Lundi 16 septembre 2024, SMART IMPACT reçoit Tania Chauvin (chargée de projet, Électriciens sans frontières) et Emmanuel Toussaint Dauvergne (directeur général, Batribox)
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00:00L'opération Pile Solidaire fait sa dixième édition, on en parle dans ce Smart Impact avec Tania Chavin, bonjour.
00:13Bonjour.
00:14Bienvenue, enchanté. Vous êtes chargée de projet de l'ONG Électricien Sans Frontières et puis Emmanuel Toussaint, bonjour et bienvenue.
00:20Vous êtes le directeur général de l'éco-organisme Batteriebox Électricien Sans Frontières qui existe depuis 1986.
00:27Allez, présentation rapide, quelles sont les missions de cette ONG ?
00:31Alors, Électricien Sans Frontières, effectivement, on a presque 40 ans.
00:34On est une organisation de solidarité internationale qui œuvre pour lutter contre les inégalités d'accès à l'eau et à l'énergie dans le monde.
00:43Et on fait ça avec le soutien de 1 200 bénévoles en France, la majorité issues du secteur de l'énergie français et qui apportent leurs compétences pour la mise en œuvre de nos projets dans le monde.
00:54Donc ça veut dire qu'ils partent, ils sont envoyés sur telle ou telle mission. C'est très concret, c'est du bénévolat ultra opérationnel.
01:01Oui. Alors avant de partir, ils suivent toute l'instruction du projet sur deux ans.
01:05Mais souvent, ils partent accompagner les entreprises locales dans les zones rurales où on intervient pour vérifier la qualité des travaux effectués.
01:14Et là, vous allez nous emmener au Togo. On va partir dans un village du Togo tout à l'heure.
01:18Emmanuel Toussaint, pourquoi vous avez lancé cette opération Pile solidaire ? Je crois que c'était il y a 10 ans avec Électricien sans frontières.
01:25En fait, on l'a lancé il y a 10 ans parce qu'on s'est rendu compte qu'il nous fallait aussi des vecteurs pour sensibiliser une plus grande partie de la population.
01:31Oui. Aux enjeux de recyclage.
01:33Aux enjeux de recyclage. Nous, notre responsabilité, ce sont toutes les batteries.
01:36Donc, on s'est dit qu'on voyait nos performances stagnées en termes de collecte, qu'il nous fallait un argument essentiel, peut-être plus social,
01:44qui incite les détenteurs à nous rapporter ce gisement-là. Donc, on s'est dit qu'il faut l'associer à une cause pour lui donner plus de sens
01:51et que l'ensemble des acteurs qui maîtrisent ce gisement puissent nous le confier.
01:55Et donc, il y a une première étape qui est une première étape très clairement pédagogique, c'est ça, dans les écoles, dans les établissements scolaires ?
02:01Exactement. En fait, on a sensibilisé les enfants parce que pour nous, ce sont les éco-citoyens de demain.
02:05On leur a dit, voilà, vous avez sûrement dans vos jouets, dans vos équipements à la maison, plein de vieilles piles, plein de petites batteries.
02:12C'est l'occasion de les ramener pour que, quelque part, vous vous rendiez compte qu'avec un simple geste,
02:16vous pouvez alimenter toute une chaîne de décision qui va permettre d'électrifier une école au Togo ou au Vélin.
02:22Oui, effectivement. Au-delà des écoles, et puis on va venir à l'opération de cette année dans le détail, mais au-delà des écoles,
02:28vous disiez, la collecte, elle stagnait un petit peu. On en est où ? La France progresse, malgré tout, si on prend les 10 ans ?
02:34Restons dans ce temps.
02:37La France progresse, bien sûr. On en est aujourd'hui à peu près à une pile et batterie sur deux.
02:41D'accord.
02:42Ce qui n'est pas mal, parce qu'on a un gros problème dans notre secteur d'activité, c'est que ça se cache bien.
02:48Vous en avez bien à la maison ?
02:50Je suis sûr que si, après cet entretien, je vais fouiller mes tiroirs, je vais en trouver beaucoup.
02:53Voilà. Donc, si vous avez une chaise cassée à la maison, vous allez vous en séparer.
