
16:20par de gros fonds d'investissement mais aussi à de petites tables en province, en région
16:26qui avaient vraiment eu ce courage et d'emmener leurs équipes et leurs banques dans une expérience
16:37entrepreneuriale très courageuse.
16:39Merci Elisabeth, je vois Hippolyte au piné du chef, c'est le cas de le dire, bon, voilà,
16:51allez on enchaîne. Donc Hippolyte, vous êtes, je le disais, quelque part agriculteur, en
16:57tout cas propriétaire des terres agricoles qui produisent le café, un café qui a beaucoup
17:03de labels, vous allez nous expliquer ça et c'est vrai que quand j'entendais Elisabeth
17:07qui parlait de coalition du coup, effectivement, entre les acteurs de terrain, vous c'est vraiment
17:14la base chez vous et c'est une histoire qui dure depuis longtemps, expliquez-nous.
17:18Oui, depuis 15 ans, grosso modo quand je suis arrivé, je venais du monde du vin et un peu
17:22de la gastronomie et l'idée c'était de dire que le café de qualité, d'extrême qualité
17:27on va dire, d'émotion, de goût, n'existe pas vraiment donc on va l'inventer et venant
17:32du monde du vin, on a quand même en France des modèles, des inspirations sur comment
17:38est-ce qu'on fait justement de la qualité. Et la qualité elle part évidemment de l'agriculture,
17:47elle part aussi, puisqu'elle est transformée de porteurs de vision et de technique, donc
17:53à la fois d'une esthétique mais aussi d'une maîtrise technique et de la capacité à mettre
17:57en branle justement cette technique au service du produit, au service du plat, du produit,
18:03du vin, du cognac, du whisky que l'on va servir, que l'on va partager. Donc mon idée elle
18:08a été très simple, c'était de faire la même chose dans le café. Et aujourd'hui
18:14on a reconnu depuis 15 ans comme ayant un goût particulier, un goût signature qui
18:18est fait de gourmandise, de développement aromatique, gustatif et de longueur en bouche
18:24comme un grand vin. D'où viennent vos plantations ? Et alors on a travaillé et on travaille
18:29encore aujourd'hui avec une quinzaine de producteurs qui sont répartis dans le monde
18:32et tous très engagés. Dès l'origine, soit dans les agricultures régénératives, donc
18:38on est les leaders aujourd'hui de la biodynamie dans le café, qui est un crypto crypto crypto
18:44je ne sais pas comment on dit mouvement, puisqu'ils sont les 70 millions de producteurs dans le
18:50monde. Il y en a 16 simplement, pas 16 millions, 16 tout court, qui sont certifiés d'émetteur
18:57qui est le label exclusif de la biodynamie dans le café en tout cas. On travaille donc
19:03avec une quinzaine de producteurs, soit très investis dans l'agriculture, soit au firmament
19:09de la qualité perçue aujourd'hui dans le monde du café. Donc tout notre challenge
19:14c'est au quotidien, et ça a été au quotidien encore, d'apporter ceux, de porter ceux qui
19:20sont investis justement dans les agricultures engagées, qui visaient simplement un marché
19:25de label, donc en général sans émotion, vous voyez avec un petit peu la morale qui
19:30fait que tout retombe, toute la libido retombe ou toute la désagréabilité dont on a besoin
19:36n'est pas là. On les a portés vers la très haute qualité et puis ceux qui sont au firmament
19:40et bien on les porte justement vers la régénération, vers les agricultures biologiques au pluriel
19:48pour mettre en accord justement ce qu'on a connu dans le vin, ce qu'on connaît dans
19:53le légume et dans la restauration. Et là c'est beaucoup plus dur, donc moi j'ai accompagné
19:56pendant dix ans des producteurs auxquels on achetait le café, ça a très bien marché
20:01pour la première catégorie, puis pour la deuxième, comme on est un peu sous dominante
20:06anglo-saxonne ou américaine, ils vont nous dire mais ça m'apporte combien de points
