Manuel Bompard, coordinateur de LFI et député de la 4ème circonscription des Bouches du Rhône est l'invité des 4 vérités.
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00:00Bienvenue dans les 4V. Emmanuel Bompard, le Premier ministre Michel Barnier continue les consultations pour constituer son futur gouvernement.
00:09Est-ce que vous avez été invité à venir discuter, échanger avec lui à Matignon ? Et si c'est le cas, est-ce que vous irez ?
00:15Alors non, nous n'avons pas été invités et nous avons dit dès sa nomination qu'en ce qui nous concerne, il est évident que la nomination de Michel Barnier
00:25est une négation du résultat des dernières élections législatives et que notre volonté était de déposer une motion de censure pour censurer et renverser ce gouvernement.
00:34Mais vous iriez discuter quand même avec lui à Matignon s'il vous convient ?
00:37D'abord je tenterai avec mes collègues du Nouveau Front Populaire de le censurer parce qu'il me semble qu'il n'est pas acceptable dans une démocratie
00:46que lorsqu'il y a des élections, lorsqu'il y a un résultat de ces élections et que le Nouveau Front Populaire arrive en tête,
00:51on se retrouve avec un Premier ministre issu d'un groupe qui a moins de 40 députés.
00:54Donc si cette semaine par exemple il vous convient comme avec d'autres groupes, vous n'y allez pas ?
00:58J'en parlerai avec mes collègues mais je crois, il me semble en tout cas, que d'abord notre volonté est effectivement de le renverser.
01:05L'entourage de Michel Barnier assure qu'il y aura des gens de gauche dans son gouvernement. Est-ce que vous y croyez et à qui vous pensez ?
01:12Non je n'y crois pas et je pense que toute personne qui rentrerait dans ce gouvernement ne pourrait pas être considérée comme une personne de gauche comme vous dites
01:20puisqu'il me semble que ce gouvernement est un gouvernement qui s'inscrit clairement dans une orientation dans la continuité du macronisme
01:27et encore plus à droite sans doute puisqu'il a été installé suite à un accord, tout le monde le sait désormais, entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen.
01:35D'ailleurs on voit bien qu'il donne des gages désormais à cet accord.
01:38Alors je pense que vous évoquez cette information de nos collègues de France Info qui a été publiée hier
01:43selon laquelle le nouveau Premier ministre réfléchirait au retour d'un ministère de l'immigration
01:48comme celui qui avait été créé par Nicolas Sarkozy lors de son élection en 2007.
01:52Alors en fin de journée Matignon a tempéré expliquant que le Premier ministre cherchait la meilleure formule pour traiter cette thématique de l'immigration.
01:59Comment vous avez réagi à cela ?
02:01J'ai trouvé ça insupportable d'abord parce qu'au deuxième tour des élections législatives
02:06il y a eu un mouvement très important dans le pays pour empêcher l'extrême droite de s'emparer du pouvoir
02:11avec des gens qui parfois ont voté pour des candidats avec lesquels ils ne partageaient pas d'ailleurs un certain nombre d'options politiques
02:16mais en se disant on ne va pas permettre l'accession au pouvoir du Rassemblement National et de l'extrême droite.
02:21Et on a l'impression qu'il y a une forme de renversement de cette logique avec la nomination de ce gouvernement
02:26avec cet accord entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen et qui se traduit maintenant par des annonces.
02:30Un accord que dément Marine Le Pen et Emmanuel Macron.
02:34Sauf que nous verrons bien qu'au moment du vote sur la motion de censure que nous allons déposer
02:39cet accord va apparaître au grand jour.
02:42Évidemment sur le fond il est évident qu'une mesure comme celle-ci est une pure mesure de communication.
02:47Ce ministère de l'immigration a été mis en place sous Nicolas Sarkozy.
02:51Il avait été supprimé trois ans plus tard.
02:53S'il avait été supprimé trois ans plus tard c'est sans aucun doute parce que ça ne servait à rien.
02:56Parmi les premières urgences auxquelles doit faire face Michel Barnier il y a cette question du budget.
03:01Le nouveau Premier ministre ne s'interdit pas, dit-il, une plus grande justice fiscale.
03:06Est-ce que vous y avez vu là un signal positif et encourageant à vos yeux ?
03:10Dans ce cas-là qu'ils disent qu'est-ce qu'il s'apprête, qu'est-ce qu'il est prêt à faire
03:15pour permettre effectivement une plus grande justice fiscale.
03:18Ce que j'ai noté par ailleurs c'est que le Premier ministre Monsieur Barnier
03:21lors de ses premiers déplacements il s'est rendu par exemple à l'hôpital
03:24en disant de toute façon il va falloir faire des économies.
03:27Or tout le monde sait aujourd'hui que si on reste dans la logique qui a été celle d'Emmanuel Macron,
03:31c'est-à-dire de distribuer des cadeaux à une petite minorité de la population,
03:35les plus riches, les grandes entreprises,
03:37de demander à l'ensemble de la population, à tous les autres,
03:40de faire des sacrifices financiers,
03:42alors on va avoir une situation qui va être encore plus cataclysmique qu'aujourd'hui.
