Jeudi 7 novembre 2024, SMART TECH reçoit Margarita Zlatkova (Head of Data & Programmatic EMEA, Weborama) , Alain Garnier (Président fondateur, Jamespot) et Julien Pillot (Consultant, Enseignant-chercheur en économie, Inseec - Groupe Omnes Education)
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00:00Bonjour à tous, c'est parti pour le débrief de la tech. Aujourd'hui, vous allez voir
00:12beaucoup d'invités, beaucoup d'actualités. Je vous présente ça tout de suite, juste
00:16après.
00:17C'est parti pour le débrief de Smartech. Aujourd'hui, autour de la table, Margarita
00:24Zlatkova. Bonjour. Bonjour. Directrice Data Programmatique chez Weborama. À côté de
00:28vous, Julien Pillot. Bonjour. Bonjour Nelphine. Consultant, enseignant-chercheur en économie
00:32INSEC. Et Alain Garnier. Bonjour Alain. Bonjour Nelphine. Président fondateur de Jamespot.
00:37Alors, on va confronter nos points de vue sur la victoire de Trump et d'Elon Musk, parce
00:40que nous, on s'intéresse aussi à Elon Musk, en particulier dans Smartech. On va parler
00:44aussi de Chattopiti Search et de ses premiers pas, de l'État aussi qui rachète ASN, donc
00:50dans les câbles sous-marins. Mais on commence avec Algo Victima, un collectif de sept familles
00:55qui attaque TikTok en France. Alors, c'est au départ une information qui a été révélée
00:59par France Info. Pour en savoir plus, nous sommes connectés avec Maître Laure Boutron-Marmion,
01:05avocate au barreau de Paris, engagée depuis longtemps dans la défense des mineurs. Vous
01:10avez décidé, Maître, de fonder Algo Victima, donc une cellule d'accompagnement juridique
01:16et judiciaire des victimes des réseaux sociaux et de leurs familles. De quoi les réseaux
01:20sociaux sont-ils coupables, selon vous ? Vaste question. Raison pour laquelle, effectivement,
01:28j'ai créé Algo Victima il y a quelques mois. Tout est parti d'un constat assez net
01:34que j'ai fait il y a presque deux ans, de ce que les familles régulièrement écrivaient
01:41au cabinet, m'appelaient avec des questions juridiques assez précises, parce que finalement
01:48des emparés par une situation qu'ils n'arrivaient plus à contrôler à la maison, des dégâts
01:54qui commençaient à devenir majeurs sur la santé de leurs enfants, et peu de recours
01:59finalement, et puis un personnel de santé souvent très peu conscientisé sur ces sujets-là.
02:05Donc, si vous voulez, j'ai créé effectivement cette cellule, si je puis dire, d'accompagnement
02:12Algo Victima, au sein de laquelle nous sommes plusieurs familles à réfléchir, aussi à
02:17débattre avec les politiques sur ce qu'il y aurait lieu de faire, et puis également,
02:23l'idée évidemment, c'est d'accompagner aussi judiciairement ces familles-là, et de là
02:28est né aussi le recours qui vient d'être déposé contre TikTok, un recours qui a pour
02:35but de saisir la justice française de ces dommages véritablement très nets sur la
02:42santé des jeunes, dont deux, je le rappelle, se sont suicidés et ne sont plus là, et
02:51cette idée de se dire, eh bien, à un moment, effectivement, les plateformes, et en l'occurrence
02:56la TikTok, ne peut plus, si vous voulez, s'exonérer d'une responsabilité dans ce qui se passe.
03:02Oui, donc, chef d'accusation, c'est la dégradation de la santé mentale et physique des enfants.
03:09Parlez-nous un peu des familles qui portent plainte, quelle est leur histoire ?
