• il y a 2 mois
LE GRAND DÉBAT / Niche parlementaire du Rassemblement National : le jeu du « qui perd gagne »

« Le récap » par Thibault Hénocque

Le Rassemblement national a tenu sa niche parlementaire le jeudi 31 octobre 2024. À l'agenda figuraient des propositions de loi pour réinstaurer des peines planchers, expulser les délinquants étrangers, exonérer d'impôt sur le revenu les médecins et infirmiers en cumul emploi-retraite et supprimer le critère de diagnostic de performance énergétique. Le Rassemblement National tenait avant tout à ce que les députés votent sa proposition de loi d'abrogation de la réforme des retraites. Bien que détricoté en commission des affaires sociales de l'Assemblée, le texte a été maintenu par Marine Le Pen lors de cette séance parlementaire. Afin de redonner de la substance au texte, les députés RN avaient déjà soumis des amendements devant être validés par la Présidente de l'Assemblée en vertu de l'article 40 de la Constitution. Ce-dernier interdit aux députés de créer de nouvelles dépenses non compensées. Yaël Braun-Pivet a déclaré la proposition de loi du RN irrecevable. Les stratégies adoptées par les différents partis lors de cette journée de niche parlementaire sont-elles la preuve que le « cordon sanitaire » qui encerclait le RN a disparu ?

Invités :
- Elsa Mondin-Gava, journaliste LCP
- Frédéric Dabi, directeur général Opinion d'IFOP
- Antoine Marette, journaliste au service politique de France Culture, spécialiste de l'extrême droite

LE GRAND ENTRETIEN / Anne-Charlène Bezzina : plaidoyer pour la Vème République
Dans « Cette Constitution qui nous protège », Anne-Charlène Bezzina revient sur chacun des articles et alinéas de la Constitution dans un souci pédagogique. L'autrice tente de lever les aprioris selon lesquels la Constitution serait hors de portée du grand public. « La Constitution est souvent drapée dans le mépris que les citoyens peuvent avoir pour leur classe dirigeante : déconnectée des réalités, secrète, complexe », explique-t-elle. Il s'agit de proposer une grille de lecture des cent huit articles de la Constitution de la Vème République. Comment un texte d'une telle ampleur, qui protège les institutions et les citoyens, peut-il s'avérer aussi méconnu ?

- Grande invitée : Anne-Charlène Bezzina, maîtresse de conférences en droit public à l'Université de Rouen, enseignante à Sciences Po Paris et autrice de « Cette Constitution qui nous protège » (XO éditions)

LA QUESTION QUI FÂCHE / Faut-il supprimer le Service National Universel ?
- Jean-Baptiste Daoulas, journaliste politique à « Libération »
- Bertrand Périer, avocat

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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Transcription
00:00Générique
00:05Bonsoir et bienvenue dans ça vous regarde notre grand témoin ce soir c'est Anne-Charlene Bézina.
00:11Bonsoir Myriam.
00:12Grand plaisir de vous avoir à mes côtés.
00:14Vous publiez le livre indispensable à tous ceux qui veulent comprendre ce moment inédit de notre histoire politique,
00:20le texte intégral de la Constitution expliqué article par article.
00:25Cette Constitution qui nous protège c'est le titre chez Ixo vous nous direz de qui et de quoi tout à l'heure dans la deuxième partie.
00:32Dans notre grand débat ce soir la stratégie contrariée du RN.
00:37Le parti de Marine Le Pen défendait ses propositions de loi.
00:40Aujourd'hui dans un hémicycle chauffé à blanc rien ne s'est passé comme prévu.
00:44On va tout vous expliquer.
00:45Le RN tire-t-il véritablement profit de sa position d'arbitre à l'Assemblée ?
00:51Grand décryptage dans un instant avec mes invités.
00:53Enfin la question qui fâche ce soir.
00:56Faut-il supprimer le SNU, le service national universel destiné aux jeunes ?
01:01Il s'est vu privé de ses crédits hier soir en commission tire-croisé avec nos chroniqueurs à la fin de cette émission.
01:07Voilà donc pour le programme.
01:09On y va Anne-Charlene ?
01:10On y va.
01:11Ça vous regarde Top Générique.
01:23C'est une journée que le RN a préparée minutieusement et de longue date.
01:27Bien décidé à mettre en porte-à-faux ses adversaires.
01:30Seulement voilà sur l'abrogation de la réforme des retraites le piège tendu à la gauche n'a pas fonctionné.
01:35Alors que s'est-il passé sur le papier ?
01:38Cela ressemble à un échec pour Marine Le Pen mais qu'en est-il en réalité ?
01:42Bonsoir Frédéric Dhabi.
01:43Bonsoir.
01:44Grand plaisir de vous avoir également parmi nous ce soir.
01:46Vous êtes le directeur général opinion de l'IFOP et vous venez de publier il y a quelques semaines
01:50« Parlons-nous la même langue ? » aux éditions de l'Aube.
01:53On aura l'occasion sans doute d'en reparler.
01:55Bonsoir Antoine Marrette.
01:56Bonsoir.
01:57Merci d'être avec nous journaliste au service politique de France Culture
02:00en charge du suivi du Rassemblement National notamment.
02:03Bonsoir Elsa Mondingava.
02:04Bonsoir.
02:05Ma consoeur d'LCP.
02:06Vous avez suivi de près les débats de l'après-midi dans l'hémicycle
02:09et vous présentez l'émission questions au gouvernement tous les mardis et mercredis à 14h en direct sur LCP.
02:14Anne-Charlene Bézina vous intervenez quand vous le souhaitez.
02:18Alors que faut-il retenir de cette bruyante après-midi ?
02:22On voit cela dans le récap de Thibault Hénocq qu'on accueille tout de suite.
02:35Bonsoir mon cher Thibault.
02:36Bonsoir Myriam.
02:37Les députés du RN étaient donc à l'offensif toute la journée, pas que l'après-midi.
02:41Oui, à l'offensif pour leur niche parlementaire, autrement dit ce jour dans l'année
02:45où c'est eux qui choisissent le menu des lois examinées dans l'hémicycle.
02:49Alors ce n'était pas le grand soir, pas tellement dans l'ADN du RN,
02:53mais c'était le grand jour pour preuve de l'aurore.
02:56Le parti était partout, ses élus déployés en nombre pour dérouler le programme du jour
03:02avec en haut de l'affiche cette fameuse abrogation de la réforme des retraites.
03:06Des députés décidés à faire du bruit, et bien c'est ce qui s'est passé dans l'hémicycle
03:11et pas seulement au sens figuré.
03:16Mes chers collègues, s'il vous plaît.
03:18Je vous demanderais de faire un peu moins de bruit.
03:20On est montés jusqu'à 80 décibels, ce qui est le double de la moyenne.
03:2480 décibels, c'est presque le niveau sonore d'une boîte de nuit.
03:27Myriam, seulement ce n'était pas pour des mots d'amour, mais pour des noms d'oiseaux.
03:31Vous n'êtes que des traîtres au peuple qui travaille, qui souffre, qui a le dos cassé.
03:36Vous êtes un voyou, vous êtes un menteur.
03:40Regardez le Pinocchio, regardez le Pinocchio.
03:44Pourquoi tant de bruit et d'invectives ?
03:47D'abord en raison du caractère inflammable du sujet, bien sûr,
03:50mais aussi pour une raison particulière.
03:52Une stratégie assumée du Rassemblement national.
03:55Mettre chacun face à ses responsabilités.
03:58Et là encore, la formule était à prendre au pied de la lettre.
04:01Les Français doivent comprendre et savoir que c'est Jérôme Guedj du PS,
04:07que c'est Sandrine Rousseau des écologistes,
04:09que c'est madame Anaïs Béloissat-Tirifi.
04:13Je vais continuer, messieurs-dames.
04:15Un peu de calme, s'il vous plaît.
04:16Les Français doivent savoir les noms de ceux qui ont empêché cette abrogation.
04:22Les noms des députés ayant voté contre cette abrogation la semaine dernière
04:26en commission déclinée un à un par le rapporteur RN Thomas Ménager.
04:30Une forme de name and shame qui a suscité un vif-et-moi.
04:34Monsieur le rapporteur, c'est une menace.
04:36Celle de jeter à la vindicte populaire le vote et le nom des députés.
04:41Et oui, mais nous le savons, la délation est une grande tradition
04:45de l'extrême droite et du Rassemblement national
04:48que vous continuez dans l'hémicycle.
04:50En effet, c'était électrique. Sur le fond, précisément.
04:52Alors, de quoi parle-t-on ?
04:53C'était un peu lunaire, Myriam.
04:55Le texte examiné aujourd'hui dans l'hémicycle était en fait quasiment vide.
04:59Les deux principaux points de la loi déposés par le RN,
05:02le retour de l'âge légal de 64 à 62 ans
05:05et la baisse de la durée de cotisation, n'ont pas pu être débattus.
05:08Pour comprendre pourquoi, il faut revenir un petit peu en arrière dans l'histoire.
05:11Il y a une semaine, les articles 1 et 2 de la loi qui portaient ces mesures
05:15ont été rejetés en commission.
05:17Le RN a bien essayé ensuite de les réintroduire pour l'examen en séance.
05:22Seulement, la présidente de l'Assemblée nationale, Yael Brown-Pivet,
05:25s'y est opposée, arguant que ces amendements étaient irrecevables.
05:29Je vous passe les détails, mais résultat.
05:31Le texte débattu aujourd'hui dans l'hémicycle était en réalité
05:34une coquille vide réduit à une série de demandes de rapports.
05:37Conclusion, la loi a été rejetée au terme de plus de 5 heures de débat tout de même.
05:42Pour l'abrogation, il faudra repasser, mais ce n'est pas la fin de l'histoire.
05:46À sa pause déjeuner, Marine Le Pen est venue faire une annonce.
05:50Nous, on pense aux Français, et par conséquent,
05:53l'abrogation de la loi d'Emmanuel Macron sur la retraite,
05:58nous la voterons le mois prochain.
06:00Le mois prochain, car le 28 novembre, une autre proposition de loi
06:04d'abrogation de la réforme des retraites sera débattue dans l'hémicycle,
06:07cette fois à l'initiative de la France insoumise.
