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Cette vidéo rend hommage à Michel Blanc, une figure emblématique du cinéma et de la télévision française, à travers une interview exclusive avec Pierre Lescure. Dans cet échange, Michel Blanc évoque sa carrière, ses choix artistiques et les moments marquants de sa vie professionnelle. "Beau Geste" souligne les réflexions sincères et l'humour caractéristique de Blanc, offrant un aperçu précieux de sa vision de l'art et de la scène. Ce portrait intime met en lumière l'impact durable de Michel Blanc sur le paysage culturel français.
Transcription
00:00Retourner sur les bancs de l'école en sa compagnie, c'est l'assurance de traverser 45 ans de cinéma.
00:17« Pierre, oh, on se rejoint dans la cour ? » « J'arrive ! »
00:21Là où Jean-Claude Dusse croise Monsieur Hir, où l'amant de Depardieu rencontre un Birkab, où un paysan aigri rejoint un commissaire.
00:33Lui qui a tourné pour André Téchinet, Claude Berry, Robert Altman ou Roberto Benigni aura réalisé 5 films et presque autant de succès.
00:41Alors qu'en grâce à son nouveau film, le voici renvoyé en primaire, nous nous sommes dit, c'est l'occasion de le croiser à la récré.
00:47« Bonjour Michel. » « Bonjour Monsieur Pierre. » « Tous nos jouets sont là. » « Oui, on va faire une petite course. »
00:53« En fait, on se retrouve dans cette école et vous n'êtes pas professeur, contrairement à ce qu'on pourrait croire, vous êtes élève. » « Oui. »
01:03« Pourquoi tu ne sais pas lire ? » « Je ne sais jamais rentrer dans ma tête et puis après j'ai oublié. »
01:08« A-U ? » « Non. A-U, ça fait O. » « Ah non, ça fait A-U. » « Ah non, ça fait O. »
01:15« Et P-H, ça fait F. » « Non, tu déconnes. » « Non. »
01:19« Quel titre extraordinaire, Les Petites Victoires. » « Les Petites Victoires, c'est que moi je retourne et je commence à apprendre à lire.
01:26La petite victoire, c'est que le village revit, que le bistrot rouvre, ce qui n'est pas une mince chose en Bretagne.
01:38Et donc, c'est une accumulation de petites victoires comme ça qui font que ces gens-là, à la fin de l'aventure, sortent renforcés. »
01:48« Tu ne sais même pas tenir ton crayon, bouffon. » « Et toi, tu es moche comme ton père. » « Quel nage. » « Crétin. »
01:54« C'est le scénario ou c'est le personnage qu'on vous proposait, qui vous a accroché d'abord ? »
01:58« Le personnage m'a d'abord accroché, évidemment. C'est souvent comme ça que ça démarre.
02:02Mais le scénario était à la hauteur et je me suis dit, voilà, il y a un bon scénario, il y a un bon rôle, donc il faut fonctionner. »
02:10« Vous aviez vu le premier film de Mélanie Offray, Roxane ? » « Non. » « Ah, il faut le voir. » « Oui, je sais. »
02:15« Il faut le voir. Cette histoire où Guillaume de Tonquedec récite du Cyrano à ses poules, toujours en Bretagne, mais c'est une merveille aussi. »
02:23« Il y a les Bretonnes. » « Les Bretonnes. » « Des environs de 20. »
02:26« Quand vous lisez un scénario de comédie, quel que soit le registre de la comédie, au bout de quelques pages, vous savez déjà si vous allez aller au bout ou pas ? »
02:36« Oui, parce que, par exemple, on m'a proposé un scénario de comédie, vraiment, et j'ai dit non, c'est trop caricatural, le personnage est trop un personnage de comédie.