03:14Alors, ces familles, elles ont toutes des histoires finalement assez différentes tout
03:20en étant très similaires, c'est-à-dire un jeune, enfin, une adolescente, en l'occurrence,
03:26ce sont toutes des adolescentes, là, pour ce qui concerne le recours contre TikTok,
03:33à cette heure où on se parle, des adolescentes qui très vite vont être confrontées à des
03:39contenus qui ne devraient pas circuler sur la plateforme et qui, si vous voulez, les
03:46enferment dans cette idée que, finalement, ce n'est pas si grave d'avoir des idées noires,
03:51ce n'est pas si grave de les développer, de les exprimer très clairement, ce n'est
03:55pas si grave de les partager avec une sorte de communauté secrète, que se scarifier,
04:00ça peut être très, très bon à la santé, et on en arrive, si vous voulez, à des états
04:06de santé dégradés terribles, pourquoi ? Parce qu'évidemment, du fait de la rythmique de ces
04:12produits digitaux qui, par l'algorithme, abondent de contenus du même type, mais on ne parle pas
04:20d'une vidéo, mais à ce compte-là, d'une viralité de vidéos, et donc d'un ensemble qui est
04:26complètement anxiogène et qui fait que, effectivement, l'adolescent plonge très vite dans
04:31une dépression dont il n'a plus les capacités de se sortir.
04:36Alors, comment est-ce que vous dressez cette liste, finalement, des préjudices vis-à-vis de TikTok ?
04:44J'imagine que c'est une liste très précise.
04:46Alors, ça a été beaucoup, beaucoup de travail en amont, évidemment, vous l'imaginez,
04:50puisqu'on ne toque pas à la porte de la justice française avec simplement des affirmations
04:56péremptoires, donc on a tout à la fois, évidemment, sourcé notre recours de
05:01tous les rapports d'autorité qui ont pu être jalonnés ces derniers mois et années sur le sujet,
05:09et puis également, pour chaque famille, on a évidemment fait ce travail de fourmi de
05:16retrouver les vidéos auxquelles ils ont pu être confrontés, les vidéos publiées qui n'ont jamais
05:20été censurées, pour montrer, si vous voulez, au juge, effectivement, ce à quoi avaient été
05:26confrontés les jeunes, et puis, évidemment, après, on a également démontré l'état de santé
05:33dans lequel étaient chaque jeune, leur histoire, qu'est-ce qui a pu se passer.
05:37On est avec des situations où les jeunes ont fait au moins une tentative de suicide, voire plusieurs.
05:47On a une petite jeune qui a été en état d'anorexie sévère, qui a quand même perdu la moitié de son poids
05:53en l'espace de six semaines. Voilà, c'est très sérieux, ce qui se passe.
05:57Et en fait, ces sept familles sont l'illustration aussi de tant d'autres adolescents, si vous voulez,
06:04qui sont dans cet état balbutiant de mal-être, qu'on porte aussi au recours, si vous voulez,
06:11puisque, du coup, effectivement, cette famille dénonce, elle, ce qui s'est passé, et que les dégâts
06:16sont tels qu'elle ne pouvait pas ne pas porter une action en justice, mais elle parle aussi pour toutes les autres.
06:23Aujourd'hui, le droit français vous permet justement de faire porter la responsabilité
06:27sur une plateforme sociale comme TikTok. Pourquoi est-ce que, d'ailleurs, vous avez porté l'affaire
06:32auprès du tribunal judiciaire de Créteil ? Vous auriez pu aussi décider de vous appuyer, par exemple,
06:38sur le DSA au niveau européen ?
06:41Alors, il faut savoir que le DSA est encore très jeune, et le DSA est une grande avancée, effectivement,
06:47dans ces questions-là, mais, pour ce qui concerne, en tout cas, en plus, l'histoire de mes familles,
06:54ça ne pouvait pas, en tout cas, je ne pouvais pas me contenter du DSA.
06:59Ensuite, nous avons, nous, Français, trop tendance à raisonner avec l'idée de se dire que si on n'a pas
07:09une loi, si vous voulez, pour un cas précis, eh bien, finalement, on ne peut pas y aller.
07:16Globalement, un petit peu le raisonnement qu'on peut avoir. Je crois qu'il faut quand même beaucoup
07:21s'inspirer de nos confrères et consœurs outre-Manche et outre-Atlantique, qui ont une conception
07:27beaucoup plus prétorienne du droit, et donc avec une idée beaucoup plus qui est de se dire que, aussi,
07:32les juges sont là pour, aussi, ils sont la bouche de la loi, et moi, si vous voulez, je ne fais ni plus ni moins
07:40qu'un recours en responsabilité en me rebasant sur les principes essentiels de la responsabilité civile
07:47délictuelle en France, et je pars du principe que, dans la mesure où il s'agit d'une société qui développe
07:53un produit sur notre territoire, qui propose un produit à des utilisateurs, et que, forcée de constater
07:59que ce produit présente des défaillances, puisque l'utilisateur qui l'utilise, donc, en souffre,
08:06eh bien, il en doit réparation, et point. Donc, si vous voulez, oui, évidemment qu'il y a encore beaucoup de chemin
08:13à faire sur les questions à se poser sur la notion d'hébergeur de contenu, éditeur de contenu, etc.,
08:20mais il n'empêche que, lorsque l'on a cette famille qui, très concrètement, ont des doléances et des souffrances
08:27endurées directement par le développement commercial d'une plateforme, eh bien, on peut tout à fait,
08:35par les principes essentiels du droit, aller toquer à la porte du juge.
