• le mois dernier
Avec Georges Ayache, Historien spécialiste des États-Unis

On décrypte le monde, tous les samedi matin à 8h16.

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##ON_DECRYPTE_LE_MONDE-2024-10-26##

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00:00...
00:20J-11, chers amis, J-11 avant l'élection présidentielle
00:24américaine qui, de Donald Trump ou de Kamala Harris,
00:28ira ou reviendra à la Maison-Blanche.
00:31C'est ce qu'on verra.
00:32On le vivra, évidemment, en direct sur Sud Radio.
00:35Le compte à rebours est enclenché un petit peu partout.
00:38Que disent les sondages ?
00:39Que vaut la campagne en ce moment ?
00:41On en parle avec notre invité, Georges Aillach.
00:43Bonjour.
00:44Bienvenue sur Sud Radio.
00:45Vous êtes historien spécialiste des Etats-Unis,
00:48auteur de nombreux ouvrages
00:50qui font référence sur les présidents américains,
00:53mais notamment celui-ci.
00:541960, la première élection moderne de l'Amérique.
00:58C'est publié chez Perrin.
00:591960, c'était une élection qui opposait Kennedy à Nixon,
01:04si je ne m'abuse.
01:05Avec un premier débat télévisé.
01:07Le premier de l'histoire, en effet,
01:08qui a beaucoup polarisé les Etats-Unis,
01:11le public américain.
01:12Et dans lequel Nixon était transpirant, mal à l'aise,
01:16contrairement à Kennedy,
01:17ce qui a permis, normalement, à Kennedy de l'emporter dans le cheveu.
01:20L'homme qui était très malade paraissait en excellente santé.
01:22Celui qui était en excellente santé, malheureusement, ce jour-là,
01:24n'était pas tellement en forme.
01:25Et comme quoi, la santé a toujours eu un impact,
01:27ou souvent eu un impact, sur les élections américaines.
01:30C'est le cas en ce moment, mais avant ça,
01:32j'aimerais qu'on vienne sur le climat actuel de la campagne.
01:35Échange de noms d'oiseaux, c'est le cas de le dire.
01:38Franchement, entre les deux candidats,
01:39tant Donald Trump que Kamala Harris,
01:42Donald Trump est-il un fasciste, a-t-on demandé à Kamala Harris ?
01:46Elle a répondu oui sans hésiter.
01:48À l'inverse, Donald Trump,
01:49au sujet de son adversaire Kamala Harris,
01:51je cite, c'est une personne stupide, un peu tarée.
01:54Je traduis à peu près avec un QI inférieur à la moyenne.
01:57D'abord, est-ce qu'on a déjà vu ça ?
01:59Non, incontestablement, jamais.
02:02Les débats pouvaient être rudes, âpres, sans concession,
02:06mais ça ne dérapait jamais sur de la trivialité
02:08ou sur des attaques à dominem, c'est clair.
02:11En tout cas, pas venant des candidats
02:13se visant les uns les autres.
02:15Comment ça s'explique ? Qu'est-ce qui a changé ?
02:17Les sociétés ont changé, pas seulement les sociétés américaines,
02:20les sociétés françaises aussi.
02:21Quand on voit nos débats à l'Assemblée,
02:23ça ne donne pas une image très valorisante.
02:25C'est un phénomène un peu général,
02:27mais aux États-Unis, ça s'est beaucoup plus amplifié.
02:29D'une part, en raison de la personnalité de Trump,
02:32qui est non seulement clivante,
02:34mais il donne facilement dans la vulgarité.
02:37Donc, forcément, il y a des réactions en retour d'un côté.
02:40Et puis, la société américaine est fracturée,
02:42elle est devenue triviale,
02:43elle est devenue vraiment un lieu d'opposition impitoyable.
02:48On l'a bien vu avec le Capitol en 2021,
02:51ça peut arriver jusqu'à des extrémités de ce genre.
