• il y a 13 heures
Boris Vallaud, député des Landes et président du groupe "Socialistes et apparentés" à l'Assemblée nationale, s'exprime au pupitre de l'Assemblée nationale, après le discours de politique générale du Premier ministre, François Bayrou.

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Transcription
00:00Madame la Présidente, Monsieur le Premier Ministre, Mesdames et Messieurs les Ministres, mes chers collègues,
00:05je m'exprime aujourd'hui devant vous avec la solennité qu'exige la gravité du moment
00:11et avec la seule préoccupation d'être utile aux Françaises et aux Français.
00:15En vous nommant, Monsieur le Premier Ministre, et en refusant obstinément à la gauche
00:20qui le revendiquait légitimement l'exercice du pouvoir,
00:23le Président de la République a pris le risque d'aggraver la crise politique et institutionnelle
00:27qu'il a lui-même ouverte avec les dissolutions.
00:30Le mal n'est pas que le pouvoir lui échappe, le mal c'est qu'il refuse de l'accepter.
00:35Ce gouvernement, Monsieur le Premier Ministre, n'est assurément pas le nôtre.
00:39Votre politique n'est assurément pas la nôtre,
00:42votre budget n'est pas celui que nous aurions défendu à gauche
00:46et les socialistes ne tairont jamais leur désaccord.
00:49Quelque chose d'ailleurs nous opposera toujours dans notre vision du monde,
00:53dans notre conception de l'homme, de la justice, de la liberté, de la question sociale,
00:57mais aussi du mérite, de l'ordre et de l'autorité.
01:01Pour nous, les choses sont claires et cette clarté nous la devons à nos électeurs
01:05car nous n'avons pas été élus sur les mêmes projets ni sur les mêmes convictions.
01:10Nous demeurons dans l'opposition, nous ne sommes à la recherche ni d'une coalition nouvelle
01:15ni de nouvelles alliances, nous ne voulons aucun portefeuille ministériel
01:19et nous refusons les combines et les combinaisons.
01:22Nous ne vous rejoignons pas.
01:25Nous avons notre destin qui est de toujours marcher vers l'avènement de la raison et de la justice
01:32et nombreux sont aujourd'hui les Français, plus nombreux encore demain,
01:36qui en espèrent l'accomplissement.
01:38Je le dis avec gravité, vous l'avez dit aussi, l'époque gronde,
01:42un monde menacé par l'égoïsme des nations, la remise en cause du droit international
01:46et in fine par la guerre, un climat déréglé dont on peine à mesurer toutes les conséquences
01:51mais qui montre d'ores et déjà sa grande violence, une humanité percluse d'inégalité,
01:55rongée par la désespérance et partout des ennemis de la démocratie,
01:59prêts à toutes les promesses pour mettre en oeuvre tous les mensonges.
02:03Nous vivons dans un monde de basculement, au bord du basculement,
02:06dans ce clair obscur d'où surgissent les monstres
02:10et l'extrême droite menace ici comme partout d'abattre tout ce que l'homme,
02:14tout ce que la France, tout ce que la République a fait de grand dans son histoire
02:19et plus souvent sans elle et même contre elle.
02:23Monsieur le Premier ministre, au moment de renverser le gouvernement de Michel Galarnier,
02:27nous sommes adressés à nos collègues du socle commun et je m'adresse dans les mêmes termes à vous
02:31avec une question simple mais déterminante. Que préférez-vous ?
02:34La laisse et le bâton des maîtres chanteurs du Rassemblement national
02:38ou la responsabilité républicaine au prix de négociations exigeantes avec la gauche ?
02:43Et notre conviction est inébranlable, on ne s'allie pas avec l'extrême droite,
02:47on ne saurait accepter qu'elle inspire la loi et encore pire qu'elle dicte sa loi.
02:52Tout plutôt que la corruption de nos principes communs.
02:55Monsieur le Premier ministre et chers collègues du socle commun,
02:58n'imaginez pas qu'il nous soit facile ou naturel de négocier avec celles et ceux
03:03que nous combattons depuis sept ans et demi dans ces orientations
03:07et que nous combattrons certainement encore dans les mois et les années à venir.
03:11Et je sais aussi la méfiance qui inspire d'instinct le compromis.
03:14Mes instruits de l'histoire, je sais aussi que ce n'est pas la part modique de la politique.
03:17Dès lors que chacun reste à sa place, nous dans l'opposition, vous dans le soutien au gouvernement.
