Plus les gens meurent autour de lui, plus Tristan a peur de pas les retrouver de l’autre côté si jamais il n'est pas sur liste. Et si y'a un truc qu'il déteste, c’est vraiment devoir se justifier pour rentrer quelque part !
Retrouvez « Nouvelles têtes » présenté par Mathilde Serrell sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/nouvelles-tetes
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00:00Place aux nouvelles têtes Mathilde Serrell, ce matin, votre invitée à 35 ans, et il n'est pas folle, il est FOREVER, le performeur Mathieu Barbin est dans notre studio.
00:12Mais elle est folle ! Non, elle est FOREVER, baby !
00:17Je m'appelle Sarah FOREVER, je suis balance et assissante dentaire, et je sais cligner de l'œil et avec les douze yeux.
00:25Bonjour Mathieu Barbin ! Bonjour !
00:27Inoubliable, époustouflante, Sarah FOREVER, ça nous fait trop plaisir de la réentendre, votre personnage de la saison 2 de Drag Race France.
00:33C'est un grand succès d'audience d'ailleurs, plus de 11 millions de spectateurs s'y sont intéressés, contre 7 millions pour la saison 1.
00:39Vous vouliez rentrer dans la télé pour expliquer à votre mère ce que vous faisiez. C'était ça le projet ?
00:45Oui, la télé ça a toujours été le seul outil culturel qu'on avait chez moi. On n'allait pas au cinéma, pas au théâtre, pas au musée.
00:52J'avais pas du tout accès à ça, il n'en était même pas question en fait.
00:55Par contre la télé, elle était au centre de la pièce et c'était ce qui nous permettait de nous réunir et d'échanger, de créer un langage commun.
01:03Et c'est vrai que quand je suis rentré dans la télé, après m'être déconstruit pendant des années comme tout bon queer qui se respecte,
01:09c'était un moyen de retisser du lien avec ma mère.
01:12On va vous écouter justement vous en parler dans Drag Race.
01:15Ma mère ne sait pas du tout que je fais du drag.
01:18C'est vrai ?
01:19Et ce n'est pas que je profite de cette émission pour lui annoncer, mais j'aimerais juste aussi des fois économiser des mots et juste montrer des actes.
01:27Et comment ça s'est passé du coup après le tournage ?
01:29Je dis des choses brillantes sans me rendre compte.
01:32Et à une heure de grande écoute.
01:34Comment ça s'est passé après ?
01:36Après, le lien ne s'est pas totalement tissé.
01:40Je trouve que ça a été assez incomplet.
01:42Parce qu'une fois qu'on pose des mots, qu'on pose aussi des actes, comme le drag et même sur le service public.
01:48En fait, il y a encore tout un gouffre à combler, des mots à penser.
01:52Et c'est pour ça aussi que j'ai fait ce spectacle d'Inastis.
01:55C'est pour compléter un peu ce cheminement, continuer à ne pas la laisser de côté, à l'embarquer avec moi.
02:01Exactement.
02:02Ce personnage de Sarah Forever, absurde, inventif, infusé de mille références, qui a vraiment marqué cette saison 2 de Drag Race France.
02:09C'était Première Dauphine quand même à la fin.
02:11Vous reprenez la filiation du personnage dans Dynastis.
02:14Votre spectacle joue à guichet fermé pour l'instant.
02:16C'est très dur d'avoir des dates.
02:18Vous êtes à Paris en ce moment.
02:19La prochaine date à Dijon est complète aussi.
02:21Générique du spectacle.
02:34Dynastis.
02:36C'est bon, j'ai les frissons.
02:38Feuilleton de référence à la télé.
02:40Parce que vous, Mathieu Barbin, avez grandi devant la télévision.
02:44Et vous avez eu plein de parents à Sarah Forever.
02:47Ils sont tous nés dans votre télévision, ceux qui ont créé votre personnage.
02:50Oui, c'est ça.
02:51En tout cas, des femmes puissantes, des stars qui parlent anglais.
02:55J'en parle beaucoup dans le spectacle.
02:57La langue, la question sociale et les autorisations sociales que ça soulève.
03:01Moi, j'ai très vite compris, je l'ai verbalisé après,
03:05qu'en voyant des gens parler anglais, c'était eux qui réussissaient dans la vie.
