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00:00Europe 1 Soir Week-end, 19h21, Pascal Delatorre Dupin.
00:05Je suis toujours dans ce studio avec Béatrice Brugère qui a eu la gentillesse de rester
00:08puisqu'on a d'autres sujets à aborder.
00:09Vous êtes magistrate, secrétaire générale du syndicat Unité Magistrat FO et auteur
00:14de l'ouvrage Justice, la couleur qui monte, plaidoyer pour une refondation.
00:18On va parler de Gérald Darmanin et de ses propositions alors que j'accueille dans ce
00:21plateau mes amis Paul Melun et Jules Torres.
00:24Bonsoir Pascal, bonsoir mesdames, nous sommes toutes oui.
00:27Oui, c'est très bien, c'est déjà très bien.
00:29Joyeux Saint-Valentin Pascal.
00:30Oh là là, il est sympa ce Paul Melun, quelle élégance, quelle élégance.
00:35On s'élève en notre amour professionnel.
00:37Oui bien sûr, vous avez raison, vous avez raison, c'est vrai.
00:39Paul Melun, et on le savait, n'a personne.
00:40Mais je vous en prie Jules, on passe la soirée ensemble parce que heureusement les auditeurs
00:44n'ont pas l'odeur que nous on a en studio.
00:46Pourquoi ?
00:47Je ne vais pas dire la marque de mon parfum, ça fait deux mois de salaire de Jules Torres
00:51mon parfum.
00:52La Béatrice Brugère, désolé, mais vous voyez, pour nous c'est fort sympathique.
00:57Ils sont jeunes.
00:58Ils sont sympathiques, ils sont intelligents, ils s'aiment bien, et ils s'aiment bien,
01:04et ils s'aiment bien.
01:05Qui aime bien, châtine bien.
01:06Voilà, qui aime bien, châtine bien.
01:07Béatrice Brugère, je voudrais qu'on revienne à Gérald Darmanin qui veut donc muscler
01:10la loi contre les mineurs délinquants avec un couvre-feu pour les mineurs délinquants.
01:16Je vous vois déjà en train de dire, bon, avec sanctions à la clé ou le renforcement
01:20de l'usage de bracelets électroniques, est-ce que vous pensez que ça peut fonctionner ?
01:23Alors, tout ça existe en vrai, mais pourquoi ce n'est pas appliqué ?
01:27Non, mais en fait, d'abord, ça existe, il faudrait voir le détail de ces propositions-là,
01:32on est sur le désannonce, qu'il les durcissent, c'est possible, mais il n'y a pas de nouveauté,
01:39d'innovation importante.
01:40Le bracelet électronique c'est toujours intéressant, sauf qu'on sait qu'aujourd'hui, on a très
01:45peu de moyens de les contrôler, en plus, ce qui est bien, c'est que c'est impossible
01:50sous l'âge de 16 ans, donc puis je dirais, ça serait possible.
01:54En fait, ce qu'on n'utilise pas et qui serait intéressant, c'est les bracelets électroniques
01:58avec géolocalisation, mais on en fait très peu en France, ça coûte très cher, mais
02:03surtout, quand vous mettez des bracelets électroniques, il faut derrière des gens qui contrôlent
02:07et qui surveillent.
02:08Non, mais ne dites surtout pas ça à tous les gens qui ont des bracelets électroniques,
02:10vous aussi !
02:11Non, mais ce qu'il faut, c'est que, pourquoi pas, si derrière, il y a une organisation
02:18sérieuse de contrôle qui puisse vraiment faire en sorte que ça marche.
02:22Ce n'est pas très bien suivi, les bracelets électroniques.
02:24C'est-à-dire que si on en fait plus, il va falloir qu'on mette davantage de moyens ?
02:28Pourquoi le fait que ça ne marche pas ?
02:30Ce qui marche bien, c'est la géolocalisation, ça, ce n'est pas possible pour les mineurs
02:34et puis ce n'est pas possible aujourd'hui pour ceux qui ont moins de 16 ans.
02:37C'est ça qu'il faut changer ?
02:38Alors, peut-être que c'est ce qui sera dans le prochain.
