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00:00Europe 1 soir, 19h21, Pierre de Villeneuve.
00:04La scénique on retrouve bien sûr tout à l'heure, dans un quart d'heure, pour le rappel de l'actualité.
00:08Jean-Michel Salvatore est là, Gilles Boutin aussi pour parler de la Syrie, de cette instabilité politique.
00:14On parlait du Golan, l'Iran a condamné comme une violation du droit d'une incursion de l'armée israélienne dans la zone tampon du Golan syrien.
00:22Il y a des questionnements autour de ça, il y a des questionnements aussi autour du fait de savoir si l'Iran va venir s'ingérer dans les affaires syriennes avec Mohamed al-Jalouni.
00:35Et Benjamin Netanyahou a promis des frappes intenses si jamais l'Iran venait à pointer le bout de son nez.
00:42Et en France ? Et bien en France, on sait qu'il y a des ressortissants français parmi les djihadistes qui sont sur place.
00:51Et notamment dans ce qu'on appelle la poche d'Idlib, qui était une zone un peu en marge du centre de la Syrie.
01:00Et ce matin, chez nos confrères d'RTL, le procureur national antiterroriste Olivier Christenne faisait part justement du fait que le renseignement était sur les dents à leur sujet.
01:11Il y a à peu près une grosse centaine de français qui étaient dans la poche d'Idlib.
01:16Tous les individus français qui sont partis en Syrie sont à peu près identifiés.
01:21On était de l'ordre de 2500.
01:23On sait à peu près, de façon assez précise, ceux qui sont détenus dans les camps syriens qui sont sous contrôle du Kurdistan.
01:32On sait, il y en a un certain nombre dont l'on sait qu'ils sont à priori décédés, à peu près 500, même si pour certains ce n'est que présumé.
01:41Il y a les 390 qui sont revenus.
01:44Et puis il y en a à peu près 300 qui ont disparu, c'est-à-dire sur lesquels on n'a plus de traces.
01:48Et nous pensons que ce serait parmi ceux-là qu'il y aurait certains des individus qui étaient détenus dans les prisons de Bachar el-Assad.
01:55Il y en avait deux que nous connaissions avec certitude et nous supposons qu'il y a un volant qui est plus large.
02:02Gilles Boutin, la bonne nouvelle c'est que le renseignement, comme son nom l'indique, a l'air très renseigné sur ces français qui potentiellement pourraient être dangereux.
02:12Je m'avance un peu sur le terme dangereux, mais en tout cas, on les surveille.
02:15Oui, et c'est le rappel, si l'on le fallait un, que les islamistes ne changent pas de nature en quelques années seulement.
02:20Ce sont des français...
02:21Ce que disait Mgr Gollnisch, en tout cas il espérait que Mohamed al-Jalouni, sans vraiment y croire, j'ai l'impression...
02:28Je pense que Mgr Gollnisch...
02:29... ait chassé Satan de son âme à jamais.
02:32Oui, et Mgr Gollnisch est aussi contraint à participer à un effort de diplomatie.
02:37Ce n'est pas à lui, je pense, de tenir des discours trop alarmistes, même si nous on va s'en charger.
02:43Parce que, sur le fond, qu'est-ce qui a changé chez ces français qui sont partis de France pour se battre en Syrie ?
02:50Je ne le vois pas.
02:51Et ce sont ces mêmes qui ont commis des attentats extrêmement meurtriers sur le sol français.
02:59Donc tout cela incite à une extrême méfiance.
03:02Et puis le procureur a rappelé que, dans la partie kurde, il y avait des prisonniers islamistes.
03:10Il y en a au moins 50 000, à ma connaissance.
03:12Donc c'est vraiment un moteur, c'est une véritable motivation.
03:16C'est cette prison qui a été libérée, notamment ? Vous parlez de ça ?
03:20Non, je parle des islamistes, de Daesh notamment, et d'autres groupes qui sont retenus par les Kurdes dans des camps.
03:27Ah oui, dans le nord du pays.
03:29Je ne vois pas pourquoi les islamistes qui ont repris toutes ces villes de Syrie n'oublieraient leurs frères qui sont retenus par les Kurdes, qui sont nos alliés objectifs.
03:35C'est-à-dire qu'il y a une poche de résistance islamiste qui est là, et sur laquelle il faut avoir la plus grande des surveillances.
03:43Jean-Michel Salvatore.
03:44Je pense qu'il faut être extrêmement lucide sur le risque que cela peut représenter.
03:50Il y a un petit détail que je trouve assez inquiétant, c'est que sur cette centaine de djihadistes français qui se trouvent dans cette poche d'Idlib,
04:00il y a l'un d'entre eux qui avait des liens assez ténus avec le terroriste Tchétchène qui a assassiné Samuel Paty.
04:12Oui, c'est l'information qu'on a donnée hier.
