Les Évasions Célèbres - 1972 - Episode 03 - Latude ou l'Entêtement de Vivre

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DB - 31-08-2024
Transcript
00:30Sous-titrage Société Radio-Canada
01:00L'ÉTUDIANT
01:17Oh, mille pardons !
01:18C'est pas bien grave.
01:20Laissez, laissez, c'est du linge à blanchir.
01:22C'est pas bien fragile.
01:23Ah, mais permettez-moi de porter votre bagnée.
01:25C'est bien aimable à vous.
01:27Mais vous en auriez pour deux bonnes heures de marche.
01:29C'est la Bastille.
01:48Monsieur Latulippe ?
01:52C'est-à-dire, qui vous a donné cette adresse ?
01:56Le roi à qui vous l'aviez fournie.
02:10Vous l'avez trouvé ?
02:12À l'adresse indiquée.
02:14Bien.
02:16Ainsi, monsieur d'Henri...
02:18Ah, non, non, pardon, pardon.
02:19Henri Mazère de Latude.
02:22S'il vous plaît, monsieur le gouverneur.
02:24De Latude.
02:25Bâtard, mais bâtard du marquis de.
02:29C'est un détail que j'ai déjà signalé
02:31et auquel j'attache quelques prix.
02:33Mazère de Latude.
02:35Alors, monsieur d'Henri,
02:37on s'évade de Vincennes
02:39et on écrit à Sa Majesté
02:41et on se retrouve en Bastille,
02:44d'où l'on ne s'évade jamais.
02:46En Bastille, mais non en Bastillais,
02:48monsieur le gouverneur.
02:49Nous ne sommes ici que le temps d'une explication
02:52entre Jean de Bonnefoy.
02:54De fait, j'ai signalé à notre jeune ami
02:56cette particularité du règlement
02:58qui veut que tout évadé repris
03:01soit amnistié et libéré sur le champ
03:04s'il fournit les détails de son évasion
03:07et le nom de ses complices.
03:10Ah, oui, mais oui, bien sûr.
03:13Alors, monsieur d'Henri, je vous écoute.
03:17Détails, complices.
03:20Après quoi, je suis libre.
03:21Comme l'air que nous respirons.
03:23Eh bien, ce sera vite dit.
03:25Après cinq mois de Bastille,
03:27d'où on ne s'évade jamais,
03:30on me transfère à Vincennes
03:32où je n'eus qu'une pensée.
03:35J'y étais depuis neuf mois lorsqu'un matin,
03:37à la promenade,
03:40j'observe l'absence de l'abbé Saint-Sauveur.
03:43L'abbé Saint-Sauveur qui donne des leçons de latin
03:45aux enfants des officiers du château.
03:49Lorsque l'idée me prend...
03:51Vraiment, Saint-Sauveur était complice?
03:53Non, absent.
03:55Il y a deux ou trois enfants qui attendaient déjà pour la leçon.
03:58D'enfants innocents, vous faites des complices.
04:00Non, Saint-Sauveur, l'abbé,
04:02manque les enfants qui attendent pour la leçon.
04:06Je vais au premier garde et je lui dis...
04:08Son nom.
04:10Attendez, l'abbé Saint-Sauveur n'est pas arrivé,
04:12vous ne l'avez pas vu,
04:13et c'est vos enfants qui attendent, là, sous le soleil,
04:15qui se plaigneront à tes officiers, hein?
04:17Ah, si je n'étais pas là, je...
04:19Ah, si je n'étais pas là,
04:20je vais d'Itoise plus loin, au second garde.
04:22Son nom.
04:24Attendez, je lui répète ma chanson.
04:26L'abbé Saint-Sauveur, vous ne l'avez pas vu, hein?
04:28Vous ne l'avez pas vu, l'abbé Saint-Sauveur?
04:30Et il me regarde effaré.
04:32Il répond pas.
04:33Mais je suis devant la grille de la cour,
04:35face au porte-clés.
04:37Je ne connais pas son nom.
04:38Je pèse, le porte-clés est là.
04:40Je lui dis, l'abbé Saint-Sauveur, vite!
04:42Où est-il? Tu ne l'as pas vu?
04:43Vite, donne-moi la clé.
04:44Bougredane, je lui dis.
04:45Bougredane, pas de complice.
04:47Vite, la clé, vite, donne-moi la clé.
04:49Il me la fera.
04:50J'ouvre la grille.
04:51J'ouvre la grille et...
04:53Je referme.
04:55Hé, hé, hé, hé.
04:57Hé, dites-moi, l'abbé Saint-Sauveur,
04:59vous ne l'avez pas vu, hein?
05:00Non, je ne veux rien.
05:01Vous allez jouer?
05:02Vous êtes des bonnets!