02:40Je vous donne une note d'espérance.
02:43Une note d'espérance, est-ce une information ou une note d'espérance ?
02:46Je vous pose la question, je ne sais pas.
02:48Les députés ont aussi approuvé le durcissement des sanctions envers les parents de mineurs
02:52délinquants.
02:53Ça, je trouve que c'est quand même très intéressant et on en parlait, je le dis aux
02:57auditeurs d'Europe, toutes les deux pendant la pause.
02:59C'est souvent des familles monoparentales, vous me disiez, donc ça veut dire souvent
03:03malheureusement une mère seule et qu'il y a elle qui prend tout, moi je dis où sont
03:06les pères dans tout ça ?
03:07Oui, alors il y a quelques mesures en effet qui peuvent être intéressantes mais c'est
03:10toujours pareil.
03:11La problématique aujourd'hui, alors là pour le coup, c'est celle des moyens qu'on voudra
03:17mettre derrière pour que ça soit efficace.
03:19Après, la justice peut sanctionner mais sur les parents, elle ne va pas sanctionner les
03:26parents pour les fautes des enfants.
03:28Elle va sanctionner les parents parce qu'ils n'éduquent pas bien leurs enfants, qu'ils
03:32sont dans un délaissement, on a déjà des infractions là-dessus, donc utilisons déjà
03:37peut-être ce qui existe de façon ferme.
03:40Mais pourquoi ? Tout existe, quand on vous écoute, tout existe et on a le sentiment
03:43que rien n'est appliqué ou applicable, mais c'est vrai.
03:45C'est une très bonne question.
03:47Alors, je vais vous dire, tout existait et on a supprimé les choses qui marchaient.
03:51Par exemple, on avait une procédure rapide qui s'appelait la PIM, qui permettait de juger
03:56rapidement justement ces fameux mineurs qui sont extrêmement réitérants.
04:00Ça a été supprimé avec Nicole Belloubet, on avait la possibilité plus facilement de
04:04mettre en détention avant moins de 16 ans, ça a été supprimé et on a complexifié
04:10les procédures.
04:11Donc moi, je pense qu'il faut revenir à des choses relativement simples, efficaces,
04:16qui puissent être adaptées à ces mineurs extrêmement violents.
04:19Nous, on est pour les ultra-courtes peines, ça a été supprimé avec Nicole Belloubet,
04:24on est pour des procédures rapides, ça a été supprimé avec Nicole Belloubet, on
04:30est pour mettre en détention, parce que parfois le mineur, on n'a pas le choix et ça le
04:35fait réfléchir et ça le sort de son milieu d'alinquance, ça a été quasiment supprimé
04:39avec Nicole Belloubet.
04:40Donc, tout n'existe plus.
04:42Elle est formidable !
04:49On n'a jamais oublié, c'est un acte manqué l'essentiel, c'est que dans la loi qui a
04:55été faite aussi avec Nicole Belloubet, nous avons créé cette fameuse césure, qui est
04:59un faux semblant de rapidité, puisqu'en fait, en effet, avant ça ne marchait pas bien, on
05:05jugeait très lentement.