06:10Match retour dans 4 semaines donc,
06:12ce qui nous laisse le temps de nous acheter des bouchons d'oreille.
06:14Merci, merci beaucoup Thibault pour cet exposé parfaitement clair.
06:20Antoine Marrette, alors à défaut de victoire politique,
06:23le RN s'est offert une sacrée tribune, on vient de le voir.
06:26Pour vous, sur les retraites, sur l'abrogation de la réforme,
06:29qui sort gagnant de cette journée ?
06:31Personne. Le Rassemblement national a décidé de maintenir
06:36cette proposition de loi, sachant qu'elle était vide de toute substance.
06:40Pour faire une tribune, ça s'est plutôt réussi,
06:43mais d'un côté comme de l'autre, on l'a vu du côté de l'LFI
06:46comme du côté du RN, ça a beaucoup crié ce matin
06:50et jusqu'à cet après-midi, puisque ça a occupé
06:52une très grande partie de la journée avant de passer
06:55à la deuxième proposition de loi.
06:57On verra pour la suite, et la suite, c'est bien sûr LFI,
07:02le mois prochain, avec à nouveau cette proposition de loi
07:06pour abroger la réforme des retraites
07:09pour la niche parlementaire LFI.
07:11C'est bien joué d'un point de vue politique,
07:14de dire au fond, puisqu'ils ne sont pas capables
07:16de voter à gauche pour ce à quoi ils croient,
07:20puisqu'ils avaient quasiment la même proposition,
07:22moi, le 28, je voterai la proposition de loi LFI.
07:25C'est fait pour donner une image constructive,
07:28on est dans une opposition constructive,
07:30on est là pour dire, on est pour le bien des Français,
07:34et donc dans cette stratégie dite de la cravate,
07:37le Rassemblement national dit, on est prêt à voter
07:42n'importe quel texte à partir du moment où il va dans le bon sens,
07:47ou plutôt le texte venant de n'importe où
07:50à partir du moment où il va dans le bon sens.
07:52Le groupe de Marine Le Pen a voulu faire un coup,
07:54on l'entend, en dénonçant d'abord un double sabotage,
07:58l'hypocrisie aussi de la gauche dans ce débat.
08:01Il y a aussi une stratégie de communication,
08:04à parler des heures durant, alors qu'on sait bien
08:06qu'on a perdu d'un point de vue politique.
08:08Surtout que ce n'était pas forcément ce qui était prévu
08:10la semaine dernière au groupe Rassemblement national.
08:13On nous disait, on va maintenir le texte,
08:15on va faire une demi-heure de tribune politique,
08:17et ensuite on retirera le texte pour passer à d'autres choses,
08:20puisqu'il y a des textes sur lesquels
08:22le Rassemblement national voulait parler.
08:24Hier, on nous a dit, et je pense que c'est à l'issue
08:27de plusieurs réunions de groupes et de discussions,
08:30qu'on va y passer le temps qu'il faudra.
08:32Déjà parce que le Rassemblement national
08:34ne voulait pas que les journalistes titrent
08:36« L'ERN retire sa proposition »,
08:38puisque ça peut être aussi interprété comme
08:40le fait d'abandonner, de ne pas tenter les choses.
08:42Pas être en retraite.
08:43Exactement.
08:44Et puis l'ERN a vu que dans son électorat,
08:46ça prenait, qu'il y avait peut-être des interrogations
08:48pour savoir, mais c'est vrai, pourquoi la gauche,
08:50finalement, ne va pas voter cette abrogation.
08:52Et donc ils se sont dit, tant pis, quitte à sacrifier.
08:54Thibault le rappelait, ils ont une journée.
08:56Là, ils ont décidé que cinq heures
08:58de leur niche parlementaire, ça allait être consacré
09:00à des demandes de rapports.
09:02Évidemment, ce n'étaient pas des demandes de rapports.
09:04Le fond, c'était juste de rappeler que la gauche
09:06est pour, mais ne vote contre,
09:07de dénoncer le sectarisme des uns et des autres.
09:09Et de citer les noms.
09:10Exactement, de citer les noms.
09:12Il y a toute une campagne sur les réseaux sociaux aussi
09:14qui a été faite pour interpeller les députés,
09:17pour nommer, ça s'est très assumé,
09:19du côté du Rassemblement national.
09:21Effectivement, ils ont fait peser le coup avantage.
09:23Ils se sont dit, il faut y passer du temps.
09:25Il y a une bataille dans l'opinion
09:27pour savoir qui est le meilleur combattant
09:29contre cette fameuse réforme aussi contestée
09:31des retraites, Frédéric Dhabi.
09:33Après une journée comme celle-ci,
09:35est-ce que vous pensez que les électeurs vont se dire,
09:37c'est l'ORN qui défend mieux sur ce point-là
09:39que la gauche, ou pas ?
09:41Encore faut-il que les électeurs aient suivi
09:43ce qui s'est passé. Je suis frappé de voir
09:45le niveau d'intérêt assez faible
09:47des Français pour ces questions parlementaires
09:49depuis quelques semaines.
09:51Les Français ont connu une éclipse du politique.
09:53Entre le 7 juillet au soir
09:55et la nomination de Michel Barnier
09:57et de son gouvernement, ils se sont habitués
09:59et ils étaient très contents de cet apaisement
10:01à une absence du politique
10:03après des tensions extrêmement fortes.
10:05C'est vrai qu'ils n'ont pas été mécontents.
10:07Ça ne leur manquait pas.
10:09Quand je voyais les enquêtes que l'on faisait
10:11sur l'image du président avant la nomination
10:13de Michel Barnier, on lui reprochait moins
10:15de ne pas avoir encore nommé de Premier ministre
10:17et de gouvernement que d'avoir
10:19dix sous qui restent là que toujours.
10:21Maintenant, c'est vrai que la question des retraites,
10:23on n'en sort pas.
10:25Les Français n'ont pas encore, et loin de là,
10:27classé ce dossier.
10:29Toutes les enquêtes, on s'en souvient, on en a parlé ici.
10:31Deux tiers des Français contre cette réforme.
10:33Trois quarts des personnes concernées,
10:35des personnes salariées.
10:37Le souhait d'abrogation est bien sûr majoritaire.
10:39Et c'est vrai que le RN,
10:41vous l'avez très bien dit, est dans cette stratégie
10:43de la distinction. Nous sommes responsables
10:45par rapport à une gauche sectaire.
10:47Nous voulons coller aux préoccupations
10:49des Français.
10:51N'oublions pas que la catégorie générationnelle
10:53qui vote aujourd'hui le plus
10:55pour le Rassemblement national, on l'a vu aux Européennes,
10:57on l'a vu au premier tour du 30 juin
10:59des législatives, c'est les 50-64 ans.
11:01C'est les Français qui sont, pour la plupart,
11:03qui vont être concernés
11:05par cette future réforme des retraites.
11:07Et donc, le RN colle, je trouve,
11:09plutôt bien à son électorat.
11:11Le RN est arrivé premier parti
11:13des salariés aux législatives
11:15et aux Européennes.
11:17Entre qui va être le plus crédible
11:19à gauche, à l'Assemblée,
11:21entre le NFP et le RN,
11:23je ne pense pas qu'il y aura un impact fort
11:25chez les Français.
11:27On ne va pas se cacher les choses,
11:29même si on trouve ça nous tous passionnant,
11:31c'est pour l'instant très peu lisible.
11:33En tout cas, le RN, plus que jamais,
11:35joue l'alternative.
11:37Le bloc central et le bloc du NFP
11:39s'écharpent, souvent de manière assez violente,
11:41même si ça se calme un peu par rapport
11:43à il y a quelques semaines, et veut apparaître
11:45comme le parti responsable.
11:47Anne-Charlene Bézina, on a entendu ce mot
11:49de sabotage.
11:51Ce qu'ont fait la gauche et les macronistes
11:53en commission, c'est la technique
11:55procédure parlementaire.
11:57Est-ce que vous dites technique ?
11:59D'ailleurs, il faut être savant,
12:01il y a eu des précédents, parce qu'il y a eu
12:03une proposition de loi Lyot sur les mêmes sujets,
12:05ou est-ce que vous dites hors-jeu ?
12:07Vous ne jouez pas le jeu
12:09véritablement, et le mot
12:11sabotage est légitime.
12:13Il y a, à mon sens, de la technique
12:15et de l'art
12:17du détournement dans ce qui a été fait,
12:19notamment parce que,
12:21en fait, c'est des deux côtés que ça se joue.
12:23Comment ignorer de la part du RN
12:25que cette proposition de loi
12:27encoure l'article 40 ?
12:29Pour le dire rapidement, l'article 40, c'est ce qui
12:31interdit aux députés d'aggraver un budget.
12:33Si on abroge une réforme des retraites qui nous coûterait
12:35je ne sais pas combien de milliards d'euros
12:37en dépenses publiques et en pertes de recettes,
12:39on peut quand même être très
12:41difficilement étrangers au fait que cette menace
12:43pesait sur la proposition de loi.
12:45Donc, des deux côtés, on est en train d'instrumentaliser
12:47un petit peu le jeu parlementaire
12:49et la Constitution, évidemment, pour
12:51aller maximiser les prérogatives.
12:53Donc, c'est une démarche de crispation,
12:55une démarche de prise d'otage
12:57de l'opinion qui, des deux côtés,
12:59bat son plein. Je ne suis pas sûr
13:01complètement que le Rassemblement national
13:03joue finalement, autant qu'il le croit,
13:05l'opposition honnête et responsable
13:07parce que le fait de choisir ces
13:09cinq heures de débat pour dire que quelque chose
13:11qui n'existe pas, n'existe pas,
13:13mais tout simplement dans l'optique
13:15justement d'attiser, de dénoncer,
13:17finalement, c'est un peu jouer la partition
13:19du bruit et de la fureur qui est cher
13:21au groupe de la fille.
13:23Donc, attention peut-être au double jeu.
13:25Intéressante analyse. En revanche,
13:27est-ce qu'on peut dire qu'il y a
13:29des faits sur les deux autres propositions
13:31dont on suivait
13:33le vote ? Elles concernaient
13:35des questions régaliennes, à la fois
13:37faciliter les expulsions
13:39des étrangers illégaux délinquants
13:41et puis une autre sur les peines planchées.