08:39— Margarita, vous avez une question, peut-être ?
08:41— Oui, effectivement, maître. J'avais une question sur les algorithmes en soi, puisqu'à là, du coup, on parle
08:46des familles et de la responsabilité de TikTok dans ces 7 cas que vous représentez. Je me posais la question
08:52si vous portez au travers de ça aussi le fait de la responsabilité de TikTok, du développement même des algos,
08:58qui, eux, comme on le sait, sont addictifs. Et on a cette affaire aux États-Unis par les 14 procureurs
09:04qui sont en train d'intenter aussi une action. Donc je me demandais si, plus profondément, ça n'attaque pas
09:08aussi ce sous-sujet-là, qui est un produit qui, par défaut, est nocif pour un certain nombre de personnes
09:14en état de vulnérabilité. — C'est exactement l'objet de mon recours. Évidemment que pour démontrer le comportement
09:25néfaste de la société, si vous voulez, j'explique une chose très simple. C'est à partir du moment où ces entreprises-là
09:34développent en conscience un produit qui, par nature, est addictif et que, dans le même temps, elles ne modèrent pas
09:41et elles ne régulent pas les contenus qui y circulent, eh bien on allie, si vous voulez, viralité avec danger.
09:49Et on ne peut pas s'étonner des effets directs et des conséquences majeures sur l'état de santé des utilisateurs,
09:55en l'occurrence de tout utilisateur. Mais simplement, effectivement, les adolescents, de par leur minorité,
10:02sont susceptibles d'une vulnérabilité spécifique qui fait que les effets dévastateurs arrivent très vite.
10:10— Bon. Je sais que vous allez devoir nous quitter, M. Boutron-Mermur. Je voulais vous demander, quand même,
10:14qu'est-ce qu'elles réclament, les familles, dans cette affaire ? — Alors le recours judiciaire, très directement,
10:22elle réclame l'écoute et une oreille attentive de la part du juge français, qu'il analyse nos arguments et puis,
10:30évidemment, qu'il analyse l'ensemble de nos pièces, qu'il écoute la douleur des familles, que TikTok soit reconnu
10:37par une décision judiciaire française responsable des dommages qui ont été endurés par tous.
10:45Et ensuite, l'action a effectivement une vocation indemnitaire. Et donc du coup, TikTok devra être condamnée
10:53à régler des dommages d'intérêt à l'ensemble de ces familles-là. Et après, plus largement, elles sont tout à fait conscientes,
10:59ces familles aussi, que de par le caractère inédit de l'action qui est lancée du moins sur l'échelle européenne,
11:09eh bien, si ce recours-là peut aussi interpeller et permettre à tous parents aussi de réfléchir à cette question-là,
11:18je crois qu'elle appelle aussi de leur vœu parce qu'elles souffrent tellement qu'elles se disent que si au moins
11:24la souffrance de leurs enfants et de ce qui est vécu dans la famille peut servir à d'autres, je crois que ça leur permettra
11:33aussi de se reconstruire. — Merci beaucoup, maître Laure Boutron-Marmillon.
11:37Donc je rappelle que vous êtes la fondatrice du collectif Algos Victima. On suivra cette affaire, bien évidemment, dans Smartech.