03:23Et à celles et ceux qui s'interrogent ou même dénoncent,
03:25parfois avec beaucoup de véhémence et beaucoup de violence,
03:27le principe même de la négociation, je leur adresse ces mots du grand Jaurès
03:31au soutien du gouvernement Valdez-Crousseau.
03:33Il nous plaît que notre parti ne soit pas composé de ces éternels impuissants
03:36qui critiquent, chicane, disputent, dégénéragisent et combattent toujours trop tard.
03:42Les choses pour nous sont claires.
03:45Personne à cette assemblée n'a de majorité absolue.
03:48Mais voilà, je l'ai dit, le monde grince.
03:51La menace de l'extrême droite est forte.
03:54Et face aux urgences économiques, sociales, environnementales, démocratiques,
03:57il est de notre devoir d'être utile, tout le tirant, partout, aux Françaises et aux Français.
04:02Être utile à cette majorité introuvable ici, mais qui existe bien dans notre pays.
04:07La majorité des vies difficiles.
04:09La majorité de celles et de ceux qui se désespèrent de leurs conditions de travail,
04:12de leurs salaires, de leurs factures, de leur santé, de leur sécurité,
04:15de leur retraite, de leurs enfants, de leur liberté individuelle,
04:18comme de l'avenir de la planète.
04:20Monsieur le Premier ministre, tout ce que vous ne consentirez pas,
04:23à la gauche, aujourd'hui et demain,
04:26pour bâtir une stabilité dans la justice qui a l'appel de ses voeux,
04:29dans des négociations que nous avons acceptées,
04:32vous finirez par le consentir à l'extrême droite sur d'autres terrains
04:36qui remettront en cause les valeurs qui sont les nôtres.
04:39Et je voudrais dire ici à la représentation nationale,
04:41et à travers elle, aux Français, quel a été notre état d'esprit
04:44dans ces discussions, avec un seul objectif.
04:48Servir le pays, être utile à la vie quotidienne des Françaises et des Français.
04:52Nous avons été guidés par quelques principes simples.
04:56Épargner celles et ceux qui n'ont que leurs forces de travail pour vivre
04:59des efforts demandés.
05:01Les retraités, les classes moyennes, les malades, les fonctionnaires.
05:04Et demander à celles et ceux qui le peuvent, les multinationales,
05:07les grandes entreprises, les efforts qu'ils appellent.
05:11Voilà pourquoi, dès le budget de Michel Barnier,
05:14nous avons réclamé des mesures de justice,
05:16comme la réindexation des pensions.
05:18C'est acquis, et c'est grâce à la gauche.
05:21Nous avons refusé l'augmentation du prix de l'électricité,
05:24du ticket modérateur, du déremboursement des médicaments,
05:27de l'instauration des jours de carence.
05:30Voilà pourquoi nous avons demandé des justices fiscales,
05:32au nom de la solidarité nationale,
05:34parce qu'il faut bien compenser les cadeaux fiscaux
05:36jamais financés, faits depuis 2017,
05:38à chacun selon ses moyens,
05:40pour répondre à chacun selon ses besoins.
05:42Et nous avons, avec la même force,
05:44défendu nos services publics,
05:46l'hôpital, pour lequel nous demandons plus de moyens,
05:48l'éducation nationale, pour laquelle nous récusons
05:51les suppressions de postes.
05:53Et nous avons également besoin
05:55d'un budget qui ne soit pas un budget récessif,
05:57venant au secours, notamment du logement,
05:59qui s'effondre au moment
06:01où le nombre de ceux qui veulent se loger
06:03et qui n'y peuvent pas, ne cesse d'augmenter.
06:06Voilà aussi pourquoi nous avons demandé
06:08la suspension et la remise en chantier
06:10la renégociation de la réforme des retraites,
06:13parce qu'il y a là la possibilité,
06:15non seulement de réparation d'une injustice sociale,
06:18faite aux classes populaires, faite aux carrières longues,
06:20faite aux carrières hachées, faite aux carrières pénibles,
06:22faite en réalité à beaucoup de femmes
06:24ici, de ce pays.
06:26Il y a aussi la possibilité d'une réparation démocratique,
06:29d'une loi adoptée dans la brutalité politique et institutionnelle,
06:32sans débat, sans dialogue social
06:34et contre l'avis des Français.
