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00:00Et nous sommes en ligne avec Renaud Girard, bonjour et merci de répondre à France 24.
00:04Vous êtes grand reporter, chroniqueur international au Figaro.
00:07La mort de ces six otages constitue-t-elle un tournant au sein de la société israélienne ?
00:13Pourquoi cette mobilisation ? Qu'est-ce que les manifestants perçoivent ? Un abandon ?
00:19Oui, alors la révélation de ces six otages qui ont été tués en captivité
00:26a provoqué un véritable choc psychologique dans la société israélienne.
00:32Mais celle-ci est toujours divisée.
00:35Faut-il, il y a une partie de la société israélienne qui met comme priorité désormais la libération des otages,
00:44enfin ceux qui restent, on ne sait pas du tout combien sont encore vivants.
00:49Et l'autre partie, celle qui soutient le gouvernement de Benjamin Netanyahou,
00:56qui dispose de 64 députés sur 120 à la CNESET, donc une majorité solide,
01:04qui considère que la priorité c'est l'éradication du Hamas,
01:11c'est la suppression de ce mouvement islamiste militaire.
01:17Alors évidemment que le gouvernement Netanyahou souhaite et fait tout militairement pour libérer des otages,
01:24il en a d'ailleurs libéré par des opérations militaires spécifiques, mais ce n'est pas sa priorité.
01:33Et c'est d'ailleurs pour cela qu'il refuse de céder à la revendication du Hamas,
01:39qui est ce qu'on appelle le corridor de Philadelphie, c'est-à-dire la bande de terrain qui sépare Gaza de l'Égypte.
01:50Et ce n'est pas à travers cette bande que passait évidemment toute la contrebande par des tunnels,
01:56des armes qui arrivaient au Hamas à partir du Sinaï égyptien.
02:03L'armée israélienne sur ce point précis, Renaud Girard, elle voudrait quitter le corridor de Philadelphie et la frontière avec l'Égypte.
02:12Quand la politique et l'armée s'opposent, est-ce qu'il n'y a pas un danger ?
02:17Alors l'Israël reste quand même une démocratie où les militaires obéissent au pouvoir civil.
02:29Et donc évidemment les généraux peuvent donner leur avis au gouvernement,
02:34mais ils doivent obéir au gouvernement comme en France, comme aux États-Unis ou comme en Angleterre.
02:40L'Israël n'a pas un gouvernement militaire, il a un gouvernement civil.
02:46Alors peut-être qu'eux considèrent pour des raisons proprement militaires que le Hamas ne peut pas être éradiqué,
02:56que c'est une illusion.
02:58En tout cas, j'ai rencontré, j'ai été reçu pendant une heure et demie par le premier ministre israélien Netanyahou en mois de juin dernier,
03:09et lui m'a dit à l'époque que son projet n'avait pas changé, sa stratégie n'avait pas changé depuis le 7 octobre,
03:20c'est-à-dire l'éradication complète du Hamas militairement et politiquement,
03:27et même il avait envisagé favorablement si par exemple les dirigeants du Hamas allaient se réfugier en Algérie,
03:35c'est une option qui lui allait par exemple.
03:37Avec quelle gestion de la bande de Gaza pour l'après-guerre ?
03:41Alors la gestion de la bande de Gaza pour l'après-guerre ce n'est pas clair,
03:47puisque l'autorité palestinienne qui a été chassée par le Hamas de la bande de Gaza en 2007 n'a aucune légitimité aujourd'hui.
04:04Certains avancent des noms comme Mohamed Darlan,
04:10où évidemment il y aurait la solution rêvée de libérer ce Palestinien prisonnier depuis 20 ans qui est Marwan Barghouti,
04:20qui est très respecté puisque c'était un résistant, mais qui reconnaît qu'il fait partie de l'OLP,
04:25qui reconnaît le droit à l'existence d'Israël,
04:28donc à la fois il est respecté par les Palestiniens,
04:30mais il a reconnu dans le passé le droit à l'existence d'Israël,
04:34et qui pourrait, c'est une sorte de Mandela palestinien,
04:36qui pourrait gérer effectivement cette bande de Gaza,
04:42sans doute avec les assistances militaires d'un contingent de pays arabes du Golfe,
04:49les Émirats, les Saoudiens, etc.
04:51Mais on en est encore extrêmement loin.
04:54Ça reste tout à fait hypothétique, et la guerre continue.
04:57On voit, pendant que vous parlez Renaud Girard, ces nombreux manifestants israéliens.
05:02On retrouve bien sûr les opposants habituels, j'allais dire à Netanyahou,
05:06mais cette fois c'est toute l'économie israélienne qui se met en grève générale.
05:10Ça peut mener à quoi ?
05:12À une fracture au sein de la société israélienne,
05:15à un mouvement de contestation qui pourrait ébranler la démocratie,
05:18et qui s'installe dans la durée ?
05:21Oui, alors on retrouve, si vous voulez,
05:25la division traditionnelle entre la gauche et la droite israélienne.
05:30Grosso modo, la droite israélienne considère depuis toujours,
05:36depuis le maître intellectuel de Benjamin Netanyahou,
05:43qui est Vladimir Chapoutinsky,
05:45mais qui est un homme qui est mort au début de la Deuxième Guerre mondiale,
05:50qui était de dire que la Palestine,
05:53c'est-à-dire de la mer à la rivière, au Jourdain,
05:56a été donnée par la déclaration de Balfour,
05:59mais dans son entièreté, à l'implantation juive.
06:06Alors que la gauche israélienne,
06:09représentée par les travaillistes Ben Gurion et les autres,
06:12ont toujours accepté, plus ou moins, de partager,
06:15dans une solution du partage,
06:18et c'est la solution des deux États, cette terre.
06:22Mais aujourd'hui, les partisans du partage,
06:27c'est-à-dire les partisans d'un État palestinien en Israël,
06:30sont de moins en moins nombreux, parce qu'ils disent,
06:33mais qu'est-ce qui nous garantit que cet État palestinien
06:35ne nous attaquera pas à nouveau ?
06:38En revanche, la gauche israélienne, aujourd'hui,
06:41est très forte pour demander la libération des otages.
06:46C'est-à-dire qu'en fait, vous avez la droite,
06:49qui est pour la raison d'État, si vous voulez,
06:52qui soutient l'État à poupées,
06:55et la gauche qui soutient les personnes, les individus,
06:59et en l'occurrence, ces otages,
07:02qui ont été pris en otages, il faut quand même le rappeler,
07:05à cause de la non-préparation et de l'irresponsabilité
07:09du gouvernement Netanyahou, qui n'avait absolument
07:12pas anticipé la possibilité d'une attaque terroriste
07:16de très grande ampleur le 7 octobre 2023.
07:19Ça a été résolument un aveuglement.
07:21Merci beaucoup Renaud Girard.
07:23Pour vos explications, on vous lit dans le Figaro.
07:26Merci encore et à très vite.