05:04Quoi?
05:06Qu'est-ce que je vous fais?
05:08Quoi, 30?
05:10Quoi, un mois de cachot?
05:12Et vous, messieurs?
05:14Vous!
05:17Si vous venez à l'esprit de révéler quoi que ce soit
05:19sur cette farce propre à nous déconsidérer tous...
05:31Cueillis dans la cour de la Bastille,
05:34d'où on sort comme d'un moulin,
05:36et vous le voyez sans complice.
05:41Un mouchoir usagé.
05:44Une tabatière.
05:47Une montre en argent.
05:52Et une bourse.
06:02Une bourse vide.
06:04Oui, oui, oui.
06:06La chemise aussi.
06:09Vous m'avez menti, Saint-Marc.
06:11Vous m'avez volé, vous m'avez dépouillé,
06:13mais le roi le saura.
06:14Le roi est bon et juste, et vous serez châtié.
06:16Votre temps de cachot sera doublé, monsieur,
06:18pour avoir osé évoquer Sa Majesté
06:20dans une tenue bien indécente.
06:41Ah, Saint-Marc.
06:43Monsieur le lieutenant de police,
06:45très heureux de vous voir rétabli.
06:47Quelle nouvelle depuis ma dernière visite?
06:49Eh bien, mon Dieu, le comte de Cermoise est mort
06:52dans la tour de la comtée.
06:54Cela doit bien réjouir ses enfants,
06:56qui lui avaient fait maître.
06:58Des voilà riches.
07:00Ensuite?
07:02Le président Capelli est mort.
07:04Et vous?
07:06Et vous?
07:08Et vous?
07:10Le président Capelli est parti le 12 juillet.
07:13Est-ce tout?
07:14Eh bien, mon Dieu.
07:16Le jeune Latute, on m'a dit hier...
07:18Ah, oui, nous l'avons repris.
07:21Nous? Quel tour, quelle chambre?
07:23Je vous écoute, Saint-Marc.
07:28Beau cachot, depuis six semaines.
07:31Mais qu'avez-vous encore fait?
07:33Vous étiez libre, vous pouviez gagner quelques provinces,
07:35et laisser passer du temps.
07:38Si votre père n'avait pas pu me joindre,
07:40j'ignorais votre sort.
07:42C'est à Paris que je veux réussir.
07:44M. le lieutenant de police, à Paris.
07:46J'en ai le talent.
07:48Vous connaissez mon ennemi mortel, Mme de Montballon?
07:50Pas de nom, s'il vous plaît.
07:54Au-dessus d'elle, il n'y a que le roi.
07:56Alors, j'ai donc adressé une requête
07:58où je lui disais ma faute, mon repartir.
08:01Et votre adresse?
08:03Oui, mon adresse, oui, et j'attendais une réponse.
08:06Je voulais son pardon,
08:08et j'ai eu sa marre.
08:10C'est la soupe?
08:12Non, non, c'est de l'eau.
08:14On leur donne d'abord à boire, comme ça, ça coupe la faim.
08:17Daragon, vous regardez trop les rangs en face.
08:20Ils finissent par vous ressembler,
08:22et ça ne les embellit pas.
08:26Vous irez chercher de l'eau à la fontaine des gars?
08:28Oh, c'est haut.
08:30Moi, j'en bois.
08:32Et vous enlèverez les chaînes du prisonnier d'Henri,
08:35son temps de cachot est terminé.
08:43Lui donner la chambre de M. de Cernoise?
08:45Mais qui paiera?
08:47Son père, lieutenant-colonel au régiment d'Orléans-Dragon.
08:50S'il désire quelques suppléments, vous les porterez sur la pension.
08:53Vous êtes plein de mensuétudes, M. le lieutenant de police.
08:56Il y a un charme dans ce garçon.
08:58Oui, c'est vrai, un charme, quelque chose qui provoque l'excès.
09:01On ne peut lui vouloir que beaucoup de mal,
09:03ou beaucoup de bien.
09:05Il est du mois de mars, le mois des impatients.
09:08Et comme tous les bâtards, on le néglige, il se monte.
09:11Il réclame de l'encre et du papier, mais nous avons à son endroit
09:14des ordres formels contre l'encre et le papier.
09:17C'est qu'il a le démon d'écrire.
09:20Essayons une autre médecine.
09:22Accordons-lui un confident sur lequel il puisse s'étourdir de paroles
09:25jusqu'à peut-être en oublier la plume.
09:27Un autre confident? Un prisonnier?
09:29Mais ils s'enhardiront l'un l'autre.
09:31Non, pas un prisonnier.
09:33Quelque chose de plus neutre, une sorte d'animal.
09:36J'en ai déjà parlé au père qui consent à en prendre la charge.