02:56Par contre, si vous avez une pile usagée, vous n'allez pas forcément vous en séparer.
02:59Elle va rouler au fond d'un tiroir ou rester dans un jouet.
03:01Donc, l'idée, c'est justement de se dire comment on peut faire pour aller plus loin dans la performance.
03:05Alors, on va détailler ensemble ce que vous faites au Togo, Tania Chabat. Ce village s'appelle Feouda.
03:11Déjà, je veux bien que vous nous présentiez. C'est quoi ? C'est grand ? Il y a combien d'habitants ? Où on part avec vous ?
03:17On part dans un village assez typique de nos interventions. Donc là, c'est la région de Kara, au Togo.
03:23Donc, le Togo, on a un faible indice de développement humain, malgré des fortes politiques structurelles.
03:28Et dans les zones rurales, forcément, moins de développement des infrastructures.
03:33Et donc, le village de Feouda, on est à quelques centaines de kilomètres de la capitale, de Lomé.
03:39Et on est sur un village de 1200 habitants. Donc, on est vraiment sur un petit village,
03:45où il y a toutefois un dispensaire qui accueille les villages environnants.
03:49Donc, 5000 habitants qui vont dans ce centre de santé, notamment les femmes, pour accoucher.
03:55Et c'est là où l'accès à l'électricité peut avoir un impact particulièrement important.
04:01On nous le dit souvent sur place, c'est l'accès à la lumière pour l'accouchement de nuit.
04:05Qu'est-ce que vous allez y construire, dans ce village ?
04:08On va raccorder le village à l'électricité, notamment son école.
04:14Effectivement, cet aspect école dans les Sud, école en France,
04:19souvent les élèves d'ailleurs s'envoient des messages aussi autour du projet.
04:23Donc, l'école qui accueille actuellement 250 élèves, mais aussi l'atelier de tissage,
04:30puisque le village de Feouda est connu pour cette activité de tissage artisanal.
04:35Et donc, il y a une vingtaine de femmes, plus leurs apprentis, qui travaillent dans cet atelier.
04:41Sauf que forcément, sans accès à l'électricité, c'est plus compliqué.
04:45Évidemment, et c'est moins productif.
04:47C'est vous qui financez l'opération, c'est ça, tout simplement ?
04:50Tout à fait. En fait, l'idée que l'on a dans ce partenariat,
04:53c'est de se dire qu'à chaque fois qu'il y a des tonnes de piles qui sont ramenées,
04:57on les transforme en euros pour Électricien Sans Frontières,
05:01pour qu'ils finalisent un geste qui a commencé en Europe et qui a tout son sens en Afrique.
05:06Ça veut dire que cette opération, elle va être financée par les piles et les batteries
05:11qui seront récupérées là, cette année, puisque l'opération démarre là,
05:15dans quelques jours, mi-septembre, et ça dure jusqu'en avril, c'est ça ?
05:19Alors, je vais poser la question précisément,
05:22est-ce que le montant que vous allez donner à l'opération, alloué à l'opération,
05:27dépend précisément du nombre de piles et de batteries qui seront rapportées par les enfants ?
05:31En effet, non. On a déjà un accord préalable.
05:34Parce que sinon, les projets ne partent pas.
05:36Nous, on sait à peu près, en fonction des écoles qui vont participer,
05:39quelles seront les quantités qu'on va récupérer.
05:41Donc, on n'attend pas, mais il ne faut peut-être pas le dire aux élèves,
05:44on n'attend pas le résultat.
05:45Apportez-en le plus possible, de toute façon.
05:47Chaque tonne de plus amène des euros en plus aussi.
05:51Voilà une très bonne motivation.
05:53Chaque année, à faire plus que l'année passée, ou plus que l'objectif,
05:57parce que ça nous permet, nous, d'apporter plus,
05:59parfois pour un deuxième projet qui peut être financé.
06:02Je lisais en préparant l'émission que le Togo a l'ambition d'atteindre
06:05les 70% d'accès à l'énergie, là, d'ici à la fin de cette année,
06:10ou à la mi-décennie.
06:14Je veux bien qu'on soit assez concrets.