04:14Et donc ça, ça veut bien dire que là on n'est pas dans le fantasme, on ne joue pas à se faire peur, on voit bien que là il y a des risques,
04:23qu'il y a des djihadistes français qui sont capables d'avoir des liens directs avec des gens qui ont commis des attentats sur le sol.
04:33Et ça saute aux yeux.
04:34Ça saute aux yeux, et alors qu'est-ce que vous voulez faire ?
04:40Être prudent effectivement, activer le renseignement, surveiller tous les mouvements, ce que fait notre renseignement.
04:50Mais au-delà de ça, sur le discours, on est un petit peu fatigué par cet ultra-optimisme, par cette naïveté très occidentale.
04:59On a cette envie de voir...
05:01Moi je n'appellerais pas ça de la naïveté, pourquoi vous parlez de naïveté ?
05:04Dans le discours des chancelleries, on sent cette envie de voir dans ces islamistes qui se font voir sous un jour un peu plus rassurant et modéré,
05:15on a envie de les voir tel qu'on les souhaite.
05:18Est-ce que ce n'est pas parce qu'il y a eu la chute du règne de Bachar ?
05:23Je me d'accord, il faut bien faire avec les nouveaux chefs.
05:25C'est vrai, je vois à qui vous faites allusion, vous faites allusion à Jean-Noël Barraud dont on a passé le sonore hier, je ne sais pas s'il l'a encore,
05:31je me tourne vers Benoît Lievionnoir, qui disait qu'effectivement, Bachar était coupable des exactions, et c'est vrai !
05:39Pendant dix ans, souvenez-vous, les attaques au gaz, etc.
05:43Il ne faisait que peu allusion aux djihadistes, on va écouter justement le ministre des Affaires étrangères.
05:50La place qui sera donnée aux femmes, la place qui sera donnée aux minorités chrétiennes, druses, kurdes, conditionne la capacité de la Syrie à vivre en paix et en sécurité dans sa région.
06:04Les premiers signaux démontrent une volonté de ces groupes d'écarter les exactions dont certains groupes islamistes ou djihadistes sont coutumiers,
06:14d'écarter certaines attitudes qui démontreraient une volonté hégémonique.
06:18Mais nous sommes très prudents, et je le dis, l'appui de la France sera conditionné au respect des minorités et des droits humains.
06:24Ça s'apprécie sur la durée.
06:25Ça s'apprécie sur la durée, évidemment.
06:26Voilà, et je mettais hier, ici même, en opposition, les propos du chef de la diplomatie britannique, David Lamy,
06:34qui certes a traité de boucher, de dealer de drogue, de rat de Damas, le président Bachar Al-Assad,
06:42mais voilà ce qu'il dit, il dit, nous ne devons pas être aveuglés sur les risques de ce moment.
06:47La chute d'Assad n'apporte aucune garantie de paix.
06:51C'est peut-être ça la preuve de lucidité de l'anglais, et qui n'est pas du tout dans les mots de Jean-Noël Barraud,
06:56qui lui voit une méfiance, mais plutôt des signes positifs du régime qui se met en place.
07:05Ah oui, parce qu'en fait, on est quand même instruits par l'histoire.
07:08Souvenez-vous, Yasser Arafat, avant d'être le patron de l'autorité palestinienne, c'était un terroriste.
07:15Donc, on peut s'améliorer d'une certaine façon, et puis on a beaucoup de contre-exemples.
07:19On peut chasser le démon pour reprendre les propos de Monseigneur.
07:22Il y a beaucoup de contre-exemples.
07:23Il y a Kadhafi, qui est quand même le contre-exemple le plus parlant, finalement.
07:27Les Français voulaient à toute force se débarrasser de Kadhafi, à commencer par Bernard Henri-Lévy.
07:32Et puis, on s'est bien rendu compte que ceux qui étaient après étaient pires que lui.
07:35Et puis, le deuxième exemple, c'est Saddam Hussein.
07:37Donc, c'est vrai qu'il faut être...
07:39Saddam Hussein avant Kadhafi, et Kadhafi qui avait dit aux Occidentaux,
07:44si vous me destituez, vous aurez Al-Qaïda.
07:49Donc, finalement, ils n'ont pas eu Al-Qaïda, ils ont eu Daesh, mais c'était encore pire.
07:52Absolument.
07:53Moi, je trouve que Barraud, je pense qu'il va peut-être un petit peu vite,
07:57et je trouve qu'en plus, il met des critères très occidentaux sur...
08:01Qu'est-ce que vous appelez occidentaux ?
08:02Quand il dit, bon, le droit des femmes, etc.
08:05Et pourquoi pas l'inclusion, pendant qu'on y est ?
08:08Vous voyez ce que je veux dire ?
08:09Bon, je pense que c'est des civilisations qui sont différentes,
08:12et je pense qu'il ne faut pas utiliser, il ne faut pas plaquer forcément
08:15les critères occidentaux à ce qui se passe là-bas.
08:19Mais je pense que là, il y a une certaine volonté de prendre ses désirs pour des réalités.
