Pour son nouveau documentaire "Nature : pour une réconciliation sur la beauté de la nature", diffusé ce soir sur M6, Yann Arthus-Bertrand répond aux questions de Amandine Bégot et Thomas Sotto.
Regardez L'invité de 9h40 avec Amandine Bégot et Thomas Sotto du 11 février 2025.
Regardez L'invité de 9h40 avec Amandine Bégot et Thomas Sotto du 11 février 2025.
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00:00L'invité du 9-10.
00:02Et notre invité ce matin c'est Yann Arthus-Bertrand, bonjour !
00:05Bonjour ! Et bon courage !
00:07Et bon courage, on a envie de vous dire, vous êtes donc coincé dans les bouchons à cause de ce sommet sur l'intelligence artificielle qui, il faut le dire, complique sacrément la circulation.
00:16Vous vouliez nous parler, vous allez nous parler de ce documentaire Nature, pour une réconciliation qui sera diffusée ce soir à 21h10 sur M6.
00:26C'est un film qui, une nouvelle fois, nous fait ouvrir les yeux sur l'état alarmant de notre planète.
00:30Yann Arthus-Bertrand, je vous propose qu'on écoute un extrait et on en parle juste après.
00:33L'humanité n'est pas invincible, et le monde que nous avons bâti non plus.
00:38Il est même bien vulnérable face au bouleversement à venir.
00:41C'est avec gravité et une profonde tristesse que je veux répéter ce que les scientifiques crient depuis des années.
00:48Nous sommes en train de vivre la sixième extinction de masse.
00:53Et contrairement aux précédentes, elle est essentiellement provoquée par nous-mêmes.
01:01Yann Arthus-Bertrand, ce film, c'est pas le premier que vous faites, mais on vous sent plus inquiet que précédemment, c'est le cas ?
01:11Bah c'est-à-dire, oui, on peut dire ça.
01:14On peut dire ça, c'est-à-dire, du haut de mes 78 ans, vous savez, je suis écolo depuis que j'ai 20 ans.
01:20Quand j'avais 20 ans, j'avais envie de sauver les rhinocéros, les éléphants, voilà.
01:24Et le gap que je suis en train de vivre en ce moment est absolument invraisemblable.
01:28Ce que je viens de dire dans le film sur la sixième extinction, on le montre bien, c'est que, vous savez, quand j'avais 20 ans, on pensait pas à ça.
01:33Le monde était ouvert, devant nous.
01:35Et aujourd'hui, on a quand même un monde assez fermé, si on veut regarder les chiffres, et ne pas être dans un déni collectif.
01:40Parce qu'on vit tous dans un déni.
01:42On ne veut pas croire ce que l'on sait en continuant exactement comme avant.
01:45Pourquoi tout le monde semble s'en foutre maintenant de la familiarité du temps ?
01:49Mais c'est ça, l'écologie, j'ai l'impression que ça a été une préoccupation.
01:52Chez les jeunes, ça l'est toujours.
01:54Et puis chez les dirigeants, il y a eu un moment où on s'est dit, tiens, c'est peut-être en train de bouger.
01:57Et puis là, vous disiez que vous avez 78 ans, vous avez l'âge de Donald Trump,
02:00qui lui, est en train de tout détricoter, ce qui a été fait depuis des années.
02:04J'ai l'impression que la réalité nous rattrape.
02:06C'est ce que a-t-il bien dit Edgar Morin, c'est la complexité du réel.
02:11On est complètement dans un monde à tirailler de tous les côtés,
02:14où le pouvoir d'achat, les emplois, sont de plus en plus importants, sans doute,
02:18que ce qui va se passer dans 20 ou 30 ans.
02:21Mais il y a aussi ce qui se passe aujourd'hui.
02:22Pourquoi les cyclones, les catastrophes naturelles,
02:24les événements climatiques qui sont accélérés, qui sont amplifiés,
02:28pourquoi ça ne nous fait pas rire ?
02:29Pourquoi on ne se dit pas, oh là là, il y a le feu, au sens propre et au sens figuré ?
02:32Je suis comme vous, je suis étonné.
02:34Je me pose la question, je n'ai pas la réponse malheureusement.
02:37Mais c'est aussi un film assez magnifique sur l'espoir.
02:40On commence d'abord par le cosmos, avec des images incroyables.
02:44James Webb, ce télescope qu'on a envoyé à 1,5 million de kilomètres,
02:49c'est déjà assez extraordinaire, il fait des images incroyables.
02:52C'est aussi les images formidables sur la naissance de la vie,
02:55avec la beauté du monde,
02:58parce que la beauté du monde nous touche toujours beaucoup, énormément.
03:00Et puis c'est un film, j'ai demandé aux femmes de me faire la conclusion du film.
03:05Et on a fait une trentaine d'interviews de femmes,
03:08qui nous touchent au cœur.
03:11C'est un film que j'aime beaucoup,
03:14c'est sans doute le plus compliqué que j'ai eu à faire.
03:16Ce n'est jamais très facile de faire un film sur la fin du monde,
03:19et c'est drôle parce qu'aujourd'hui,
03:22on a eu une très grosse projection hier soir,
03:24j'étais très étonné de voir la réaction extrêmement positive des gens.
03:27Ça me donne de l'espoir.
03:29Et quand les jeunes me demandent, qu'est-ce que je peux faire,
03:32qu'est-ce que je dois faire, moi je réponds,
03:34je ne sais pas, mais j'ai confiance en vous.
03:36Je ne sais pas si c'est compliqué, Yann Arthus-Bertrand,
03:38parce qu'on est nombreux à culpabiliser aussi dans nos vies quotidiennes,
03:42dans nos achats,
03:44et puis on se dit, est-ce que la stratégie du colibri,
03:46chacun met sa petite goutte dans l'océan, ça peut marcher ?