02:54L'invasion du Capitol par des partisans de Donald Trump,
02:57à moitié à son appel,
02:58des partisans qui contestaient l'élection,
03:01la victoire de Joe Biden contre Donald Trump.
03:03Ça avait été dénoncé par une partie du parti républicain,
03:06le vice-président à l'époque, d'ailleurs, Mike Pence,
03:08qui était sur place.
03:09Quoi qu'il en soit, revenons aussi à ce qui s'est passé.
03:12Vous parliez de la violence verbale,
03:13elle n'est pas que verbale, elle est aussi physique.
03:15Quelles que soient les outrances verbales
03:17et les insultes proférées par Donald Trump,
03:18c'est lui qui a été visé par une tentative d'assassinat.
03:20C'est lui qui a été visé,
03:22et d'ailleurs, ça s'est passé à la trappe un peu
03:24par la propagande démocrate.
03:26Ils ont à peine effleuré le sujet pour finir par dire
03:29que finalement, il l'a cherché, il l'a bien cherché,
03:31et puis après, blackout total, on n'en parle plus.
03:33Et comment on explique cette violence ?
03:35Pourquoi Donald Trump cristallise une telle violence,
03:38une telle haine ?
03:39Parce qu'il est clivant,
03:40il dit les choses de manière très, très brutale,
03:42il ne les enrobe pas du tout.
03:44Nixon parlait du même phénomène, en fin de compte,
03:48la majorité silencieuse qui est ignorée.
03:50Mais il avait les habitudes de la politique à l'ancienne,
03:53la courtoisie, la manière d'exposer les choses calmement
03:56et avec rigueur.
03:58Là, ce n'est plus le cas.
03:59Là, maintenant, ce sont des invectives,
04:00ce sont des coups de Twitter.
04:02Voilà, c'est devenu très, très, très lapidaire.
04:05– Et justement, dans un contexte pareil,
04:07qui a la faveur des sondages à ce stade ?
04:10On a l'impression qu'on a des sondages contradictoires.
04:13– Oui, ils seront contradictoires jusqu'au bout
04:15et ils seront tellement serrés qu'on reste à la marge d'erreur.
04:17Donc, on ne peut pas en déduire une leçon très, très, très précise à ce stade.
04:22En tout cas, 11 jours avant, quand vous le disiez,
04:24c'est impossible de savoir qui est le vainqueur.
04:26– Une chance sur deux, quel que soit le vainqueur.
04:28Est-ce qu'il sera respecté ou est-ce qu'elle sera respectée
04:31par son adversaire ?
04:32– Ah non, elle sera contestée.
04:33Elle sera contestée parce que la campagne électorale
04:35est tellement dure, âpre et violente qu'il est impossible
04:39qu'il n'y ait pas de contestation à la sortie.
04:41– Donc, ça signifie que ce à quoi on a assisté la dernière fois
04:43entre Joe Biden et Donald Trump,
04:45Donald Trump demandant à recompter, appelant parfois certains Etats
04:49à le faire, on va le revoir.
04:51– On risque de revoir ce même phénomène.
04:54On a une comparaison avec 1960.
04:56Nixon avait eu la nette impression de s'être fait voler.
04:59Ce n'était pas qu'une impression du reste.
05:01– Il s'était fait voler.
05:02– Il s'est fait voler, mais il n'a jamais contesté pour deux raisons.
05:05D'abord, des raisons d'Etat.
05:06Il était suffisamment conscient des enjeux pour ne pas en rajouter
05:11dans le clivage de l'Amérique.
05:12Puis ensuite, pour ne pas hypothéquer ses chances 8 ans plus tard.
05:14– Vous êtes en train de dire que Nixon s'était fait voler.
05:16Alors, c'est un fait reconnu.
05:18L'élection par Kennedy, comment ?
05:20– Sur deux Etats.
05:21– C'est-à-dire ?
05:22– Sur deux Etats qui étaient l'Illinois avec Chicago et le Texas.
05:25– En 1960.
05:26Et comment ça s'était passé ?
05:28Comment un vol d'une élection présidentielle américaine,
05:30une des plus célèbres de l'histoire, a pu se produire ?
