• il y a 3 mois
Aujourd'hui dans le Grand entretien, nous recevons le nouveau ministre de la Justice, et seul prise revendiquée de gauche par le nouveau gouvernement, Didier Migaud.

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Transcription
00:00Et dans le Grand Entretien, ce matin avec Marion Lourdes, nous recevons le ministre de la Justice et garde des Sceaux numéro 2 du gouvernement.
00:08Vos questions, chers auditeurs, vos réactions, vos questions sur la justice et l'état de droit en France au 01-45-24-7000 ou l'application d'Inter.
00:19Bonjour Didier Migaud.
00:20Bonjour.
00:20Merci d'avoir choisi France Inter pour prendre la parole, une parole qui est attendue.
00:27Vous avez été nommé au gouvernement dans un poste stratégique et dans un contexte explosif au moment, Didier Migaud, où la justice elle-même est en accusation.
00:38Rien ne vous prépare à cette situation.
00:41Pourquoi ?
00:42Parce qu'en l'occurrence, la justice, c'est 70 à 80% des Français qui jugent qu'elle est trop laxiste, qu'il faut encore durcir le droit pénal.
00:53Et je ne vais pas vous apprendre qu'un certain nombre de vos collègues au gouvernement pensent la même chose.
01:00Il y a des situations tout à fait objectives, comme sur l'exécution des peines, qui a beaucoup progressé, comme le nombre de personnes qui, aujourd'hui, sont détenues en prison.
01:22Et je sais que c'est inentendable pour le citoyen.
01:26Vous êtes inaudible ? Vous avez conscience que le discours que vous portez est inaudible ?
01:31Je souhaite convaincre les citoyens qu'il faut faire confiance dans la justice.
01:36Et comme garde des Sceaux, ce sera à moi, effectivement, de veiller à ce que la justice puisse avoir les moyens de fonctionner.
01:43Je serai toujours le défenseur de l'état de droit, toujours le défenseur de la justice, toujours le défenseur des magistrats, sans être complaisant vis-à-vis de manquements qui peuvent effectivement intervenir.
01:57On va en parler, mais on vous a reproché votre silence ces derniers jours.
02:01Votre silence pour désigner des responsables dans des cas comme celui du meurtre et du viol de la jeune Philippine, on va en parler.
02:10On vous a reproché aussi de ne pas suffisamment soutenir les magistrats et ceux qui font fonctionner la justice en France.
02:18Pourquoi vous êtes au-dessus, Didier Migaud ?
02:21Injuste ? Vous savez que le garde des Sceaux ne peut pas intervenir dans le cadre d'une procédure individuelle.
02:28Ça ne m'empêche pas de ressentir aussi fortement que les citoyens l'émotion devant une telle situation.
02:36C'est une tragédie.
02:39Ma dernière fille, elle a l'âge de la victime.
02:41Donc vous vous rendez compte que je peux imaginer le drame que ça peut représenter pour la famille.
02:47Et je lui exprime bien évidemment toute ma sympathie.
02:52Alors qu'est-ce que je dois faire ?
02:54Essayer de travailler justement pour voir si la réglementation, si la législation est adaptée en toutes circonstances pour faire en sorte d'éviter ce type de situation et ce type de drame.
03:07Et là, je dois travailler avec le ministre de l'Intérieur.
03:09C'est ce que nous efforçons de faire d'ailleurs depuis quelques jours pour faire face à cette situation.
03:14Mais je comprends que l'émotion est telle qu'elle submerge bien évidemment tous les discours objectifs que nous devons nous efforcer de...
03:25Donc vous refusez l'idée qu'il y a eu une défaillance de l'institution judiciaire dans l'affaire qui a amené au meurtre de la jeune Philippe ?
03:32Vous savez que je n'ai pas à la commenter, donc je ne la commenterai pas.
03:37Je vais regarder si les procédures sont totalement adaptées face à ce type de situation pour, avec mon collègue de l'Intérieur, éventuellement proposer les modifications nécessaires.