03:08Et ça renvoie d'autant plus à une barrière.
03:11Quand toi, tu es dans ton salon, en banlieue de Bordeaux,
03:13avec des parents qui ne parlent pas un mot d'anglais, etc.
03:16Mais oui, c'est plein de personnages qui ont nourri,
03:19ou de personnes d'ailleurs,
03:20qui ont nourri l'artiste que j'allais devenir,
03:23que j'étais en train de construire.
03:24On y retrouve Sissi, entre autres.
03:26Mais puis, Dolly Parton.
03:28Parce que votre mère, qui est secrétaire,
03:30elle vous a inspirée.
03:31C'est un peu votre Dolly Parton à vous.
03:33Elle est aussi un peu Lady Di.
03:34Elle vous habillait comme un petit prince au Noël d'entreprise.
03:37Oui, il y a ce truc, toujours avec ma mère,
03:39où elle nous présentait, en société, bien au-dessus de nos moyens.
03:44En fait, ce n'était pas du tout le reflet de ce qu'on était.
03:46Du coup, c'est vrai qu'on se demandait un peu
03:48qui arrivait au Noël du comité d'entreprise
03:50habillant Lady Di et Prince William.
03:53C'était absolument ridicule.
03:54Vous aviez une culotte en velours, des grosses bouclettes.
03:56C'était vraiment la totale, toute la panoplie.
03:59Et ça ne reflétait pas vraiment ce qu'on était.
04:02Mais on était déjà, et ça, je pense que ça a beaucoup influencé
04:04aussi ce que j'allais faire après,
04:05on était déjà dans la performance sociale.
04:08Vous dites, la première scène, pour moi,
04:10ça a été les genoux de ma mère, dans le bus.
04:12Oui, ça a été le premier mensonge aussi,
04:13que moi, je trouve très salvateur.
04:15En fait, c'est très bien de mentir.
04:17J'encourage tout le monde à mentir.
04:18C'est beaucoup de bien.
04:19Ça dépasse, ça permet aussi de s'extirper.
04:21Et c'est la première fois, oui, que moi, j'ai commencé à mentir.
04:23Je sentais qu'il fallait jouer à un jeu.
04:26Et un rôle qu'on endossait très, très bien avec ma mère.
04:29Vous avez décidé de vous rapprocher d'elle,
04:31parce que vous avez cette formule très jolie.
04:33C'est que plus vous êtes rapprochés de vous,
04:35plus vous êtes éloignés d'elle.
04:37C'est-à-dire à la fois en termes de temps,
04:39de distance et de transfuge de classe aussi.
04:41Est-ce que c'est votre expérience ?
04:43Moi, je ne parle jamais de transfuge,
04:45mais oui, effectivement, ça renvoie à ça.
04:46Je ne parle jamais de transfuge,
04:47parce que c'est toujours ceux qui ne le sont pas qui le...
04:49Oui, bien sûr.
04:51Ça renvoie aussi, le fait de nommer transfuge,
04:53ça remet à la place le transfuge lui-même,
04:56et pas tellement.
04:57C'était pas du tout, on s'entend très bien.
05:01Mais c'était quoi la question ?
05:02C'était que cette démarche, elle vient de l'éloignement.
05:06Plus vous êtes devenus ce que vous vouliez devenir,
05:08plus vous êtes éloignés d'elle.
05:09Donc vous avez un peu fait ce spectacle pour vous rapprocher.
05:11Oui, c'est ça.
05:12C'est ce que je disais.
05:13Pour recréer un langage et recréer,
05:15retisser du lien,
05:16mais aussi rapprocher physiquement.
05:18Il y avait vraiment une volonté.
05:19Effectivement, après être parti de chez moi,
05:22avoir quitté ma chambre d'enfants,
05:23c'est aussi un lieu dont je parle beaucoup dans la pièce.
05:27Et m'être complètement déconstruit, radicalisé,
05:29mais vraiment dans le bon sens du terme.
05:31Avoir rencontré une communauté aussi qui m'a beaucoup nourri.
05:33Vous avez été danseur d'abord,
05:35notamment aux côtés de Boris Charmat.
05:37Et puis vous avez rencontré, je crois,
05:39toute une communauté queer à Paris.