11:43Une réaction en plateau, Julien ? — Oui. Non, je crois que pour synthétiser, il y a 3 niveaux de responsabilité, évidemment,
11:50qui vont se poser et qui sont évidemment pas au même niveau les unes des autres. Mais en premier rideau, il y a évidemment
11:55la responsabilité de TikTok et de toutes les autres plateformes de contenus sociaux. Donc évidemment, elles sont soumises
12:03à des réglementations qu'elles ne respectent pas toujours en matière de modération, en matière de contrôle des contenus
12:08et évidemment en matière de détection et prévention de certains comportements addictifs, parce qu'elles en vivent,
12:14d'une certaine façon. Il y a un deuxième rideau, une responsabilité aussi des autorités publiques qui font passer
12:20des réglementations, notamment le DSA, qu'elles doivent être en mesure de pouvoir faire appliquer, si possible,
12:26de façon extrêmement restrictive et dissuasive. Et puis en troisième rideau – et ça fait pas un mois, l'avocat du diable
12:32que de le répéter – mais il y a quand même une question de responsabilité parentale. Quand vous mettez un téléphone
12:37connecté à Internet et avec un accès libre à ces réseaux-là entre la main de vos enfants, en fait, vous leur donnez
12:43une boîte de Pandore. Et s'il n'y a pas un accompagnement parental éducatif, extrêmement minutieux et empli de bienveillance,
12:52on risque d'avoir des dérapages et des dérapages qui conduisent à des drames, en fait.
12:55On a aussi besoin d'avoir de la sensibilisation, de savoir à quoi s'attendre quand on va sur les réseaux sociaux.
13:01Il faut aussi un soutien politique. Une réaction, alors ? – Moi, la réaction avec... Combien de fois, par exemple,
13:07il y a eu des gens sur l'action de la régulation, sont évidemment pro-business, donc pas de régulation, parce que quand même,
13:13ça tuerait le business. Ben ça tue pas le business, ben ça tue des gens. Et ça tue des enfants. Et donc ce qui se passe,
13:17c'est que de toute façon, les pro-régulateurs ou ceux qui ne veulent pas de régulation, quand elles n'arrivent pas hantées,
13:23c'est-à-dire qu'on prévient avant, alors qu'en plus TikTok était au courant de ces problèmes-là, ben ça finit avec des drames humains,
13:29avec des morts, et finalement au tribunal quand même. Donc il y aura de toute façon de la régulation, sauf qu'elle se fera
13:36après avoir fait des... finalement qu'il y ait des drames. Et c'est ça que je trouve vraiment dommage, c'est qu'à un moment donné,
13:41on n'inverse pas les valeurs. Moi, je trouve que la vie des enfants est plus importante que le business.
13:45Il faut juste le rappeler de temps en temps, plutôt que d'avoir justement... Et je trouve cette action tout à fait justifiée,
13:51parce que je rappelle que l'État français piétine sur ces questions-là depuis 10 ans. Donc à un moment donné,
13:59l'Europe également. Et le DSA est mou. — Même aux États-Unis, hein. Aujourd'hui, tout le monde piétine.
14:04— Et même aux États-Unis. Mais parce qu'on est encore une fois très pro-business, je pense qu'il faut revenir à la base aussi
14:08peut-être de nos valeurs si on veut pas aller dans le mur. — Bon. Ben d'ailleurs, on y part, aux États-Unis, avec notre sujet
14:15élection américaine. Voilà, Donald Trump, nouveau président des États-Unis. Et puis il y en a un qui s'en réjouit et qui ne s'en cache pas.
14:23Sur la plateforme XX Twitter, c'est Elon Musk qui dit qu'il a hâte de pouvoir servir l'Amérique. Voilà. Et d'ailleurs,
14:31dans son discours de victoire, Trump a glorifié véritablement le génie d'Elon Musk. Il dit qu'on a une nouvelle star,
14:40une star aînée. C'est Elon. Enfin bon, voilà. Donc que va devenir cet Elon Musk au sein de cette nouvelle administration européenne ?
14:48Comment vous avez perçu, vous, cette double victoire, finalement, qu'on a vécue en direct sur la plateforme X ?
14:55— On parle de régulation. Là, c'est justement l'opposé. C'est-à-dire que c'est le libertarien qui a gagné. C'est-à-dire c'est l'idée
15:02que justement à la fois le business et la toute-puissance des GAFAM arrivent carrément à la Maison-Blanche. Donc en fait,
15:09ce qu'on aurait imaginé... On a souvent dit que les GAFAM... — Alors il est pas encore à la Maison-Blanche, même s'il a posté
15:14une photo de lui avec son évier. Bon. — Il a en tout cas maintenant l'oreille du président. Et il fait partie de ces gens
15:21qui vont pouvoir faire des choses. Moi, je pense que ce qui va se passer, c'est que les intérêts d'Elon Musk et politiques
15:26et également individuels vont être démultipliés. Il a déjà une emprise aujourd'hui dans le spatial, dans l'automobile,
15:35dans l'énergie, puisque Tesla, c'est moitié de chiffre d'affaires, c'est de l'énergie. On oublie un peu de le dire souvent.