03:48Ou ça c'est dépassé ça ?
03:50C'est peut-être un petit peu dépassé, d'abord le colibri c'est bien,
03:54c'est le fameux oiseau qui à la goutte va arrêter un incendie,
03:57mais le colibri il faut qu'il demande au pélican de venir avec lui.
04:00Tout seul il ne peut pas y arriver.
04:02En même temps, quoi faire d'autre ?
04:04On ne peut pas se résoudre, continuer comme avant,
04:06en disant c'est pas grave, on verra bien ce qui va se passer.
04:08Je pense qu'on a tous une responsabilité personnelle,
04:11tous une envie de changer les choses,
04:13et c'est aussi un film où je parle énormément d'amour.
04:16Ça parait du nus, un peu cucu comme ça,
04:18mais l'amour de la vie, ce qui nous tient tous,
04:21c'est ça qui nous fera avancer.
04:23Vous avez raison parce que c'est un beau film,
04:25attention parce que là on parle des choses négatives,
04:27mais c'est un film où on voit que la planète est belle,
04:30c'est l'humanité qui est en danger, ce n'est pas la planète.
04:32C'est presque une déclaration d'amour à la Terre.
04:34Vous dites que la Terre est le seul endroit où l'on peut vivre.
04:36Mais bien sûr, c'est une vraie déclaration d'amour à la Terre.
04:39Est-ce qu'on aime assez la vie ?
04:41Est-ce qu'on aime assez les gens autour de nous ?
04:43Est-ce qu'on aime assez les animaux ?
04:45Est-ce qu'on est en train de faire subir à la vie sur Terre ?
04:48C'est inouï ce qui se passe en ce moment.
04:50On est dans un chaos comme invraisemblable.
04:52Quand vous pensez Los Angeles, Mayotte,
04:54vous voyez bien Trump, l'Assemblée.
04:58Yann Arthus-Bertrand, j'imagine que c'est quelque chose
05:00dont vous parlez avec les politiques.
05:02Ils vous répondent quoi ?
05:04Je n'ai aucun contact avec les politiques.
05:06Les politiques ne m'intéressent pas beaucoup.
05:08Vous pourriez les intéresser ?
05:10Non, parce que c'est vrai,
05:12le politique, il est un peu le miroir de ce que nous sommes.
05:14Le politique, il est dans ses contradictions.
05:16Est-ce qu'on a envie de changer ?
05:18On passe notre temps à demander aux gens
05:20de changer leur façon de vivre alors que personne n'en a vraiment envie.
05:22C'est aussi le problème.
05:24Regardez la viande, regardez l'avion.
05:26Il faut arrêter de consommer de la viande industrielle.
05:28C'est le B à bas.
05:30Aujourd'hui, le poids de la viande industrielle
05:32sur la planète est énorme.
05:34Les pesticides sont en train...
05:36Dans le film, on dit par exemple
05:38que 80% des insectes
05:40volants ont disparu en France.
05:42On devrait tous manger bio.
05:44En plus, la filière du bio s'écroule.
05:46Ce n'est pas les politiques, c'est nous-mêmes.
05:48On n'est pas capables de faire des efforts
05:50et de respecter les paysans qui font un travail formidable.
05:52C'est vrai, c'est incroyable. Quand on fait un voyage en voiture,
05:54les gamins, en arrivée, il y avait des moucherons partout
05:56sur le pare-brise. Maintenant, il n'y en a plus un seul.
05:58Il n'y a plus rien. Et l'avion, vous évoquiez.
06:00Certains vous reprochent, à vous, de le prendre encore
06:02beaucoup. Vous l'avez réduit ?
06:04Non, non. J'ai pris énormément l'avion.
06:06J'ai arrêté
06:08depuis cinq ans.
06:10Je n'ai pas du tout de fierté à le faire
06:12parce que j'ai beaucoup pris l'avion.
06:14Il faut dire aussi qu'à une époque, on ne savait pas tout ça.
06:16Et maintenant, c'est le drone alors du coup ?
06:18Bien sûr. Vous savez, pour le film
06:20qu'on vient de faire, c'est un film qui a zéro
06:22carbone parce qu'on a demandé à tous les gens
06:24qui filmaient dans le monde de nous envoyer des images.
06:26On n'a fait aucun
06:28voyage pour ce film et beaucoup, beaucoup d'images
06:30d'archives. Mais c'est un film
06:32dont vous sortez un petit peu
06:34ébranlés
06:36mais en même temps heureux de vivre.
06:38C'est des paroles que les femmes nous donnent
06:40à la fin. Et on a fait quelque chose qui est assez particulier.
06:42On a fait quelque chose qui ne me fait pas
06:44souvent la dédicace. Pourquoi les femmes ? Parce que là,
06:46ça fait deux fois que vous parlez des femmes. Elles ne viennent pas
06:48d'arriver sur Terre. Pourquoi d'un coup, vous dites, tiens, on va mettre
06:50les femmes à la fin. Ça va peut-être bien marcher.
06:52Non.
06:54J'ai fait le film « Woman »
06:56où j'ai interrogé 2000 femmes et je peux vous dire que ma vie
06:58a été transformée par les
07:00interviews que j'ai vues parce que je suis un peu
07:02le vieux con à écouter
07:042000 interviews de femmes
07:06qui vous parlent. Sincèrement,
07:08ça vous fait réfléchir. Et je crois que les
07:10femmes sont beaucoup plus ancrées dans les réalités.
07:12Beaucoup plus solides. Elles voient l'avenir
07:14d'une façon différente. Et ce qu'elles nous disent dans le film,
07:16elles le disent
07:18d'une autre façon que moi et d'une façon
07:20beaucoup plus belle.