03:51On doit ressentir... Pour moi, c'est un sentiment d'échec, bien évidemment, quand on est confronté à ce type de situation.
03:57C'est évident. Donc comment faire en sorte que ce type de situation ne puisse pas se reproduire ?
04:04Et ça, ce sera de ma responsabilité avec le ministre de l'Intérieur et l'arbitrage du Premier ministre par rapport à un certain nombre de propositions que nous pourrons lui formuler.
04:15Mais bien évidemment que c'est inacceptable.
04:17Vous avez prononcé le mot de manquement, Didier Migaud.
04:20En tout cas, l'affaire Philippine, le viol et le meurtre de cette étudiante, ils font débat notamment à cause des lenteurs
04:26qui ont conduit à remettre en liberté sur le territoire français le principal suspect qui était sous le coup d'une obligation de quitter le territoire français.
04:34On comprend que vous ne voulez pas commenter le cas individuel, l'affaire individuelle.
04:39Mais Emmanuel Macron lui-même, hier, a exprimé l'émotion de toute la nation.
04:43Il parle d'un crime odieux et atroce.
04:45Il dit qu'il faut chaque jour mieux protéger les Français.
04:48Ça veut dire quoi, ça ? Mieux protéger les Français ?
04:53C'est évident et la justice est là pour faire en sorte que de telles situations ne restent pas impunies.
05:01Je suis conscient de ce que la justice doit toujours s'exercer dans la sérénité nécessaire.
05:09Le temps de la justice n'est pas le temps de l'émotion.
05:12Donc, il faut pouvoir bien évidemment analyser en toute objectivité, en toute sérénité une situation.
05:19Mais on doit pouvoir gagner en rapidité et je suis tout à fait conscient.
05:26Mais à ceux qui vous disent que les Philippines n'auraient pas dû mourir, c'est le cas par exemple de Fabien Roussel,
05:30c'est le cas de l'autre bord politique, elles n'auraient pas dû mourir.
05:34Est-ce que vous, aujourd'hui, vous cherchez à donner du doigt à un responsable ou une responsabilité ?
05:40J'entends bien sûr ce qui est dit. Moi aussi c'est mon réflexe.
05:44Quand je vous dis, est-ce qu'il y a eu des manquements individuels ?
05:47Administratifs ou juridiques ?
05:49C'est ce qu'il faut que nous regardions avec le ministre de l'Intérieur.
05:52Est-ce que les textes, par exemple, sont suffisamment clairs pour que le juge puisse apprécier si la personne doit rester en détention ?
06:03La personne ne peut pas rester en détention de façon illimitée.
06:07Nous sommes un État de droit, il y a un certain nombre de règles qui s'imposent.
06:12Il faut voir si au niveau des procédures, des règles, quand il s'agit de renouveler, par exemple, une quatrième possibilité de sortir de la détention,
06:24il faut regarder s'il n'y a pas des choses à ajuster pour faire en sorte que ce type de situation n'arrive pas.
06:31Bien évidemment que ce crime est odieux, bien évidemment que Philippine n'aurait pas dû mourir.
06:35Donc vous êtes d'accord en fait avec votre collègue Bruno Retailleau qui dit qu'il faut faire évoluer l'arsenal juridique ?
06:42À partir d'un constat objectif, oui, il peut être possible de faire évoluer l'arsenal juridique.
06:49Donc on a mal compris quand on a eu l'impression qu'il y avait un désaccord entre vous, notamment sur le laxisme supposé de la justice ?
06:56Mais je ne peux pas être d'accord.
06:59On ne peut pas être d'accord quand on dit que la justice est laxiste et regarder les données objectives.
07:06La justice a tendance à infliger des peines plus lourdes que par le passé.
07:13Le taux d'exécution des peines est meilleur qu'il ne l'a été.
07:18Il n'y a jamais eu autant de détenus dans les prisons françaises.
07:21Alors est-ce que pour cela, ça signifie que tout fonctionne bien ?
