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Flavie Flament reçoit Raphaëlle Bacqué et Vanessa Schneider, journalistes, pour répondre à la question : grandes fortunes, comment assurent-elles leur succession ?
Flavie Flament reçoit Raphaëlle Bacqué et Vanessa Schneider, journalistes, pour répondre à la question : grandes fortunes, comment assurent-elles leur succession ?
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00:00Bonjour Raphaël Baquet, bonjour Vanessa Schneider, merci d'être là toutes les deux, vous êtes toutes deux grands reportères au Monde et je l'attendais avec impatience, le voici.
00:07Il vient de paraître donc le tome 2 de Succession Secrets de Famille et c'est aux éditions Albin Michel.
00:14Que l'on parle des familles Dassault, que l'on parle des Barrière, que l'on parle de la famille Ricard, c'est pas une histoire d'empire, il n'y a pas que d'un empire, il n'y a pas finalement que d'une fortune que l'on hérite Raphaël Baquet, vous le dites.
00:27En dehors finalement de ce petit détail que sont les milliards en jeu, il y a beaucoup, beaucoup d'irrationnels, en fait il y a beaucoup de sentiments dans ces histoires.
00:35En fait ces familles elles ressemblent aux nôtres, en pire peut-être, mais lorsqu'il s'agit de transmettre le pouvoir, resurgissent non pas du tout les affaires de fortune, mais les affaires de sentiments, d'enfants préférés, de rivalité entre frères et sœurs.
00:52Et c'est là que les enjeux sont beaucoup plus graves parce que l'irrationnel et les émotions rentrent en compte et surpassent d'ailleurs même parfois l'intérêt de l'entreprise.
01:02Et c'est ça qu'on a voulu raconter.
01:04Et qui est si bien raconté. Et c'est vrai que les histoires précédentes, Vanessa Schneider, influent les familles d'aujourd'hui et il faut s'y prendre le plus tôt possible pour éviter certains drames.
01:15Il y a une histoire qui est un peu le contre-exemple et que toutes les familles qu'on a rencontrées veulent éviter, c'est l'histoire Lagardère.
01:21Jean-Luc Lagardère qui est mort dans la fleur de l'âge, en tout cas il ne s'attendait pas du tout à mourir, il est mort à l'occasion d'une opération bénigne.
01:29Et il n'avait pas formé son fils Arnaud Lagardère, il avait un fils unique qu'il a très peu formé, il n'avait même pas prévu de suite véritablement à lui et ça a été la catastrophe qu'on a vue.
01:43Et c'est vrai que ça a provoqué des réactions en chaîne dans les autres familles qui d'abord se sont dit il faut s'organiser parce qu'on n'est jamais à l'abri d'un décès prématuré.
01:51Et ils ont réalisé à quel point la succession était importante, l'éducation des enfants était importante si on souhaitait que l'entreprise reste au sein des familles.
01:59La question qu'on peut se poser aussi quand on lit votre livre c'est qu'on se dit est-ce qu'il n'est pas plus difficile d'hériter d'un groupe familial que de le fonder soi-même, que d'en être véritablement le fondateur.
02:09Quels sont les écueils que rencontrent ces familles dans ces héritages hors normes ?
02:14En fait ce qui est compliqué c'est que souvent le patriarche a du mal à céder la place.
02:18Pas facile.
02:19On l'a vu, on en a vu beaucoup qui étaient écrasants pour leur progéniture et donc ça c'est compliqué.
02:25Parfois certains enfants sont obligés de tuer le père symboliquement, de le pousser dehors littéralement et ça c'est difficile.
02:33Parfois aussi c'est vrai que les fils, parce que ce sont souvent les fils qui prennent la suite, ne sont pas forcément à la hauteur, n'ont pas forcément envie ou alors ont envie de tout changer.
02:46Et là c'est difficile de faire entendre raison au père.
02:50Parfois les fils ont raison contre leur père mais il faut passer la main au bon moment.
02:57Si vous le faites trop tôt, par exemple comme Paul Ricard, il laisse la place à son fils alors qu'il n'a pas encore 60 ans, c'est mortel.
03:04Car en fait il a envie de continuer à diriger et il ne cesse d'embêter son fils et finalement de le pousser dehors.