15:41C'est pas que des voitures. C'est justement des batteries. Donc la question, c'est quelle autre emprise il va prendre.
15:46Il veut... — Surtout que c'est des secteurs sur lesquels il y a vraiment des grandes questions de régulation et de réglementation.
15:51— Non mais là, je pense qu'on va être dans une période non régulée. Et moi, ce que je vois comme avenir, je dirais qu'il va se précipiter,
15:59vu qu'il veut plus de fonctionnaires, à faire travailler ses robots pour remplacer les fonctionnaires. Donc on voit une espèce
16:05de trajectoire de Musk qui peut transformer une Amérique vraiment dystopique si on lui donne 5. Et pourquoi pas 5 années de plus ?
16:13Pourquoi il serait pas le prochain président, d'ailleurs ? — Légalement, il peut pas. Légalement, il peut pas, parce qu'il est pas né américain.
16:19Donc il y a au moins ce garde-fou, là, le concernant. — Elon Musk, oui. Alors est-ce qu'il sera ou non à la tête d'un ministère
16:26de l'Efficacité gouvernementale ? Alors ça, c'est... On verra. Mais... — En tout cas, il y a un parallèle, effectivement,
16:31assez intéressant à faire entre ce qu'il a fait dès le lendemain de sa prise de pouvoir de Twitter, qui est depuis devenue X,
16:39et ce qu'il pourrait faire avec certaines agences gouvernementales. Lorsqu'il a pris le contrôle de X, il a à peu près licencié,
16:46on estime, 90% des équipes de modération et des équipes techniques, jugées comme étant superflues ou remplaçables par des algorithmes.
16:54Il pourrait qu'il découvre que dans les administrations américaines, notamment les fédérales, il y ait beaucoup de bouti de jobs
17:01qui pourraient être remplacés par des algorithmes ou des robots. Pourquoi pas ? Ce qui poserait vraiment la question de savoir
17:09quelles sont les limites que pourrait lui opposer le nouveau et ancien président réélu Trump pour lui dire
17:16« Écoute, t'as pas totalement carte blanche non plus, en vérité ». Donc qu'il est l'oreille attentive du président Trump ?
17:22— Alors ça serait à la fois des super économies pour l'État, mais en même temps des super bénéfices pour les entreprises d'Elon Musk.
17:29— Surtout si c'est lui qui vend la technologie. C'est évident. Donc là, il y a évidemment des schémas de conflits d'intérêts qui se profilent,
17:37que ce soit à travers ce qu'il peut faire de façon très concrète au niveau des agences gouvernementales, mais aussi par rapport à la gestion
17:43de certains marchés publics, dont bénéficient déjà très largement certaines entreprises, notamment SpaceX ou XAI.
17:50Donc sincèrement, oui, il y a des questions qui vont se poser. Et on peut aussi supposer que les réponses aux questions qu'on se pose aujourd'hui
17:57sont déjà apportées en interne au niveau de la stratégie de campagne du camp Trump. Je pense qu'ils ont déjà pensé à des solutions parallégales
18:05qui permettront en fait à Elon Musk de pouvoir continuer à jouer ce rôle d'un peu de jugé parti, quoi. — D'influence.
18:12— D'influence. — Alors ce qu'il a fait aussi quand il a repris la plateforme X, c'est qu'il a tout de suite réhabilité le compte de Donald Trump.
18:18— Absolument. — Et on a vu comment la plateforme s'est transformée finalement en réseau social d'influence pro-Trump.