20:11dans le guide par coeur du café grosso modo ? Mais en fait ça va t'apporter bien plus
20:16que des points, mais on peut jouer, on peut faire un essai pour voir combien de points
20:19ça va te rapporter. Mais le moteur est celui-ci. Et du coup au bout de dix ans j'ai dit bon
20:25ben je vais arrêter de parler, enfin je vais pas arrêter pardon, je vais continuer à
20:29parler mais surtout on va montrer que c'est possible. Et donc on a acheté un terrain
20:35vierge, des anciennes pâtures, après plantées d'eucalyptus, donc pour ceux qui connaissent
20:40un petit peu l'agronomie, c'est un peu la double sanction, à très haute altitude au
20:45Pérou, 35 hectares, et qu'on a planté deux cafés, 40 espèces d'ombrages différentes
20:53et une agriculture intensive, régénérative, donc en mélangeant justement plusieurs agricultures,
20:59notamment inspirées des agricultures cubaines, de l'horticulture, mais de l'agroforesterie
21:06vous l'aurez compris, de la biodynamie, etc. Aujourd'hui on a des rendements qui sont supérieurs
21:11effectivement à la moyenne conventionnelle du Pérou, qui est supérieure aux moyennes
21:18biologiques et avec des qualités, bien que vous avez pu expérimenter, mais qui objectivement,
21:23dès la première récolte, on a gagné le championnat national du Pérou, on a été
21:28au championnat du monde, avec un baby baby café. Et on a aujourd'hui la reconnaissance
21:36de nos pères aussi pour notre café, qui est devenu le best-seller de la maison. Donc
21:42une grande réussite, merveilleuse, étonnante, on n'en pensait pas aller aussi vite, mais
21:47du coup c'est tout à fait possible d'être à la fois dans des notions de rendement,
21:51alors pas aussi extraordinaires que des agricultures dont les rendements baissent aujourd'hui très
21:57intensifs, et on sait qu'ils vont encore baisser, Marc-André Sellos l'a bien répété,
22:05mais d'être dans une sustainability à tous les étages, et une profitabilité effectivement
22:10à tous les étages. Et ce que nous disent, et c'est ce que faisaient nos clients en boutique
22:17ou en restauration, c'est un petit peu cette reprise de la biodynamie, en disant la biodynamie
22:23c'est ésotérique, c'est machin, etc, mais surtout ça change le regard du fermier, des
22:28gens qui travaillent dans les champs, etc, sur la nature, en disant wow, je ne suis pas
22:32tout seul, jamais seul, je crois que c'est Marc-André Sellos qui a écrit un livre sur
22:37le microbiote comme ça, on n'est pas tout seul, et ça change ce regard, et c'est vrai
22:42que quand on sert nos cafés, quand on les transforme, puisque nous on vend un solide
22:50et nos clients servent eux un liquide, et bien toute cette richesse émotionnelle qu'on
22:56retrouve en tasse, cette énergie, et bien elle change effectivement le regard des gens,
23:01elle change le quotidien, en plus du sol, et on est assez content.
23:05Oui, et vous êtes ferveur du commerce équitable aussi, parce que c'est vrai qu'on parle beaucoup
23:09de saisonnalité, de produits locaux, made in France, est-ce que vous servez du café
23:15chef ? Est-ce que vous mettez de la vanille ? Est-ce que vous saupoudrez de poivre vos
23:21plats ? Alors, à l'arpège, plus de voyage, plus
23:25de vanille, plus d'épices.
23:27Plus rien.
23:28Non, en fait, comment vous assaisonnez ?
23:30Le café, je n'ai pas encore trouvé le substitut, mais je vais y arriver.
23:35On se rencontrera un jour avec Alain.
23:38Écoutez, vous vous rencontrez ce matin.
23:40Oui, oui.
23:41Non, mais moi ce que j'aime, c'est la difficulté, parce que c'est facile de faire une crème
23:45glacée à la vanille, mais dans mon jardin, est-ce que je n'ai pas justement quelque
23:50chose qui peut faire, je ne sais pas, ça peut être une menthe poivrée, ça peut être
23:58une sauge, un romarin, une herbe.