13:43Où en est-on ? Alors, pour l'instant,
13:45on sait que la deuxième proposition de loi,
13:47celle pour faciliter les expulsions
13:49d'étrangers délinquants, les articles...
13:51Alors, c'est un peu technique, mais vous savez,
13:53il y a un article très important. Il a été supprimé.
13:55Il y a des amendements de suppression
13:57qui ont été adoptés. Donc, le RN a décidé
13:59d'enlever sa proposition de loi parce que, pour le coup,
14:01elle était vidée de sa substance.
14:03Elle n'a pas pu vraiment faire la démonstration
14:05qu'il n'y avait plus de cordon sanitaire,
14:07même si la droite était plutôt intéressée
14:09par sa proposition de loi. Comme on n'est pas arrivé au vote,
14:11il n'y a pas franchement de photo
14:13finish où on peut vraiment voir
14:15qui a franchi le Rubicon ou non.
14:17En revanche, moi, ce qui m'a frappée,
14:19c'est le ministre au banc du gouvernement,
14:21Nicolas Daragon, qui est ministre délégué
14:23de la Sécurité du quotidien,
14:25a dit qu'il partageait complètement le constat
14:27du RN, que le gouvernement avait étudié,
14:29sans a priori, cette proposition de loi,
14:31qu'elle était contre...
14:33Sur les expulsions ?
14:35Voilà, sur les expulsions des délinquants étrangers,
14:37que le gouvernement était contre pour des raisons techniques,
14:39parce que, selon elle, elle n'était pas bien filselée.
14:41Mais, en tout cas, a dit clairement à la tribune,
14:43l'a assumée, l'a répétée plusieurs fois,
14:45que le constat était partagé. Donc, on a senti, quand même,
14:47que le gouvernement considérait
14:49cette proposition de loi du RN
14:51comme une proposition de loi qui pourrait venir
14:53de n'importe quel autre groupe parlementaire.
14:55Alors, Frédéric Dhabi, ça rejoint, d'ailleurs,
14:57votre dernier livre. Ça veut dire que,
14:59sur ces questions-là, les clivages
15:01ne sont pas aussi nets droite-gauche.
15:03Tout à fait. Sur la question de
15:05l'immigration, et on le voit depuis
15:07maintenant quelques années, le clivage gauche-droite
15:09s'est littéralement effondré.
15:11Lorsque l'on avait testé, en septembre 2023,
15:13dans une enquête IFOP,
15:17l'adhésion des Français à l'expulsion
15:19de délinquants étrangers à l'issue
15:21européenne, on était sur trois quarts de oui
15:23et, surtout, une majorité. Alors, bien sûr,
15:25une attentivité plus forte à droite, mais une majorité,
15:27une petite majorité de sympathisants de gauche
15:29qui étaient favorables.
15:31Donc, là, le RN colle,
15:33si je puis dire, au public. Sur le
15:35RN, il faut, à mon avis,
15:37aussi sortir
15:39des schémas passés.
15:41Bien sûr, l'immigration reste une matrice
15:43dans le vote RN, mais le RN est devenu
15:45un parti de masse, où l'immigration n'est pas
15:47toujours la première des préoccupations
15:49aux élections européennes.
15:51La première motivation du vote de l'électorat
15:53Bardella, c'était l'insécurité.
15:55La deuxième, c'était le pouvoir d'achat.
15:57La troisième, c'était l'immigration.
15:59Ça reste, bien sûr, un niveau élevé,
16:01mais on voit aussi que ça s'est relativement,
16:03je dirais, étendu, élargi
16:05de ce point de vue-là.
16:07Antoine Marret, on n'aura pas l'occasion de le vérifier
16:09dans l'hémicycle, puisque cette proposition doit,
16:11sur les expulsions, supprimer...
16:13Ils ont trouvé une
16:15majorité dans l'hémicycle avec
16:17la gauche et les macronistes.
16:19N'empêche que la droite, de Laurent Wauquiez,
16:21avait très clairement dit qu'on votera le texte.
16:23Est-ce qu'on assiste
16:25à une forme d'union des droites ?
16:27Est-ce que c'est nouveau ou pas que la droite républicaine
16:29assume pleinement de voter avec le RN ?
16:31C'est un cordon sanitaire
16:33qui se délite un petit peu.
16:35Autant, le cordon sanitaire a été très efficace
16:37au moment des élections
16:39législatives, avec des retraits
16:41au second tour, qui ont fait perdre
16:43au RN 80
16:45ou 100 députés, peut-être.
16:47Là, dans l'hémicycle,
16:49ça devient une autre affaire. Et sur les questions régaliennes,
16:51effectivement, LR
16:53est capable de dire
16:55qu'on est constructifs également.
16:57Mais qui absorbe qui, dans ces cas-là ?
16:59Pour l'instant, c'est LR qui est absorbé
17:01par le RN. D'ailleurs,
17:03le RN a absorbé une partie de LR
17:05avec Éric Ciotti.
17:07Il ne reste pas grand-chose de LR
17:09pour le moment. Ces deux textes
17:11régaliens, donc la double peine
17:13et les peines planchées, c'était l'espoir
17:15du RN aujourd'hui, très clairement,
17:17d'espérer décrocher
17:19un texte. A priori,
17:21c'est plutôt mal pour l'un,
17:23donc il a été retiré. Pour l'autre,
17:25on va voir, mais c'est plutôt mal parti.
17:27Et dans l'hémicycle, cet après-midi,
17:29les députés LR ont plutôt brillé par leur absence.
17:31Oui, c'est pour ça qu'on ne sait pas très bien
17:33qui a gagné ce soir, parce que
17:35ce qu'on peut dire factuellement, c'est que le RN,
17:37aujourd'hui, dans cette nouvelle donne politique,
17:39n'est pas en capacité
17:41de faire adopter le moindre texte.
17:43Donc le cordon sanitaire
17:45est très solide. Quel texte politique est en capacité,
17:47aujourd'hui, de faire adopter un texte ?
17:49Parfois, le RN, ça l'arrange.
17:51C'est pour ça qu'on a parfois le sentiment que
17:53le RN, dans les deux cas, c'est face,
17:55il gagne, pile, c'est les autres qui perdent.
17:57Puisque, là, ils vont dénoncer sur
17:59les retraites le sectarisme de la gauche.
18:01Sur le texte qu'il proposait,
18:03sur les expulsions de délinquants étrangers,
18:05ils vont dire, le gouvernement est d'accord avec nous,
18:07mais pourquoi il ne reprend pas nos propositions ?
18:09Enfin, ils arrivent, de toute façon, à avoir un argumentaire
18:11pour dire, si les autres sont contre nous,
18:13regardez, c'est même pas parce qu'ils ne sont pas d'accord,
18:15c'est uniquement parce que ça vient de nous.
18:17Donc ils arrivent, quand même, malgré tout,
18:19même si c'est des défaites, aujourd'hui, ils n'ont pas réussi
18:21à décrocher la victoire, d'avoir un premier texte
18:23voté à l'Assemblée. Ils arrivent,
18:25dans leur récit, à raconter que
18:27si on ne les suit pas, c'est pas pour des questions de fond,
18:29c'est pas pour des questions de bon sens, c'est juste parce qu'ils sont le rassemblement.
18:31Et ça, dans la perception, au fond,
18:33tout ce contre le RN, c'est mal perçu par les Français ?
18:35Ça fait longtemps que c'est
18:37mal perçu. Qu'est-ce que les Français
18:39attendent du politique au pouvoir ?
18:41Ils attendent qu'ils transforment le quotidien,
18:43qu'ils changent la vie. Ces oppositions
18:45jugées stériles, à mon avis,
18:47c'est quelque chose qui n'est pas bon.
18:49Une des raisons de la crise du politique,
18:51des élus politiques nationaux qui ont
18:53jamais été autant discrédités,
18:55alors que les élus politiques locaux, qui, eux,
18:57transforment le quotidien, n'ont jamais été autant
18:59valorisés, c'est peut-être une crise
19:01de l'écoute entre
19:03une scène parlementaire
19:05fracturée et qui, souvent,
19:07surjoue le clivage gauche-droite, on vient de le dire
19:09sur les différentes niches parlementaires,
19:11et une opinion publique française,
19:13des Français de plus en plus
19:15pragmatiques et au sein desquels
19:17ce clivage gauche-droite s'est beaucoup
19:19atténué et qui attendent qu'on prenne en charge
19:21leurs attentes communes
19:23sur l'immigration, la sécurité,
19:25l'école, les aides politiques.
19:27Et sur l'économie, est-ce que le dépassement est possible
19:29ou est-ce qu'au contraire, le clivage
19:31gauche-droite demeure, bel et bien,
19:33cette journée dédiée au RN
19:35peut aussi masquer
19:37un certain nombre de divergences, voire même
19:39d'incohérences sur le budget, ISF,
19:41flat tax, pas facile de suivre les positions
19:43du RN dans l'hémicycle quand deux lignes
19:45libérales d'un côté, étatistes de l'autre
19:47cohabitent. Explication Stéphanie Despierres.
19:53Sur l'économie,
19:55la ligne du RN est difficile
19:57à suivre, comme le prouvent les débats
19:59budgétaires. Souvent, sur une
20:01même question, les députés de Marine Le Pen
20:03changent de position en
20:05quelques jours. En commission, ils ont voté pour
20:07augmenter la fiscalité du capital. En séance,
20:09ils votent contre. En commission,
20:11ils ont voté pour un certain
20:13nombre de dispositions pour
20:15pérenniser la taxation des hauts revenus
20:17et des grandes entreprises. Et puis dans l'hémicycle,
20:19finalement, ils votent contre. Sur la hausse
20:21de la flat tax proposée par le Modem
20:23et la gauche, en commission,
20:25les troupes de Marine Le Pen choisissent
20:27l'abstention, ce qui permet
20:29l'adoption de la mesure.
20:31Colère de Jordan Bardella,
20:33qui se fend d'un rappel à l'ordre.
20:45Message reçu.
20:47Quelques jours plus tard, dans l'hémicycle,
20:49ces députés votent contre.
20:51Autre volte-face, l'ISF,
20:53l'impôt sur la fortune.