18:27— Justement, ce que je trouve moins intéressant, c'est le fait qu'on est sur deux personnages qui ont une inversion complète pour la régulation,
18:33pour les régulateurs, pour la législation en général. Et c'est ce qui s'est passé avec X, en fait. Le fait de faire supprimer les modérateurs,
18:40c'était aussi sous couvert de l'expression libre et la liberté d'expression. C'est de donner aussi libre cours à cette capacité à exprimer
18:50ce qui porte les intérêts, que ce soit de Trump ou d'Elon Musk. Le fait d'avoir recalibré les algos, ce qui est quasiment sûr, pour faire ressortir
18:59ses propres posts... Il y a quand même plus de 200 millions de followers. Pour effectivement faire cacher un petit peu les posts de Kamala Harris
19:08pour qu'ils soient moins visibles, pour que les siens soient portés avec beaucoup plus de viralité, effectivement, ça démontre la puissance
19:15que peut avoir Elon Musk. Il y a une petite enquête du Wall Street Journal qui atteste qu'effectivement, l'algorithme a été modifié pour favoriser
19:23ses contenus. Et 3 000 messages postés aux Trump par Elon Musk. Et effectivement, on a aussi un autre effet de bord, c'est que ce X va devenir aussi
19:36le support de communication future de Donald Trump. On a vu tous les fake news, on a vu tous les deepfakes en plus, qui sont quasiment tous,
19:43pas tous, mais une grande partie attesté, qui vont continuer à abonder cette plateforme-là. Et ça donnera encore plus de puissance, je trouve, à tous les deux
19:52pour gouverner cette Amérique sur la... Oui, couper des coups, remplacer des gens, mais aussi gouverner un peu l'état d'esprit d'un pays entier.
20:02— Ouais. Je voudrais juste relativiser un tout petit peu, parce que déjà, il n'y a vraiment pas grand-chose de nouveau. Je veux dire des connivences
20:08entre le pouvoir politique et le pouvoir médiatique. Il y en a toujours eu. Il y a des manias de médias qui se sont rapprochées de certains partis
20:14ou de certains hommes ou femmes politiques. Ça a toujours existé. Là, on en parle un peu plus, parce qu'il s'agit de X et il s'agit d'Elon Musk.
20:20Mais surtout, il faut peut-être aussi relativiser le pouvoir d'influence que peut avoir une plateforme comme X. Sur X, il y a souvent des débats assez tranchés.
20:27Et pas des gens qui sont à convaincre, en fait. C'est des gens qui sont déjà convaincus dans un camp ou dans l'autre, blanc ou noir, mais rarement dans la nuance.
20:33Donc en vérité, comme tout le monde n'est pas sur X et que les personnes qui sont sur X, qui sont actives sur X, ne sont plus à convaincre, mais sont plutôt
20:40déconvaincues, qui prêchent pour leur paroisse, en vérité, je pense que si on faisait vraiment une étude extrêmement minutieuse sur le plan scientifique,
20:45on se rendrait compte que, finalement, l'influence que peut avoir un réseau social comme X, même s'il est aujourd'hui programmé au niveau des algorithmes
20:54pour favoriser un camp plutôt que l'autre, sur les résultats de l'élection serait une influence assez marginale, à mon sens.
20:59Oui, d'autant que ceux qui ne supportent plus, justement, ce nouvel algorithme s'en vont, finalement, parce qu'il y a d'autres plateformes possibles.
21:07Juste une remarque. Effectivement, je suis tout à fait d'accord avec toi, Julien, jusqu'au moment où la presse, la vraie presse médiatique, reprenne ces contenus-là
21:15et leur donne de l'ampleur. Et c'est ça que je trouve le moins dangereux. La plateforme en elle-même, je suis tout à fait d'accord avec toi. Effectivement, il y a des gens
21:21qui sont partis de X de par l'arrivée de Elon Musk, de tout ce qui s'est passé. Par contre, on a vu beaucoup la presse réelle reprendre les contenus de X
21:28et leur donner une puissance supplémentaire. Et là, tu touches, effectivement, un public beaucoup plus large.
21:33Absolument. Et c'est là aussi que le journaliste doit faire son travail de fact-checker.
21:36Exactement. Tout à fait.
21:38Moi, vraiment, je pense que ce qu'on va voir se profiler, c'est qu'au fond, c'est plutôt l'emprise d'Elon Musk sur le monde et sur sa vision de refaçonner le monde
21:49à partir des industries. Parce qu'en fait, son vrai projet, ce n'est pas juste d'avoir un journal en ligne qui s'appelle X, c'est clairement d'aller sur Mars
21:58et de faire que l'humanité change de catégorie. Il y a quelque chose de mégalomaniaque chez Musk qui dépasse souvent l'entendement.