02:49Alors que là, on rit, mais on rit de personnages qui sont vrais, qui sont profonds et qui ne sont pas forcément drôles à vivre. »
02:57« Ah, je crois que... » « Bon, alors je vous suis. » « Eh ben oui. »
03:07« Les manteaux accrochés, tout ça. » « Ben oui, il n'y a pas le mien, mais bon... » « Ah, il y a le nom pourtant. » « Ben il y a le nom, mais donc... »
03:21« Tiens, je vais me mettre là. » « Ouais. C'est vrai que le plus dur, c'est de jouer avec des enfants et des animaux ? »
03:27« Oui, c'est ce qu'on dit, mais je préfère les enfants, parce qu'on peut les frapper, contrairement aux animaux, maintenant on ne peut plus. »
03:35« On lève bien les genoux ! Lève les genoux, je te les pète ! »
03:38« Mais... Non, je plaisante. Évidemment, les enfants, ça a des moments un petit peu de... où ils sont difficiles à contrôler, surtout que là, c'était avec des petits. »
03:47« Ouais, tout petits. » « C'était de 6 ans à 9 ans. Donc, il y avait une petite fille devant la table, enfin, devant moi, qui était assez surréactive.
03:57Et il y a des moments où il fallait réussir à la calmer, parce que juste pendant qu'on partait, elle me renversait ma trousse, par exemple, des trucs comme ça. Donc, voilà. Mais autrement... »
04:07« Il faut les amener à retrouver leur vrai naturel. » « Oui, absolument. Donc, il ne faut pas les brimer non plus. »
04:12« Et ça, Mélanie, là-dessus, a été formidable, parce qu'elle les a beaucoup entraînées, je dirais. Tous les matins, elle les entraînait.
04:21Et puis, elle avait établi des codes avec eux, c'est-à-dire des espèces de trucs de yoga. Quand ils étaient un peu trop excités, elle leur disait bon, on ferme les yeux et on visualise du vert. »
04:31« Je crois que c'est dans une salle de classe que, la première fois, on vous a proposé, Michel, de jouer. C'était en 3e, je crois. »
04:39« Ouais. » « Où un prof vous a proposé de monter sur scène. »
04:43« Oui, parce que c'était un prof de lettres, enfin de littérature, c'était au lycée, qui nous faisait jouer systématiquement un petit bout des pièces. »
04:54« Que vous appreniez ? » « Oui. Ah, c'est moi qui sonne ? Mais oui, alors attendez, on va remédier à ça. C'est la maîtresse qui m'appelle. »
05:04« Ah ben, c'est la nièce d'Annie Cordy. »
05:08« À un moment, on me dit, qui est-ce qui veut venir jouer ? C'était les Precieuses Ridicules. Moi, j'étais horriblement timide. Et là, ma main s'est levée presque malgré moi.
05:19Évidemment, j'ai été choisi, puisque quand vous ne voulez pas y aller, c'est vous qu'on repère. Et j'ai commencé à jouer. Et là, d'un seul coup, mes camarades de classe se sont mis à rire, etc.
05:34Et il y a eu un déclic dans ma tête. Je me suis dit, t'es mal à l'aise partout, sauf là. Donc, il faut que tu fasses ce métier, parce que c'est le seul moyen que tu sois à l'aise. »
05:44« Quand vous vous retrouvez avec la troupe du Splendide, quand on est dans la comédie, on va chercher son emploi, son rire à soi. Vous allez le trouver avec Amour... »
05:54« Avec Jean-Claude Duss. » « Avec Jean-Claude Duss, évidemment. »
05:58« À l'époque, c'était Amour, Coquillage et Crustacé. » « Et vous le construisez comment, ce Jean-Claude ? »
06:03« Je suis parti de manière un peu cérébrale. Qu'est-ce qu'il y a de plus déplacé dans un club de l'époque ? Parce que tous les types y allaient pour faire des rencontres.
06:13C'est quelqu'un, non seulement qui n'a aucune aventure avec une femme, mais en plus, à la limite, elle ne le voit pas. Il est presque transparent. »
06:23« L'histoire des Bronzés, c'est l'histoire d'un chef des sports qui joue, qui est un mec super bronzé, qui se lève toutes les bronzesses. Et c'est ça, c'est son histoire pendant une semaine du club. C'est ça le principal. »
06:34« En fait, quand on voit le film, on s'aperçoit très vite que le personnage principal s'appelle Jean-Claude Duss. C'est moi qui le joue.