07:26Bien sûr que non.
07:28Donc ce sera mon rôle de voir ce qui peut être amélioré pour que la justice est rendue au nom du peuple français.
07:35Il faut donc qu'il y ait une confiance des citoyens dans la justice comme dans toutes les institutions.
07:40Et ça, c'est un problème dans nos démocraties.
07:44Cette défiance que peuvent avoir les citoyens vis-à-vis des institutions, y compris vis-à-vis de la justice.
07:49À moins de faire en sorte que cette confiance soit beaucoup plus forte.
07:52Et par exemple, allonger la durée de rétention des étrangers clandestins dangereux que proposent les républicains ?
07:57Je ne vais pas vous répondre comme ça.
08:00Je veux travailler avec le ministre de l'Intérieur et proposer des solutions au Premier ministre et bien sûr au Parlement.
08:07C'est une question extrêmement importante et c'est une question de principe.
08:12Les députés et les républicains ont déposé une proposition de loi pour allonger nettement la durée de rétention des étrangers clandestins dangereux.
08:19Ce sont les députés qui votent la loi avec les sénateurs.
08:21La loi est votée par le Parlement.
08:23Vous pouvez l'approuver, la porter ou vous y opposer.
08:27Mais pourquoi je m'opposerais a priori par rapport à une proposition ?
08:33Il faut pouvoir en débattre, en discuter.
08:36J'ai été député pendant 22 ans et je me suis toujours battu pour que justement la fonction législative, la fonction de contrôle, la fonction de parlementaire soit davantage reconnue.
08:46Comme ministre, je ne vais pas bien sûr m'opposer à ces discussions parlementaires et je suis à la disposition du Parlement.
08:57Donc vous allez nous dire la même chose sur la proposition du Rassemblement national de rétablir les peines planchers qui vont être déposées également à l'Assemblée nationale ?
09:05C'est un sujet plus compliqué puisque vous avez des rapports qui expliquent que ça n'est pas obligatoirement la solution,
09:14que ça n'est pas obligatoirement efficace par rapport aux sujets posés.
09:17Dans ces sujets-là, évitons que l'émotion l'emporte, évitons que la démagogie et le populisme l'emportent.
09:26En revanche, en toute objectivité, je suis prêt à entendre un certain nombre de propositions, à y contribuer pour faire en sorte que la justice puisse s'exercer,
09:37au sens noble du terme, et que les citoyens puissent avoir confiance dans leur justice.
09:42Elle est rendue une fois de plus au nom du peuple français.
09:44Elle est rendue au nom du peuple français mais pas suffisamment bien à en voir par exemple le président du Rassemblement national, Jordan Bardella,
09:51qui parlait hier soir à la télévision de justice trop laxiste, qui veut pour le coup rétablir la double peine et qui critique extrêmement vertement le problème du garde des Sceaux en tant que tel.
10:05Il faut changer les textes, il faut également changer de manière de fonctionner dans les tribunaux.
10:11Est-ce que vous iriez jusque-là ou est-ce qu'une proposition du Rassemblement national pour rendre le droit pénal plus dur vous semble inutile ?
10:21Je suis favorable à tout ce qui peut contribuer au bon fonctionnement de la justice.
10:26Donc même à des propositions du Rassemblement national ?
10:28Mais écoutez, les sujets ne se posent pas ainsi et je ne vous répondrai pas sur l'émotion par rapport à une situation, même si je comprends cette émotion.
10:40Il y a toujours des tensions.
10:42On ne peut pas légiférer sur l'urgence, à partir de l'urgence, à partir d'un gain individuel.
10:48Et pourtant c'est ce qui se fait très régulièrement sur le droit pénal.
10:50Je le regrette, je le regrette parce qu'il faut pouvoir...
10:54On voit bien d'ailleurs que dans un certain nombre de situations, quand on légifère à chaud, on peut commettre quelques erreurs.
11:00Donc prenons le temps d'en discuter et ce temps peut être court.