24:02Moi, j'aime cette notion où on casse les codes, volontairement, on veut essayer de
24:10faire autre chose, parce que c'est là où on est surpris.
24:14Toute ma brigade est totalement partante sur cette aventure.
24:20Moi, j'aime être étonné par un goût nouveau.
24:24Ça ne vous bride pas du tout dans votre créativité, au contraire, vous n'êtes pas bridé, au
24:29contraire.
24:30Oui, oui, c'est vrai que d'avoir un jardin, ça change quand même beaucoup de choses.
24:35C'est vrai que je suis allé moi dans l'un des deux potagers pour rencontrer Sylvain,
24:39qui est votre chef jardinier depuis 25 ans, et il m'expliquait qu'il allait tester
24:48des nouvelles variétés, que ce soit des herbes aromatiques, des légumes, des fruits
24:53aussi, pour apporter encore d'autres saveurs dans vos assiettes.
24:58Bien sûr, je passe mes commandes, c'est l'avantage d'avoir son jardin, j'aimerais qu'on essaye
25:04cette plante ou ce navet ou cette carotte.
25:07On est sans arrêt en train de faire des essais, et donc ça nous invite effectivement à trouver
25:13des nouvelles saveurs et puis de participer à cette gastronomie responsable.
25:18Vous avez été surpris par un aliment ou un légume que vous pouvez nous partager ce
25:22matin ?
25:23Oui, tous les jours il se passe quelque chose, on parvient à faire aujourd'hui, toutes
25:27nos sauces sont totalement vegan, on ne travaille qu'avec des jus de légumes qui sont réduits,
25:34on récupère la chlorophylle, on les conjugue, on a des sauces qui sont d'une beauté esthétique
25:41formidable, des brillances, des luisances, des textures, et surtout des saveurs.
25:46Et on en revient à ce qu'on disait tout à l'heure, je ne mets plus de beurre ni de crème
25:51dans mes sauces.
25:53Et vous dites, j'aime bien ce terme, vous changez de métier quatre fois par an avec
25:59les saisons ?
26:00Oui, quand on respecte les saisons, effectivement, je ne suis pas le même cuisinier en hiver
26:05avec des poireaux qu'au printemps avec des petits pois ou une tomate en été.
26:08Et ça c'est formidable, je veux que cet enseignement existe dans les écoles hôtelières,
26:13je change de métier quatre fois par an, il n'y a pas un autre métier dans le monde
26:17où il y a ça.
26:18Merci chef.
26:19Elisabeth, un petit mot pour vous, la gastronomie durable, c'est aussi la diversité, parce
26:26qu'on parle beaucoup d'environnement ce matin ici, mais c'est aussi valoriser notamment
26:32les femmes dans la gastronomie ?
26:33Oui, c'est encore difficile de briser le plafond de verre, c'est compliqué de devenir
26:42chef, femme, entrepreneur aujourd'hui dans beaucoup de pays, il n'y a pas assez de femmes
26:50à la tête de cuisine en général, et c'est vrai que c'est une frustration parce qu'en
26:59discutant avec elle depuis maintenant dix ans, on commence à bien identifier les points
27:07de difficulté, mais il va s'agir, c'est vraiment l'affaire de tous de prendre à
27:13bras le corps le problème, et pour nous, au Guide Michelin, d'essayer de survaloriser,
27:21alors pas en changeant nos critères, il n'y aura pas de discrimination positive à l'étoile
27:26par exemple, pour une raison qui n'est pas celle de la cuisine, mais en revanche de les
27:33mettre davantage en valeur, de leur donner confiance en elles, de veiller aussi à ce
27:37qu'elles soient entendues au sein d'une brigade qui parfois est très masculine, et c'est vrai
27:43qu'on n'a pas encore complètement trouvé la solution, mais on a l'intention de faire
27:47en sorte que la voix du Guide Michelin qui porte désormais dans cinquante pays, elle
27:52soit mise au service aussi de cette cause, et notamment de la visibilité des femmes.
27:58Merci beaucoup à tous les trois, je vois que le temps file, merci pour vos témoignages.

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