05:42Là, on vous a dit,
05:43mais en fait, tu sais,
05:44les trucs quand tu te déguises et tout ça dans tes spectacles,
05:46c'est du drag.
05:47Oui, c'est ça, exactement.
05:48Vous ne vouliez pas être drag, c'est venu au fil.
05:51En fait, c'est venu avec le théâtre.
05:53C'est vraiment venu comme des outils de théâtre.
05:56J'ai rencontré un des metteurs en scène,
05:58amis qui m'ont plongé là-dedans,
06:00eux-mêmes sans jamais nommer que c'était du drag.
06:02Mais on était déjà le corps entièrement body-painté.
06:05C'était cinq heures de make-up.
06:07Et c'était un calvaire.
06:08C'était une horreur.
06:09Et en même temps, quand ça a terminé,
06:10j'avais juste envie de recommencer.
06:12Et là, je me suis dit,
06:13il y a peut-être un truc,
06:14soit de l'ordre de la névrose,
06:15mais en tout cas, ça se passait sur scène.
06:18Et c'est ça qui m'a donné envie de faire du drag.
06:20Et ça a permis, effectivement, paradoxalement,
06:22de retisser du lien aussi avec l'aspect social
06:25dont je m'étais beaucoup éloigné en partant de chez moi.
06:28Oui, et donc là, vous retissez aussi du lien avec votre mère sur scène
06:31à travers des références qui vous sont chères,
06:33comme le couple mère-fille Judy Garland,
06:36Liza Minnelli, on les écoute.
06:52Judy Garland, Liza Minnelli,
07:07Liza Minnelli, son mère et fille,
07:09et vous vous amusez avec le public de Paris,
07:11vous dites, vous ne le saviez pas.
07:13Oui, très souvent,
07:15en fait, c'est ça qu'il faut avec ces deux figures emblématiques.
07:20C'est tellement des stars incontestées,
07:22elles excellent tellement dans leur domaine
07:24que, en fait, Liza Minnelli a complètement échappé
07:27au népotisme, à cette accusation un peu de fille d'eux.
07:31En fait, elle existe quand même en tant que figure à part entière
07:35et très souvent, les gens ne font pas le lien.
07:37Moi, je l'ai fait parce qu'on a travaillé avec ces outils-là pour le spectacle,
07:42donc ça nous paraissait assez évident avec toute l'équipe
07:44et on s'est rendu compte au fur et à mesure des représentations
07:46que très peu de personnes savaient qu'elles étaient effectivement mère et fille.
07:49Et vous, c'est un couple qui vous inspire dans la relation ?
07:52En fait, c'est ce que je n'ai pas été, c'est ce que je n'ai jamais eu.
07:56Alors, c'est un couple qui m'inspire dans la relation très forte
08:00qu'elles ont eue dans l'intimité
08:03parce que Judy Garland était constamment accusée dans les médias,
08:06elle devait constamment se défendre d'être une bonne mère, une mère capable, etc.
08:10Ce que détestait d'ailleurs Liza Minnelli.
08:12Et moi, ce que je trouve super intéressant surtout dans ce duo,
08:15c'est qu'elles ont performé la relation mère-fille.
08:19Ce qu'on a fait aussi avec ma mère, mais pas du tout sur scène.
08:22Et en revanche, il y avait comme ça une passation entre Judy Garland et Liza Minnelli,
08:26culturelle, d'héritage vraiment culturel,
08:29que moi je n'ai pas du tout eu en revanche avec ma mère.
08:31Et c'est ça qui en fait un duo très complexe.
08:33Et en même temps, grâce à elle, vous avez été inspirée par Sissi à la télévision,
08:37vous avez découvert des choses, Sissi la nazi que vous l'appelez dans le spectacle,
08:40vous vous rappelez que c'est Sissi la nazi.
08:42Vous avez découvert aussi votre sexualité en regardant Elton John à la télé
08:46et vous avez eu toutes ces révolutions en fait aux côtés de votre mère.
08:49Donc là, c'est réuni sur scène ces magnifiques dynasties.
08:53De qui sommes-nous l'enfant ? De quelles images ?
08:55C'est exactement la question qui est posée.
08:57C'est magnifique, c'est à Paris.
08:58Ce sera aussi à Dijon et bientôt de nouvelles dates.
09:00Bonne route à vous Mathieu Barbin, Sarah Forever.