Nos systèmes de retraites sont-ils en faillite ? La population vieillit, suscitant des dépenses croissantes. Dans le même temps, les recettes diminuent avec moins de nouveaux arrivants sur le marché du travail, un chômage durablement présent et des parcours de plus en plus précaires.
Dans l’ensemble, tous pays confondus, devons-nous nous attendre à toucher, très tard, des retraites minimales ?
Dans l’ensemble, tous pays confondus, devons-nous nous attendre à toucher, très tard, des retraites minimales ?
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00:00:00...
00:00:18FMI 3%, BCE libre, OCDE, SWAP, TVA, G20.
00:00:22Ce n'est pas l'économie qui est compliquée, c'est son alphabet.
00:00:26...
00:00:33Partout, à toutes les époques, les hommes ont inventé des codes
00:00:36qui masquent leurs grands dessins et petits secrets.
00:00:40Des chiffrages, un éclairage salutaire sur cette arithmétique et sa syntaxe obscure
00:00:45qui n'aide pas le plus grand nombre à comprendre les enjeux de l'économie d'aujourd'hui.
00:00:49...
00:00:54Depuis plus de 20 ans, nous nous inquiétons pour nos retraites.
00:00:57Si jusqu'ici tout va bien, ou à peu près, nous en sommes convaincus.
00:01:01Bientôt, ça n'ira plus du tout.
00:01:03Un système complexe, opaque, des réformes qui se succèdent les unes après les autres,
00:01:08un avenir incertain.
00:01:10Va-t-il falloir repenser nos systèmes de retraite ?
00:01:13...
00:01:15Nos systèmes de retraite seraient donc en faillite.
00:01:18Les États européens tirent vigoureusement la sonnette d'alarme.
00:01:21La population vieillit plus vite qu'elle n'amène de nouveaux salariés sur le marché,
00:01:25le chômage est là, durablement,
00:01:27et les parcours, de plus en plus précaires,
00:01:29sont désormais entrecoupés de périodes d'inactivité.
00:01:34Tel un paradis perdu, la perspective d'une retraite pleine et descente s'éloigne.
00:01:39Le salarié semble aujourd'hui engagé dans une course sans fin,
00:01:42un marathon dont la ligne d'arrivée ne cesse de reculer.
00:01:46Et pour les jeunes générations, la messe est dite.
00:01:49Ils répètent à l'envie qu'ils n'auront rien
00:01:51et que ce sont les anciens qui ont mangé leur pain blanc.
00:01:59Donc on a des jeunes qui à la fois pensent qu'ils n'auront pas de retraite,
00:02:02ils voient que leurs grands-parents font des chèques à Noël,
00:02:04ils voient que leurs parents se portent caution quand ils doivent chercher un appartement, etc.
00:02:08Mais ils ne voient pas beaucoup l'état provenance.
00:02:10Donc ils comprennent de moins en moins pourquoi ils devraient payer des cotisations
00:02:13pour les retraités actuels alors qu'eux-mêmes considèrent qu'ils n'en auront pas.
00:02:17Ce doute est partagé par tous les citoyens européens.
00:02:21Les retraites seraient en train de devenir une promesse non tenue,
00:02:24un luxe dont tout le monde devra se passer.
00:02:28En France pourtant, la problématique serait moins aiguë.
00:02:30Et pour certains Français, pas question de céder à l'alarmisme ambiant.
00:02:36Si on est capable de maîtriser l'évolution économique générale dans les années qui viennent,
00:02:42on n'a pas de problème massif de financement des retraites.
00:02:45Donc il n'est pas nécessaire d'envisager soit de baisser très fortement les pensions,
00:02:51soit d'augmenter de manière ininterrompue les cotisations,
00:02:54soit de reporter toujours l'âge des départs et la retraite.
00:02:57Non, avec les paramètres, en gros, un taux de remplacement à 60-70%
00:03:03pour les gens qui prennent leur retraite,
00:03:05un âge moyen du départ à la retraite autour de 62-63 ans
00:03:08et le niveau actuel des cotisations peut-être un petit point de plus.
00:03:13Mais ce n'est pas vraiment nécessaire aujourd'hui, ça suffit pour équilibrer le régime.
00:03:18Pendant une période, on va avoir ce qu'on appelle le papy-boom.
00:03:21Ça ne va pas durer indéfiniment, vers 2030-2040,
00:03:25et les papy-boomers vont disparaître.
00:03:29Mais il est logique d'une certaine manière de se préoccuper du financement des retraites.
00:03:33Ce qui ne serait pas logique, c'est de croire que parce qu'on s'en occupe,
00:03:37le problème est dramatique et non résolu.
00:03:40Parce qu'on s'en occupe, on a résolu déjà une grande partie du problème des retraites.
00:03:45Toutes les études montrent que la France a pris des mesures
00:03:50très importantes pour résoudre le problème des retraites.
00:03:53Je ne dis pas que tout est résolu, je dis qu'une large partie du chemin est faite.
00:03:59Si nous ne sommes pas tous sur le même chemin, dans l'ensemble,
00:04:03tous pays confondus, nous devons nous attendre à toucher très tard des retraites minimales.
00:04:08Et comment ne pas trembler en voyant nos voisins grecs ou espagnols si démunis, si menacés ?
00:04:14S'il est évidemment économique, l'enjeu des retraites est aussi diablement politique.
00:04:19Depuis 20 ans, l'Allemagne et la France ont multiplié les réformes à court terme.
00:04:24Les deux pays ont-ils eu raison de réformer si souvent, à toute allure,
00:04:28sans s'offrir le temps de réels débats de société ?
00:04:31Nos retraites et nos aînés ne méritent-ils pas mieux que ça ?
00:04:35La machine est-elle cassée ?
00:04:37Les systèmes de retraites européens sont-ils à bout de souffle ?
00:04:40Parce que tôt ou tard, nous serons tous concernés.
00:04:43Il est temps de comprendre comment ça marche ici et ailleurs, en France ou en Allemagne,
00:04:47et de réfléchir à l'avenir de nos retraites.
00:04:56Bonne nouvelle pour les terriens, mauvaise nouvelle pour l'équilibre financier des retraites.
00:05:00Nous allons vivre plus longtemps.
00:05:02Plus de vieux et moins d'actifs seraient égales au début des difficultés.
00:05:07Mais la retraite se résume-t-elle à une simple affaire de chiffres ?
00:05:13L'Europe compte actuellement 4 actifs pour un retraité.
00:05:17Mais en 2060, le ratio devrait tomber à 2 actifs pour un retraité,
00:05:22en raison du vieillissement de la population.
00:05:25Les Européens font moins de bébés et leur espérance de vie augmente.
00:05:29Les hommes nés en 2060 pourraient vivre jusqu'à 85 ans,
00:05:33soit 7 ans de plus que ceux nés en 2013.
00:05:36Les femmes, elles, pourraient gagner 6 ans d'espérance de vie et atteindre 89 ans.
00:05:42Cette plus grande longévité augmentera mécaniquement le nombre de retraités.
00:05:46Si le taux de natalité de la France laisse espérer un renouvellement suffisant
00:05:51de la population en âge de travailler,
00:05:53en Allemagne, la part de seniors augmente d'autant plus vite
00:05:57que la faible natalité réduit le nombre de jeunes.
00:05:59À l'avenir, il y aura de moins en moins d'actifs
00:06:02pour contribuer à la retraite de personnes âgées.
00:06:06Depuis le fléchissement de la courbe de natalité due à la pilule
00:06:10à la fin des années 60 et au début des années 70,
00:06:13les naissances sont devenues insuffisantes.
00:06:15Aujourd'hui, c'est presque une génération de femmes qui manque pour faire des enfants.
00:06:20Ce manque-là ne peut désormais plus être comblé.
00:06:22Les classes d'âge qui devront remplacer celles qui vont quitter le monde du travail
00:06:27et partir à la retraite sont moitié moins nombreuses que les précédentes.
00:06:31C'est un grand problème, notamment pour les plus jeunes.
00:06:34Si ma fille me demande où est-ce que je lui conseille d'aller travailler et vivre plus tard,
00:06:37je dois dire honnêtement que je ne lui conseille pas forcément de rester en Allemagne,
00:06:41ne serait-ce qu'à cause de cette immense pression
00:06:42à laquelle la jeune génération allemande va devoir faire face.
00:06:48Tous les pays ne sont donc pas logés à la même enseigne
00:06:50et la France n'est pas la plus mal lotie.
00:06:52Les Français font des bébés, ils vont donc continuer à toucher des retraites.
00:06:57Mais la question se déplace sensiblement
00:06:59lorsqu'il s'agit de connaître le montant des pensions à venir.
00:07:02Puisqu'il va falloir financer des retraites de plus en plus longues.
00:07:05Et quels que soient les pays, quand la crise s'invite dans l'équation,
00:07:08le bateau tend dangereusement.
00:07:12La crise financière de 2008 a doublement touché nos retraites.
00:07:16Le nombre de demandeurs d'emploi, lui, a augmenté.
00:07:18Le taux de chômage en Europe varie selon les pays de 5% en Allemagne jusqu'à 25% en Grèce.
00:07:24Or, plus il y a de chômeurs,
00:07:26moins il y a de cotisations pour faire fonctionner les systèmes publics de retraite.
00:07:30Lorsque le montant de pensions dépasse le montant des cotisations,
00:07:34les caisses de retraite doivent alors s'endetter afin de verser leur dû aux retraités,
00:07:38ceux qui creusent leurs déficits et déstabilisent le système.
00:07:42Avec la baisse des rendements boursiers,
00:07:44les particuliers qui avaient placé leur épargne retraite dans des fonds de pension
00:07:48ne peuvent plus compter sur le niveau des prestations promis.
00:07:52La politique des retraites consiste toujours et partout en désajustement.
00:07:57Et les systèmes par répartition, justement, doivent toujours être revus et corrigés.
00:08:01Un système par répartition n'est pas une vache qui broute dans le ciel
00:08:05et qui donne du lait sur la terre.
00:08:10C'est-à-dire que les coûts et les conséquences du vieillissement de la population
00:08:14ou du développement économique sont réels.
00:08:17Et la politique des retraites ne peut qu'essayer de répartir de manière à peu près équitable
00:08:22ce coût sur les différentes générations.