11:05On peut très bien travailler sur un certain nombre d'améliorations.
11:09Mais voilà, dans le respect d'un certain nombre de principes, nous sommes un État de droit et ça je le rappellerai en permanence.
11:15Il y a toujours des tensions entre un ministre de l'Intérieur et le ministre de la Justice.
11:20C'est une tradition dans le fonctionnement d'un gouvernement.
11:24Depuis le début de cet entretien, vous dites systématiquement et vous l'avez répété plusieurs fois cet élément de langage avec le ministre de l'Intérieur.
11:31Et vous refusez, vous mesurez les mots que vous employez pour parler du Rassemblement National.
11:38Question toute simple, est-ce que le RN fait partie de l'arc républicain ?
11:44Écoutez, je suis ministre, il y a des députés, il y a des élus...
11:48Mais vous avez des convictions, répondez-nous !
11:50Mais j'ai des convictions, mais il y a des élus du suffrage universel, ils doivent être respectés et je dois répondre à chacune, chacun.
11:57Dans l'hémicycle, si j'ai des questions, s'il y a des propositions qui sont formulées, bien sûr qu'on doit en débattre.
12:03Ça ne veut pas dire que vous partagez les convictions de celles et ceux avec lesquelles vous parlez.
12:07Bon, puisque vous avez vos propres convictions.
12:09Et le Didier Migaud d'aujourd'hui, il n'est pas si éloigné que cela du Didier Migaud quand il était député socialiste.
12:17Donc j'ai des convictions, oui, oui.
12:19Je n'ai pas pu les exprimer à partir du moment où mes fonctions faisaient en sorte que je ne pouvais pas.
12:25Mais vous refusez de dire si le RN appartient à l'arc républicain ou non ?
12:28Honnêtement, ce n'est pas le sujet, il est député de la République.
12:33Ils sont députés de la République.
12:34Bon, alors, je sais bien que chacun joue sur les mots et tout ça.
12:39Ils sont là, ils sont députés, ils ont été élus par le suffrage universel.
12:43Eh bien, ils sont partie prenante.
12:44On a compris. Est-ce que le RN est un parti d'extrême droite ?
12:48Je le pense, oui. Il y a des positions qui sont prises par le Front National que, personnellement, je trouve d'extrême droite.
12:56Mais il faut pouvoir, bien sûr, prendre en considération toutes les propositions.
13:03Un député est un député, un parlementaire est un parlementaire avec tous les droits qui s'attachent à cette fonction.
13:09Mais vous n'êtes pas obligé de reprendre toutes les propositions des parlementaires.
13:13Il faut en discuter.
13:14Il se trouve qu'il n'y a pas de majorité au niveau de l'Assemblée nationale.
13:19C'est la difficulté, d'ailleurs.
13:20Didier Migaud, vous disiez tout à l'heure qu'il ne faut pas légiférer sous le coup de l'émotion.
13:24Et tout à l'heure, sur notre antenne, à 7h20, la présidente de la Fondation des Femmes, dans sa chronique,
13:28parlait, concernant l'affaire philippine, d'une « récupération politique obscène ».
13:33Là, je la cite. Vous partagez ces mots ?
13:35Je ne veux pas ajouter de la polémique dans ce type de situation.
13:41Mais récupération ou pas ?
13:42Je comprends l'émotion.
13:47Rendez compte, c'est perdre un enfant.
13:51Mais la récupération, elle existe ?
13:55Je ne veux pas vraiment raisonner comme cela.
14:01Il y a un sujet.
14:02Il faut voir comment je peux le traiter de façon objective,
14:06faire en sorte que ça ne se renouvelle pas,
14:09mais dans le respect de ce qui est notre État de droit.
14:13Donc voilà, c'est quand même ce qui fonde notre démocratie.
14:17Il faut qu'on en soit conscient.
14:19Bon, donc voilà.
14:20Mais je ne rejette pas un certain nombre de propositions.
14:23Vous posez chacun vos mots, Didi Migaud.