20:55Lors de la présidentielle 2022,
20:57Marine Le Pen voulait le rétablir.
20:59Mais quand un amendement socialiste
21:01propose son retour dans sa version
21:03d'avant 2017,
21:05le RN vote contre
21:07et la vice-présidente du groupe a du mal
21:09à l'expliquer.
21:11Nous souhaitons taxer
21:13la fortune financière et pas
21:15la fortune immobilière, surtout
21:17quand ça prend en compte
21:19la résidence principale.
21:21Nous n'avons rien trahi,
21:23nous avons été élus sur un programme.
21:25Notre programme ne comportait pas
21:27le rétablissement de l'ISF,
21:29nous n'avons pas voté pour le rétablissement de l'ISF.
21:31Marine Le Pen disait il y a quelques années
21:33que la suppression de l'ISF avait
21:35engendré la crise des gilets jaunes.
21:37Le RN est aujourd'hui
21:39tiraillé entre son électorat
21:41déjà conquis, les classes moyennes
21:43et populaires, et celui qu'il veut
21:45encore conquérir, les chefs d'entreprise
21:47et les plus riches.
21:49Antoine Marrette,
21:51il y a vraiment deux lignes
21:53aujourd'hui au RN,
21:55sur les questions économiques
21:57et budgétaires ?
21:59L'économie n'est pas le point fort du RN.
22:01Le RN, au départ, s'intéresse essentiellement
22:03aux questions de société,
22:05comme l'immigration, le régalien,
22:07éventuellement aux questions sociales,
22:09comme le pouvoir d'achat,
22:11mais l'économie, il y a toujours eu
22:13à l'extrême droite deux tendances,
22:15une tendance libérale conservatrice,
22:17plutôt incarnée par Jordan Bardella,
22:19et puis une tendance ni droite ni gauche
22:21populiste, incarnée par Marine Le Pen.
22:23Il y a toujours eu des tiraillements.
22:25Ils ont été un peu
22:27estompés par Marine Le Pen, mais là...
22:29C'est pas Marine Le Pen la patronne ?
22:31C'est Marine Le Pen qui est patronne,
22:33mais là, en ce moment, elle a quelques problèmes
22:35judiciaires à régler, elle n'est plus à l'Assemblée nationale.
22:37C'est peut-être ce qui explique
22:39les cafouillages qu'on a vus
22:41cette semaine. Il est tenable, ce grand
22:43écart. On assiste
22:45même à des vols de face sur
22:47des articles, en fonction
22:49de la commission et de l'hémicycle.
22:51C'est-à-dire qu'une semaine
22:53avant, c'est une position. Sur l'ISF,
22:55par exemple, ou sur la taxe, une semaine après,
22:57ça change. Oui, et on a bien vu qu'en
22:59un week-end, le sujet, elle démonte.
23:01Jordan Bardella a un peu remis les choses
23:03d'équerre. On voit qu'il essaye de séduire
23:05les grands patrons. On l'a vu pendant
23:07la campagne, quand il rencontre le MEDEF, etc.
23:09Et qu'effectivement, le Rassemblement
23:11national, s'il veut élargir son
23:13socle, c'est justement... Il est obligé
23:15d'adapter son discours.
23:17Alors, peut-être que Jordan Bardella, c'est ce qu'il pense
23:19de toute façon, au fond de lui. Mais évidemment,
23:21ils vont rechercher des catégories
23:23sociales plus aisées, des chefs d'entreprise,
23:25des petits patrons, voire même des grands patrons.
23:27Et donc, pour ça, il faut montrer une image
23:29rassurante. Et surtout,
23:31on l'a vu aussi se démarquer du
23:33Nouveau Front populaire. Quand on voit qu'en commission
23:35des finances, c'est aussi par la
23:37somme des voix du Nouveau Front populaire et
23:39du Rassemblement national qu'un certain nombre
23:41d'impôts augmentés de taxes ont été créés,
23:43là, je crois que le Rassemblement national voulait
23:45vraiment faire la distinction dans l'hémicycle.
23:47D'où le rappel, alors, de Jordan Bardella.
23:49Et on a rééquilibré
23:51dans l'hémicycle avec un discours
23:53beaucoup plus libéral, en tout cas.
23:55Alors, Frédéric Dhabi, qu'est-ce qu'attendent
23:57les électeurs de Marine Le Pen ? Est-ce qu'à trop
23:59élargir aux petits patrons,
24:01aux classes moyennes, elles risquent
24:03de perdre sa base ? Mais, j'ai envie de dire,
24:05ils ont déjà élargi.
24:07Qu'est-ce que l'on voit au premier tour
24:09des législatives aux élections européennes ?
24:11D'un côté, la rectification dont vous parliez
24:13au second tour du 7 juillet.
24:15L'URN, ça peut être bizarre
24:17à entendre, est devenu un parti
24:19de masse. Quand ce parti arrive
24:21en tête chez les retraités pour la première fois,
24:23quand ce parti fait des scores très importants
24:25partout, quand il est passé
24:27du Jean Marisme, c'est-à-dire du vote
24:29fort chez les ouvriers, les catégories
24:31populaires et les catégories pauvres
24:33à cette percée dans
24:35les classes moyennes, cette percée dans les catégories
24:37qui étaient très peu atteignables, il y a
24:39parfois des attentes contradictoires.
24:41Le bloc RN...
24:43Défense des PME et en même temps
24:45étatiste, souverainiste...
24:47On est d'accord, il y a des véritables contradictions.
24:49Le bloc RN reste un bloc
24:51sur les questions de société,
24:53sur les questions
24:55d'euroscepticisme.
24:57L'URN s'est beaucoup vanté des 5 milliards
24:59de contributions votées
25:01en moins à l'Union européenne,
25:03même si ça n'a pas tenu, mais c'est vrai que sur ces questions
25:05économiques, comment contenter,
25:07oui, un électorat cadre
25:09supérieur, petit patron, qui d'ailleurs
25:11dans les enquêtes de popularité, je pense à celle
25:13de l'IFOP fiduciale pour Paris Match
25:15et Sud Radio, où Marine Le Pen
25:17a une cote infiniment moins importante
25:19que celle de Jordane Bardella,
25:21et un électorat plus populaire,
25:23l'électorat passé, qui
25:25attend de l'aide, qui est sur
25:27un rôle de l'État très très important,
25:29c'est vrai que c'est... – Cumulable ces électorats,
25:31compatibles. – Je pense que ça peut être
25:33compatible dans une campagne où les Français,
25:35ces Français, ces électeurs,
25:37attendent une projection, un projet,
25:39l'incarnation, l'incarnation
25:41compte énormément et elle le permet,
25:43je me souviens, je fais un parallèle
25:45audacieux, mais du François Mitterrand
25:47des années 80, de la campagne
25:49de 80, qui aussi dans l'électorat
25:51de gauche, notamment quand il a
25:53rallié l'électorat de marché, quand l'électorat de marché
25:55l'a plutôt rallié, a vraiment,
25:57il faut aller voir le programme commun,
25:59pris en compte
26:01des attentes économiques extrêmement
26:03contradictoires, mais effectivement, c'est un point
26:05de fragilité relative pour le RN,
26:07c'est pour ça qu'on le voit, on l'a vu dans sa niche,
26:09il a mis le paquet sur les
26:11questions de société. – Alors la grande question,
26:13et elle va être pour vous cette fois Anne-Charlene Bézina,
26:15c'est que va faire
26:17le RN sur le budget ? On le sait qu'il est
26:19en position d'arbitre, qu'il a
26:21un pouvoir de vie ou de mort
26:23sur le gouvernement de Michel Barnier,
26:25ce matin, la menace de censure
26:27se fait plus précise, écoutez
26:29Jean-Philippe Tanguy, c'est le confrère de France Info.
26:31– Rien ne nous convient,
26:33ça c'est sûr, aujourd'hui, oui, nous sommes sur un chemin
26:35qui pourrait mener à la censure,
26:37si Jordan Bardella et Marine Le Pen le décident.
26:39– Anne-Charlene Bézina,
26:41est-ce que
26:43le RN
26:45peut censurer
26:47un gouvernement qui provoquerait,
26:49ça veut dire qu'il n'aurait plus de budget, on est bien d'accord ?
26:51Si le budget
26:53est adopté par 49.3 qui a censure,
26:55vous me le confirmez, la France n'a plus de budget.
26:57– Alors,
26:59on a quand même fonctionné pendant quelques mois
27:01avec un gouvernement démissionnaire,
27:03donc on pourrait tout à fait imaginer que
27:05par des mécanismes concisionnels,
27:07on va dire de sauvegarde de l'urgence,
27:09le gouvernement démissionnaire soit amené
27:11à prendre une loi spéciale juste pour au moins percevoir
27:13les impôts au 1er janvier, mais
27:15on s'engagerait dans une discussion au-delà du mois de janvier
27:17pour un budget de simple fonctionnement.
27:19– Il y aurait des conséquences sur la vie économique française.
27:21– Non seulement de l'austérité, mais là pour le coup,
27:23voilà, on paye les fonctionnaires et les services publics
27:25et puis c'est la fin du jeu politique.
27:27– Avec des agences de notation qui risqueraient
27:29de dégrader la note. – On est bien d'accord.
27:31– Et une attaque sur les marchés. – Et puis une menace
27:33pour les plus précaires, donc en fait, j'ai envie de dire
27:35trois choses par rapport au RN. La première,
27:37c'est que cette posture de la réassurance
27:39qu'ils ont voulu jouer à propos
27:41de cette idée de ne pas susciter du chaos
27:43sur le chaos, notamment en n'incitant pas
27:45à la motion de censure
27:47dès que Michel Barnier a été nommé
27:49en disant on va lui laisser faire des résultats,
27:51si elle tombe à la fin du mois de décembre,
27:53dans le pire moment qu'on puisse choisir économiquement
27:55et financièrement pour la France, j'ai le sentiment
27:57que ça trahirait quand même profondément cette promesse
27:59faite à leurs électeurs, donc ça c'est la première chose.
28:01– Vous ne croyez pas à la censure de Noël ?
28:03– Je ne crois pas à la censure de Noël, même si on peut avoir
28:05des surprises dans ces moments-là, nous dirait le père Noël.