00:08:25C'est donc un processus sans fin.
00:08:27Pour tous les pays du monde.
00:08:33Impossible donc de déconnecter un système de retraite de la situation économique.
00:08:38Véritable casse-tête pour les dirigeants
00:08:40qui doivent ajuster deux temporalités totalement différentes.
00:08:43Le temps du marché du travail avec ses soubresauts à court terme
00:08:46et la temporalité des retraites qui doivent se penser sur 40 ou 50 ans.
00:08:51Un décalage temporel qui nourrit le sentiment répandu que les États sont déconnectés
00:08:55des difficultés quotidiennes des populations.
00:08:58Il y a un imaginaire social dont l'illusion serait celle
00:09:01d'une possible mise en pilotage automatique des affaires humaines.
00:09:05Donc on pourrait s'accorder sur la même façon qu'on règle le thermostat de sa chaudière.
00:09:10On pourrait fixer un objectif chiffré à partir duquel s'enclencheraient des mécanismes automatiques
00:09:15qui feraient qu'on aurait la bonne température.
00:09:18Ça c'est le fantasme nourri à peu près généralement dans les élites dirigeantes actuelles
00:09:22qu'elles soient économiques ou politiques.
00:09:25Et la question de la retraite n'échappe pas à cela.
00:09:30Trop cher, trop lourd, trop gourmand en points de PIB,
00:09:33les systèmes de retraite sont examinés à la loupe par les institutions internationales.
00:09:38C'est quasi systématique parce que finalement assez facile.
00:09:41On grignote les systèmes de retraite, on les réforme sans arrêt
00:09:45pour ne pas alourdir la dette publique.
00:09:47On exige désormais que les gouvernements les plus endettés
00:09:50sacrifient leurs aînés sur l'autel de la protection sociale.
00:09:53Les retraites, qu'elles soient grecques, portugaises ou espagnoles,
00:09:56sont au cœur de toutes les politiques d'austérité.
00:09:59En principe, l'Union européenne n'a aucune compétence
00:10:03pour dicter ce que doit être un régime de retraite.
00:10:06Dans les textes de l'Union européenne, on disait on fait un marché ensemble
00:10:10et les questions sociales restent sous l'égide de la souveraineté des États.
00:10:14Mais au travers de l'Union monétaire, les institutions européennes
00:10:17s'arrogent le droit maintenant de dicter ce que doivent être les systèmes de retraite
00:10:22dans l'ensemble des pays qui sont entrés dans l'Union
00:10:25et qui ont donc souscrit à des objectifs chiffrés d'équilibre de leurs comptes.
00:10:30Donc le cas européen est le point avancé de cette forme de dépolitisation,
00:10:35des débats qui, au nom de la technique,
00:10:37sont soustraits à une délibération démocratique véritable.
00:10:42Pour éviter le creusement du déficit,
00:10:44les gouvernements utilisent trois leviers de réforme.
00:10:48Le premier consiste à augmenter les cotisations
00:10:50versées par les salariés et les employeurs.
00:10:53Le deuxième impose une baisse du niveau des pensions versées aux retraités.
00:10:58Le troisième consiste à retarder le départ effectif à la retraite,
00:11:02soit en repoussant l'âge légal de départ à la retraite,
00:11:06soit en augmentant la durée de cotisation nécessaire
00:11:09pour obtenir une pension à taux plein.
00:11:11De nombreux pays repoussent progressivement l'âge légal de la retraite à 67 ans.
00:11:16Ce sera le cas en Allemagne à l'horizon 2029.
00:11:20Et si, depuis 2014, un salarié justifiant de 45 années de cotisation
00:11:25pourra toucher sa retraite sans décote dès 63 ans,
00:11:28cela ne concerne qu'une infime minorité d'Allemands.
00:11:33La retraite à 67 ans a été votée en 2007 et prend effet à partir de 2012.
00:11:39Et les syndicats étaient complètement contre.
00:11:42Ils étaient complètement contre.
00:11:45Et c'est pour ça qu'on peut dire que cette retraite à 63 ans,
00:11:48qui est une mesure temporaire,
00:11:50est un cadeau de réconciliation du SPD au syndicat
00:11:53pour qu'ils acceptent la retraite à 67 ans.
00:11:57Mais la décision de fond du départ à la retraite à 67 ans
00:12:00n'a pas été remise en cause.
00:12:05Le problème avec cette concession,
00:12:06c'est le signe complètement biaisé que l'on donne ainsi.
00:12:11Car dans une société vieillissante,
00:12:13il faut faire comprendre à la population qu'il faut travailler plus longtemps.
00:12:18Et non que l'on peut travailler moins.
00:12:21On a toujours besoin de certaines valeurs limites.
00:12:24Et il appartient au débat politique de savoir si ces valeurs,
00:12:27qui d'un point de vue individuel ont toujours l'air hasardeuses,
00:12:30sont appropriées ou pas.
00:12:33Je pense que dans le débat sur la prolongation du temps de travail dans la vie,
00:12:37nous avons fait le second pas avant le premier.
00:12:44Nous devrions d'abord essayer de savoir de quelle façon les gens devraient travailler,
00:12:48et comment ils pourraient le faire plus longtemps.
00:12:53Et quand nous verrons que cela fonctionne, que ça roule,
00:12:57on pourra discuter pour savoir qui peut travailler plus longtemps et à quelles conditions.
00:13:02Mais juste augmenter l'âge de la retraite en faisant pression sur les gens
00:13:06n'est pas une voie très réussie.
00:13:12Mais comment donc en est-on arrivé là ?
00:13:15On le sait, l'histoire du monde s'écrit de plus en plus vite.
00:13:18Et plus le passé est proche, plus il se brouille.
00:13:21À histoire récente, mémoire courte ?
00:13:23Pour écrire l'avenir de nos retraites,
00:13:25il faut commencer par se souvenir des besoins auxquels elle répondait.
00:13:30L'idée d'une forme de retraite par répartition naît en Allemagne.
00:13:34A la fin des années 1880, émerge dans l'Allemagne de Bismarck
00:13:38un système d'assurance-retraite financé par des cotisations salariales et patronales.
00:13:43Le chancelier espère étouffer les mouvements socialistes et syndicaux
00:13:46en améliorant les conditions de vie des travailleurs.
00:13:49Mais très peu d'ouvriers vivent assez longtemps pour en profiter.
00:13:52Il s'agit bien souvent d'une retraite des morts.
00:13:56On lui aurait dit, mais c'est une folie, ça va être ruineux, etc.
00:14:01Il avait dit, mais à quel âge les gens meurent-ils en moyenne ?
00:14:03On lui avait dit, je ne sais plus, 60 ans.
00:14:06Il avait dit, vous n'avez qu'à mettre 65 ans comme ça.
00:14:09Pendant très longtemps, la retraite était effectivement quelque chose
00:14:14qui correspondait à une assurance contre un risque, le risque de vieillir.
00:14:19La plupart des gens mouraient avant.
00:14:21Et puis, de temps en temps, il y avait des gens qui n'avaient pas de chance,
00:14:24qui survivaient et qui ne pouvaient plus travailler.
00:14:26Il fallait bien qu'ils aient un petit revenu.
00:14:29L'idée se développe jusqu'au Royaume-Uni.
00:14:31En 1941, William Beveridge instaure un minimum vieillesse pour les plus âgés.
00:14:36Une aide non plus financée par les cotisations des travailleurs et des employeurs,
00:14:40mais financée par l'impôt.
00:14:42De nombreux pays vont s'inspirer de ces deux systèmes pour protéger les retraités.
00:14:47Ce pays tout blanc, trop blanc, blanc comme la mort.
00:14:51Que trouveront ceux qui n'ont plus la force de travailler ?
00:14:54Vieillard, tu as été un jeune homme à l'établi, puis un homme mûr.
00:15:00Et un jour, tu t'es retrouvé au même établi,
00:15:03un vieux dont l'avenir s'ouvrait sur une grande nuit.
00:15:06Certes, tu as eu quatre ans de vacances vers 1914,
00:15:10quatre ans passés dans des trous avec un fusil dans la main.
00:15:13Et plus tard, tu as encore donné tes fils.
00:15:17On met en place des politiques familiales, des politiques de santé
00:15:20et des promesses de retraite en 1945.
00:15:24Et puis, il y a une très forte croissance économique,
00:15:27il y a le plein emploi des hommes en tout cas,
00:15:29il y a une fécondité qui explose, le baby-boom,
00:15:31et donc les actifs et leurs enfants profitent de cette croissance économique.
00:15:34Et dans les années 1960, on réalise quelque chose,
00:15:37c'est qu'on est en train de laisser sur le bord du chemin
00:15:40tout un pan de la population, à savoir les anciens, les vieux, les personnes âgées.
00:15:44La charge de la vieillesse doit être répartie sur tous.
00:15:48Demain, elle deviendrait trop lourde pour une France qui se dépeuple.
00:15:51Demain, elle s'allègera en raison du nombre de ses enfants qui pourront travailler.
00:15:56Que la France redevienne un peuple de jeunes.
00:15:59Que le travail de tous participe au repos de ceux qui ont fini de travailler.
00:16:03Et chacun pourra entendre sans crainte le mot aujourd'hui terrible,
00:16:07« vieillir ».
00:16:08L'État social vous délie des liens de solidarité personnelle
00:16:13qui existaient précédemment.
00:16:15Dans le système traditionnel, vous aviez une obligation personnelle
00:16:18de prendre en charge les personnes âgées.
00:16:21À partir du moment où vous avez des systèmes de retraite,
00:16:23vous êtes quittes en ayant payé vos cotisations, si je puis dire,
00:16:27et par conséquent, vous pouvez vous voir davantage comme autosuffisant.
00:16:31Donc il y a cet effet ambivalent de l'État social sur l'individualisme
00:16:36que d'une certaine manière, en termes de solidarité financière,
00:16:39il nous rend de plus en plus dépendants les uns des autres.
00:16:42Mais psychologiquement, il attise une certaine tendance à l'individualisme.
00:16:49Un individu, pour être un individu, a besoin des autres générations.
00:16:54C'est-à-dire que l'individualisme n'est pas le contraire de la solidarité.
00:16:58L'individualisme a besoin de la solidarité des autres générations
00:17:02pour produire de l'individualisme.