14:26C'est assez frappant de vous écouter lors de votre discours.
14:29Mais il vaut mieux.
14:30Je trouve que certains s'expriment peut-être un peu trop rapidement.
14:33Vous citiez vos modèles Robert Badinter.
14:36C'était également Robert Schumann.
14:38Christiane Taubira,
14:40qui est quelqu'un qui ne plaît pas énormément aux républicains
14:45avec qui vous siégez au gouvernement.
14:49Ce que vous appréciez chez elle,
14:52en quoi est-elle un modèle pour vous, Christiane Taubira ?
14:55Sa spontanéité, les valeurs qu'elle peut défendre.
15:00Bon, alors après, ça ne veut pas dire que vous êtes d'accord sur tout.
15:04Mais c'est une femme qui défend avec beaucoup de conviction,
15:10beaucoup de force, ses idées.
15:13Bon, j'ai cité aussi Badinter, j'ai cité Nicole Belloubet,
15:16parce que ce sont mes prédécesseurs immédiats.
15:18Eric Dupond-Moretti aussi,
15:20qui a présenté un bilan qui, par rapport aux moyens même de la justice,
15:27est un bon bilan.
15:28Il faut augmenter le budget de la justice.
15:31Vous savez, ça représente 2% des dépenses de l'État.
15:35C'est faible quand vous regardez ce que représentent ces pommes.
15:37Mais merci pour la transition, Didier Migaud, puisque justement,
15:40on a Jean-Laurent qui nous appelle au standard sur cette question.
15:43Oui, mais peut-être répondre plus complètement
15:47par rapport aux ministres de l'Intérieur et par rapport police-justice.
15:52Nous avons vocation à travailler ensemble.
15:55Or, bien sûr, chacun doit être dans son rôle
15:59au niveau de la défense de sa propre institution.
16:02Mais on doit travailler ensemble.
16:04Police et justice sont complémentaires.
16:06Nous recherchons, nous avons les mêmes objectifs,
16:09les mêmes buts, la justice.
16:12Bonjour Laurent et bienvenue sur France Inter.
16:14Bonjour France Inter.
16:15Vous aviez une question pour M. le ministre Didier Migaud.
16:19Tout à fait.
16:20Donc, en tant qu'ancien président de la Cour des comptes,
16:24si je ne m'abuse,
16:25vous aviez une approche, je dirais dire, gestionnaire,
16:30j'allais dire séquentielle.
16:32La question, comme la justice, c'est très complexe,
16:36est-ce que le Premier ministre vous a demandé
16:38d'avoir une approche plus pragmatique, transversale,
16:42c'est-à-dire ne pas se limiter uniquement
16:44au duo ministère de l'Intérieur et la justice,
16:47mais aussi voir tout ce qui concerne
16:49les questions d'insertion,
16:51par exemple, le recours très rare en France
16:55aux travaux d'intérêts généraux,
16:57parce que mettre des gens en prison, ça coûte très cher,
17:00il faut fabriquer les prisons, la surveillance, tout ça,
17:04enfin, c'est un système qui coûte très cher,
17:05qui enferme les gens, qui les rend encore pire
17:08qu'avant qu'ils ne sont entrés en prison.
17:10On est dans la justice punitive,
17:12on n'est pas dans la réparation,
17:14on entend tout le temps parler de réparation,
17:15mais si on avait une approche plus,
17:17c'est-à-dire un peu plus pragmatique,
17:21un peu moins idéologique,
17:23c'est-à-dire moins philosophique,
17:25peut-être qu'on n'aurait pas des gens dangereux,
17:29puisque certaines personnes,
17:31je peux vous parler de l'entourage...
17:33D'un mot, Laurent.
17:34Il y a des gens qui désœuvraient,
17:38qui ont eu des problèmes psychologiques,
17:40qui font tout pour retourner en prison,
17:42parce que c'est là, finalement, qu'ils trouvent leur place.
17:45Donc, il ne faut pas s'étonner qu'il y a des gens qui récidivent,
17:47parce que...