28:07Mais la deuxième chose,
28:09c'est que j'ai l'impression que le RN
28:11n'a pas encore fait
28:13le bilan interne qui est nécessaire
28:15pour devenir un parti, vous avez parlé
28:17de mutation vers le parti de masse, mais vers le parti de gouvernement.
28:19Parce qu'au fond, quand on dit
28:21le cordon sanitaire a changé, mais je crois que c'est le RN
28:23qui en fait vient jouer sur les plates-bandes
28:25des LR, peine planchée, proposition
28:27de Nicolas Sarkozy, régalien
28:29RPR depuis
28:3120 ans, donc
28:33au fond ce RN change de nature
28:35en voulant aller chercher dans les partis, on va dire
28:37plus édulcorés que ce qui était
28:39sa base, au risque de la perdre,
28:41et avec mon troisième point, c'est-à-dire
28:43je pense que ce qui peut tuer
28:45la crédibilité du RN dans ce moment de majorité relative
28:47c'est son discours social.
28:49Parce que c'est là-dessus quand même que
28:51dans les différentes élections, le RN
28:53fait une grande montée, c'est-à-dire
28:55une montée vers la France
28:57qui souffre, les gilets jaunes, etc.
28:59Et si finalement on voit que sur
29:01l'économique, etc., ce social n'est pas
29:03suivi par le RN, ça sera encore une fois
29:05une trahison de ses messages.
29:07Les messages qu'il envoie aux Français sont tellement
29:09contradictoires qu'il y a un moment où
29:11l'épreuve de vérité, soit sur la motion de censure, soit sur
29:13le budget, soit sur l'économie, soit sur le social,
29:15elle va forcément arriver.
29:17Donc il y a une prise de risque évidemment aussi pour le
29:19RN. Antoine Marret,
29:21qu'est-ce qu'ils attendent, les électeurs
29:23du RN, sur la censure ? Est-ce que
29:25la base électorale, on entend ça
29:27souvent qu'une majorité des
29:29électeurs du RN attendent
29:31que ce gouvernement tombe, veulent voir leur
29:33chef dans l'opposition, véritablement ?
29:35Les électeurs du RN, ils attendent
29:37de re-voter, donc
29:39ils pourront re-voter à partir du mois de juillet
29:41s'il y a dissolution, et on peut
29:43penser que si une motion de censure
29:45est votée à partir du mois de juillet,
29:47dans ce cas-là, il y aura dissolution et cela
29:49sera possible, donc
29:51en attendant, en attendant,
29:53le RN n'a aucun intérêt
29:55à voter une motion de censure.
29:57C'est dans leur stratégie
29:59de la cravate, encore une fois.
30:01Ce serait apparaître un peu comme les agents
30:03de la crise, du chaos. Exactement.
30:05Ils le disent d'ailleurs
30:07en off, ils disent de toute façon
30:09avant juillet, nous, on n'a aucun intérêt
30:11à voter la motion de censure.
30:13Ils sont constants, il n'y a pas de petits
30:15changements depuis quelques jours.
30:17Ils ont quand même
30:19entretenu une espèce de flou
30:21stratégique en disant, on ne sait pas, on va voir.
30:23Mais là,
30:25on sait que le budget, ils vont voter contre
30:27parce qu'ils sont dans l'opposition, et donc
30:29voter contre, c'est plutôt que de
30:31s'abstenir, c'est une façon de marquer
30:33son opposition. La motion de censure,
30:35c'est un cran au-dessus,
30:37et là, ils ne vont pas franchir ce cap avant juillet.
30:39Ils ne franchiront pas le cap,
30:41Elsa Magava ? Justement, là, je pense
30:43aussi, le fait de reparler de censure tout de suite,
30:45ça masque aussi un peu certaines incohérences économiques.
30:47On sait très bien que du coup, on va retenir
30:49le fait que le RN remette...
30:51Et remettre un coup de pression. Ce qu'on nous dit
30:53au Rassemblement national, c'est que l'électorat, comme on l'a vu,
30:55il est divisé, et en fait
30:57il est divisé aussi sur la question de la censure.
30:59Leur électorat, de base, pousse
31:01pour la censure, parfois, en disant, mais allez-y,
31:03allez-y, dégagez-les tous, si je peux
31:05me permettre, et un autre électorat leur dit
31:07surtout pas de bordel, si je peux me permettre aussi.
31:09C'est deux termes. Mais voilà, donc en fait,
31:11ils sont un peu tiraillés entre ces deux électorats.
31:13Un, à mon avis, ça ne déplairait pas
31:15de, justement, voir
31:17enfin le RN pouvoir censurer
31:19un gouvernement, et une autre partie de leur électorat
31:21qui leur dit surtout pas, nous, ce qu'on veut,
31:23c'est de la stabilité, etc.
31:25Est-ce que vous êtes d'accord, Frédéric Damy ?
31:27Deux électorats ?
31:29On a publié une enquête la semaine dernière avec Sud Radio.
31:31J'ai conscience que la question est un peu
31:33artificielle. Est-ce qu'on soutiendrait
31:35une motion de censure ?
31:3752% des sympathisants aux électeurs RN...
31:3952% quand même.
31:4152%, c'est la plus grande faillite politique
31:43après la France insoumise.
31:45Mais c'est vrai que le RN a bien en tête,
31:47l'électorat RN, qu'un des freins majeurs
31:49à un RN
31:51parti de gouvernement,
31:53c'est la crainte du désordre, la crainte du chaos,
31:55et les Français, pour l'instant, ne souhaitent pas
31:57une nouvelle
31:59élection législative.
32:01Donc le RN est peut-être tiraillé de ce point de vue-là,
32:03mais clairement, l'électorat RN,
32:05même si Michel Barnier a une certaine bienveillance
32:07auprès de cet électorat, reste un électorat
32:09d'opposition. Et que doit faire une opposition
32:11s'opposer pour finalement arriver au pouvoir ?
32:13Merci beaucoup. On s'arrête là.
32:15Merci infiniment pour ce décryptage
32:17très complet. Je vous garde avec moi,
32:19Charlène Bézina, bien sûr, parce qu'on va à présent
32:21parler de votre livre,
32:23cette constitution qui nous protège
32:25chez Ixo. Vous avez fait un travail
32:27colossal, tout l'été, je crois, pour
32:29rendre accessible à tous
32:31notre loi fondamentale, le texte intégral.
32:33Commentez, article par article,
32:35il y en a 108.
32:37108, ça fait un paquet. Regardez ce que ça donne.
32:39C'est dans l'invitation de Maïté Frémont.
32:41Interview toutes les deux juste après.
33:05Pour tenir chaque jour la promesse
33:07et l'ordre de la République pour rebâtir l'unité de la nation.
33:09Pourtant, en 66 ans,
33:11alors que les drapeaux français flottent
33:13devant nos mairies, que la
33:15marseillaise est chantée dans nos écoles,
33:17ce texte fondateur ne réussit
33:19pas vraiment à s'incarner
33:21aux yeux des Français, autrement
33:23que par ça. Sur le fondement
33:25de l'article 49, alinéa 3
33:27de la constitution.
33:29Le très célèbre 49-3
33:31ou plus récemment, l'article 12.
33:33J'ai décidé
33:35de vous redonner le choix de notre avenir
33:37parlementaire, par le vote.
33:39Deux articles,
33:41mais en réalité, la constitution sait
33:43bien plus, dites-vous.
33:45Anne-Charlene Bézina, vous êtes constitutionnaliste,
33:47docteur en droit, enseignante,
33:49et vous sortez ce livre
33:51où vous décortiquez les 108
33:53articles pour nous faire
33:55comprendre cette constitution
33:57qui nous protège.
33:59Bijoux imparfaits, mais qui sait
34:01dépoussiérer, évoluer
34:03avec la société pour l'adoption
34:05780
34:07contre
34:0972.
34:11Il y a sept mois, la constitution
34:13s'enrichit de ce droit de
34:15recourir à l'IVG.
34:17Toujours en évolution, preuve
34:19pour vous que cette constitution ne doit
34:21pas être abandonnée.
34:23Et votre article chouchou, Anne-Charlene
34:25Bézina, vous répondez
34:27sans hésiter, l'article 5.
34:29Le président de la République
34:31est le garant du respect de cette
34:33constitution. Un article,
34:35dites-vous, obscur,
34:37mais bourré de poésie.
34:39Alors, où avez-vous
34:41trouvé de la poésie, Anne-Charlene
34:43Bézina, dans ce texte quand même assez aride
34:45et parfois obscur ?
34:47Celui de l'article 5 me plaît
34:49particulièrement par rapport à cette posture
34:51de l'arbitre que le
34:53président de la République est censé incarner.
34:55Je le trouve poétique parce qu'un arbitre,
34:57c'est à la fois un joueur et quelqu'un
34:59qui sait se mettre de côté
35:01pour faire respecter la règle du jeu.
35:03Donc, il y a quelque chose
35:05de profondément ambigu
35:07dans cette notion d'arbitrage,
35:09et qui à la fois incarne bien le président de la République
35:11de 58, c'est-à-dire celui qui vient
35:13protéger le peuple, mais qui
35:15essaye, tant que faire se peut,
35:17de ne pas être l'homme
35:19qui joue le jeu.
35:21C'est un peu ça qu'on perd.
35:23Ce mot d'ambiguïté, parce que souvent, on se dit
35:25que le diable se cache dans les détails.
35:27Est-ce que le texte laisse
35:29la liberté à l'interprétation ?
35:31Est-ce que la pratique doit corriger
35:33peut-être le flou ? Et c'est passionnant,
35:35article par article, de trouver des réponses à cela.
35:37D'abord, je voudrais
35:39qu'on parte du président
35:41de la République. On en parlait.
35:43D'abord, on dit souvent que cette Constitution,
35:45elle a été faite pour et par
35:47le général de Gaulle. Elle a été écrite
35:49avec Michel Debré, à sa main.
35:51Est-ce que vous êtes d'accord ? Est-ce qu'elle porte
35:53la marque de son inspirateur ?
35:55Oui, nécessairement.
35:57Je pense que c'est une Constitution gaulliste.