22:06Sauf que là, il a accès à la première puissance mondiale qui peut se lancer sur des choses comme ça. C'est-à-dire qu'on peut tout à fait imaginer que demain,
22:15la conquête sur Mars, qu'il essayait de faire avec ses petits bras, devienne l'alpha et l'oméga d'une politique américaine.
22:24C'est vraiment ça, moi, que je vois. C'est-à-dire qu'on est en train de donner à un industriel, finalement, sa capacité de mégalomania et son hubris.
22:33Parce qu'en plus, il ne faut pas oublier que Trump est également quelqu'un qui a un hubris incroyable et fait fi de la réalité.
22:40Donc on va plutôt être là-dedans, c'est-à-dire une dystopie potentielle ou une utopie potentielle sans que la réalité vienne l'arrêter.
22:46Alors que d'habitude, en fait, la réalité vient arrêter assez vite les gens qui essaient de construire des utopies ou des dystopies.
22:52C'est comme si on avait un dictateur qui était arrivé et qui a donné les clés du pouvoir quand même de la première puissance mondiale.
22:58— Oui, il y a quand même des contre-pouvoirs. Je vous emmène sur le troisième sujet.
23:01— Les... — OpenAI avec Chadjipiti. C'est pas forcément le meilleur ami d'Elon Musk, puisque c'est clairement un concurrent et qui est aujourd'hui leader sur le marché.
23:12Et donc là, l'actualité sur laquelle je voulais vous faire réagir, c'était Chadjipiti Search. Je vais y arriver.
23:17— Module de recherche web, donc intégré à l'IA générative qu'on connaît. Est-ce qu'il vous sembla que, comme on a pu l'entendre, ça y est,
23:25ça devient vraiment un vrai concurrent de Google ? Ou est-ce que vous envoyez les limites, comme moi, parce qu'en vrai, pour l'instant,
23:30il y a vraiment beaucoup de limites à l'intégration d'un moteur de recherche et de l'IA générative ? Margarita.
23:37— Si tu me permets. — Oui, bien évidemment. — Moi, je pense que ça peut devenir rapidement concurrent de Google Search, très honnêtement.
23:44Il n'y est pas encore. On est d'accord. Il y a plusieurs sujets et plusieurs enjeux qui, pour moi, sont importants. Et le premier, c'est celui de la confiance.
23:51Là où on a OpenAI, il se frotte à un géant comme Google qui a la confiance des utilisateurs, des consommateurs.
23:59Google fait partie de notre vie quotidienne, à tel point qu'on dit « Je vais taper sur Google à 300 %, j'ai ma petite-fille de 8 ans
24:06quand j'ai pas la réponse », et me dit « Va vérifier sur Google ». Donc c'est très rapidement rentré dans les mœurs de tout le monde.
24:11Je pense qu'il y a une question de confiance. Donc ça veut dire pour le chat GPT, beaucoup de travail pour créer des modèles qui sont basés
24:17sur des données fiables tout en ayant des données... — Alors c'est ça qui apporte la petite fonctionnalité Search.
24:23— Exactement. — C'est que justement, il va aller chercher, apporter des liens vers des sources à jour... — À jour. — ...et vérifier.
24:29— Et vers tous les gros éditeurs aussi de contenu, parce qu'il y a le Financial Times, il y a Le Monde chez l'enfance, Access Springer, Associated Press, etc.
24:37Donc ça, c'est une des limites aussi aujourd'hui. Effectivement, le contenu est très fiable et basé sur des éditeurs, mais en même temps,
24:42il est limité, parce qu'en France, on n'a que Le Monde, typiquement. Mais il y a quand même un autre...
24:46— Vous pouvez refuser d'ailleurs de négocier plus largement avec d'autres éditeurs français.
24:51— Et donc effectivement, on a un autre sujet également aussi. Donc il y a le sujet de fiabilité pour moi, qui est, oui, convaincre les consommateurs
24:58que les données sont très bonnes. Et ça, pour Unien, ça veut dire être précis et répandre quasiment à chaque fois dans le bon sens.
