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Pour son interview d’actualité, Télématin reçoit Alain Duhamel, journaliste et écrivain.

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00:00Michel Barnier renversé trois mois seulement après avoir été nommé, le pays qui entre dans une période d'incertitude.
00:05Comment en est-on arrivé là ? Pour essayer d'y voir plus clair, on vous a invité, Patrice Duhamel, bonjour.
00:10Bonjour.
00:10Le documentaire que vous avez co-signé avec Michel Cotta et Jean Garrigue a été diffusé hier soir sur France 2.
00:17Il s'intitule « Dissolution, histoire d'un séisme politique ».
00:20Il est évidemment disponible en replay pour celles et ceux qui l'auraient manqué.
00:23Alors, Patrice Duhamel, tout ce qu'on vit en ce moment, toute cette instabilité, ça vient donc du 9 juin dernier,
00:28de la dissolution décidée par Emmanuel Macron. Vous diriez que c'est l'acte fondateur ?
00:33L'acte fondateur, le premier acte, c'est la législative de 2022, avec l'absence de majorité absolue,
00:40et de manière significative, puisqu'il manquait 40 députés pour y parvenir.
00:44Et puis, il y a cette décision étrange, incomprise, un peu surréaliste,
00:51qui, pour moi, est la décision la plus grave et la plus lourde de toutes les décisions politiques de la Ve République.
01:01Je pense vraiment que c'est une faute absolument majeure.
01:04Donc la dissolution, prenons le soir des Européennes.
01:07Celle du 9 juin. Et le Président, hier soir, a admis qu'elle était incomprise.
01:14C'était une évidence. Il n'est pas allé jusqu'à dire qu'il s'était peut-être trompé.
01:19Ça faudra peut-être attendre quelques mois.
01:22Il a engagé, vous avez entendu, les Français ont entendu, il a enclenché le compte à rebours.
01:27Il a dit dans 30 mois, c'est terminé.
01:30Je ne suis pas sûr qu'il ait eu raison en termes de stratégie politique, d'existence, de maîtrise des événements,
01:41parce que ça donne une bête butoir, du coup.
01:44Il est très impopulaire et donc il est possible, vous vous souvenez, Chirac qui disait 2 ans,
01:51alors c'était dans d'autres circonstances, mais là je trouve que le fait de déclencher lui-même le compte à rebours,
01:56c'était assez étrange.
01:57– Vous parlez de faute d'erreur en parlant de la dissolution qui a été déclenchée lourde,
02:00effectivement par Emmanuel Macron.
02:02Quand on regarde votre documentaire, on se rend bien compte que les politiques de premier rang
02:05que vous interviewez sont assez d'accord, même s'ils le disent pour certains plus ou moins ouvertement,
02:10sur le fait que ce n'était pas la chose à faire finalement.
02:13– Non, ce qui est curieux, ce qui ressort de ce film où on a eu tous les grands acteurs de la vie politique,
02:20à l'exception du Président et du Premier Ministre,
02:23il n'y a que Gabriel Attal qui a refusé pour des raisons pas très compréhensibles,
02:27d'ailleurs je pense qu'il a eu tort parce qu'il y avait tous les grands politiques,
02:30tous les grands acteurs politiques actuels.
02:31– On va gérer à l'archi le président du Sénat.
02:33– Voilà, ce qui ressort c'est qu'ils ont été aussi sidérés que les Français
02:37et qu'ils ne s'y attendaient pas davantage.
02:39– Tous partis confondus encore une fois.
02:40– Tous partis confondus qui n'ont toujours pas compris ce qui s'était passé.
02:44– Mais il imaginait quoi le Président ?
02:46– Il imaginait que… alors la séquence elle est compliquée pour lui,
02:51parce que quand vous voyez ça avec le recul, il disait je dissous
02:55parce que le gouvernement sera sans doute censuré à l'automne au moment du vote du budget.