35:59Néanmoins, l'idée
36:01qu'elle puisse être trop étroite
36:03pour lui survivre, je crois qu'on a prouvé
36:05aujourd'hui, au vu de sa longévité,
36:07que ce n'était pas une vraie idée
36:09de la Constitution, parce que
36:11le paradoxe gaulliste, encore une fois,
36:13c'est cette idée de pouvoir
36:15permettre plusieurs lectures.
36:17Je pense que la marque gaulliste, c'est ça.
36:19Arriver à avoir une incarnation de l'exécutif,
36:21mais permettre aussi que la Constitution
36:23puisse s'adapter aux circonstances.
36:25Le président de la République est l'institution
36:27la plus originale, exceptionnelle
36:29et peut-être même
36:31inqualifiable, écrivez-vous, de la Constitution
36:33de la Ve République. Pourquoi ?
36:35Pourquoi ? Parce que dans tous les régimes
36:37proches, qu'on soit dans un régime parlementaire
36:39ou dans un régime présidentiel, le président a
36:41des attributions assez claires. On voit
36:43totalement à quoi il sert. Alors que
36:45quand on vote cette Constitution,
36:47le 4 octobre 58, ce président,
36:49c'est une originalité absolue.
36:51On n'a plus l'habitude de l'incarnation
36:53d'un exécutif aussi fort. Et pourtant,
36:55si on est en cohabitation, si on est en période
36:57de majorité aussi relative qu'aujourd'hui,
36:59il change de visage, il change de nature.
37:01Donc l'arbitrage, la manière dont
37:03le président va incarner cette Constitution,
37:05c'est toute sa saveur.
37:07La première tête d'un exécutif
37:09qui en comporte deux, c'est
37:11une originalité totale
37:13par rapport à tous les pays dans le monde.
37:15On va partir sur l'article 20,
37:17si vous le voulez bien, parce que c'est d'actualité.
37:19Dans cette coexistence,
37:21c'est le terme d'Emmanuel Macron,
37:23entre le président et le Premier ministre
37:25Michel Barnier, le partage des tâches est-il
37:27clair ? Oui et non.
37:29Pas autant que ce qu'on
37:31le prétend en période de cohabitation.
37:33Je cite François Mitterrand pour le plaisir
37:35qui dit, en période de cohabitation,
37:37toute la Constitution, rien que la Constitution,
37:39mais en réalité, elle ne permet que le jeu
37:41des hommes. Parce que, par exemple,
37:43pour prendre le chef des armées, dont on a
37:45parlé pendant l'entre-deux-tours,
37:47envoyer des armes, ça vient certes
37:49du président de la République, mais il faut
37:51que ce soit contre-signé par le Premier ministre
37:53et lui-même doit se mettre d'accord avec le ministre des Armées
37:55qui a un État-major. Donc, vous voyez,
37:57tout le monde doit être autour de la table
37:59et c'est ça aussi la richesse de la Constitution,
38:01c'est qu'elle est pleine de contre-pouvoirs.
38:03Donc, c'est la pratique aussi qui détermine
38:05au fond
38:07plus les choses que le texte
38:09lui-même, parce qu'on parle de domaine
38:11partagé ou de domaine réservé.
38:13Quelle est votre religion là-dessus, au vu du texte ?
38:15Moi, j'ai le sentiment que la Constitution
38:17ne prévoit pas de couloir pour l'un comme pour l'autre.
38:19En réalité, le domaine réservé,
38:21c'est cette théorie de Jacques Chabandel Mas
38:23au lendemain de la Constitution pour préserver
38:25au général de Gaulle cet appanage sur les
38:27relations internationales qui, encore une fois,
38:29est historique et tout à fait légitime par rapport
38:31à cette unité de la voie de la France.
38:33Mais il n'y a pas de couloir
38:35et il ne peut pas véritablement y en avoir
38:37dans un régime parlementaire avec un président aussi fort
38:39que celui de la Vème République française.
38:41Tout est affaire de patine,
38:43en quelque sorte, entre les pouvoirs des uns
38:45et les pouvoirs des autres.
38:47Vous l'avez dit, président fort,
38:49aussi fort que la Vème République.
38:51Est-ce que, lorsque
38:53le président préside,
38:55en plus de gouverner,
38:57ou plutôt gouverne en plus de présider,
38:59dans un fait majorité absolue clair,
39:01est-ce que vous diriez
39:03qu'on est dans une situation
39:05complètement démocratique ?
39:07Est-ce que le fait que le président,
39:09on pense à Emmanuel Macron en 2017,
39:11à Nicolas Sarkozy,
39:13le fait qu'il ne soit
39:15responsable que tous les cinq ans
39:17devant les électeurs, c'est suffisant ?
39:19Moi, ça n'est pas cela
39:21qui me choque dans l'hyperprésidentialisation
39:23de la Vème République.
39:25L'idée qu'on revienne aux urnes pour retrouver
39:27de la légitimité et de la connexion,
39:29pour moi, c'est comme ça que fonctionne
39:31la démocratie représentative, quand on a confiance.
39:33Mais pour qu'on ait confiance, encore faut-il
39:35qu'il y ait une certaine pratique du pouvoir.
39:37Un président de la République qui s'immisce dans une CMP,
39:39un président de la République qui veut revenir
39:41sur une décision du Conseil constitutionnel,
39:43comme Nicolas Sarkozy en 2008,
39:45tout ça, c'est quelque chose qui abîme la démocratie,
39:47alors pourtant que ça n'est pas dans le texte
39:49de la Constitution. Je crois que
39:51si on en revenait à l'épure de cet arbitrage,
39:53c'est-à-dire un président fort,
39:55mais qui laisse les autres jouer leur partition,
39:57c'est ce fabuleux orchestre
39:59de la Constitution.
40:01Ca dépend des hommes, pas des textes.
40:03L'article 16, tiens,
40:05qu'il a toujours lieu d'être, à votre avis,
40:07ou plus que jamais, au vu du contexte.
40:09Rappelez-nous.
40:11L'article 16, c'est un peu cette période,
40:13c'est la Grosse Bertha, c'est cette période
40:15de dictature présidentielle où il peut avoir
40:17l'exécutif, le législatif et le judiciaire
40:19à sa main. Moi, j'ai le sentiment qu'il est utile
40:21comme tous les articles exceptionnels et de crise,
40:23c'est-à-dire que si demain, on arrivait
40:25à avoir les deux conditions de l'article 16,
40:27je les rappelle, c'est-à-dire
40:29un blocage sur la continuité de la nation,
40:31l'intégrité du territoire et l'incapacité
40:33pour nos pouvoirs publics à travailler,
40:35évidemment que ce serait utile d'avoir un président
40:37de la République qui peut nous sortir de cette situation.
40:39Donc les pleins pouvoirs, ça peut être encore utile.
40:41N'oublions pas, aussi bien pour la destitution
40:43que pour l'article 16 que peut-être pour l'article 49
40:45que ce sont des articles qui sont censés ne pas nous servir.
40:47On y vient. C'est l'idée.
40:49À partir du moment où on est dans l'ultime,
40:51c'est légitime, mais à partir du moment où c'est bien utilisé.
40:53Alors justement, puisque c'est l'actualité,
40:55le débat budgétaire, on va venir
40:57au 49-3 dans un instant,
40:59mais le 47, il est forcément
41:01majeur, puisqu'on est
41:03en train de discuter des finances
41:05de l'Etat. C'est fondamental que les
41:07députés autorisent,
41:09finalement, le gouvernement ou l'exécutif
41:11à dépenser
41:13les deniers publics ou à exiger
41:15des citoyens leur
41:17argent. Alors, est-ce que c'est normal,
41:19franchement, qu'il soit contraint dans le temps ?
41:21Je crois
41:23que ça l'est, parce qu'il faut revenir
41:25à la philosophie de 58. 58, c'est
41:27l'anti-46, d'accord ? C'est-à-dire qu'on avait
41:29une constitution de la 4e République qui permettait
41:31que les budgets soient adoptés,
41:33on va dire, au desiderata de l'Assemblée nationale,
41:35parfois en deux ans, si bien qu'en fait,
41:37on avait l'habitude de truquer l'horloge
41:39au-dessus du Sénat et de l'Assemblée nationale
41:41pour essayer de faire qu'on ne soit pas vraiment
41:43au 31 décembre. Ces manigances,
41:45ces arrangements électoraux
41:47de députés dans leurs circonscriptions
41:49ont fait beaucoup de mal à la démocratie
41:51et à la transparence. Et en 58,
41:53quand on bloque dans le temps, on se dit au moins
41:55on va bloquer le débat législatif dans sa cohérence.
41:57Encore faut-il
41:59que les amendements venant des parlementaires
42:01aillent directement à leur objet et ne soient pas
42:03de l'obstruction. C'est-à-dire que
42:05si on a une pratique de plus de 1500 amendements
42:07déposés d'emblée, d'ores et déjà,
42:09on sait que le délai de 70 jours va être plus compliqué
42:11à tenir. L'idée, c'est d'aller
42:13directement à son but. Donc moi, je défends ce délai,
42:15je défends cette idée que l'article 47
42:17n'est pas une brutalisation de la démocratie
42:19à charge pour l'Assemblée nationale
42:21de savoir travailler. On verra ça, parce que
42:23c'est une vraie question qui va se poser
42:25dans les semaines à venir. On n'est pas
42:27encore hors délai pour le débat budgétaire.
42:29La mauvaise réputation du 49.3,
42:31vous la comprenez ? Je la comprends,
42:33notamment parce qu'il est devenu
42:35le visage d'une certaine manière de faire
42:37de la politique, notamment qui
42:39vient peut-être de cette idée qu'on n'a pas su
42:41anticiper, ce que c'était qu'une majorité
42:43très relative sous la Vème République.
42:45Michel Rocard avait peut-être eu
42:47un peu plus de facilité à gouverner
42:49avec ces armes-là. Aujourd'hui,
42:51l'article 49.3, c'est l'instrument de la brutalisation,
42:53donc il est impopulaire. Et pourtant,
42:55si on en revient encore une fois à l'origine,
42:57l'idée qu'on puisse avoir un budget
42:59et qu'on n'ait pas de shutdown à l'américaine,
43:01qu'on n'ait pas ce chantage entre le législatif
43:03et l'exécutif au-delà du mois de janvier,
43:05puis de février, puis de mars, c'est quand même
43:07quelque chose qui est sain pour la démocratie,
43:09alors à charge pour nos gouvernants d'essayer de l'utiliser
43:11le moins possible. C'est comme tous les états d'exception,
43:13comme pour le Covid,
43:15etc. À partir du moment où on s'accoutume,
43:17ça devient évidemment une mauvaise habitude.