06:36Vous avez annoncé
06:38que tout était négociable,
06:40même l'âge de 64 ans.
06:42C'est notre demande et la perspective
06:44d'une loi avant l'été.
06:46Nous la prenons, nous faisons confiance au dialogue social
06:48et personne ne se déshonore
06:50d'un retour devant les partenaires sociaux.
06:52Mais je veux dire aussi
06:54que notre objectif demeure l'abrogation
06:56de la réforme des retraites à 64 ans.
06:58Et que nous ne pouvons pas nous satisfaire
07:00que s'il n'y a pas d'accord,
07:02nous revenions à la loi antérieure.
07:04Il y aura des négociations, il y aura des propositions,
07:06il n'y aura peut-être pas de consensus
07:08mais nous demandons que cela revienne
07:10devant l'Assemblée nationale,
07:12devant la représentation nationale
07:14pour faire avancer une cause juste
07:16et dont nous sortirions tous grandis.
07:18Justice,
07:20solidarité, soutien à l'activité économique,
07:22relance du débat démocratique
07:24dans un parfait esprit de responsabilité.
07:26Il n'y a rien d'en en demande, d'excessif,
07:28de déraisonnable. Et pourtant,
07:30Monsieur le Premier ministre, vous n'en avez pas dit un mot.
07:32Alors je voudrais vous interroger.
07:34Je voudrais vous interroger
07:36et j'ai besoin
07:38de la clarté de vos réponses.
07:40Plusieurs de vos ministres
07:42dans les discussions que nous avons eues
07:44avec les écologistes et les communistes
07:46ont fait des pas en avant
07:48dans le sens de l'intérêt des Français.
07:50Je veux savoir
07:52où on en est de ce projet
07:54de contribution sur les hauts patrimoines,
07:56une contribution qui serait pérenne
07:58et qui mettrait à contribution
08:00ceux qui le peuvent et qui sont aujourd'hui les passagers clandestins
08:02de la solidarité nationale.
08:04Où on en est de l'augmentation du taux
08:06de la taxe sur les transactions financières
08:08et plus généralement du niveau de fiscalité
08:10nouvelle par rapport à 2024.
08:12Je veux également que nous sachions
08:14où nous en sommes de l'augmentation
08:16des dépenses de l'assurance maladie,
08:18en particulier de l'hôpital public.
08:20Et je veux très concrètement savoir ce que cela signifie
08:22en termes de maintien
08:24ou de création de postes et de maintien de lits.
08:26Je veux savoir où on en est
08:28du jour de carence que vous nous avez dit
08:30qu'il pouvait être supprimé.
08:32Je veux savoir où nous en sommes
08:34de l'annulation de la suppression des 4000 postes dans l'éducation.
08:36Je veux savoir où nous en sommes
08:38de l'augmentation que vous nous avez annoncée
08:40très conséquente, très importante
08:42du budget de l'outre-mer.
08:44Nous savons dans quel état
08:46et ce sont ces territoires
08:48qui souffrent de la vie chère.
08:50Je veux que nous sachions également
08:52où nous en sommes des moyens consacrés
08:54à la transition écologique, en particulier
08:56le fonds vert, en particulier
08:58le fonds eau, en particulier
09:00le fonds chaleur.
09:02Je veux savoir ce qu'il en est du taux d'augmentation
09:04des droits de mutation, du bonus auto,
09:06du prêt à taux zéro pour la construction,
09:08de cette prime pour les bairds-pâtisseurs,
09:10de la non-hausse de fiscalité
09:12sur l'électricité, de l'évolution
09:14de la fiscalité sur les rachats d'actions.
09:16Monsieur le Premier ministre.
09:18Monsieur le Premier ministre.
09:20À vous écouter, je dois vous dire que le compte
09:22n'y est pas. Où sont vos engagements ?
09:24Où sont vos compromis ?
09:26Où sont les avancées
09:28que les Françaises et les Français attendent
09:30et qu'ils pourront dire de nous ?
09:32Nous avons été utiles à quelque chose
09:34et nous avons servi l'intérêt général et le pays.
09:36Aujourd'hui,
09:38l'avenir de ce pays, l'avenir politique,
09:40institutionnel,
09:42est entre vos mains, mesdames et messieurs,
09:44du Bloc central.
09:46Monsieur le Premier ministre, mesdames et messieurs du gouvernement.
09:48Nous avons pris nos responsabilités.
09:50À vous de prendre les vôtres.

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