05:32Ce sont des voix qui ont été achetées, des urnes qui ont été bourrées.
05:35– Absolument, absolument.
05:36Notamment sur le Texas, ils ont fait voter tous les immigrés mexicains
05:40qui n'étaient pas enregistrés,
05:41avec des certificats de vote de complaisance.
05:43– Qui avaient voté Kennedy.
05:44– Achetés et votés Kennedy.
05:45– Je dis ça parce que je n'ai pas en mémoire, ça a pu arriver,
05:49mais je n'ai pas en mémoire une affaire similaire
05:51sur une élection présidentielle en France.
05:53Si c'est arrivé aux États-Unis, et c'est là que je veux en venir,
05:57est-ce que ça peut encore se produire, ce genre de choses ?
05:59– Ça peut se produire pour des raisons très simples.
06:01Un grand historien américain, Walter Russell Mead,
06:03avait dit que la fraude est consubstantielle aux élections américaines.
06:07Ce qui est vrai, d'une mesure où on a une élection en deux temps,
06:10au niveau des Etats d'abord,
06:11et puis ensuite le vote des grands électeurs à Washington,
06:13tout peut se passer.
06:15Chaque État a ses propres règles électorales.
06:17– Mais la question est un peu dérangeante,
06:18parce que dans ce cas-là, ça veut dire aussi que Donald Trump,
06:21pourquoi pas, n'avait pas forcément tort de soupçonner des fraudes,
06:25à supposer qu'elles aient eu lieu.
06:26Alors, je précise qu'elles ont été démenties.
06:29Mais en revanche, ça veut dire que ce sont des choses qui arrivent.
06:30– Les fraudes ont toujours existé, même au niveau des sénatoriales.
06:34Johnson avait volé l'élection de sénateur en 1948 au Texas.
06:38Donc, il savait très bien comment procéder au niveau d'une présidentielle.
06:42– Donc là, vous êtes en train de m'expliquer que l'élection
06:44a rarement été aussi serrée dans les sondages,
06:45et qu'on est à 11 jours, qu'on ne peut pas savoir qui va gagner,
06:48et qu'en plus, il y a toutes les chances que des fraudes arrivent encore ?
06:50– Mais elles arrivent de tous les côtés.
06:51Cela dit, ça peut s'équilibrer, en fin de compte,
06:54entre démocrate et républicain, il ne faut pas être…
06:56Ce qui s'est passé en 1960, c'est l'ampleur de la fraude qui était inusitée.
07:00Là, c'est clair que c'était à part.
07:02Mais la fraude classique, si on peut dire,
07:04au niveau des États de petits tripatouillages,
07:06sans incidence véritable sur les résultats globaux.
07:09– Alors parlons maintenant de la politique étrangère des Américains,
07:11et notamment du rapport des États-Unis à l'Europe,
07:15ça nous intéresse en premier chef.
07:17Quel président ou présidente, la France en général,
07:21a le plus intérêt à voir arriver à la Maison-Blanche ?
07:23Trump ou Kamala Harris ?
07:25– Kamala Harris, parce qu'elle préservera les apparences,
07:27au moins, d'une relation avec l'Europe.
07:29Mais le mouvement de fond de la mairie, c'est celui des Âgés de l'Europe.
07:33– Que ce soit du côté démocrate ou du côté républicain,
07:36il n'y a pas beaucoup de différence.
07:38– L'enjeu, c'est l'Asie. L'enjeu, c'est la Chine.
07:39Donc l'Europe devient résiduelle dans ce contexte-là.
07:42– Parlons de ce qui intéresse aussi l'Europe, la guerre en Ukraine.
07:45Quel rapport avec la Russie de Vladimir Poutine aura l'Amérique
07:49si elle est à nouveau présidée par Donald Trump ?
07:51– Ah ben, il y aura un rapprochement probable avec la Russie.
07:55À mesure où la guerre d'Ukraine se terminera,
07:59en réfection des crédits américains,
08:01donc la guerre trouvera une issue.