06:41Et ce Jean-Claude Duss, c'est un type principalement intéressé par le côté drague. Comme il n'est pas spécialement à droit et qu'en plus, il est dans un milieu de gens bronzés, un peu musclés, grotesques,
06:52évidemment, ça ne marche pas très bien. Oui, c'est comme ça. Il rentre à Paris bredouille, mais en fait, c'est lui le personnage principal. Il faut bien qu'il s'accroche à ça.
07:04Parce que sinon, pour leur psychisme, ça ne serait pas dur. »
07:06« En fait, pour être vraiment honnête sur la construction du personnage de Jean-Claude, il y a aussi une forme de rire qui est plutôt jouisse new-yorkaise que parisienne
07:18que j'ai découvert dans les premiers films de Woody Allen. Et ça me faisait beaucoup rire. Enfin, cet amour... Cet amour, vous voyez ? Ça, c'est un lapsus.
07:28Cet humour-là me faisait beaucoup rire. »
07:31« Mais ce plaisir de la comédie et avec les amis, mais aussi cette recherche de films comme ceux de Woody Allen, ça explique que vous ayez été un des premiers à commencer à avoir un chemin plus personnel et adjacent ? »
07:47« Oui, quand j'ai commencé à prendre des cours d'art dramatique, je n'avais pas pour intention de jouer de la comédie systématiquement.
07:54J'ai travaillé Richard Troye avec Sylvain Shelton, qui était notre maîtresse à tous. »
08:02« Tati Daniel ? »
08:04« Tati Daniel, oui. C'est horrible. C'est le personnage qui entre en scène, qui attaque, et qui attaque avec un donk.
08:12Dans le donk, j'ai mis un mois et demi pour trouver le donk. Elle me coupait après. Je rentrais, je faisais tout le truc. »
08:20« Et après donk, il y avait quoi ? »
08:22« Et je disais, donk ! Elle me disait, non mon petit chou, reprenez, vous n'êtes pas dedans, etc.
08:27Après, donk, voici l'hiver de notre déplaisir, changé en un glorieux été par ce soleil diorque. »
08:33« Il y a, il y a d'abord. Et puis dans le violon, bien en place. Et puis le reste, pas du tout, ne fait pas de poésie. »
08:40« Ce qui est formidable, c'est que c'est une personne qui a une méthode. Et ça, c'est très, très rare. Elle nous a donné une méthode.
08:44Sa méthode, c'était le phrasé, qui m'a beaucoup aidé parce que je bafouillais. »
08:48« Et tu avais un polyte dans la gorge. »
08:50« Parce que dans tous les autres cours, c'était, finalement, ça revenait à travailler des textes ou des scènes suivant sa propre sensibilité.
08:58C'est-à-dire qu'il était question de talent. Là, il n'était pas question de talent, il était question d'une méthode. »
09:01« J'ai vu une fois une interview de vous qui m'a vachement plu. Vous disiez, quand on est jeune, on doit être un peu fou,
09:06on doit être un peu insolent, on doit être même irresponsable. Donc, j'ai jamais été jeune. C'est vrai ? »
09:13« Oui, oui, je suis passé, je dis souvent, je suis passé de l'enfance à la vieillesse, mais de l'enfance à...
09:22Et en plus, je me disais, pendant toute mon adolescence, j'étais extrêmement mal dans ma peau pour les raisons que j'ai expliquées.
09:29Et en plus, parce que j'ai commencé à perdre mes cheveux à 14 ans. Donc, je me suis dit... »
09:32« À 14, c'est tout. »
09:33« Et je me suis dit, tu vas être chauve à 16 ans. Et ça, ça m'angoissait terriblement. Donc, en blaguant, je disais à mes camarades du Splendide,
09:44j'ai eu une adolescence que je souhaiterais pas mon pire ennemi, mais c'est pas faux. »
09:58Mais oui, mais oui, mais non, Boges n'est pas fini. On y retourne avec Michel Blanc.
10:04« Il y a des rôles clés dans les films qui ne sont pas a priori des comédies. Il y a des rôles clés dans votre histoire.
10:12Il y a évidemment tenue de soirée. »
10:14« Je pense que c'est celui qui a déclenché le reste. Parce que quand on tournait, on se disait, mais on va se le prendre sur la tête.