00:17:04Pourquoi un enfant a besoin de ses parents ?
00:17:06Pourquoi un jeune a besoin d'être accompagné ?
00:17:08Pourquoi un adulte a besoin d'une solidarité des générations plus âgées
00:17:12pour s'occuper des enfants ?
00:17:13Et pourquoi quand on est vieux, il n'y a rien de plus important
00:17:16que le lien avec les générations plus jeunes ?
00:17:18Donc toutes les générations ont besoin des autres.
00:17:21Cette solidarité publique entre générations
00:17:24est un modèle éthique de solidarité qui se retrouve au sein de la famille.
00:17:30Il y a des aides financières qui vont des plus âgés aux plus jeunes,
00:17:34qui vont des grands-parents aux parents et aux petits-enfants.
00:17:38Même dans les familles les plus modestes,
00:17:39une personne retraitée peut aider son petit-fils étudiant
00:17:43en l'hébergeant chez elle ou grâce à son épargne,
00:17:46en aidant à financer ses études.
00:17:48Donc ça a donné un meilleur statut aux grands-parents
00:17:52et ça a créé d'autres types de liens, de réciprocités,
00:17:55d'échanges et de réciprocités entre les générations.
00:18:00Liquidation, réversion, décode, surcode,
00:18:03coefficient de proratisation, pluri-pensionnés,
00:18:06taux de remplacement, c'est à ni rien comprendre.
00:18:10Que ce soit en Allemagne ou en France,
00:18:12les systèmes sont opaques et hermétiques.
00:18:14Le système des retraites est une fusée à plusieurs étages.
00:18:18Le premier est constitué du régime de base,
00:18:20auquel chaque salarié est obligé de cotiser
00:18:23auprès des caisses publiques de retraite.
00:18:25Le deuxième étage correspond au régime complémentaire
00:18:28géré par des caisses de retraite.
00:18:30Le premier étage correspond à l'étude de la qualité
00:18:33de l'emploi des retraites et de la qualité de vie des salariés.
00:18:36Le deuxième étage correspond à l'étude de la qualité
00:18:39de la vie des salariés et des salariés de la retraite.
00:18:42Le troisième étage correspond au régime complémentaire
00:18:45géré par des caisses de retraite distinctes
00:18:47pour les employés et les cadres.
00:18:49En France, le salarié y cotise d'office.
00:18:53L'Allemagne a opté pour un système facultatif,
00:18:55dont les sommes sont placées en bourse.
00:18:58Le troisième étage correspond à l'épargne-retraite
00:19:01que chaque salarié choisit, ou non, de constituer,
00:19:05en plaçant une partie de ses revenus
00:19:07sur des produits financiers de long terme.
00:19:09Cela incite fiscalement les salariés à constituer une telle épargne.
00:19:13En France, au-delà de produits tels que l'assurance-vie,
00:19:17l'épargne-retraite des salariés passe aussi par l'entreprise.
00:19:21Le salarié peut choisir de placer les sommes perçues
00:19:23au titre de la participation ou de l'intéressement
00:19:26sur un plan d'épargne pour la retraite collectif.
00:19:31Chaque pays a donc son système de retraite spécifique.
00:19:34Mais la France, encore elle, cultive une particularité de taille,
00:19:39A chacun son régime, selon qu'on est fonctionnaire ou salarié du privé,
00:19:43cheminot, agriculteur, profession libérale,
00:19:46il existe plus d'une trentaine de régimes de retraite différents.
00:19:50Et lorsqu'on change de carrière professionnelle
00:19:52et qu'on passe d'un régime à l'autre,
00:19:54comprendre quel sera le montant de sa retraite future
00:19:57relève d'un contorsionnisme mental de haut vol.
00:20:00Ça fait des frais de fonctionnement considérables.
00:20:03On économiserait à peu près 3 milliards
00:20:06si on fusionnait l'ensemble des régimes.
00:20:083 milliards de frais de fonctionnement.
00:20:10Donc c'est pas négligeable.
00:20:12Le coût des retraites en France, c'est à peu près 240 à 250 milliards par an.
00:20:17Donc ramenons les choses, c'est un peu plus de 1%.
00:20:20Mais gagner 1%, c'est déjà autant de plus
00:20:22qui pourrait aller dans la poche des retraités.
00:20:24Donc ça serait pas tout à fait négligeable.
00:20:28Le système de retraite tel que nous le connaissons
00:20:31est en fait basé sur un principe qui sous-tend
00:20:33que les gens aient une carrière professionnelle relativement stable.
00:20:37Il n'est pas conçu pour les gens qui ont des carrières professionnelles lâchées,
00:20:41avec de longues périodes de chômage
00:20:43et peut-être aussi d'autres périodes
00:20:45où ils n'ont pas d'activité professionnelle.
00:20:48Ce système n'a pas été conçu pour cela.
00:20:51Il se base plus ou moins sur une continuité dans l'activité professionnelle.
00:20:55Ce n'est que dans ce cas que le système de retraite
00:20:58garantit véritablement un revenu convenable.
00:21:01Le système de retraite allemand
00:21:03est devenu nettement plus complexe ces dernières années.
00:21:06Cela est notamment dû au fait qu'aujourd'hui,
00:21:09en plus de la retraite obligatoire,
00:21:11il faut aussi cotiser pour des assurances privées
00:21:14et dans certains cas aussi par le biais de l'entreprise.
00:21:18Et faire coexister ces trois piliers
00:21:20et savoir combien je dois réellement cotiser
00:21:22pour avoir une retraite convenable quand je serai plus âgé
00:21:25revient à faire des calculs très complexes
00:21:28que seuls très peu de gens s'affairent correctement.
00:21:35Les Européens sont attachés à leur système de retraite
00:21:38et ceux qui décident de les réformer
00:21:40peuvent s'exposer à de forts remous sociaux.
00:21:42Pourtant, depuis plus de 20 ans,
00:21:44l'Allemagne mais aussi la France
00:21:46ont multiplié les réformes.
00:21:48Des mesures au coup par coup, souvent sur le court terme.
00:21:51Trop de réformes tueraient-elles la retraite ?
00:21:59Le problème principal en France,
00:22:01c'est qu'on a tendance à avoir un discours alarmiste,
00:22:05à dire que c'est urgent de réformer.
00:22:07Mais si c'est urgent de réformer,
00:22:09il faut réformer tout de suite, dans les trois mois.
00:22:12Dans les trois mois, on ne fait pas une réforme systémique,
00:22:15structurelle, qui essaie de leur donner la cohérence.
00:22:17On a tendance à dire que c'est très urgent,
00:22:19qu'il faut le faire tout de suite,
00:22:21donc on n'a pas le temps de la faire.
00:22:23Une fois qu'on l'a fait, on a dit que le problème est résolu.
00:22:26On attend 5 ans, et au bout de 5 ans,
00:22:28on dit que c'est à nouveau très urgent.
00:22:30Jusqu'à la fabrication des grands régimes complémentaires,
00:22:33des cadres pour tous les salariés,
00:22:36la construction de notre régime de retraite
00:22:38a été le produit de formes de délibération démocratique.
00:22:41Maintenant, on considère ça comme une machine
00:22:44à réparer ou à remplacer par autre chose,
00:22:47et plus comme expression d'un projet politique
00:22:51pour une société à un moment déterminé.
00:22:54D'où l'importance qu'il y aurait
00:22:56à remettre ces questions au centre
00:22:59d'un véritable débat politique et démocratique,
00:23:02et pas le laisser simplement entre les mains d'experts,
00:23:06qui seraient censés pouvoir le régler
00:23:08par des réglages paramétriques.
00:23:12Ces 20 dernières années,
00:23:14les réformes successives ont modifié sensiblement
00:23:17le système des retraites en France et en Allemagne.
00:23:20La France a d'abord allongé la durée de cotisation
00:23:23des salariés du privé en 1993,
00:23:26puis du public et enfin des régimes spéciaux.
00:23:30La réforme de 2003 a établi aussi
00:23:33le principe d'indexation des pensions sur les prix.
00:23:36En 2010, l'âge légal de la retraite
00:23:39passe de 60 à 62 ans.
00:23:42Et en 2014, une nouvelle augmentation
00:23:44de la durée de cotisation est adoptée.
00:23:47Les salariés devront à terme cotiser 43 ans.
00:23:51Le gouvernement allemand, lui,
00:23:53a commencé par élever l'âge légal
00:23:55à 65 ans dès 1993.
00:23:58La réforme de 2001 a ouvert la porte
00:24:01à la retraite par capitalisation,
00:24:03et celle de 2004 a limité
00:24:05la revalorisation des pensions
00:24:07en fonction de la hausse du nombre de retraités.
00:24:10En 2007, le principe d'un âge légal
00:24:13fixé à 67 ans est programmé pour 2029.
00:24:18La croissance est en berne
00:24:20et l'indexation des pensions sur les prix
00:24:22durcit la vie des retraités.
00:24:24Du côté de la France, par exemple,
00:24:26depuis maintenant 3 ans,
00:24:28les pensions sont gelées
00:24:30et pas de revalorisation en vue pour 2016.
00:24:32Et la décision d'indexer les retraites
00:24:34sur l'inflation plutôt que sur les salaires
00:24:36apporte une nouvelle incertitude
00:24:38sur le niveau des pensions futures.
00:24:40Indexer ?
00:24:42Indexer, oui, monsieur Martinet.
00:24:44Ce n'est peut-être pas nécessaire.
00:24:46Mais si, mon cher Martinet.
00:24:48Indexons, maître.
00:24:50Enfin, si ça gêne monsieur Martinet,
00:24:52on peut très bien...
00:24:54Mais si, on indexe.
00:24:56On indexe.
00:24:58Aujourd'hui, on a décidé,
00:25:00pour faire des économies à court terme,
00:25:02de déconnecter l'évolution des pensions
00:25:04de l'évolution des salaires.
00:25:06Il en résulte une incertitude
00:25:08sur le niveau relatif des pensions.
00:25:10Et cette incertitude
00:25:12est une incertitude très perverse
00:25:14si les choses vont très bien.
00:25:16Si on sort de la crise
00:25:18et puis qu'on trouve
00:25:20le moyen de faire beaucoup de productivité
00:25:22tout en maintenant le plein emploi,
00:25:24les salaires vont augmenter beaucoup.