08:23Je pense qu'il est un peu tôt pour se réjouir.
08:25Ça montre l'éternelle malédiction de ces pays,
08:29c'est-à-dire qu'ils sont toujours tiraillés entre soit un État autoritaire aux apparences libérales
08:34et qui se donne des accents occidentaux.
08:36Je pense notamment à la Tunisie pendant longtemps,
08:39et la Syrie, c'est la même chose.
08:42Et l'alternative en face, c'est les islamistes qui se tiennent toujours en embuscade
08:48pour prendre la relève.
08:50Et les forces intermédiaires, modérées, sont toujours bouffées.
08:57Vous pouvez prolonger ce schéma, qui est d'ailleurs assez triste,
09:01parce que vous avez effectivement un dictateur, la chute du régime,
09:05la prise par des groupes révolutionnaires quels qu'ils soient.
09:08Ensuite, vous avez l'ingérence des pays occidentaux,
09:11qui disent que ce n'est pas comme ça qu'on doit faire.
09:14Ça a été quand même beaucoup la pensée américaine pendant des années,
09:17dans plusieurs pays, en disant voilà comment il faut faire.
09:20Et là, vous avez quand même le calque d'une pensée occidentale dans des pays,
09:24et vous l'avez bien rappelé Jean-Michel Salvatore,
09:27où il y a une autre culture, il y a une autre pensée,
09:30et forcément, ça a foiré.
09:32Et ça a foiré en Afghanistan, et ça a foiré au Vietnam,
09:35et ça a foiré dans plein d'autres pays où ça n'a pas marché,
09:38où on est rentré dans des guerres épouvantables,
09:41où les soldats occidentaux ont pris part d'ailleurs à la guerre,
09:44parce que c'était le devoir du soldat de la nation qui les représentait.
09:47C'est vrai que c'est un schéma meurtrier, terrible,
09:52et qui pourtant se répète à chaque fois.
09:54Et Fukuyama avait dit qu'il n'y aura plus de guerre dans les années 90,
09:58en réalité, il s'est complètement planté lui aussi,
10:01et on se retrouve quand même dans ce schéma,
10:03qui est peut-être le schéma de la nature humaine.
10:05Oui, mais la différence cette fois-ci, si on compare avec l'Irak et avec la Libye,
10:09c'est qu'il y avait les occidentaux qui ont beaucoup poussé,
10:13qui ont été finalement les artisans de la chute de Kadhafi et de Saddam Hussein.
10:19Là, on n'est pas tout à fait dans le même schéma.
10:21On a la Turquie derrière, comme l'a rappelé M. Le Guinich,
10:26qui joue un rôle très important,
10:28et derrière la Turquie, il y a évidemment d'une certaine façon les Etats-Unis.
10:32Donc on n'est pas exactement dans la même situation
10:35d'une candeur occidentale qui essaye de bouter dehors,
10:41et qui essaye de tuer même un dictateur pour le remplacer par...
10:44Je ne crois pas que ce soit antinomique avec ce que je viens de dire,
10:46je crois que c'est complémentaire,
10:47parce qu'il y a toujours une force politique derrière.
10:50Et là, en l'occurrence, il y a un mécanisme politique,
10:52vous avez raison de le dire, avec Erdogan et avec les Etats-Unis.
10:55Mais vous voyez, les Etats-Unis qui avaient promis de ne plus faire d'ingérence,
10:58et qui avaient promis surtout de ne plus être le gendarme du monde,
11:00finalement, les voilà en embuscade.
11:02Pourquoi ? Parce que Erdogan est atlantiste,
11:04il leur achète du matériel,
11:06et tout ça, il y a une question d'argent derrière,
11:09comme bien souvent Gilles Broutin...
11:10Ça nous met face à notre cynisme et à nous lâcher aussi.
11:13La situation des Kurdes va se reposer à nouveau.
11:16De manière crue.
11:17Et ça va nous faire penser aux Arméniens également.
11:19On a des alliés objectifs, même civilisationnels,
11:22que nous devons soutenir.
11:24Il y a effectivement des différences entre les Kurdes et l'Occident,
11:27mais les Kurdes se caractérisent par le fait que ce n'est pas leur religion
11:31qu'ils caractérisent.
11:32Et eux respectent les droits de tous.
11:34Et Jean-Michel parlait tout à l'heure de l'Irak et de Saddam,
11:38souvenons-nous quand même des Américains qui sont allés faire la guerre en Irak,
11:42alors qu'ils avaient armé l'Irak contre l'Iran.
11:45C'est ça quand même, il y a toujours un commencement quelque part.
11:48Bref, 20h44, on va mettre cela en pause,
11:53parce qu'évidemment les jours prochains vont nous dire
11:56ce qu'il en est de ce régime syrien.
11:58Et nous on va parler de politique intérieure dans un instant
12:00avec Jean-Michel Salvatore et Gilles Broutin sur Europe 1.
12:02A tout de suite.