05:06Aujourd'hui, on peut faire une première audience de culpabilité qui va un peu plus
05:10vite mais on a une deuxième audience de neuf mois où là justement on prend un peu un risque pénal c'est
05:18l'affaire d'Elias où vous avez un mineur qui est réitérant des hincans ultra violents qui ressort et
05:24on lui dit on se revoit dans neuf mois et on verra pour la sanction. Donc ça à mon avis c'est
05:29inadapté pour ses profils il faut d'urgence que la césure ne soit maintenue que pour des cas
05:36exceptionnels où vraiment il n'y a pas de risque et avoir des audiences uniques pour juger,
05:45donner une sanction et que le mineur comprenne tout de suite la gravité des faits. Et sur la
05:50gravité des faits je ne sais pas s'il y en a qui sont parents ici mais neuf mois c'est pratiquement
05:56une année pour un enfant enfin c'est toute une vie. C'est une année scolaire. Ça n'a pas de sens si
06:01vous voulez et c'est pour ça et ça n'a tellement pas de sens que justement il y en a qui comprennent
06:06pas qui reviennent etc. On entend beaucoup dans le débat public de propositions quant à la
06:11généralisation à des maisons de correction mais de centres d'accueil qui en est davantage, de centres
06:17d'accueil fermés pour des mineurs un peu sur le modèle des boot camps américains ou des maisons
06:22de correction jadis avant mai 68 en France. Est-ce que c'est quelque chose qui d'après vous serait
06:26de nature à freiner la délinquance des mineurs ? Alors tout ce qui peut sortir le mineur de son
06:33lieu qui est un lieu criminogène alors on sait l'effet de bande, des familles qui sont
06:39déstructurées, des criminels qui vous prennent dans les stupes tout ça évidemment dès que vous
06:45sortez un mineur et que vous pouvez le mettre à l'écart de ça si derrière il y a un travail
06:50éducatif sérieux avec une évaluation aussi parfois psychologique oui il faut juste savoir
06:56que les centres d'éducation fermée dont vous parlez ne sont pas fermés, c'est juste leur nom.
07:02C'est trop souple pour pouvoir convenir. Donc il faudrait des centres fermés selon vous ? Oui et
07:08puis il faut derrière un contenu vous savez c'est comme pour tout, il y a les murs mais il y a ce
07:12que vous mettez dedans et donc là je pense que... Du sport et revoir maths, français, orthographe
07:17et des livres. Et là on arrive sur une deuxième problématique puisque en fait c'est en cascade
07:24c'est aussi le manque d'éducateurs, de gens qui veulent travailler parce qu'en fait comme ils sont
07:30violents et que ça manque de contenu, plus personne ne veut y aller. On parlait de retraités de l'armée,
07:35Béatrice Brugère, magistrat, vous en pensez quoi ? C'est intéressant on avait même des épis,
07:38des choses avec l'armée qui marchaient très bien, ça a été supprimé. En fait je ne sais pas pourquoi
07:43on supprime ce qui marche. Ça c'est une bonne question. Non mais c'est une bonne question.
07:47Peut-être parce qu'il nous faut plus de Brugère et moins de Béloubet, c'est ça aussi si la justice...
07:53Non mais c'est assez étonnant parce qu'en fait c'est une forme d'aveuglement qui est parfois
07:57idéologique, moi je le dis, et que je ne comprends pas. Parlez bien de votre micro Béatrice Brugère.
08:03C'est parfois un aveuglement idéologique. En fait je ne sais pas pourquoi la justice des Mideurs
08:08est un champ de bataille idéologique, là où il devrait y avoir une forme de consensus et de
08:13bon sens. Je veux dire la question ce n'est pas d'être répressif ou laxiste, la question c'est
08:18d'être proportionné, d'arriver au bon moment et d'être adapté. Sauf qu'on n'investit pas ce champ
08:24intellectuel, sociologique, on n'a pas de statistiques et donc il y en a qui vont vous dire
08:28ah mais non mais pas du tout la violence elle n'augmente pas. D'autres vont dire bah si vous
08:32voyez bien qu'elle augmente. Donc en fait on est à l'aveugle et on s'aveugle premièrement. Après
08:36on légifère un peu sous l'émotion, n'importe comment, à contre sens et à contre temps et
08:42après on revient. Parce qu'il ne faut quand même pas oublier, et peut-être que je finirai là-dessus,
08:46que la proposition d'Attal qui nous a pillé nos deux mesures principales, et je l'en remercie,
08:52je le trouve formidable même si elles sont mal écrites, à partir au même gouvernement qui a
09:02justement supprimé ça. Donc si vous voulez il y a aussi un problème de cohérence politique dans
09:07l'action d'évaluation des politiques publiques et les politiques publiques, si on veut qu'elles
09:12fonctionnent, faut-il encore qu'elles s'appuient sur une réalité qui est observée, documentée,
09:19analysée. Voilà et c'est votre métier. Moi je voudrais qu'on parle un instant peut-être de Bruno
09:22Rotailleau si vous le permettez, Jules Torres, un mot à dire. Alors ça c'est plus les mineurs
09:26directement, on se jette dans le narcotrafic. Il y a des mineurs, il y a des mineurs qui sont
09:32utilisés comme de la chair à canon. On a aussi des mineurs dans le trafic qui sont stupéfiants qui
09:39à 13-14 ans sont là pour tuer et qui sont des tueurs à gage. C'est quand même incroyable.