43:19Et puis vous l'aviez mentionné,
43:21l'article 68, on l'a appris aujourd'hui,
43:23la France insoumise mettra à nouveau
43:25la question de la destitution du chef de l'Etat
43:27dans l'ordre du jour
43:29de sa journée d'initiative,
43:31de sa niche parlementaire, le 28 novembre,
43:33destitué Emmanuel Macron.
43:35Ils font la bonne lecture,
43:37les Insoumis, de cet article ?
43:39On l'a assouplie, en 2007, cet article 68,
43:41parce qu'auparavant, on disait qu'on pouvait
43:43attraire notre président de la République
43:45en haut de cour pour
43:47haute trahison, donc c'est vrai
43:49que le vocabulaire s'est assoupli.
43:51Néanmoins, je crois qu'il ne faut pas perdre à l'esprit
43:53que la haute trahison, c'était
43:55un instrument extrêmement grave.
43:57Destituer le président de la République, ça veut dire
43:59préférer retourner aux urnes,
44:01remettre en cause toute la légitimité
44:03d'une élection acquise, et je pense
44:05qu'un manquement incompatible avec l'exercice
44:07de son mandat, ça veut quand même dire quelque chose.
44:09Lire l'article 8 comme obligeant
44:11à la nomination de Lucie Castex,
44:13même encore aujourd'hui, au mois de novembre,
44:15c'est quand même une curieuse interprétation
44:17de ce qu'on veut pour les Français.
44:19C'est un livre compagnon.
44:21C'est pas du tout un essai,
44:23on va piocher et on a plus que jamais besoin
44:25de ces éclairages article par article.
44:27Ce qui est très intéressant
44:29dans votre livre, c'est que vous nous faites
44:31voyager dans l'histoire, ça commence
44:33avec la Révolution française, mais aussi dans le monde.
44:35Vous nous parlez des autres modèles,
44:37européens, allemands, mais aussi chinois.
44:39C'est la Constitution qui nous protège.
44:41Expliquez-nous ce titre.
44:43Qui nous protège de qui et de quoi avant tout ?
44:45Alors, j'ai le sentiment...
44:47J'ai écrit ce livre, comme vous le disiez,
44:49dans l'été, c'est-à-dire après
44:51la page politique de la dissolution,
44:53parce que j'ai parfois le sentiment
44:55que cette Constitution est non seulement méconnue,
44:57mais vécue parfois, avec ce 49.3,
44:59comme instrumentalisée.
45:01C'est devenu l'objet de ces abus de pouvoir
45:03et de cette maltraitance du peuple.
45:05Moi, je crois que si on en revient au texte,
45:07déjà à l'étude de ce qu'il dit,
45:09je le trouve très poétique,
45:11comme je vous l'ai dit,
45:13je crois que quand on en revient au texte,
45:15on se rend compte que la Constitution est bourrée
45:17de protections, déjà des droits fondamentaux,
45:19de limites pour chacun des pouvoirs.
45:21Et donc, non, il n'y a pas d'abus
45:23grâce à la Constitution.
45:25Au contraire, tous sont normalement présagés
45:27par elle, anticipés par elle.
45:29Elle est très, très souple.
45:31Et puis, à la fois, elle oblige normalement
45:33tout le monde à avoir une vision politique
45:35au-delà de la querelle partisane.
45:37N'oublions pas qu'elle est gaulliste,
45:39et son seul objet, peut-être,
45:41c'est de dépasser la République des partis
45:43et on va essayer de gouverner dans l'intérêt de la France.
45:45Donc, si on en revient à l'épure du texte,
45:47si les citoyens, c'est mon souhait,
45:49se saisissent à nouveau
45:51de ce texte fondateur, peut-être qu'ils
45:53pourraient avoir à l'idée qu'elle-même,
45:55rien que ne serait-ce que de la connaître et de la lire,
45:57c'est un fabuleux contre-pouvoir.
45:59On incite nos téléspectateurs à le faire.
46:01J'espère que vous reviendrez,
46:03parce qu'on a besoin d'éclairage constitutionnel.
46:05Avec plaisir.
46:07En ce moment, cette Constitution qui nous protège,
46:09vous restez avec moi, Anne-Charlène,
46:11parce qu'on va terminer avec nos chroniqueurs,
46:13qu'on accueille tout de suite.
46:15La question qui fâche, mesdames, messieurs.
46:25Et à la barre, ce soir,
46:27de la question qui fâche,
46:29Maître Bertrand Perrier, bonsoir.
46:31Avocat auprès de la Cour de cassation,
46:33passé maître dans l'art oratoire,
46:35allez-vous réussir à tenir tête ce soir,
46:37Jean-Baptiste Daoulap,
46:39journaliste politique à Libération.
46:41Merci d'être avec nous.
46:43Messieurs, voici la question qui fâche.
46:47Deux chambres,
46:49deux majorités,
46:51un même résultat.
46:53L'Assemblée et le Sénat l'ont voté hier soir en commission.
46:55Les 128 millions d'euros alloués au Service national universel
46:57ont été quasi annulés.
46:59C'est une mesure, évidemment,
47:01qui coûte un pognon de dingue,
47:03si je peux me permettre,
47:05pour nous expliquer qu'il faut se serrer la ceinture.
47:07Donc on a vraiment plein d'idées sur ce qu'on peut faire
47:09avec cet argent-là,
47:11plutôt que d'aller mettre au pas la jeunesse.
47:13Le SNU, programme de 12 jours,
47:15créé en 2019 pour former les jeunes
47:17de 15 à 17 ans à devenir
47:19des citoyens attachés aux valeurs de la République.
47:21Au programme, le lever des couleurs,
47:23un rituel républicain
47:25pour promouvoir la cohésion nationale.
47:27Cheval de bataille d'Emmanuel Macron,
47:29le président,
47:31souhaitait d'ailleurs le généraliser
47:33son territoire en 2026.
47:35Le Service national universel fait partie de la réforme,
47:37c'est pourquoi j'aurai l'occasion d'y revenir
47:39dans les prochaines semaines,
47:41mais nous irons vers la généralisation du Service national universel
47:43en seconde.
47:45Depuis, l'exécutif rétropédale à l'heure
47:47où l'État cherche à renflouer ses caisses.
47:49Moi j'ai une partie des crédits du SNU dans mon ministère,
47:51donc je peux en reparler.
47:53Aujourd'hui, je n'ai pas les moyens pour une généralisation
47:55du SNU, c'est clair.
47:57Il ne sera donc pas généralisé.
47:59En 2025, il ne le sera pas.
48:01En 2026, j'imagine même qu'il puisse l'être.
48:03Mais le gouvernement l'assure,
48:05pas question de le supprimer.
48:07Le gouvernement ne souhaite pas supprimer
48:09le Service national universel.
48:11Ce n'est pas la position que nous avons portée,
48:13ce n'est pas la position que nous porterons.
48:15En 2023, 40 000 jeunes ont réalisé
48:17un séjour sur l'année scolaire
48:19sur plus de 60 000 places disponibles.
48:21Alors la question qui fâche, la voici.
48:23Faut-il supprimer
48:25le Service national universel ?
48:27Allez, l'accusation pour commencer.
48:29Jean-Baptiste Eddaoulas.
48:31Quand on est face à un gadget,
48:33entend-on dire budgétaire, oui, il vaut mieux le supprimer.
48:35C'est comme on disait dans le sujet,
48:37le Service national universel,
48:39c'est un sparadrap que se traîne
48:41Emmanuel Macron depuis 2017,
48:43quand il sort cette idée du chapeau
48:45dans un discours sur la défense en mars 2017,
48:47alors que ça ne répond finalement
48:49à aucune demande
48:51des étudiants, des lycéens.
48:53C'est quelque chose qui est plaqué
48:55finalement d'en haut avec une image
48:57assez passiviste. C'est d'ailleurs intéressant
48:59que ça ait été dans un discours sur la défense à l'époque.
49:01C'est quand même l'idée de jouer avec cette nostalgie
49:03d'une France un peu sépia,
49:05la France du service militaire, la France de l'uniforme,
49:07celle du « c'était mieux avant ».
49:09Et donc depuis, il n'essaie qu'à un cas
49:11de mettre ça en place.
49:13Et effectivement, ça coûte très cher.
49:15La Cour des comptes estime qu'au lieu des 2 milliards
49:17annoncés par le ministère de l'Éducation nationale,
49:19ça pourrait coûter en réalité
49:21entre 3,5 et 5 milliards d'euros.
49:23Je pense qu'on peut faire
49:25un autre emploi de cet argent pour l'instant.
49:27Maître Bertrand Péry, il se trouve,
49:29et je ne l'ai pas dit tout à l'heure,
49:31que vous avez participé en tant qu'animateur
49:33à des ateliers du SNU.
49:35Oui. Alors, gadget ou pas ?
49:37Non. Moi, je crois que d'abord,
49:39ceux qui parlent le mieux du SNU,
49:41c'est ceux qui l'ont fait. Et 94%
49:43des jeunes qui ont fait le SNU
49:45ont été satisfaits de cette expérience.
49:4778% disent qu'ils ont rencontré
49:49des jeunes issus d'un autre milieu que le leur.
49:51Et donc, aujourd'hui, ça coûte 160 millions.
49:53Je ne dis pas que c'est bien utilisé,
49:55je ne dis pas que c'est bien géré,
49:57mais je dis qu'il y a une voie
49:59entre la suppression et la généralisation.
50:01Alors, qu'est-ce qu'on y fait ? Pourquoi cette satisfaction ?
50:03Qu'est-ce qu'on apprend ? Qu'est-ce qu'on transmet ?
50:05On y apprend par module pendant 12 jours
50:07dans une maisonnée où il y a une vingtaine de jeunes
50:09les gestes de premier secours,
50:11la laïcité, la place de la France dans le monde.