00:25:26Et pour le coup,
00:25:28on va surfinancer les retraites.
00:25:30Par contre, imaginez la situation inverse.
00:25:32Dans un marasme persistant,
00:25:34avec des salaires qui stagnent, voire qui n'augmentent pas,
00:25:36les retraités, eux, ils ont une sorte de garantie
00:25:38de pouvoir d'achat.
00:25:40Et donc là, ce sera la double punition pour les actifs.
00:25:42Leurs salaires n'augmenteront pas très vite
00:25:44et à la limite, on serait légitime
00:25:46de leur demander des cotisations supplémentaires
00:25:48pour financer des retraites.
00:25:50C'est complètement absurde.
00:25:54L'État veut à la fois être
00:25:56le législateur et le gestionnaire.
00:25:58Toutes les réformes qui sont faites,
00:26:00les réformes paramétriques, c'est une loi qui le fait.
00:26:02Et ça, c'est mauvais parce qu'ensuite,
00:26:04l'État ne peut pas se sanctionner lui-même.
00:26:06Il gère mal, mais il est le maître.
00:26:08Alors que s'il y avait un gestionnaire
00:26:10d'un côté et l'État
00:26:12qui est le législateur et en même temps
00:26:14le surveillant des gestionnaires de l'autre,
00:26:16quand les gestionnaires font mal leur boulot,
00:26:18il les rappellerait à l'ordre.
00:26:20Ça serait beaucoup plus efficace.
00:26:26Pour ce qui est du financement des retraites,
00:26:28ce sont bien deux logiques économiques qui s'affrontent.
00:26:30Le système par répartition face au système
00:26:32par capitalisation.
00:26:34La solidarité entre les générations
00:26:36face à l'épargne individuelle.
00:26:38Une sécurité relative face aux fluctuations
00:26:40du marché.
00:26:42Mais la capitalisation est-elle dangereuse
00:26:44pour nos retraites ?
00:26:52Avec la retraite par répartition,
00:26:54c'est le travail des actifs
00:26:56qui payent la pension de ceux qui sont retraités.
00:26:58Des cotisations sont
00:27:00prélevées sur le salaire et sont
00:27:02immédiatement redistribuées par les caisses
00:27:04de retraite. Le système
00:27:06par capitalisation repose donc sur la solidarité
00:27:08entre les générations.
00:27:10La retraite par capitalisation
00:27:12est un système où chaque individu
00:27:14place une partie de son revenu sur les marchés
00:27:16boursiers via des fonds de pension
00:27:18en prévision de ces vieux jours.
00:27:20Pendant longtemps,
00:27:22le financement des retraites en France
00:27:24et en Allemagne reposait uniquement
00:27:26sur le système par répartition.
00:27:28Pour compenser la baisse
00:27:30annoncée des pensions,
00:27:32un rapport de la Banque mondiale,
00:27:34en 1994, a vivement incité
00:27:36les pays à s'ouvrir à la retraite
00:27:38par capitalisation.
00:27:42Au cours des décennies
00:27:44passées, nous avons constamment
00:27:46sous-estimé l'augmentation de l'espérance
00:27:48de vie.
00:27:50Et nous avons trop peu cotisé
00:27:52pour nos retraites.
00:27:54Je ne suis pas favorable au système
00:27:56de retraite par répartition.
00:27:58Mais ici, au Royaume-Uni,
00:28:00comme dans beaucoup d'autres pays,
00:28:02les systèmes publics de retraite
00:28:04fonctionnent sur la répartition.
00:28:06Et la majorité des pensions
00:28:08des fonctionnaires ne sont pas financées.
00:28:10Et le défi est
00:28:12comment passer d'un monde de retraite
00:28:14par répartition à un monde
00:28:16de retraite par capitalisation.
00:28:22Oui, les fonds de pension ont été
00:28:24diabolisés. Mais ça ne veut pas dire
00:28:26que les fonds de pension ne sont pas aussi
00:28:28attractifs que les systèmes par répartition.
00:28:30Les contributions
00:28:32vers les fonds de pension
00:28:34doivent augmenter.
00:28:36Ce qui signifie
00:28:38que nous devrons consommer moins.
00:28:40Et ça, c'est un message politique
00:28:42qui va être sacrément difficile à faire passer.
00:28:46De plus en plus de pays
00:28:48qui font reposer leur système sur la répartition
00:28:50suggèrent à leurs citoyens
00:28:52de compléter un petit peu leur retraite
00:28:54future par des bouts de capitalisation.
00:28:56C'est une suggestion très forte en Grande-Bretagne,
00:28:58obligatoire en Suède,
00:29:00très incitée en Allemagne.
00:29:02Mais c'est normal puisque les taux de remplacement
00:29:04des retraites obligatoires en Allemagne
00:29:06ont beaucoup baissé au cours des 15 dernières années,
00:29:08alors que ce n'est pas le cas en France.
00:29:10Il n'y a qu'en France que l'on pense
00:29:12que tout peut disparaître. La crainte française,
00:29:14c'est de dire que tout l'argent que j'ai mis de côté va partir en fumée.
00:29:16Mais quand on regarde
00:29:18l'histoire des fonds de pension,
00:29:20l'histoire des investissements boursiers
00:29:22sur un siècle, un siècle et demi,
00:29:24ça n'arrive pas que tout disparaisse puisque
00:29:26c'est un temps peu raisonnable,
00:29:28vous ne mettez pas tous vos oeufs dans le même panier
00:29:30comme n'importe qui le sait.
00:29:32L'histoire l'a prouvé avec la crise financière de 2008.
00:29:34Investir des capitaux retraite
00:29:36en action, c'est se mettre
00:29:38réellement en danger.
00:29:40Quand la vieillesse pointe son nez,
00:29:42il n'est pas très raisonnable de trop miser sur le marché.
00:29:44Les retraités danois, hollandais,
00:29:46américains ou anglais ont payé
00:29:48un lourd tribut à cette règle d'or.
00:29:52Toutes les projections de retraite
00:29:54que l'on a, quel que soit le système,
00:29:56sont des projections sur une valeur future,
00:29:58sur un produit national futur.
00:30:00Or, toute projection sur le futur
00:30:02est forcément attachée d'incertitudes.
00:30:04Dans le système par répartition,
00:30:06des risques par rapport au marché du travail
00:30:08et des risques démographiques.
00:30:10Dans le système par capitalisation,
00:30:12des risques liés au marché.
00:30:16Lors de la grande crise financière en 2009,
00:30:18dans les systèmes mal régulés comme les USA
00:30:20ou la Norvège,
00:30:22les risques menés par le capital sont tombés de 30%.
00:30:26En Suisse aussi.
00:30:28En Allemagne, en revanche,
00:30:30les effets ont été négligeables.
00:30:32Parce qu'ici,
00:30:34il y avait une régulation très stricte.
00:30:36Mais il faut ajouter
00:30:38que plus un système par capitalisation est sûr,
00:30:40moins le taux de rendement est élevé.
00:30:42Il faut trouver un compromis.
00:30:44Mais c'est le travail de la politique.
00:30:48Le danger des fonds de pension,
00:30:50ceux-ci peuvent avoir un impact négatif
00:30:52sur les retraites, notamment
00:30:54quand les marchés vont mal,
00:30:56et que la capacité des fonds
00:30:58à honorer leurs engagements se trouve réduite.
00:31:00Mais il y a le fait que les fonds de pension
00:31:02sont devenus des acteurs majeurs
00:31:04de ce que j'appelle le capitalisme financier
00:31:06ou capitalisme actionnarial.
00:31:08Parce que ces acteurs gèrent
00:31:10des masses de fonds absolument considérables
00:31:12qu'ils investissent dans les entreprises
00:31:14et ensuite c'est eux
00:31:16qui font la pression,
00:31:18qui posent leurs exigences
00:31:20notamment de rendement financier élevé
00:31:22sur les entreprises,
00:31:24dans une optique de rendement,
00:31:26souvent d'ailleurs à court terme,
00:31:28et ceci au détriment
00:31:30de la pérennité des entreprises
00:31:32et bien entendu aussi des revenus
00:31:34des salariés et de leur protection sociale.
00:31:36Quand certains économistes
00:31:38affirment que le danger
00:31:40vient de la financiarisation des entreprises,
00:31:42d'autres soutiennent au contraire
00:31:44que c'est l'investissement
00:31:46et qu'ils sont en difficulté,
00:31:48personne n'est réellement à l'abri.
00:31:50Comment donc concilier le besoin de stabilité
00:31:52au cœur même de l'idée de retraite
00:31:54et l'instabilité à l'œuvre pour en produire les conditions ?
00:31:56Le point important à comprendre
00:31:58c'est qu'un système par capitalisation
00:32:00il peut être public ou privé,
00:32:02il peut être socialisé ou individualisé.
00:32:04Le Fonds de réserve des retraites
00:32:06en France est un régime
00:32:08en capitalisation publique
00:32:10qui sert en fait à financer
00:32:12l'ensemble des régimes obligatoires
00:32:14mais c'est la capitalisation publique.
00:32:16Alors ce n'est pas du tout une mauvaise chose
00:32:18que d'avoir de la capitalisation en complément
00:32:20de la répartition.
00:32:22Ça permet de faire passer des chocs temporaires,
00:32:24ça permet d'avoir des réserves
00:32:26pour faire passer lorsqu'il y a une crise.
00:32:28Donc ça c'est quelque chose de très utile.
00:32:30La vraie richesse c'est d'avoir
00:32:32beaucoup de gens sur qui on peut compter.
00:32:34C'est quelque chose qu'on trouve encore exprimé
00:32:36dans l'ensemble de proverbes africains par exemple.
00:32:38Si vous êtes seul sur votre tas d'or,
00:32:40vous êtes pauvre.
00:32:42Si on transpose ça à la situation
00:32:44contemporaine et à nos pays,
00:32:46on pourrait dire qu'il faut
00:32:48un mixte certainement.
00:32:50La capitalisation c'est
00:32:52nourrir l'illusion
00:32:54qu'on sera riche sur son tas d'or.
00:32:56Les systèmes par répartition
00:32:58c'est plutôt ceux qui disent
00:33:00votre sécurité économique sera assurée
00:33:02si vous pouvez compter sur un grand nombre de personnes.