08:03– Et ça, c'est certain ?
08:04– Il y a de fortes chances.
08:05Rien n'est jamais certain, mais il y a de fortes chances.
08:07Et donc, l'intérêt de Trump,
08:12c'est de jouer la carte russe par rapport à la Chine.
08:15– Dernière question, et elle est très importante.
08:16En ce moment même, on annonce des frappes israéliennes sur l'Iran.
08:21En ce moment, notamment du côté de la capitale de Téhéran.
08:25La Maison-Blanche a annoncé que les Américains
08:27avaient été prévenus par Israël de ces frappes,
08:30que ces frappes étaient légitimes.
08:31C'était de l'autodéfense suite aux attaques iraniennes.
08:33Mais qu'en revanche, les Américains n'étaient pas mêlés à ces frappes.
08:37Quel impact la guerre au Proche-Orient
08:39peut avoir sur la campagne américaine ?
08:42– Ça dépend si ces frappes prennent une certaine ampleur
08:45et si ça s'anonyme directement avec Téhéran.
08:48Là, ça peut gêner dans les derniers jours.
08:50– Gêner qui ?
08:52– Ça peut gêner le pouvoir en place, de toute façon,
08:55qui n'aura pas su peut-être maîtriser Benjamin Netanyahou, etc.
09:00– Et que pense l'opinion publique américaine
09:02à ce stade du conflit au Proche-Orient ?
09:04Est-ce que l'opinion publique est rangée derrière Israël
09:07et Benjamin Netanyahou ou pas ?
09:09– Non, mais pas l'inverse non plus.
09:12Mais cela dit, une politique étrangère
09:15n'a jamais trop d'impact sur l'élection américaine.
09:17– Jamais trop ? – Jamais trop.
09:18– Pourtant, ça avait été le cas précisément en Iran,
09:21lorsque les otages de l'ambassade américaine à Téhéran
09:25avaient été gardés par le régime des Mosquins.
09:27– Il fallait qu'il y ait des otages américains.
09:29S'il n'y avait pas eu d'otages, les Américains s'en seraient un peu…
09:32– Il n'y aurait pas eu d'impact.
09:33Donc là, vous êtes en train de me dire que concrètement,
09:35la situation internationale n'aura pas vraiment d'impact.
09:38– Non, elle n'a rarement d'impact sur la politique étrangère.
09:41– Alors dernière question, la plus importante,
09:43sur quoi va se jouer l'élection ?
09:46– Sur les dernières impressions, peut-être une gaffe d'un candidat.
09:51Ça peut arriver, le climat de tension est tel,
09:55les enjeux sont tels que tout peut arriver.
09:58Avec deux candidats qui ne sont pas d'une fiabilité,
10:02d'une solidité nerveuse incontestable.
10:05– Ni l'un, ni l'autre.
10:06– Ni l'un, ni l'autre.
10:07– Qui ne sont pas les meilleurs candidats de l'histoire.
10:08– Ah ben, Harris n'était pas la meilleure candidate démocrate,
10:11c'est pour cause.
10:11– La preuve, Harris-Ingo, elle aurait été désignée dès le début.
10:14Ça signifie, si je vous suis, que quoi qu'il arrive,
10:17on n'aura pas le ou la meilleure président ou présidente
10:19de l'histoire des États-Unis au sortir de cette élection.
10:22– Certes, mais pour rechercher le meilleur,
10:24il faut vraiment fouiller de manière très précise.
10:27– Au moins, on terminera sur cette note un peu cynique.
10:30Merci à vous pour cet éclairage sur Sud Radio.
10:34Merci d'être venu nous raconter cette histoire
10:36des élections américaines.
10:37Georges Hayash, je rappelle que vous êtes historien,
10:39spécialiste des États-Unis et auteur notamment de ce livre
10:421960, la première élection moderne de l'Amérique.
10:46C'est publié chez Perrin.
10:48Ça parlait du duel légendaire entre Kennedy et Nixon.

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