03:46Ça veut dire que vous dites quoi Michel Barnier ?
03:47Il faut augmenter les impôts, c'est ça votre solution ?
03:49Non, je dis il faut augmenter les recettes de l'État
03:51et ces recettes de l'État elles nécessitent effectivement
03:54d'augmenter la participation des plus grandes fortunes de ce pays,
03:58des plus grandes entreprises à la solidarité nationale.
04:01Et j'aimerais que dans le débat public,
04:03quand on dit ça, on n'essaie pas de faire croire qu'il s'agit d'augmenter l'impôt
04:07de chacune et chacun des Françaises et des Français,
04:10parce que ce n'est certainement pas le cas.
04:11On dit les plus riches, à partir de combien en France on est riche selon vous ?
04:15Écoutez, la proposition que nous avions faite de réforme fiscale,
04:19réforme de l'impôt sur le revenu, réforme de la CSG,
04:22amenée au résultat suivant, 93% des Françaises et des Français
04:26payaient moins ou autant d'impôts qu'aujourd'hui,
04:28et il y avait 7% qui seraient amenés à contribuer davantage.
04:31À partir de quel salaire par mois, vous considérez quelqu'un est riche en France ?
04:34Moi, mon sujet, ce n'est pas à partir de quand on est riche ou pas riche,
04:37c'est à partir de quand on considère qu'il faut contribuer davantage qu'aujourd'hui.
04:41Là, c'était à 4 000 euros pour une personne célibataire sans enfant.
04:454 000 euros, on considérait qu'elle pouvait contribuer davantage.
04:48Mais bien évidemment, l'effort devait être concentré d'abord sur les 1% des plus riches,
04:52sur les 0,1% des plus riches, qui aujourd'hui, toutes les études le disent,
04:56ne payent pas autant d'impôts proportionnellement à leur revenu
04:59que les classes moyennes en particulier.
05:01Donc, il faut davantage de justice fiscale.
05:03Ça passe par une réforme de l'impôt sur le revenu,
05:05ça passe par la réintroduction de l'impôt de solidarité sur la fortune, par exemple.
05:09Vous savez, depuis qu'Emmanuel Macron est arrivé au pouvoir,
05:11nous avons renoncé, l'État a renoncé à 50 milliards d'euros de recettes par an.
05:15Et aujourd'hui, on nous dit qu'il faut aller chercher 27 milliards d'euros
05:19dans des coupes, dans le budget de l'hôpital, dans le budget de l'éducation nationale.
05:22Dans les arrêts maladie, par exemple, le patron de l'assurance maladie
05:26a donné une interview hier à nos confrères des Echos,
05:28estimant qu'il fallait s'intéresser très près à la question, évidemment, des arrêts maladie,
05:33parce que les dépenses liées aux arrêts de travail avaient augmenté de plus d'un milliard cette année.
05:37On serait à 16 milliards d'euros cette année.
05:39Il dit qu'il faut trouver un nouveau système d'anonymisation
05:42qui soit plus soutenable et plus juste.
05:44Mais pourquoi les arrêts maladie ont augmenté ?
05:46Parce qu'il y a plus de souffrance au travail, tout simplement.
05:49Donc, si on veut qu'il y ait moins de recours aux arrêts maladie,
05:51il faut lutter contre la souffrance au travail.
05:54Mais cette idée que pour faire des économies,
05:56c'est encore les gens qui ont des difficultés au travail, qui souffrent au travail,
06:02c'est-à-dire le plus grand nombre des Françaises et des Français qui vont être mis à contribution,
06:05est insupportable.
06:06Enfin, on a atteint l'année dernière un record historique
06:09du montant des dividendes versés aux actionnaires.
06:12Emmanuel Macron a distribué les cadeaux aux plus riches, aux grandes multinationales.
06:16Ça n'a servi à rien du point de vue de l'impact sur l'économie.
06:18Si on veut permettre de revenir dans des clous d'un point de vue du déficit budgétaire,
06:23c'est là où il faut concentrer les efforts.
06:24Pas sur le plus grand nombre des Françaises et des Français
06:26qui déjà tirent la langue pour pouvoir vivre face à l'augmentation des prix
06:29avec des salaires qui sont trop bas.
06:30Ce n'est pas à eux qu'il faut demander encore plus d'efforts.
06:32C'est à ceux qui s'en mettent plein les poches depuis des années et des années.
06:36Vous avez expliqué que vous souhaitez censurer le futur gouvernement de Michel Barnier.
06:39Est-ce que ça veut dire que vous allez déposer une motion de censure
06:41dès le début de la session parlementaire au début du mois d'octobre ?
06:43Oui, bien sûr.
06:44Oui, bien sûr, parce que la mise en place de ce gouvernement,
06:47encore une fois, il me semble en démocratie que quand on a voté,
06:50c'est le résultat qui doit s'appliquer.
06:52Pour que cette motion de censure soit votée,
06:54il faudra que ça soit largement votée dans l'hémicycle.