17:48Alors, il y a beaucoup de choses dans ce que vous dites, Laurent.
17:50L'accompagnement n'existe pas.
17:52On va laisser Didier Migaud vous répondre,
17:54et c'est une vraie question de fond.
17:55Oui, c'est une vraie question de fond,
17:57la prison n'est pas toujours la solution,
18:00il y a des peines alternatives,
18:01il faut trouver, bien sûr, les bons équilibres,
18:04c'est de la responsabilité du juge,
18:08du magistrat.
18:09Bon, je n'oublie pas que je suis aussi
18:12le garde des sceaux des victimes, aussi.
18:16Bon, donc, tout ça doit être pris en considération.
18:19Vous avez d'ailleurs un tissu associatif dense,
18:23avec des bénévoles qui font un travail remarquable,
18:26justement, sur l'accompagnement, sur la réinsertion possible,
18:30et mon objectif est aussi de les soutenir.
18:33Bien sûr que ça doit être pris en considération.
18:36C'est toujours un échec quand vous échouez
18:39dans la réinsertion,
18:41vous ne pouvez pas garder les personnes à vie.
18:43Donc, il faut faire en sorte que lorsqu'elles sortent,
18:45bon, elles ne récidivent pas.
18:48Le problème de la récidive est un vrai sujet.
18:51Et notre auditeur parlait de faire des économies,
18:53ça c'est une vraie question aussi,
18:54parce que dans vos documents préparatoires
18:56au budget pour l'année prochaine,
18:58il est prévu 500 millions d'euros de baisse de budget.
19:01Alors, évidemment, en tant que ministre,
19:02vous n'êtes pas content,
19:03mais en tant que président de la Cour des Comptes,
19:05ancien président de la Cour des Comptes,
19:07vous savez aussi qu'on va sans doute atteindre
19:08un déficit de 6% cette année.
19:11Il va falloir faire la part des choses.
19:12Vous êtes prêt à accepter quelle économie au final ?
19:16Je ne vais pas le dire là.
19:18Mais vous savez.
19:20Pourquoi pas, vous parlez aux citoyens d'Inter.
19:22Oui, oui, bien sûr, mais bon,
19:25je veux être correct aussi avec le Premier ministre,
19:28mes collègues,
19:29et vous avez une solidarité qui doit exister.
19:34Je suis tout à fait conscient, bien sûr,
19:36de la situation budgétaire de notre pays.
19:42J'ai suffisamment averti lorsque j'étais
19:44premier président de la Cour des Comptes.
19:47On a un sujet d'efficacité et d'efficience de la dépense.
19:51On a un sujet de priorité à définir.
19:55Mais on peut maîtriser, me semble-t-il, nos comptes,
20:00tout en ayant des priorités.
20:05J'estime que la justice doit être une priorité.
20:08Je rappelais tout à l'heure que la justice,
20:09c'est à 2% des dépenses du budget.
20:16Ça mérite mieux.
20:16Et d'ailleurs, il y a eu des états généraux,
20:19présidé par Jean-Marc Sauvé,
20:21l'ancien vice-président du Conseil d'État,
20:23qui a fait un travail remarquable et qui a montré
20:25justement que la justice avait besoin.
20:27Ça n'est pas qu'une question de moyens,
20:28mais c'est aussi une question de moyens.
20:30Donc, oui, je trouve que le rabot tel qu'il est présenté est trop fort.
20:38Donc, il faut pouvoir obtenir un certain nombre de rectifications,
20:42ne serait-ce que pour tenir des engagements qui ont été pris.
20:45Vous avez eu des garanties du Premier ministre ?
20:47Écoutez, ça se discute, ça se débat.
20:49Je ne veux pas anticiper sur les arbitrages du Premier ministre.
20:52J'espère le convaincre que la justice doit rester une priorité.
20:57Bonjour Arthur, vous nous appelez de Nantes.
20:59Bienvenue sur Inter.
21:01Oui, bonjour.