06:16Ça provoque quelle réaction en chaîne, dans un village,
06:19quand l'électricité arrive ?
06:22Vous avez commencé à en parler, mais il y a tellement de dominos
06:26qui s'activent positivement.
06:28C'est déjà un enjeu de possibilité de développement.
06:33On peut faire des choses sans accès à l'électricité,
06:36mais on les fait en prenant plus de temps.
06:38On a moins de temps pour faire d'autres choses.
06:40Il y a toute une série d'aspects, comme la sécurité la nuit,
06:44dans une zone rurale encore plus, qui sont affectés.
06:47Notre cœur de métier, c'est d'impacter les services collectifs.
06:52Certains acteurs ont pour vocation d'intervenir dans le secteur privé
06:56pour les entreprises.
06:58Nous, on va chercher à intervenir pour le centre de santé,
07:01là où il y a un impact immédiat sur la qualité des soins,
07:04sur l'éducation, avec la qualité de l'enseignement
07:06que les professeurs peuvent préparer,
07:08qui sont déjà affectés dans des zones rurales
07:10où ce n'est pas facile de rester.
07:12Il y a souvent un fort turnover des enseignants.
07:14Avoir leur logement de fonction éclairé,
07:17ça permet que le professeur dans cette zone reculée
07:19ne reste plus longtemps, comme ça a pu l'être en France
07:22il y a longtemps, mais pas si longtemps en même temps.
07:25– Ça vous a mené dans quel pays cette opération Pile solidaire ?
07:28– On a fait beaucoup de voyages.
07:29Je crois qu'on est allé au Népal, on est allé au Maroc,
07:31on est allé au Sénégal, on est allé au Togo.
07:34On est même allé en Guyane française, en Amazonie française,
07:38pour aller équiper des écoles, des partenaires,
07:41à chaque fois des puits pour pouvoir pomper de l'eau.
07:43C'est très concret, c'est ce qui nous a beaucoup plu dans ces projets.
07:46– Si on regarde, puisqu'on a l'ancienneté, on a 10 ans,
07:49dans le ou les premiers villages que vous avez aidés,
07:52vous avez vu cet effet boule de neige dont on parle,
07:55pour le développement par exemple, sur la création d'activités ?
07:59– Oui, en plus on a pris un engagement chez Electriciens sans frontières
08:03qui est assez en phase avec celui de Screllec,
08:05et celui de la durabilité et de la pérennité de nos investissements.
08:08Et donc on a un suivi à minima 10 ans après la réalisation
08:12des installations électriques dans un lieu.
08:14Donc on a un suivi qui est assuré en partie par les équipes
08:17qui sont parties sur place, les bénévoles, nos équipes salariées au siège,
08:21poursuivre, appuyer la communauté locale dans la maintenance de ces installations,
08:25s'assurer que ça produit l'impact qu'on attendait,
08:28qu'elles peuvent aussi développer de nouveaux usages.
08:31Donc oui, on a des résultats concrets de développement d'activités
08:35génératrices de revenus, on a une baisse des maladies hydriques,
08:38on a des effets très immédiats.
08:41– Et c'est ce que vous racontez évidemment aussi aux élèves.
08:44Je l'imagine, on va en profiter pour faire un peu de pédagogie
08:47sur le recyclage, Emmanuel Toussaint.
08:50Ça s'appelait Screllec Battery Box et ça s'appelle Battery Box.
08:54Vous récupérez quoi ? Dans nos piles, dans nos batteries,
08:57il y a des métaux, qu'est-ce que ça devient ces métaux ?
08:59– Alors oui, on récupère des piles et des batteries.
09:01Aujourd'hui, inférieur à 5 kilos, on va le faire simple.
09:04Et on va en récupérer des quantités assez importantes quand même,
09:07parce qu'on est au-delà de 6 000 tonnes aujourd'hui.
09:10Et dedans, ce gisement, on arrive à le valoriser à 80%.
09:13Et on extrait des métaux qui sont très importants
09:15pour pouvoir les remettre à disposition de l'industrie.
09:18L'idée, c'est de rentrer dans une boucle vertueuse en économie circulaire
09:21pour que l'ensemble des gisements que l'on collecte
09:24bénéficient à l'industrie nationale.