25:04Mais pour ça, c'est beaucoup plus complexe derrière, puisque si on remplit Unien uniquement avec des sujets qui sont véridiques en quelque sorte,
25:11on lui donne pas la possibilité d'apprendre ce qui est de mauvaise qualité. Donc en fait, il y a un équilibre à trouver entre de la bonne
25:16et de la mauvaise qualité pour qu'Unien sache faire la différence entre les deux. Et il y a un autre sujet pour moi qui est beaucoup plus important
25:24d'un point de vue économique, qui est aujourd'hui Google donne la possibilité aux éditeurs de générer du trafic. 99% des sites aujourd'hui de contenu
25:33sont monétisés par de la publicité. Donc plus d'utilisateurs, plus de trafic, plus de monétisation et plus de rentabilité. Demain, aujourd'hui,
25:42de ce que moi j'ai vu de chat GPT Search, on arrive directement sur un petit résumé sur... Effectivement, on a la source, mais on a toutes les informations
25:50qui sont nécessaires. On n'a même pas besoin de scroller, pas besoin de cliquer, pas besoin d'aller sur le site de l'éditeur. Ça veut dire moins de trafic.
25:57Donc, moins de revenus. Mais qu'est-ce qui se passe si demain, moins de revenus égale disparition des sites éditeurs ? D'où proviendra le contenu pour le chat GPT ?
26:05Je pense qu'on a ici un paradigme qui doit être résolu dans le futur. Effectivement, je pense qu'il y a des réflexions pour dire c'est les algorithmes d'IA
26:12qui vont financer les sites éditeurs. C'est pour ça qu'on venait à y refuser de signer avec des éditeurs, parce qu'ils ne se sont pas mis d'accord sur la négociation commerciale.
26:19Absolument. Non mais en fait, tu as quasiment déjà tout dit. Peut-être un petit point de complément.
26:24Tant mieux, parce qu'on n'a plus beaucoup de temps.
26:26Tant mieux. Non mais peut-être un point de complément, c'est qu'aujourd'hui, on sait monétiser un moteur de recherche. On ne sait pas encore monétiser une intelligence artificielle générative
26:35qui ferait ensuite de la recherche et qui deviendrait un outil de référence. Donc, on ne sait pas le faire. À un moment donné, il y a quand même de l'argent qui fait un peu la loi sur les marchés.
26:46Et si on n'arrive pas à trouver des business models qui soient rentables, il est peu probable que cette alternative devienne une alternative dominante.
26:55Et puis, les vraies problématiques de Google aujourd'hui, elles sont moins sur la problématique que pourraient poser OpenAI, Search et d'autres IA génératives
27:04qui voudraient faire de la recherche sur Internet, que des problématiques de l'ordre de la régulation, de la mise en conformité de leurs services avec la réglementation.
27:13Des problématiques antitrust aussi qui se posent à elles un petit peu partout dans le monde et notamment des deux côtés de l'Atlantique.
27:19Et puis, la concurrence que lui oppose aujourd'hui les réseaux sociaux et notamment TikTok, notamment auprès des plus jeunes.
27:25Ok. On devait parler aussi de l'État qui rachète ASN quand même parce que je me suis dit qu'Alain Garnier allait apprécier cette déclaration d'Antoine Armand,
27:34notre ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, qui nous dit que cette acquisition, c'est un signal fort qui montre que nous sommes en capacité d'identifier et d'investir
27:42dans des activités stratégiques, en l'occurrence numériques.
27:45Exactement. Et pour 130 millions d'euros, c'est-à-dire trois fois rien, on reprend notre capacité de souveraineté sur les câbles sous-marins,
27:54sachant qu'elle était petit à petit dépossédée et qu'on était en problématique de résilience absolue là-dessus.
27:59Donc ça, c'est bien. Ça percute au niveau politique et on s'aperçoit que ça ne coûte pas si cher, finalement, de se protéger vers la résilience.
28:07Donc moi, je suis très, très content de cette nouvelle. Bravo pour cette action.
28:10Nouvelle doctrine, alors.
28:11Et moi, sur le search, je pense que, contrairement à ce qui a été dit, structurellement, le search by AI est différent et peut transformer et casser la vision qu'on a du search depuis 20 ans.
28:22Oui, on a été habitué à un search, c'est 10 liens et je clique, mais le search by AI est structurellement quelque chose qui nous emmène ailleurs.
28:30Et moi, je pense que ça le remplacera. Par contre, ce n'est pas Google qui le fasse. Ça, c'est autre chose.
28:34Merci Alain Garnier de James Pod, Julien Piyot de l'INSEC et Margarita Zlatkova de Weborama.
28:40Merci à tous de nous suivre. C'était Smartech sur la chaîne de Smart for Change. A très bientôt.