06:56Est-ce que ça veut dire que vous appelez les députés du Rassemblement national
06:59à voter votre motion de censure ?
07:00Non, ça veut dire que moi j'appelle tous les députés,
07:03tous les députés, les 577 députés à l'Assemblée nationale,
07:06à voter cette motion de censure.
07:08Quand vous déposez une motion de censure,
07:09c'est que vous souhaitez qu'elle puisse être votée par plus de la moitié des députés.
07:12En ce qui concerne les députés du Rassemblement national,
07:15j'ai bien compris qu'ils s'étaient engagés sur la voie de la trahison
07:18de leurs électrices et de leurs électeurs.
07:20Ils ont été élus sur l'idée qu'ils allaient permettre de rompre avec le macronisme.
07:25Or, qu'est-ce qu'ils sont en train de faire ?
07:27Ils sont en train de servir de béquille à la poursuite de la politique d'Emmanuel Macron.
07:30Marine Le Pen dit qu'elle place Michel Barnier sous surveillance
07:33et qu'elle n'exclut pas de voter une motion de censure contre lui
07:36si c'était le Rassemblement national qui déposait une motion de censure.
07:39Vous la voteriez, la motion ?
07:40Mais nous sommes la coalition qui disposons du plus grand nombre de députés à l'Assemblée nationale.
07:44Donc c'est nous qui allons déposer une motion de censure.
07:46Et c'est notre motion qui peut renverser le gouvernement.
07:50Et nous n'allons pas aller voter une autre motion déposée par un groupe avec moins de députés que nous.
07:55Mais si l'URL vote votre motion, on dira demain, il y a un accord entre le NFP et le Rassemblement national.
08:00Comme vous dites, il y a un accord par exemple entre Emmanuel Macron et le Rassemblement national pour Michel Barnier.
08:04Mais monsieur, quand vous déposez une motion de censure,
08:06ce n'est pas parce qu'il y a des gens qui ont des pensées politiques
08:09ou des projets politiques très différents qu'ils la votent
08:11que pour autant ils sont d'accord sur la politique qu'il faudrait mettre en place.
08:13Ça ne fonctionne pas comme ça.
08:14Il y a des systèmes institutionnels dans lesquels quand vous déposez une motion de censure,
08:17vous devez dire quelle est votre majorité alternative.
08:19C'est le cas, je crois, en Allemagne par exemple.
08:21Ce n'est pas le cas en France.
08:22Donc ce n'est pas parce que des gens qui ont des opinions politiques très différentes votent une même motion de censure
08:26qu'ils sont d'accord sur le projet politique à mettre en place.
08:28Vous avez défendu bec et ongle la nomination de Lucie Castex à Matignon,
08:32expliquant qu'il n'y avait pas d'autres hypothèses possibles pour le poste de Premier ministre.
08:36Vous vous retrouvez avec Michel Barnier,
08:37avec un gouvernement qui va peut-être être constitué au 4-5ème de membres des Républicains,
08:42avec l'idée peut-être pour certains de remettre en place un ministère de l'immigration.
08:45Est-ce que vous considérez que vous avez réussi votre coup ?
08:47Non, je considère qu'il y a un déni de démocratie insupportable et inacceptable
08:50et que le Président de la République a pris une décision qui est une décision extrêmement grave
08:54et que donc il est normal, de mon point de vue,
08:57que nous utilisions ensuite tous les moyens à notre disposition pour rétablir la démocratie.
09:01Rétablir la démocratie, ça veut dire censurer le gouvernement de Michel Barnier
09:04et ça veut dire engager la procédure de destitution du Président de la République
09:08parce que par cette décision, il a manqué à ses devoirs au respect de la Constitution,
09:12au respect de la souveraineté populaire.
09:14Donc il faut destituer le Président de la République, c'est la démarche que nous avons engagée.
09:17Même si ce n'était pas l'idée à vos yeux, Bernard Cazeneuve-Michel Barnier, c'était la même chose ?
09:20Je ne sais pas si c'était la même chose, mais j'ai vu que depuis quelques jours,
09:24il y a une fable qui consisterait à essayer de faire croire
09:26qu'en quelque sorte ce serait de notre responsabilité si M. Barnier a été nommé.
09:29Or tout le monde sait que même les conditions qui avaient été fixées par Bernard Cazeneuve,
09:33qui étaient assez minimalistes, mais par exemple l'idée qu'il fallait revenir sur la réforme des retraites,
09:37était refusée par le Président de la République, Emmanuel Macron.
09:40Donc il ne faut pas faire croire aux gens que les responsables de ce déni de démocratie, ce serait nous.
09:45S'il y a un responsable de ce déni de démocratie, il a un nom, il a une adresse,
09:48il s'appelle Emmanuel Macron, il habite à l'Elysée.
09:50Et donc c'est lui qu'il faut destituer.
09:52Il faut faire en sorte qu'on s'arrête avec un homme seul qui considère qu'il peut décider tout seul,
09:56même quand les Françaises et les Français ont décidé autre chose.
09:58Merci, vous êtes venu dans les cadres et ce matin.