10:19Les gens vont être choqués par les propos, par ce qui se passe, par le fait de nous voir avec Gérard dans des positions parfois contestables. »
10:28« Ambiguës. »
10:29« Non, elles étaient pas ambiguës. »
10:30« Sensuelle. Vachement sensuelle. »
10:32« Homosexuelles, en tout cas. Elles n'étaient pas ambiguës du tout. C'est bien ça le problème. »
10:41« Je me suis dit, mais comment est-ce qu'un homosexuel peut regarder ce film sans avoir l'impression qu'on se fout de lui ?
10:47Et ils m'ont donné l'impression qu'ils étaient contents parce qu'enfin, ils étaient considérés comme des gens normaux avec qui on peut rire. »
10:56« J'ai l'impression que les homosexuels, qui sont à l'aise, qui n'ont pas honte, sont contents du film.
11:09Je le sens avec des amis quand ils voient le film. J'ai l'impression, on me l'a dit, des amis me l'ont dit.
11:17Et puis d'autres sont extrêmement malheureux. Mais c'est normal, je crois qu'il y a...
11:25C'est un film qui peut être très dur pour certaines personnes et au contraire très réjouissant pour d'autres. »
11:29« Vous pensez aujourd'hui que le fait qu'il n'y a que les gays qui doivent jouer les gays... »
11:34« Si on part là-dedans, je fais plus ce métier. Vous savez pourquoi j'ai fait ce métier ? Pour ne pas être Michel Blanc.
11:40Alors si je ne peux jouer que ce que je suis, j'arrête. »
11:43« Vous êtes comme Bette Davis qui disait... »
11:46« En moins sexy. »
11:48« On est comédien pour échapper à soi-même. »
11:51« Oui, c'est totalement vrai, pour ce qui me concerne. »
11:54« Vous avez dit non à Sautet, qui vous proposait le rôle principal dans « Quelques jours avec moi ». »
12:00« Oui. Alors ça, c'est pour une raison simple... »
12:02« Que jouera Auteuil, puisque Blanc a dit non. »
12:04« Eh bien, ce n'était pas un second choix, Daniel. »
12:07« Non, non, non. »
12:10« Quand j'ai lu le truc, je me suis dit qu'il faut qu'il y ait une dimension de séducteur pour ce rôle. »
12:17« Et je ne l'ai pas. Je sais que je ne l'ai pas. »
12:20« Ça ne va pas fonctionner avec moi, donc j'ai dit non. »
12:22« Il ne faut pas aller contre son intuition, parce que c'est difficile. »
12:25« Sinon, on lutte tous les jours. »
12:28« C'est bien de jouer des choses... »
12:30« C'est pour ça que je fais ce métier. »
12:32« Des choses que l'on n'est pas. »
12:34« Mais il y a une dimension physique. Ça, on ne peut pas la changer. »
12:38« Si je vous demandais... »
12:40« C'est comme, qu'est-ce que t'emportes sur une île déserte ? »
12:43« S'il ne devait rester qu'une seule image de cinéma, vous la garderiez ? »
12:47« Comme ça, à chaud. Vous pouvez changer d'avis demain, mais pour aujourd'hui. »
12:50« Pour moi, la plus grande comédie qu'on ait jamais faite, c'est « To be or not to be » de Lubitsch. »
12:55« Pour plein de raisons. D'abord, parce que c'est extrêmement drôle, c'est extrêmement bien fait. »
12:59« Et surtout, faire une comédie qui se passe en Pologne, à Varsovie, occupée par les nazis. »
13:05« Et faire un film d'une drôlerie incroyable, pour un acteur, c'est très bouleversant. »
13:11« Parce qu'il y a des personnages principaux, puis il y a des halbardiers. »
13:15« Et il y a un des halbardiers, justement, il est attrapé par les nazis. »
13:20« Et là... »
13:36« Il leur dit, si vous nous piquez, est-ce que nous ne saignons pas ? »
13:42« Ça, c'est... Ça me soppe ! »
13:48« C'est un grand film ! »
13:51« Merci, Michel. »
13:53« Ça va être l'heure de la cantine. »
13:55« Ah oui, ça, c'est vrai. J'ai pas pris mon goûter, c'est con ! »
13:58« Putain, c'est bien. »

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