50:13Moi, j'enseignais la prise de parole en public.
50:15Donc, vous avez des modules comme cela.
50:17On y fait du sport, on y apprend le patrimoine français.
50:19Il n'y a pas de militarisation.
50:21C'est pas...
50:23Oui, alors, effectivement, on a un uniforme.
50:25Mon Dieu, c'est terrible !
50:27On lève le drapeau français. Je crois que c'est notre drapeau.
50:29Et, encore une fois, tant que c'est sur la base
50:31du volontariat, moi, ça ne me gêne pas
50:33que des enfants qui ont
50:3512 au jour et qui souhaitent
50:37s'engager parce que, si vous voulez, on ne peut pas
50:39à chaque fois dire qu'il n'y a pas d'occasion
50:41pour la jeunesse de se rencontrer, qu'il n'y a pas de vivre ensemble.
50:43Et quand il y a une institution
50:45qui, même imparfaitement,
50:47promeut cela, la supprimer.
50:49Est-ce que vous avez constaté
50:51ou pas ? Parce que c'est bien de venir des quatre coins
50:53de la France, mais si on se retrouve
50:55un peu dans son propre milieu social,
50:57souvent défavorisé, est-ce que c'est utile ?
50:59Non, alors, justement, c'est en réalité un peu l'inverse.
51:01C'est en cela que ça pêche aussi un peu
51:03le SNU. C'est que c'est assez
51:05homogène en termes de milieu.
51:07C'est plutôt un milieu favorisé, en réalité,
51:09qui participe au SNU. C'est plutôt des élèves
51:11qui sont en études générales,
51:13très peu en études professionnelles.
51:15Et s'il y avait
51:17effectivement un progrès à faire, ce serait là-dedans,
51:19dans la généralisation. Vous avez, par exemple,
51:21beaucoup d'enfants qui ont déjà des
51:23engagements, qui ont déjà une culture
51:25de...
51:27Donc ça rate un peu sa cible, de ce point de vue-là.
51:29De ce point de vue-là, c'est vrai. Jean-Baptiste, convaincu ou pas ?
51:31Parce que c'est plutôt un joli tableau
51:33qui est planté. Ah non, mais le SNU,
51:35ça repose sur un très bon sentiment.
51:37Après, est-ce qu'on fait de bonnes mesures avec de bons sentiments ?
51:39J'en suis pas convaincu.
51:41Le SNU,
51:43il est censé présenter,
51:45il est censé présenter, il est censé répondre au fait que
51:47les gens ne se croisent plus.
51:49Que vous avez aujourd'hui des gens qui arrivent à 16, à 18 ans,
51:51sans être forcément sortis même de leur département,
51:53puisque le SNU fait sortir les jeunes de leur département également.
51:55Il n'y a plus de services militaires,
51:57les colonies de vacances sont finies.
51:59Ils ne vont pas avoir croisé des gens
52:01d'autres catégories sociales.
52:03Mais on prend le problème à l'envers.
52:05Le problème, c'est qu'on a des gens qui sont dans cette situation
52:07à 18 ans. Qu'est-ce que fait l'école ?
52:09Pourquoi est-ce qu'on ne fait rien pour plus de mixité à l'école ?
52:11Pourquoi est-ce qu'en maternelle, au collège,
52:13les catégories moyennes et supérieures
52:15sont souvent des experts
52:17de l'évitement scolaire pour éviter que leurs enfants
52:19se retrouvent mélangés
52:21avec des enfants de catégories inférieures.
52:23Pour vous, c'est un palliatif,
52:25un sparadrap sur une jambe de bois
52:27qui masque mal les échecs
52:29de l'éducation nationale.
52:31Les problèmes, ça s'attaque à la racine.
52:33Bertrand Perrier.
52:35Je ne dis pas que c'est la panacée.
52:37Je dis que puisque l'école ne le fait pas,
52:39c'est bien qu'il y ait une institution qui le fasse.
52:41On enseigne aussi les valeurs de la laïcité,
52:43les valeurs du vivre ensemble,
52:45les valeurs du service public, tout ça est enseigné.
52:47Il y a effectivement des jeunes gens qui,
52:49à 15-16 ans, ne connaissent pas les gestes de premier secours.
52:51Ce n'est pas inintéressant que,
52:53sur la base du volontariat, il n'y a pas d'embrigadement
52:55en réalité là-dedans. Il y a simplement
52:57l'idée que, moi j'ai fait mon service militaire,
52:59je n'ai pas eu l'impression d'être embrigadé
53:01et d'être devenu un clone parmi les clones.
53:03Simplement, pendant 12 jours,
53:05des jeunes de 15-16-17 ans,
53:07il y a beaucoup de problèmes.
53:09Il y a des problèmes de gestion, il y a des problèmes de coûts,
53:11je ne nie pas tout ça. Il y a même des problèmes de violence
53:13au sein des maisonnées. Tout ça existe, bien sûr.
53:15Je ne fais pas une panacée, mais je dis
53:17que c'est dommage de jeter le bébé
53:19avec l'eau du bain parce que, vraiment,
53:21c'est une bonne idée. Sa mise en œuvre
53:23peut être tout à fait perfectionnée,
53:25mais vraiment l'idée d'un creuset
53:27où, pendant 12 jours, des jeunes se rencontrent
53:29puis ensuite que ça se prolonge
53:31par un engagement associatif
53:33pendant l'année qui suit au service
53:35du bien commun, je pense que c'est quand même une belle idée.
53:37Jean-Baptiste Daouas, ce qui est sûr,
53:39c'est que la généralisation, c'est fini.
53:41C'est ça. On peut dire ça aujourd'hui.
53:43Ce n'est pas officiellement
53:45véritablement dit. L'idée qu'un SNU obligatoire
53:47pour les 15-17 ans soit mis en œuvre,
53:49ça, ça n'a plus trop
53:51de lettres, manifestement. Ce qu'on a vu pour l'instant, c'est que
53:53dans la version uniquement sur la base du volontariat,
53:55ça coûtait environ 150 millions d'euros
53:57par an, dont, d'ailleurs,
53:59les 150 millions qui étaient budgétés n'ont jamais été
54:01entièrement exécutés, c'est-à-dire qu'on n'a jamais
54:03trouvé assez de volontaires pour l'instant à ce stade pour y aller.
54:05L'idée, c'était de le rendre obligatoire.
54:07L'idée, c'était de le rendre obligatoire, effectivement,
54:09et le fait de le rendre obligatoire, ça coûterait
54:11officiellement 2 milliards d'euros. Et comme je le disais tout à l'heure,
54:13entre 3 et demi et 5 milliards
54:15d'euros sont dans la cour des comptes. Clairement, on n'en a plus
54:17les moyens. Donc, ce sera abandonné.
54:19Vous êtes d'accord là-dessus ? Oui, mais plus personne ne parle de cela.
54:21De toute façon, je ne suis pas sûr que c'était en soi
54:23une bonne idée, mais je crois que la suppression
54:25est tout autant une mauvaise idée.
54:27En tout cas, c'était un totem d'Emmanuel Macron.
54:29Ça fait partie vraiment des quelques grandes
54:31mesures. Alors, la roulement de tambour.
54:33C'est un bon usage. Vous êtes l'arbitre
54:35des élégances. Et c'est le mot de la fin
54:37parce que je surveille la pendule.
54:39On va cul par qui ?
54:41Je veux en revenir à la Constitution,
54:43pas parler d'eux, nécessairement,
54:45mais je crois qu'il y a une grande lacune sur laquelle il faut absolument
54:47qu'on travaille tous ensemble, c'est la citoyenneté.
54:49Et revenir, en effet,
54:51dès le plus jeune âge,
54:53dès cet âge
54:55où on est ensemble,
54:57où, justement, on apprend à avoir des idéaux,
54:59revenir sur les valeurs fondamentales
55:01de ce qu'est la France, de ce qu'elle doit être,
55:03de ce qu'est être français, de la République,
55:05c'est quand même pas un luxe.
55:07Que ça soit même uniquement facultatif
55:09ou que ça soit dans un sénacle
55:11ou dans un autre, moi, ce que je crois, c'est qu'il y a vraiment
55:13quelque chose à faire sur cette question.
55:15Donc, SNU
55:17ou SNUbis, il faudra
55:19trouver une initiative, en tout cas, pour qu'on ait
55:21une jeunesse qui comprenne le sens
55:23de ce que c'est d'être citoyen, qui ait envie
55:25d'aller voter. Et voilà, ça se perd.
55:27Et ça, c'est bien dommage.
55:29Du coup, on va terminer par peut-être un souvenir,
55:31une anecdote très concrète,
55:33pour que nos téléspectateurs se décident.
55:35Vous en avez un souvenir ?
55:37En fait, j'ai deux souvenirs. J'ai la Maisonnée
55:39dans le XIIe, donc 20 jeunes
55:41qui ne se connaissent pas et qui sont là dans une Maisonnée.
55:43Et puis, à la fin du séjour,
55:45au bout de 12 jours, il y a eu une restitution dans la Cour des Invalides.
55:47C'était magnifique.
55:49C'est pas magnifique au sens esthétique,
55:51j'ai pas un fantasme pour l'uniforme,
55:53mais il y avait plusieurs centaines
55:55de jeunes dans la Cour des Invalides
55:57qui signifient tellement dans notre histoire
55:59et pour la citoyenneté, que Anne-Charlotte Bézina
56:01rappelle à l'instant.
56:03Et on a lu des lettres de résistants
56:05qu'ils avaient apprises
56:07au cours de ce SNU,
56:09et j'ai trouvé ça très beau.
56:11On s'arrête là. Un petit sourire de conviction.
56:13En tout cas, nous, à LCP, on essaye aussi
56:15d'apporter un peu à la citoyenneté.
56:17On s'arrête là. Merci infiniment, Jean-Baptiste Dehoulas.
56:19Et merci à vous, Bertrand Perrier.
56:21Lisez cette constitution qui nous protège.
56:23N'en ayez surtout pas peur, il faut piocher,
56:25parce que c'est tellement d'actualité.
56:27Merci à vous.
56:29Très belle soirée, soirée américaine.
56:31Les élections, c'est dans moins d'une semaine.
56:33A mardi prochain. Très bon week-end de la société.

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