00:33:04Probablement la voie sage serait
00:33:06de combiner ces deux approches
00:33:08donc de ne pas tout miser
00:33:10certainement uniquement
00:33:12sur des systèmes
00:33:14de solidarité,
00:33:16de mettre une certaine place pour la capitalisation
00:33:18mais de certainement pas tout miser
00:33:20sur des systèmes de capitalisation.
00:33:26Le nerf de la guerre c'est le financement
00:33:28de nos retraites. Mais les systèmes de cotisations
00:33:30sociales sont à bout de souffle.
00:33:32Nous allons probablement devoir à terme
00:33:34tout repenser. Comment financer
00:33:36les retraites ? Et va-t-il falloir,
00:33:38comme l'envisagent les anglais,
00:33:40mettre les retraités à contribution ?
00:33:42Je pense qu'actuellement
00:33:44au Royaume-Uni, il y a un réel débat
00:33:46sur la façon de soutenir financièrement
00:33:48la population vieillissante
00:33:50et le sentiment que la jeune génération
00:33:52a en fait été lésée.
00:33:54Pour la première fois au Royaume-Uni,
00:33:56on se dit que la jeune génération
00:33:58ne sera pas plus riche, ni même aussi riche
00:34:00que la génération précédente.
00:34:02Nous avons aussi pris conscience que la protection sociale
00:34:04ne pourra pas être plus généreuse
00:34:06sauf si les plus âgés sont également
00:34:08mis à contribution.
00:34:10Les gens ont le sentiment
00:34:12que ce serait injuste que les jeunes
00:34:14générations assument seuls le coût d'une population
00:34:16vieillissante.
00:34:18Et on se demande
00:34:20comment les plus âgés pourraient eux aussi
00:34:22être mis à contribution.
00:34:26Mais c'est un problème que les politiques
00:34:28n'ont pas encore réellement affronté.
00:34:30Ils ont encore peur d'en débattre
00:34:32avec la population.
00:34:34Le débat se pose ainsi.
00:34:36Est-ce que,
00:34:38en termes d'identité,
00:34:40nous nous pensons comme une nation
00:34:42faite d'une addition d'individus ?
00:34:44Ou est-ce que nous formons
00:34:46un tout ?
00:34:48Une collectivité ?
00:34:52Si on se tourne vers les Etats-Unis,
00:34:54on va vers l'individualisme.
00:34:58Alors que du côté français,
00:35:00il y a une réticence considérable
00:35:02à penser à une société de répartition
00:35:04fondée sur le collectif.
00:35:08Ceci, ce n'est pas uniquement une question de financement.
00:35:10C'est une question philosophique.
00:35:12C'est une question de choix social, de choix de société.
00:35:14Imaginez différentes formes de financement.
00:35:16En gros, il y a deux possibilités.
00:35:18Soit les cotisations sociales
00:35:20sur les salaires.
00:35:22Mais on peut envisager un deuxième système,
00:35:24qui est le système du financement par l'impôt.
00:35:26Et là, l'idée, c'est de dire
00:35:28on va prélever un impôt
00:35:30sur le revenu, par exemple,
00:35:32ou sur le patrimoine,
00:35:34qui financera le système de retraite.
00:35:36On peut aussi imaginer, comme ça a été proposé
00:35:38par certains économistes français,
00:35:40d'hybrider les deux systèmes,
00:35:42de faire un système mixte.
00:35:44Financer les retraites autrement
00:35:46peut aussi être une invitation
00:35:48au voyage.
00:35:50En France, par exemple, la CADES,
00:35:52Caisse d'amortissement de la dette sociale
00:35:54qui est chargée d'écouler la dette sociale française,
00:35:56réalise des emprunts en dollars.
00:35:58Des investisseurs asiatiques,
00:36:00moyen-orientaux, américains,
00:36:02ont ainsi racheté une partie des dettes de la France
00:36:04et paient donc une partie des retraites
00:36:06des Français.
00:36:08Internationaliser le financement des retraites
00:36:10en passant par les marchés financiers
00:36:12me paraît être la plus mauvaise des solutions
00:36:14parce qu'on est à la merci
00:36:16d'abord des fluctuations des marchés financiers internationaux,
00:36:18mais deuxièmement, on est aussi sous la coupe
00:36:20d'investisseurs,
00:36:22voire même de pays de gouvernants étrangers.
00:36:24Or, le système de protection sociale
00:36:26doit être national.
00:36:28C'est des choix de société que font les électeurs
00:36:30à un moment donné.
00:36:32Il n'y a aucune raison que les investisseurs internationaux,
00:36:34voire les gouvernements étrangers,
00:36:36interfèrent avec les choix
00:36:38que nous faisons en tant que citoyens.
00:36:44Pension gelée, obligation de souscrire
00:36:46à des régimes complémentaires,
00:36:48allongement de la durée de cotisation,
00:36:50les états sociaux s'affaiblissent,
00:36:52l'heure est venue de dépenser moins
00:36:54et les systèmes de retraite ne sont pas épargnés.
00:36:56C'est la fin de l'âge d'or des retraites,
00:36:58voire le début d'un grand détricotage.
00:37:02Nous avons compris que les retraites
00:37:04ne pouvaient se résumer à de pures équations économiques.
00:37:06Il s'agit avant tout
00:37:08du quotidien qui s'offre à nous pour nos vieux jours.
00:37:10Il est donc temps de se demander
00:37:12si les conséquences du désengagement des états,
00:37:14qui varient selon les pays,
00:37:16vont être les mêmes pour chacun de nous.
00:37:18Sommes-nous tous égaux face à la retraite ?
00:37:20Sur la planète,
00:37:2248% des personnes en âge
00:37:24de prendre leur retraite
00:37:26ne perçoivent aucune pension.
00:37:28Parmi ceux qui en touchent une,
00:37:30ils sont nombreux à continuer de travailler
00:37:32pour compenser la faiblesse de leur pension.
00:37:34Dans la plupart des pays européens,
00:37:36100% de la population est couverte.
00:37:38Aux Etats-Unis,
00:37:40c'est le cas de 92% de la population.
00:37:42Le Mexique ou l'Inde
00:37:44affichent 25%.
00:37:46Tout en bas de la liste,
00:37:48certains pays africains
00:37:50ne dépassent pas les 7%.
00:37:52Malgré des progrès récents en Chine,
00:37:54seul un senior sur quatre
00:37:56peut espérer une pension.
00:38:06Je crois qu'il est très important
00:38:08que la population chinoise
00:38:10prenne conscience
00:38:12de l'obligation absolue
00:38:14de retarder bientôt l'âge de la retraite.
00:38:16Ceux qui ont des postes pénibles,
00:38:18qui font du travail physique,
00:38:20prennent leur retraite un peu plus tôt.
00:38:22Mais pour la majorité des gens,
00:38:24c'est 60 ans pour les hommes
00:38:26et 55 pour les femmes.
00:38:30Comme en vérité,
00:38:32depuis très longtemps,
00:38:34ce système ne concerne
00:38:36qu'une petite minorité de la population.
00:38:38Les cadres de la fonction publique
00:38:40et les ouvriers d'usines,
00:38:42les vrais retraités,
00:38:44sont peu nombreux.
00:38:46La majorité des vieux
00:38:48sont à la campagne.
00:38:50Lorsque vos enfants sont adultes
00:38:52et que vous êtes vieux,
00:38:54ils pourvoient à vos besoins.
00:38:56C'est ainsi que les générations
00:38:58se sont perpétuées
00:39:00dans l'histoire de la Chine,
00:39:02les unes après les autres.
00:39:04L'enfant est nourri par ses parents
00:39:06et il grandit.
00:39:08Il est nourri.
00:39:10Les générations
00:39:12se sont succédées
00:39:14sur ce mode-là.
00:39:16Mais le problème,
00:39:18aujourd'hui,
00:39:20c'est que la fécondité a baissé.
00:39:22Les naissances ont beaucoup diminué.
00:39:24Non seulement les enfants
00:39:26dans les campagnes sont moins nombreux,
00:39:28mais en plus,
00:39:30ils partent dans les villes.
00:39:32C'est la population flottante,
00:39:34les travailleurs migrants.
00:39:36La plupart des gens
00:39:38qui travaillent autour de nous
00:39:40ne peuvent pas se nourrir.
00:39:48Je m'appelle Zhao Jiefen
00:39:50et j'ai 55 ans cette année.
00:39:54Je suis à la retraite depuis 5 ans.
00:39:58Je travaillais dans un groupe de presse
00:40:00où je travaillais à l'intendant.
00:40:06Je suis Li Ruijin.
00:40:08J'ai 56 ans.
00:40:12Je viens juste de prendre ma retraite
00:40:14cette année, en janvier.
00:40:18Avant, je travaillais à Shougang.
00:40:22J'y ai travaillé pendant plus de 10 ans.
00:40:26Puis l'usine a été détruite
00:40:28pour des raisons d'environnement
00:40:30et j'ai été licencié.
00:40:34Ensuite, j'ai retrouvé du travail
00:40:36et travaillé pendant un peu plus de 10 ans.
00:40:40Comme je travaillais dans des conditions dures,
00:40:42dans une forte chaleur,
00:40:44je bénéficie de la retraite à 50 ans
00:40:46que je viens de prendre cette année.
00:40:52Ma retraite est d'un peu plus
00:40:54de 2 000 yuan.
00:40:58Moi, je touche environ
00:41:003 200 yuan.
00:41:02En tout,
00:41:04on est dans les 6 000.
00:41:08J'ai travaillé pendant 31 ans.
00:41:12J'ai travaillé pendant 41 ans.
00:41:16Je travaillais
00:41:18dans une institution publique,
00:41:22ce qui revient à avoir un statut de fonctionnaire.
00:41:26Concrètement, je m'occupais
00:41:28de médias et de propagande.
00:41:32Moi, comme j'ai été mise en retraite anticipée
00:41:34et qu'en plus, je viens d'une entreprise,
00:41:36ma retraite n'est pas très élevée.
00:41:38Je ne perçois qu'un peu plus
00:41:40de 3 000 yuan. Ce n'est pas énorme.
00:41:42Je trouve que ça va,
00:41:44que l'on vit bien,
00:41:46parce que lui, il touche beaucoup.
00:41:50Alors ça équilibre.
00:41:52Il gagne pas mal.