09:26– Il y a quoi ? Il y a du fer ?
09:27– Du fer, du nickel, du cobalt.
09:29– On parle souvent de mine urbaine.
09:31C'est un terme que j'ai appris grâce à cette émission.
09:34On est au cœur de cet enjeu.
09:36– On est au cœur de ça.
09:37Donc l'ambition, c'est vraiment de se dire que ce gisement-là,
09:40même une fois qu'il est arrivé en fin de vie, il a encore une valeur.
09:43Et il y a des gens qui sont susceptibles de lui donner
09:46la même valeur avec des réparations,
09:48voire en extraire les métaux pour les valoriser.
09:50– En plus, ça va s'accélérer.
09:51Les règles européennes viennent de changer.
09:53On parle d'un « big bang » de la filière recyclage en Europe
09:56et donc en France. Pourquoi ?
09:57– C'est vraiment le mot qu'il faut employer.
09:59Aujourd'hui, on est agréé sur une petite fraction des piles et des batteries.
10:03Demain, on sera agréé sur un gisement qui va décupler.
10:06Donc ça veut dire que l'ensemble des piles et des batteries
10:09qu'on va prendre en charge va considérablement augmenter.
10:11– Ça veut dire quoi ?
10:12Ça veut dire celles qui sont liées à toutes les mobilités douces, par exemple ?
10:15– Exactement. Mais même au-delà, les bus, les voitures,
10:18tout ça va rentrer dans une réglementation
10:20qui va nous obliger, nous contraindre à les prendre en charge.
10:23– Je reviens à l'opération Piles Solidaires, Tania Chavin.
10:26Donc ça commence là, mi-septembre, 16 septembre.
10:29Comment ça se déroule ?
10:30Est-ce qu'il y a peut-être des profs ou des directeurs,
10:33directrices d'école qui nous regardent ?
10:34Il faut s'inscrire ? Comment ça marche ?
10:36– On les invite à se connecter au site Piles Solidaires
10:40qui permet de se lancer dans l'action.
10:44Ensuite, en contactant Piles Solidaires, on reçoit son kit de collecte
10:48avec tout un kit pédagogique à l'initiative des professeurs,
10:51des écoles et des collèges.
10:53Et ensuite, les élèves, jusqu'à mars-avril, sont invités à ramener les piles.
11:00Et ensuite, la collecte est effectuée au sein de chaque structure.
11:04– Vous le disiez, les enfants sont souvent décrits comme des prescripteurs.
11:08Est-ce que vous avez pu évaluer le changement de comportement à la maison
11:13dans le prolongement d'une opération comme celle-là ?
11:17– Oui, c'est très clair.
11:18Je pense que ce sont vraiment des prescripteurs au sein de la maison.
11:20Et on s'aperçoit, lorsqu'on leur demande d'avoir une attitude responsable,
11:24ils sont beaucoup plus réactifs que les parents.
11:27Donc souvent, pour nous, on se dit, pour pouvoir toucher la famille,
11:30il faut passer par les enfants.
11:31Et les enfants, ils mettent en place des règles.
11:33Et je vous assure, si vous mettez votre batterie dans la mauvaise poubelle,
11:36vous allez vous faire rattraper par vos enfants.
11:38– Et donc, on est à une pile sur deux aujourd'hui, une pile et batterie sur deux.
11:41L'objectif, c'est quoi ?
11:42– L'objectif, il est européen.
11:44En 2030, il faut qu'on soit à un peu plus de 7 piles sur 10.
11:47– Oui, donc il y a du boulot.
11:49– Il y a du boulot.
11:50– Et c'est une œuvre collective, on l'a bien compris.
11:52Merci beaucoup.
11:53Merci à tous les deux d'être venus nous présenter cette opération PileSolidaire
11:57qui dure jusqu'à mi-avril, c'est ça ?
11:59– Jusqu'au printemps.
12:00– Jusqu'au printemps, on ne va pas être trop précis
12:02parce que ça permet d'ouvrir le plus large possible.
12:04Merci beaucoup.
12:05On passe à notre rubrique Innovation tout de suite.
12:08On va justement parler de métaux, on va parler de lithium.