03:01Donc il dissout, il perd et il est quand même censuré.
03:05Donc hier soir sur le plateau de Caroline Rouge,
03:09il a dit chapeau l'artiste, c'est un peu ça franchement.
03:12– Et il pensait un sursaut, c'est-à-dire qu'il s'est dit en dissolvant…
03:14– Non, il espérait gagner, bizarrement,
03:18alors qu'il venait de perdre très largement les élections européennes.
03:22Il imaginait qu'il y aurait deux candidats de gauche
03:26compte tenu des divisions à l'intérieur du nouveau Front populaire,
03:29ce qui est une erreur, pardon de dire ça,
03:32je ne donne aucune leçon et encore moins au Président de la République,
03:35mais c'est une absence de culture politique,
03:37parce que dans toute l'histoire de la Ve République,
03:39dès que la gauche a été confrontée à une élection où elle partait éventuellement divisée,
03:44elle s'est regroupée dans les 24 heures,
03:46et c'est ce qui s'est passé dès le lendemain de la dissolution.
03:50Et donc il pensait jouer sur du velours,
03:54c'est ce qu'il a dit à ses interlocuteurs avant l'annonce de cette décision.
03:59Dans le film, c'est important, vous voyez Gérard Larcher,
04:02c'est la première fois que le Président du Sénat qui,
04:05comme la Présidente de l'Assemblée et le Premier ministre,
04:08aurait dû être consulté au terme de l'article 12 de la Constitution,
04:12le Président du Sénat dit « je n'ai pas été consulté, j'ai été informé »,
04:16et il ajoute avec humour « j'ai peut-être manqué de réflexe,
04:20j'aurais pu dire au Président qu'il n'avait pas respecté la Constitution ».
04:23On va se projeter, parce qu'hier Emmanuel Macron a promis
04:25que dans ses prochains jours il y aurait un nouveau Premier ministre,
04:27on sait qu'il y a des noms qui circulent,
04:28notamment celui de François Bayrou qu'on retrouve dans votre documentaire.
04:31Voilà comment il parlait, il y a quelques semaines encore,
04:34du gouvernement Barnier, on l'écoute et puis on en parle.
04:37Pourquoi est-ce que ce gouvernement ne correspond pas à mes idées ?
04:40J'ai employé l'expression « c'est un trimaran »,
04:44mais là il n'a qu'un seul flotteur, le flotteur de droite,
04:47alors que dans un trimaran il faut la coque, un flotteur à droite
04:50et un flotteur à gauche pour que le bateau soit équilibré.
04:55Patrice Duhamel, donc il se voit capitaine de bateau,
04:57François Bayrou, mais d'un bateau à trois flotteurs.
05:00Oui, alors je ne suis pas spécialiste de la voile,
05:01mais j'ai bien compris qu'il considérait qu'il manquait le flotteur de gauche
05:05dans le gouvernement Barnier, c'est le gros sujet depuis trois jours.
05:09C'est vraiment le gros sujet, il est possible qu'on assiste
05:14historiquement à une coupure par rapport aux dernières années
05:18du nouveau front populaire, si effectivement le groupe socialiste
05:22et le parti socialiste éventuellement acceptaient,
05:26soit de ne pas censurer un gouvernement éventuellement de François Bayrou,
05:31soit de participer, ce qui dans un premier temps est sans doute
05:34assez peu probable, à ce gouvernement.
05:37Mais là on sent bien que, comme le dit Édouard Philippe,
05:41la poutre est en train de bouger.
05:44– Merci, merci infiniment Patrice Duhamel d'avoir accepté notre invitation.
05:47Je rappelle le titre du documentaire que vous avez co-réalisé,
05:50« Dissolution, histoire d'un séisme politique »,
05:52c'est évidemment disponible en replay sur le site.
05:55– C'est un thriller politique. – Totalement, merci beaucoup.
05:58– Et ce n'est pas que de la fiction, on l'a bien compris.

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