00:41:54Moi, je suis retraité
00:41:56de la fonction publique,
00:41:58alors mon niveau de retraite
00:42:00n'est pas très satisfaisant.
00:42:04Je touche plus de 8 000 yuan.
00:42:08Plus de 8 000 yuan,
00:42:10pour la Chine,
00:42:12est un niveau élevé.
00:42:14Nous avons ainsi
00:42:16un très bon traitement
00:42:18qui représente 100 %
00:42:20de mes revenus passés.
00:42:24Nous possédons 3 appartements,
00:42:26l'un que nous occupons,
00:42:28l'autre qu'occupe mon fils,
00:42:30et le troisième, nous le louons.
00:42:32Ainsi, si l'on additionne
00:42:34nos 2 traites et le loyer
00:42:36de ce logement,
00:42:38nos revenus mensuels s'élèvent
00:42:40à plus de 15 000 yuan,
00:42:42ce qui est très confortable.
00:42:44Et de plus, après notre retraite,
00:42:46nous bénéficions
00:42:48de la couverture médicale d'État.
00:42:50Ainsi, lorsque j'ai
00:42:52des frais médicaux,
00:42:54je suis remboursé à 95 %.
00:42:58Les fonctionnaires
00:43:00sont couverts à 100 %.
00:43:02C'est une réforme
00:43:04qui est passée cette année,
00:43:06et à présent, la plupart des fonctionnaires
00:43:08sont assurés à 100 %.
00:43:10Mais parmi nous, personne ne l'est.
00:43:12Pour les ouvriers,
00:43:14c'est l'assurance médicale sociale.
00:43:24Si tu dois subir
00:43:26une pension chirurgicale
00:43:28et qu'elle coûte dans les 800 000 yuan,
00:43:30alors même si tu es remboursé
00:43:32à 80 %,
00:43:34le montant à ta charge
00:43:36reste exorbitant.
00:43:38Si tu peux te l'offrir,
00:43:40tu y vas.
00:43:42Et si tu ne peux pas,
00:43:44tu t'abstiens,
00:43:46parce que l'État ne t'aidera pas.
00:43:48On a surtout peur de ça,
00:43:50de la maladie.
00:43:52Pourquoi on fait de l'exercice
00:43:54en cas de maladie grave,
00:43:56c'est hors de portée.
00:43:58Vous creusez un trou énorme
00:44:00dans les finances de la famille,
00:44:02un sacré trou.
00:44:10Tout naturellement,
00:44:12quand notre fils a grandi
00:44:14et est arrivé en âge de se marier,
00:44:16nous avons souhaité lui fournir
00:44:18un logement indépendant.
00:44:20C'est une coutume très importante en Chine,
00:44:22comme dans les villes.
00:44:24C'est encore plus fort à la campagne.
00:44:26Ou si vous n'avez pas construit
00:44:28une maison indépendante pour votre fils,
00:44:30il ne trouvera jamais d'épouse.
00:44:48Mon fils et sa femme
00:44:50ont eu leurs enfants deux ans après leur mariage.
00:44:54Avant cette naissance,
00:44:56nous ne nous occupions pas d'eux.
00:44:58Nous n'y allions pas,
00:45:00on vivait chacun de notre côté.
00:45:02Mais dès que ce petit-fils est né,
00:45:04on a pensé tout naturellement
00:45:06qu'on devait les aider.
00:45:08Au tout début,
00:45:10dans le mois qui a suivi la naissance,
00:45:12nous avons payé pour les services
00:45:14d'une nourrice spécialisée.
00:45:16Puis, lorsque le nourrisson
00:45:18est arrivé,
00:45:20on a trouvé que ce n'était pas très agréable
00:45:22d'avoir quelqu'un à la maison.
00:45:24Alors j'ai conseillé à ma belle-fille
00:45:26de ne pas reprendre le travail.
00:45:28Je lui ai dit,
00:45:30« Toi, tu ne travailles pas,
00:45:32tu t'occupes de l'enfant,
00:45:34et moi, je me charge de faire la cuisine. »
00:45:44Oui, c'est comme ça
00:45:46qu'on est en état.
00:45:48C'est pourquoi tout le monde
00:45:50a envie d'être fonctionnaire.
00:45:52Les avantages sont élevés,
00:45:54le salaire aussi.
00:45:56Le bas niveau, c'est pour les ouvriers,
00:45:58pour les travailleurs.
00:46:00C'est une caractéristique chinoise, ça.
00:46:02Dans les pays de l'OCDE,
00:46:04un retraité touche en moyenne
00:46:0642 % du dernier salaire brut
00:46:08qu'il a perçu.
00:46:10C'est ce qu'on appelle
00:46:12le taux de remplacement.
00:46:14Le taux est de 79 %
00:46:16en Espagne et de 31 %
00:46:18en Irlande.
00:46:20Le taux de remplacement du salaire
00:46:22tend à diminuer.
00:46:24Dans les 40 prochaines années,
00:46:26la Commission européenne prévoit
00:46:28une baisse de 10 à 30 points
00:46:30de pourcentage selon les pays.
00:46:32Deux raisons à cela.
00:46:34D'une part, les réformes successives
00:46:36contribuent à diminuer le taux de remplacement
00:46:38en indexant les pensions
00:46:40sur les prix et non sur les salaires,
00:46:42ou en modifiant
00:46:44les modalités de calcul de la pension.
00:46:46Par exemple, en France,
00:46:48ce sont les 25 meilleures années
00:46:50d'une carrière qui sont désormais
00:46:52prises en compte.
00:46:54Une mauvaise opération pour les salariés
00:46:56qui doivent cotiser de plus en plus longtemps,
00:46:58alors que leurs parcours professionnels
00:47:00sont de plus en plus entrecoupés
00:47:02de périodes d'inactivité ou de chômage.
00:47:04Le niveau des pensions
00:47:06va inévitablement baisser.
00:47:08Prenons le cas de la France,
00:47:10où le niveau de vie des actifs
00:47:12et celui des pensionnés est équivalent.
00:47:14Les retraités actuels
00:47:16qui ont eu de longues carrières professionnelles
00:47:18possèdent en outre un patrimoine brut médian
00:47:20de 17% supérieur aux actifs.
00:47:22C'est un matelas immobilier
00:47:24financier qui permet,
00:47:26le cas échéant,
00:47:28de compenser la perte de niveau de vie.
00:47:30Mais les prévisions du Conseil d'orientation
00:47:32des retraites sont inquiétantes.
00:47:34Ce patrimoine va fondre.
00:47:36Surtout pour les jeunes en activité
00:47:38qui auront de moins en moins les moyens
00:47:40de se constituer ces compléments de revenus.
00:48:06Qu'est-ce qu'ils font en retraite ?
00:48:12Tout ce qu'ils veulent.
00:48:20Appelez votre conseiller ou parlez-nous
00:48:22de la façon dont nous pouvons travailler ensemble
00:48:24pour sauver la retraite.
00:48:32Face à la baisse de leur pouvoir d'achat,
00:48:34de nombreux nouveaux retraités choisissent
00:48:36de partir vivre leur retraite au soleil.
00:48:38Le Maroc ou le Portugal sont les destinations
00:48:40de prédilection d'un retraité français sur 10
00:48:42qui bénéficie
00:48:44d'exonération fiscale sur sa pension.
00:48:46Et les inégalités se creusent.
00:48:48Lorsque certains retraités
00:48:50se transforment en cible économique,
00:48:52d'autres sont dans une précarisation croissante.
00:48:58En Allemagne, les prévisions montrent
00:49:00que la précarisation des personnes âgées,
00:49:02le risque d'être pauvre quand on est vieux,
00:49:04va augmenter.
00:49:06On ne sait pas exactement
00:49:08quelle ampleur cela va prendre,
00:49:10mais le risque augmente.
00:49:12Et cela est surtout dû à deux choses.
00:49:14Aux réformes qui ont conduit à une diminution
00:49:16des prestations de retraite.
00:49:18Et deuxièmement, à une période relativement longue
00:49:20où il y a eu un grand nombre de chômeurs.
00:49:22On suppose que pour une partie
00:49:24des retraités,
00:49:26la retraite ne pourra plus garantir
00:49:28un niveau de vie convenable
00:49:30et que la population augmente.
00:49:32Et que cette population ne peut pas
00:49:34se donner les moyens de prévoir
00:49:36une assurance retraite complémentaire privée.
00:49:40Et là,
00:49:42la question se pose de savoir si ces gens
00:49:44pourront s'en sortir avec la retraite de base.
00:49:46Ce qui correspond à peu près aux sommes
00:49:48que perçoivent les chômeurs de longue durée.
00:49:52Puisque ce sera ça, le niveau de vie
00:49:54auquel ils pourront alors prétendre.
00:49:56Selon le ministère du Travail allemand,
00:49:58en 2012, plus de 6 millions de retraités
00:50:00touchaient moins de 600 euros par mois.
00:50:02Conséquence,
00:50:04plus de 760 000 retraités allemands
00:50:06trouvent des petits boulots
00:50:08pour joindre les deux bouts.
00:50:10Et l'espérance de vie des revenus
00:50:12les plus faibles décline.
00:50:14Un ouvrier vit 6 ans de moins en moyenne
00:50:16qu'un cadre.
00:50:18On se retrouve face à une forme de double peine.
00:50:20Celui qui a eu un travail pénible
00:50:22toute sa vie, meurt plus jeune
00:50:24et dépite moins longtemps de sa retraite.
00:50:26C'est le cœur, n'est-ce pas ?
00:50:28Non, non, non, c'est un peu tout.
00:50:30Comment vous dire ?
00:50:32Vous êtes usé, c'est ça, vous êtes usé,
00:50:34monsieur ?
00:50:36Martinet, c'est ça, vous êtes usé.
00:50:38Usé ?
00:50:40Qu'est-ce que je dois faire, docteur ?
00:50:42Quel âge avez-vous ?
00:50:4459 ans, bientôt 60.
00:50:46Moi, je serai vous,
00:50:48je prendrai ma retraite
00:50:50anticipée.
00:50:52Ma retraite, c'est que ça...
00:50:54ça va pas faire bien lourd.
00:50:56Votre famille va vous aider, vous avez des enfants ?
00:50:58Non.
00:51:00Vous êtes marié ?