03:11Et puis finalement ça se traite sur un autre domaine qui sont les sentiments et les relations père-fils.
03:17Vanessa Schneider, de quoi les héritiers héritent-ils vraiment ?
03:20Ils héritent d'un empire mais ils héritent des responsabilités, ils héritent des emmerdes.
03:24Oui, parce qu'en fait en France on n'est pas comme aux Etats-Unis où on peut déshériter totalement ses enfants.
03:30Donc généralement au sein d'une fratrie, chacun trouve son compte en tout cas en termes d'argent.
03:35Donc il y a ceux qui restent rentiers et puis ceux qui héritent vraiment de la charge, de la gouvernance de l'entreprise.
03:43Donc c'est là où les enjeux sont beaucoup plus importants parce qu'il faut être capable déjà.
03:48Il faut être capable d'être à la hauteur d'un père qui est souvent un père très exigeant,
03:53qui va regarder de très près ce que vous faites.
03:56Et oui, c'est des enjeux colossaux et puis d'accompagner aussi les transformations de l'entreprise ou du groupe.
04:02C'est ça, parce qu'effectivement aujourd'hui ça ne va pas fort chez certaines de ces familles.
04:06Le groupe Auchan, on en parlait, qui appartient à la famille Mullier, licencie plus de demi-salariés.
04:11Le marché du luxe, on le sait, déprime.
04:13LVMH publie pour la première fois depuis quatre ans un chiffre d'affaires en baisse.
04:17Parlons aussi de l'aviation.
04:19Chez Dassault, on décroche avec une baisse de 31% l'an dernier.
04:22Ça fait partie justement de ces transformations de management auxquelles doivent se préparer ces héritiers ?
04:29Oui, certainement.
04:30Le capitalisme familial en France est très important.
04:33Et souvent quand on est salarié, on se dit qu'il vaut mieux dépendre d'une famille que d'un fonds de pension,
04:37dont on ne connaît absolument pas les actionnaires.
04:40Mais en vérité, ils connaissent les mêmes difficultés économiques que les autres.
04:43On le voit.
04:44Et donc ça c'est difficile, parce que les héritiers sont porteurs du nom, de l'histoire familiale.
04:50Ils sont porteurs aussi des valeurs, normalement.
04:53Et donc ils sont obligés de faire un peu attention à leurs salariés.
04:57Mais évidemment, quand ça va mal, ils licencient comme les autres.
05:00En fait, on parle de gros sous, de gros souffles.
05:02On parle de décisions parfois violentes et arbitraires, parfois même contre le père.
05:06Mais il y a où l'amour là-dedans, Vanessa Schneider ?
05:09On l'a malheureusement assez peu rencontré.
05:12Vous n'avez peu entendu le mot ?
05:14Non, on n'a peu entendu le mot.
05:16On a vu beaucoup de rivalités, beaucoup de rivalités fraternelles,
05:19beaucoup de rivalités entre père-fils.
05:21Des rivalités qui vont très loin avec des gens qui ne se parlent plus.
05:24On parlait du groupe Barrière de Luxe, où le fils a éjecté le père.
05:28Il l'a effacé de l'histoire et c'est arrivé dans plusieurs de nos familles.
05:32On a quelques contre-exemples et on était heureux de les rencontrer.
05:36On pense à la famille Rothschild, par exemple, où le père, David de Rothschild,
05:40vraiment a tout fait pour préparer son fils,
05:43qui n'était pas forcément très brillant ni scolairement,
05:47et pas forcément très intéressé non plus.
05:49Mais il a été préparé parce qu'il nous a dit « j'aime mon fils ».
05:53C'est vrai que c'était une phrase un petit peu…
05:56Qui a fait du bien dans l'écriture de ce livre.
05:58Oui, parce qu'on a tous entendu parler des affaires métancourdes,
06:00qui sont des concentrés de haine recuite.
06:04Tout ça, on peut le retrouver dans votre ouvrage,
06:06que je conseille à ceux qui nous regardent.
06:08On le voit, Succession secrète famille, saison 2.
06:11C'est comme une série Netflix.
06:13C'est vous Vanessa Schneider et Raphaël Baké qui le signez.
06:16Merci à vous.
06:17Merci.