21:02Vous êtes avocat ?
21:03Tout à fait.
21:05Et vous avez une question pour le ministre de la Justice, Didier Migaud ?
21:11Tout à fait, bonjour Monsieur le ministre.
21:13J'aurais souhaité attirer votre attention sur les délais de procédure,
21:17notamment en matière civile.
21:18J'interviens davantage en matière de droit des successions,
21:22droit de la famille, sur certains sujets immobiliers.
21:24La justice du quotidien ?
21:25La justice du quotidien, et je constate effectivement dans mes domaines
21:29qu'il échaîne un petit peu moins les passions peut-être que le droit pénal,
21:33mais qu'on atteint des délais qui se rapprochent parfois du déni de justice.
21:37Parce qu'en matière de succession d'immobiliers, ici à Nantes par exemple,
21:41pour des affaires relativement courantes,
21:43on va avoir des délais de l'ordre de trois à quatre ans
21:46pour obtenir une décision, avec parfois beaucoup plus,
21:51et sans parler même d'un appel.
21:53Et des délais qui s'allongent de plus en plus, Arthur,
21:56nous arrivons au terme de cet entretien, mais Didier Migaud va vous répondre.
22:00En matière civile, il y a eu des progrès dans les délais.
22:04Alors il faut bien sûr amplifier ces progrès, je suis conscient.
22:08La lenteur de la justice est un sujet,
22:14donc je souhaite pouvoir travailler pour améliorer cela.
22:21Encore une question ?
22:22En un mot, Didier Migaud, parce qu'effectivement on arrive à la fin.
22:25On en a beaucoup parlé sur Inter du procès de Gisèle Pellicot,
22:27cette femme qui a été droguée par son mari
22:29et soumise aux viols et aux agressions d'une cinquantaine d'hommes.
22:32Ça repose la question de la définition du viol.
22:35Aujourd'hui, le consentement n'est pas compris dans cette définition.
22:37Le président voulait l'inscrire dans le droit.
22:40Est-ce que vous y êtes favorable ? Oui, non ?
22:41Oui, oui.
22:43C'est très bien, c'est très court, c'est très clair.
22:46D'un mot, pour vous, la justice, si vous deviez la définir en un mot,
22:50pour avoir votre vision de votre mission ?
22:54La justice, c'est faire en sorte que dans une société,
22:57vous puissiez vivre pleinement.
23:03C'est le respect de l'état de droit, donc il faut être attentif à cela.
23:08C'est l'indépendance aussi de la justice.
23:11C'est un principe ancien, mais j'y suis très attaché.
23:15Donc voilà, si je peux contribuer comme garde des Sceaux
23:18à faire en sorte, une fois de plus, qu'il y ait davantage de confiance
23:21des citoyens dans la justice, davantage confiance
23:25entre le garde des Sceaux et les magistrats eux-mêmes,
23:27entre tous les acteurs de la justice, je n'aurais pas perdu mon temps.
23:31Et vous, vous vous sentez bien comme homme de gauche dans ce gouvernement ?
23:35Écoutez, Michel Barnier m'a proposé d'y participer,
23:39en mettant en avance son esprit d'ouverture, de dialogue,
23:43d'un gouvernement qui ne serait pas monocolore.
23:46Donc je vais essayer de défendre mes convictions.
23:49Nous sommes dans une situation de blocage.
23:51Il n'y a pas de majorité. Il n'y a pas de majorité.
23:53Il faut bien avancer. Le pays ne peut pas être sans gouvernement,
23:56sans débattre sur un certain nombre de sujets.
24:00La dissolution n'est pas possible. Alors que fait-on ?
24:03On se menace les uns les autres de censure.
24:07Non, il faut essayer d'avancer pour privilégier l'intérêt général.
24:10Et la justice me paraît mériter le dépassement des clivages.
24:15Merci Didi Migaud, monsieur le ministre de la Justice,
24:18d'avoir été l'invité de France Inter ce matin.
24:21Bonne journée à tous.

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