00:51:02Pas de relation, pas de liaison ?
00:51:04Pas d'ami ?
00:51:06Non, docteur, non, je me suis usé tout seul.
00:51:10Notre système de retraite, il a été conçu
00:51:12pour un modèle familial particulier,
00:51:14un modèle dans lequel
00:51:16monsieur travaille à temps plein
00:51:18dans la même entreprise pendant toute sa carrière,
00:51:20et madame est à la maison
00:51:22et s'occupe des trois gosses,
00:51:24ce qui était la famille typique des années 50.
00:51:26Tout le monde n'était pas dans ce cas-là,
00:51:28mais on a conçu notre système de protection sociale
00:51:30pour ce modèle-là.
00:51:32Le problème, c'est que les femmes n'ont pas
00:51:34les mêmes carrières que les hommes.
00:51:36Carrière hachée ou écourtée,
00:51:38espérance de vie plus longue,
00:51:40si on regarde du côté de la France,
00:51:42les chiffres parlent d'eux-mêmes.
00:51:44Quand la pension moyenne des hommes
00:51:46est de 1524 euros,
00:51:48elle est de moitié moins.
00:51:50Pendant qu'en Allemagne, les femmes gagnent
00:51:52en moyenne 22 % de moins que les hommes.
00:51:54En fait, c'est quelque chose
00:51:56qui vient de la vie active et pas du système de retraite.
00:51:58Demander à n'importe quel système
00:52:00de retraite de compenser
00:52:02tout ce qui s'est mal passé pendant
00:52:04la vie active, ce n'est pas possible.
00:52:06De plus en plus, les gouvernements comprennent
00:52:08que c'est une politique qui doit s'installer
00:52:10dès le plus jeune âge,
00:52:12dès la école maternelle déjà,
00:52:14et être suivi pendant toute la vie active
00:52:16pour ensuite terminer
00:52:18dans une retraite acceptable.
00:52:22Qui dit retraite
00:52:24dit non travail, répit,
00:52:26repos. Mais comment réfléchir
00:52:28aux retraites sans se pencher sur le travail ?
00:52:30Travail et retraite sont
00:52:32tellement liés que certains d'entre nous
00:52:34n'arrivent pas à les dissocier.
00:52:36Les cumuls emploi-retraite en sont
00:52:38la parfaite illustration puisqu'il s'agit
00:52:40de toucher une pension tout en exerçant
00:52:42une activité professionnelle.
00:52:44Une option pour ceux qui ne souhaitent pas
00:52:46s'arrêter de travailler mais qui posent
00:52:48question en ces temps de chômage.
00:52:50Les vieux devraient-ils libérer du travail
00:52:52pour les jeunes ? Doivent-ils laisser la place ?
00:52:58Le problème c'est
00:53:00qu'on ne peut pas échanger
00:53:02un à un
00:53:04les postes pour les personnes
00:53:06âgées ou les seniors
00:53:08et les postes pour les jeunes.
00:53:10Ce ne sont pas les mêmes compétences,
00:53:12ce ne sont pas les mêmes conditions de travail.
00:53:14Mais une économie n'est pas
00:53:16un système clos comme une entreprise
00:53:18ou une agence publique
00:53:20par exemple.
00:53:22Les pays qui créent
00:53:24de l'emploi en général créent
00:53:26de l'emploi pour les jeunes et pour les personnes âgées.
00:53:28En France, à partir de 45 ans,
00:53:30votre employeur vous dit que vous êtes trop vieux pour prendre
00:53:32une formation. Mais c'est le même employeur qui va
00:53:34aller à la télévision demander à ce que l'âge de la retraite
00:53:36soit repoussé à 65 ans.
00:53:38De 45 à 65 ans, ça fait quand même
00:53:4020 ans, la moitié d'une carrière.
00:53:42Dans beaucoup d'entreprises, on dit que c'est fini,
00:53:44tu es trop vieux pour te former.
00:53:46On inscrit l'obsolescence
00:53:48du salarié dans cette politique
00:53:50de non-accès à la formation.
00:53:52C'est un vrai problème. Dans d'autres pays,
00:53:54notamment les pays nordiques,
00:53:56mais aussi l'Allemagne, on a une formation
00:53:58qui s'appelle « Tout au long de la vie ». C'est une vraie formation
00:54:00qui vous permet d'acquérir
00:54:02de nouvelles compétences, éventuellement
00:54:04de changer de métier, pour être
00:54:06à la pointe,
00:54:08y compris à 50 ou à 55 ans.
00:54:10Les seniors eux-mêmes, beaucoup de fois,
00:54:12ne sont pas trop intéressés à investir
00:54:14dans leur capital humain. Ils considèrent
00:54:16qu'ils ne sont pas trop lointains de l'âge
00:54:18de la retraite, donc ce n'est pas la peine
00:54:20de s'engager. Donc il faut vraiment changer
00:54:22la mentalité de tout le monde.
00:54:38...
00:55:06...
00:55:12Après avoir grandi, on s'élargit.
00:55:14Le corps fonctionne comme ça,
00:55:16mais on pourrait dire aussi l'esprit.
00:55:18Eh bien, d'avoir des gens larges,
00:55:20si je puis dire, des XXL
00:55:22au sein de l'entreprise,
00:55:24avoir des gens qui sont hors concurrence,
00:55:26ce n'est pas du tout
00:55:28antinomique avec le système du marché.
00:55:30...
00:55:34Pour que le marché marche,
00:55:36il faut qu'il y ait du hors marché.
00:55:38Un marché complet, global, ça ne peut pas fonctionner.
00:55:40Il faut qu'il y ait des professeurs,
00:55:42il faut qu'il y ait des juges. Et donc, d'une certaine façon,
00:55:44pour être performant,
00:55:46le capitalisme et le salariat doivent
00:55:48intégrer et donner une place
00:55:50à part entière aux seniors
00:55:52comme étant précisément ceux qui sortent
00:55:54en quelque sorte de la logique de concurrence.
00:55:56...
00:55:58La formation des seniors est d'autant plus
00:56:00indispensable qu'il va nous falloir travailler
00:56:02plus longtemps et que l'allongement
00:56:04de l'espérance de vie est un progrès
00:56:06dès lors qu'on est en bonne santé sans incapacité
00:56:08majeure due notamment à de mauvaises
00:56:10conditions de travail.
00:56:12...
00:56:14Nous ne sommes pas tous égaux
00:56:16face au vieillissement
00:56:18et la pénibilité de certains emplois
00:56:20pèse notamment dans la balance.
00:56:22Un ouvrier français vit en moyenne
00:56:24six ans de moins qu'un cadre.
00:56:26En Allemagne, les salariés
00:56:28les plus pauvres auraient perdu
00:56:30trois ans d'espérance de vie en dix ans.
00:56:32De plus, pour travailler plus longtemps,
00:56:34il nous faudra vieillir en bonne santé.
00:56:36Or, dans la zone euro,
00:56:38la part des seniors dépendants
00:56:40va doubler d'ici 2060
00:56:42pour atteindre 58%
00:56:44des plus de 65 ans.
00:56:46...
00:56:48Préparer nos retraites signifie
00:56:50donc investir dans les conditions
00:56:52de travail afin de rendre le travail
00:56:54moins pénible pour tous.
00:56:56Pour que ceux qui le souhaitent puissent travailler
00:56:58plus longtemps et que ceux qui sont usés
00:57:00par le labeur puissent enfin raccrocher.
00:57:02...
00:57:04C'est les rapports qu'il y a entre l'impossible
00:57:06et l'interdit.
00:57:08Si on prend la durée du travail,
00:57:10avant l'invention
00:57:12d'éclairage artificiel,
00:57:14d'abord l'éclairage à gaz,
00:57:16la nuit, on ne peut pas faire travailler
00:57:18les êtres humains.
00:57:20Donc au moins, ils pouvaient dormir.
00:57:22Alors évidemment,
00:57:24on a inventé l'éclairage artificiel
00:57:26où il y avait la possibilité d'exploiter les gens 24h sur 24,
00:57:28ce que tout de suite l'être humain essaie de faire
00:57:30parce que c'est une créature
00:57:32assez cupide et dangereuse,
00:57:34parce que l'impossible avait disparu.
00:57:36Mais là, le droit a été intervenu,
00:57:38c'est toute l'invention du droit social,
00:57:40pour remplacer l'impossible par l'interdit.
00:57:42Et l'interdit n'est pas
00:57:44en soi un mal, c'est une nécessité
00:57:46pour avoir une société non-violente.
00:57:48Donc on peut faire bouger les limites,
00:57:50les pensées autrement.
00:57:52Donc le troisième âge,
00:57:54la question peut-être
00:57:56de savoir comment on peut
00:57:58ajuster
00:58:00à la fois
00:58:02la fatigue,
00:58:04le fait d'être moins disponible
00:58:06pour travailler,
00:58:08avec le désir de continuer
00:58:10d'exercer une activité,
00:58:12c'est-à-dire de participer au jeu des échanges
00:58:14sur la scène humaine,
00:58:16avant de la quitter.
00:58:18Plutôt que réformer ce qui existe déjà,
00:58:20ne va-t-il pas falloir tout réinventer ?
00:58:22Certains pays choisissent
00:58:24de réformer leur système de retraite
00:58:26de fond en comble. On repart de zéro,
00:58:28on réinvente tout après concertation,
00:58:30on modernise, on réadapte.
00:58:32Les Suédois ont mis
00:58:3414 ans à élaborer une réforme
00:58:36systémique de leur retraite.
00:58:38Et c'est vrai qu'il y a
00:58:40une partie du mode de calcul
00:58:42du système suédois qui regarde
00:58:44combien vous avez accumulé de points
00:58:46pendant votre carrière
00:58:48et qui détermine le montant de votre retraite
00:58:50de ces points. Il y a aussi
00:58:52une négociation collective nationale
00:58:54qui s'accorde pour dire que
00:58:56quand vous êtes en congé
00:58:58parental, quand vous êtes en formation,
00:59:00quand vous êtes au chômage,
00:59:02bref, un certain nombre de circonstances,
00:59:04l'État se doit de payer des points pour vous.