09:45Je racontais ça avec Béatrice Bauger il y a deux minutes, mais vous n'étiez pas là.
09:51Non je n'étais pas là et je discutais avec Paul Melun parce qu'on préparait cette émission.
09:56Pour rebondir, c'est vrai qu'on a depuis maintenant huit ans, un en même temps sur toutes les questions.
10:03Un en même temps sur les questions économiques, un en même temps sur les questions migratoires,
10:07un en même temps sur les questions judiciaires. Et quand on voit qu'on a aujourd'hui M. Darmanin
10:12qui est plutôt volontaire, qui est plutôt déterminé sur cette question de la justice et
10:16qu'on a eu Mme Belloubet, M. Dupond-Moretti qui ne sont pas tout à fait sur ces mêmes lignes,
10:21qu'on est passé de Christophe Castaner à Bruno Rotaillot, qu'on est passé de Bruno Le Maire à
10:26l'économie, à M. Lombard qui est un ancien socialiste, on voit bien que finalement, qu'est-ce
10:30qui restera du macronisme ? C'est ce en même temps qui ne fonctionne pas sur tous les sujets.
10:35Et le problème c'est que si ce n'était qu'un problème politique, ce ne serait pas un problème,
10:38le problème c'est que ça a des conséquences. Ça a des conséquences sur la vie des Français,
10:41sur l'économie ça a des grosses conséquences et ça a des conséquences sur l'aspect sécuritaire.
10:45Puisque ce en même temps là, eh bien il a armé aujourd'hui notre situation sécuritaire et c'est
10:51aussi pour cela qu'on a une hausse des tentatives d'homicide, que notre jeunesse est de plus en plus
10:56violente et qu'on a un ensauvagement, je sais que ce mot fait souvent peur, mais on a un
11:00ensauvagement de la société qui mène malheureusement à des drames.
11:03Oui, non mais moi je... Vous validez ou vous ne validez pas ? J'ai aucun problème avec ce mot.
11:10Ah vous avez 30 secondes.
11:13Alors je voudrais juste dire, on peut conserver le côté éducatif tout en étant efficace,
11:20il n'y a pas à opposer, première chose. Et deuxièmement, on peut avoir des modèles de
11:23justice pour les mineurs, c'est important de le comprendre, qui soient aussi efficaces tout en
11:28gardant nos grands principes constitutionnels. Parce que dès qu'on veut modifier ça, on vous
11:32oppose, ah mais attention vous allez sortir du système de l'état de droit, ce n'est pas vrai.
11:36En fait, tout en restant dans l'état de droit, vous avez des modélisations extrêmement différentes,
11:41et d'ailleurs d'autres pays européens ont la majorité à 16 ans, d'autres à 17 ans. Donc
11:45c'est pas la question, c'est ça que je veux dire. On a les armes, il faut savoir les utiliser,
11:50c'est ce que vous dites. Oui, on a les moyens, on a les armes. On n'a pas besoin d'avoir des
11:53débats hystériques, on n'a pas besoin de s'opposer, on n'a pas besoin de dire si
11:58vous faites ça, vous sortez de l'état droit. Non, ce n'est pas vrai, on peut redevenir efficace tout
12:02en étant rationnel et dans les clous. Merci infiniment Béatrice Brugère, magistrate, d'être
12:08venue ce soir sur le plateau d'Europe 1, il est 19h43. Vous restez messieurs, on va libérer Béatrice
12:14Brugère qui a plein de choses à faire. Libérez une magistrate, c'est dingue. Je suis contente, ça va les amis,
12:22je suis contente. Bonne ambiance dans le studio d'Europe 1, bonne soirée. Béatrice Brugère, 19h43 sur
12:27Europe 1, on a plein de choses à se dire. A tout de suite sur Europe 1.