00:59:06Ce n'est pas seulement qu'on vous donne des points gratuits
00:59:08comme on fait en France, mais l'État les paye véritablement
00:59:10dans votre compte notionnel,
00:59:12ce qui fait qu'il y a aussi de la redistribution organisée
00:59:14en faveur des populations dont on sait
00:59:16qu'elles ont des carrières
00:59:18moins continues, moins bonnes que les autres.
00:59:20Le deuxième point caractéristique de cette
00:59:22réforme des retraites, c'est que c'est un système
00:59:24le même pour tout le monde,
00:59:26y compris les fonctionnaires, les agriculteurs, etc.
00:59:28Et le troisième point, c'est de considérer
00:59:30que le sort des retraités ne peut
00:59:32pas être détaché du sort
00:59:34du reste de la société.
00:59:36Quand ça va bien pour les actifs, ça va bien pour les retraités.
00:59:38Quand ça ne va pas bien pour les actifs,
00:59:40ça ne va pas bien pour les retraités non plus.
00:59:42Et donc ça donne cette chose totalement incroyable
00:59:44qui fait que dès 2010, il a été
00:59:46décidé, et en fait c'est un calcul automatique,
00:59:48que les retraites baissaient
00:59:50en 2010 en Suède pour tout le monde.
00:59:52Pourquoi ? Parce que c'était la crise et que les revenus
00:59:54baissaient des actifs aussi.
00:59:56Et donc il y a un mode de calcul qui fait que le sort
00:59:58des retraités est totalement
01:00:00lié au sort des actifs.
01:00:02C'est le principe de la répartition.
01:00:04Et ce qui est tout à fait étonnant, c'est de voir
01:00:06combien l'ensemble de la population,
01:00:08considéré comme tout à fait normal,
01:00:10que le niveau des retraites ne monte pas
01:00:12quand le niveau des salaires n'augmentait pas,
01:00:14quand l'ensemble de la société était en crise,
01:00:16par solidarité, les retraités
01:00:18subissaient un sort
01:00:20similaire à celui des autres.
01:00:26En Suède, on peut choisir de continuer
01:00:28à travailler jusqu'à l'âge de 67 ans.
01:00:30Et on peut partir
01:00:32à la retraite très tôt,
01:00:34dès 61 ans.
01:00:36Mais on m'a proposé de continuer à travailler
01:00:38jusqu'à 67 ans.
01:00:40Et je l'ai fait
01:00:42parce que j'étais en forme
01:00:44et que j'aimais bien travailler.
01:00:46C'est pour ça que j'ai attendu le jour
01:00:48de mes 67 ans pour m'arrêter.
01:00:54Je m'appelle Thorsten Andersson,
01:00:56j'ai 69 ans et je suis à la retraite
01:00:58depuis deux ans maintenant.
01:01:00Si on a la santé, ce n'est pas étonnant
01:01:02qu'on ait envie de continuer à travailler.
01:01:04On ne devient pas vieux du jour au lendemain
01:01:06juste parce qu'on fête un certain anniversaire.
01:01:10Je n'ai pas le sentiment
01:01:12d'être partie à la retraite.
01:01:14Je ne me sens pas du tout
01:01:16comme une retraitée.
01:01:18Mais à 67 ans, j'ai senti
01:01:20que c'était le moment d'arrêter.
01:01:22Si j'ai continué à travailler ponctuellement
01:01:24après la retraite,
01:01:26c'est en partie pour des raisons économiques.
01:01:28Dans le monde de l'éducation,
01:01:30on ne travaille pas après 67 ans,
01:01:32ça ne se fait pas.
01:01:34Mes collègues trouvaient que c'était très étrange
01:01:36que je continue.
01:01:38J'ai décidé de revenir travailler
01:01:40à l'âge de 71 ans.
01:01:42Et le fait est que je reviens
01:01:44beaucoup plus en forme qu'eux.
01:01:46Ils commencent à comprendre
01:01:48qu'on n'est pas obligé d'être mourant
01:01:50quand on a 67 ans.
01:01:54Je m'appelle Elisabeth Longwist.
01:01:56Je suis née ici,
01:01:58à Stockholm,
01:02:00et j'ai toujours vécu ici.
01:02:02Le fait de continuer à travailler
01:02:04me permet d'acheter
01:02:06des choses qui, sinon, me seraient interdites.
01:02:08Je viens d'investir
01:02:10dans une nouvelle machine à coudre,
01:02:12et j'ai acheté une machine à laver la vaisselle,
01:02:14un canapé,
01:02:16que je méritais parce que je le vaux bien,
01:02:18comme dit la publicité.
01:02:22Ça fait des années que je reçois
01:02:24ces enveloppes oranges.
01:02:30Bien sûr,
01:02:32je constate que le montant de ma retraite
01:02:34n'a rien à voir avec le salaire
01:02:36que j'avais dans le temps.
01:02:38En gros, on peut dire
01:02:40qu'il faut s'adapter pour vivre
01:02:42avec la moitié de ce qu'on avait avant.
01:02:48Aujourd'hui, je touche une retraite
01:02:50de 14 000 couronnes par mois.
01:02:52Mon loyer représente
01:02:54environ 35 % de ce montant.
01:02:56D'autres dépenses fixes,
01:02:58comme l'électricité,
01:03:00le téléphone, Internet, par exemple,
01:03:02me coûtent environ 1 000 couronnes par mois.
01:03:04Il me reste assez pour vivre.
01:03:06En tout cas, c'est mon sentiment.
01:03:26Tu te souviens quand on dansait
01:03:28sur ce morceau de Fred Astaire ?
01:03:30Oui, Fred Astaire,
01:03:32et j'étais à Ginger Rogers.
01:03:34Quand je pense à quand j'étais petite fille,
01:03:36comment les vieux étaient à l'époque,
01:03:38ils ne vivaient pas aussi bien que nous.
01:03:40C'était plus dur
01:03:42de vivre en Suède à l'époque.
01:03:44On avait l'impression
01:03:46qu'ils étaient très vieux
01:03:48et sur la sortie,
01:03:50alors qu'en réalité,
01:03:52ils devaient à peine avoir plus de 60 ans.
01:03:54Je dis qu'il ne faut pas trop se prendre la tête.
01:03:56Il faut s'amuser pendant le temps qu'il nous reste.
01:03:58J'entends pas ce que tu dis.
01:04:00Il parle plus fort.
01:04:02Je disais que c'est bien de pouvoir s'amuser
01:04:04quand on est vieux.
01:04:06Chaque jour, c'est du bonus.
01:04:08Je veux vivre avec légèreté.
01:04:10L'idée, c'est de vivre le mieux possible,
01:04:12de profiter.
01:04:14Après, on va être morts
01:04:16pendant un bon moment.
01:04:20La nécessité de penser
01:04:22de nouveaux modèles qui seraient déconnectés
01:04:24des logiques de marché revient en force.
01:04:26Comme cette idée de créer
01:04:28une sorte de crédit dans lequel
01:04:30chacun pourrait puiser pour se former,
01:04:32s'arrêter de travailler, reprendre une activité
01:04:34tout au long de sa vie.
01:04:36Des droits qui ne seraient plus attachés
01:04:38à l'emploi occupé, mais à l'individu.
01:04:40Alain Suppiau a appelé ça
01:04:42les droits de tirage sociaux.
01:04:44Le droit de tirage social, c'est qu'on mobilise
01:04:46des solidarités pour vous aider
01:04:48à exercer des libertés.
01:04:50Comment peut-on mobiliser
01:04:52des solidarités collectives
01:04:54pour soutenir
01:04:56l'exercice de liberté dès lors
01:04:58que cette liberté paraît utile
01:05:00en termes sociaux ?
01:05:02Ça peut être pour
01:05:04financer un congé parental,
01:05:06pour faire de la formation,
01:05:08pour avoir une activité associative,
01:05:10etc. C'était ça au départ, cette idée.
01:05:12Pour permettre
01:05:14qu'une vie de travail
01:05:16ne soit pas simplement
01:05:18un travail subordonné au même poste,
01:05:20parce que l'idéal de la subordination à vie
01:05:22n'est pas un idéal insurpassable.
01:05:24On peut penser que dans une vie humaine,
01:05:26on puisse vouloir expérimenter
01:05:28plusieurs facettes de travail.
01:05:34Ou bien vous partez de l'être humain,
01:05:36de sa liberté, de sa capacité de faire du neuf.
01:05:38Ou bien, au contraire, vous essayez
01:05:40de faire rentrer l'être humain
01:05:42dans des schémas de type
01:05:44de gouvernance par les normes,
01:05:46des schémas cybernétiques.
01:05:48On va réguler, on va ajuster,
01:05:50donc il devient une variable d'ajustement.
01:05:56Il faudrait commencer
01:05:58très concrètement avec le système des retraites actuelles.
01:06:00D'un côté,
01:06:02il s'agit de revoir le niveau des contributions
01:06:04et l'amortissement des parcours professionnels,
01:06:06qui sont tout simplement différents
01:06:08ou moins heureux,
01:06:10comme ceux qui, par la faute ou non de la personne,
01:06:12n'ont pas évolué comme la logique
01:06:14l'imagine.
01:06:18Ainsi, le message serait le suivant.
01:06:20On peut compter sur la retraite.
01:06:22Comptez d'une part
01:06:24sur le fait qu'en payant des contributions,
01:06:26on recevra à la fin une contrepartie raisonnable.
01:06:30Et comptez aussi sur le fait que,
01:06:32si les circonstances vous ont imposé un parcours
01:06:34qui ne correspond pas à une carrière professionnelle normale,
01:06:36vous n'aurez pas pour autant
01:06:38à craindre la pauvreté.
01:06:40Pour cesser
01:06:42de trembler pour nos retraites,
01:06:44pour appréhender l'avenir sereinement,
01:06:46nous allons donc devoir penser les retraites autrement.
01:06:48Moderniser et informer,
01:06:50rendre le fonctionnement et le calcul
01:06:52des pensions plus lisibles,
01:06:54mais aussi s'adapter aux carrières fluctuantes,
01:06:56aux parcours individuels.
01:06:58Des changements qui ne seront possibles
01:07:00qu'à l'issue d'un réel débat démocratique.
01:07:02Voilà probablement un défi
01:07:04de société majeure qui s'offre à nous
01:07:06pour les prochaines années,
01:07:08dans notre réalisme et utopie.
01:07:38...
01:08:06...
01:08:34...