09:40Un domestique.
09:42Ah!
09:46Voilà. Ça, c'est du linge.
09:48Il vient de la province, votre maître.
09:50Je crois, oui.
09:52Ça doit être beau, la province.
09:54Mais l'homme? Je ne l'ai pas encore vu.
09:56C'est son père qui a tout réglé.
09:58Un petit monsieur qui vient jeter sa gourme.
10:00Ça engrossera une ou deux filles et ça retournera faire le notaire.
10:03Non, non, c'est un prisonnier en face.
10:07M. d'Henri.
10:08Un prisonnier?
10:09Mais malheureux, il faut vous défiler de cette histoire-là.
10:12Le domestique qui va en Bastille n'en sort plus qu'avec son maître.
10:15S'il reste un an, vous restez un an bon, mais vingt ans.
10:18Je sais, oui.
10:20J'ai deux enfants. Les gages sont bons.
10:23Non, puis d'après le père, le jeune homme n'a rien fait.
10:26Rien, mon ami, rien de grave.
10:28Et j'ai des protecteurs, tiens, de moi.
10:30Le lieutenant de police est mon allié.
10:32Aujourd'hui même, il plaide ma libération.
10:34Dans trois jours, peut-être dix, mettons un mois, nous sommes libres.
10:37Et je te garde, je te garde pour la vie.
10:39Et en construisant ma fortune, je construis aussi la tienne.
10:43Oui, monsieur, oui.
10:45Mais le rien de grave, c'est quoi, au juste?
10:49Il n'y a pas confiance. Il veut tout savoir.
10:52C'est simple, Thomas. Voilà.
10:54Je suis une victime de la paix.
10:57Oui, de la mauvaise paix d'Aix-la-Chapelle.
11:00Il y a trois ans...
11:01Mauvaise, mauvaise. La paix, c'est toujours bon à prendre.
11:04Beaux bêtises, tiens.
11:05Il y a trois ans, j'avais un pied dans l'armée surnuméraire du génie.
11:08Oui, monsieur. Troupe des Pays-Bas.
11:10J'allais y mettre l'autre quand tout à coup pas.
11:12La paix me coupe les jambes.
11:14Alors, mon père m'envoie à Paris pour parfaire mon éducation mathématique.
11:18Paris, j'arrive, l'esprit à l'ébullition.
11:21Alors, c'est un bal, je veux danser.
11:24Oui.
11:27Mais personne ne m'invite.
11:31Je regarde pendant un mois passer les carrosses des grands qui sautent d'une fête à l'autre.
11:36Sans que jamais un seul n'effleure du regard le jeune ambitieux de Montagnac.
11:44Alors, père, qu'est-ce que tu aurais fait, toi, dans la place?
11:46C'est tout simple. Adieu, Paris. Vive Montagnac.
11:50Non, monsieur, non. Pas moi. Pas à 25 ans.
11:53La leçon était claire. Il me fallait un protecteur.
11:56Ignoré de tout, j'avais le choix.
11:58Je visais, O, une protectrice, la plus influente de France.
12:01Régnant sur le roi, donc sur le royaume.
12:04Madame, la marquise de...
12:06Non.
12:07Si.
12:08Pompadour?
12:09Oui.
12:11Mais comment l'intéresser?
12:12Quoi? À ma modeste personne? C'est bien simple.
12:15En lui sauvant la vie.
12:17Cela me revient très bien, Bérier. Je n'ai oublié que sa figure.
12:20Aimable, madame. Enjouée.
12:22Peut-être, il me semble, oui.
12:24Il avait assisté auprès de mes gens avec de la cérémonie, du mystère.
12:29Je le fais venir ici même.
12:31Il est entré par cette porte.
12:38Eh bien, monsieur, je vous écoute.
12:41Madame, ce que j'ai à vous dire, c'est que...
12:52Madame, malgré mon jeune âge, on s'accorde généralement à penser
12:55que je suis très capable de rendre les plus grands services
12:57à ceux qui voudraient bien s'attacher à ma personne.
13:00Comment dois-je l'entendre, monsieur?
13:03Sa majesté est ombrageuse sur le chapitre de mes attachements.
13:06Oh, non, non, non. Il y va de votre vie.
13:09Ah, non, monsieur. Sur ce chapitre-là, c'est moi qui suis ombrageuse.
13:12Madame, il s'agit d'un complot.
13:15Contre moi? Qui?
13:17Qui? Oh, c'est bien malin, ce...
13:20Enfin, monsieur, expliquez-vous.
13:22Hier, dans les jardins du Luxembourg,
13:25deux ombres tiennent sur vous des propos qui m'indiquent...
13:28J'ai en tête, monsieur, l'anthologie de toutes les chansons
13:30que l'on fait contre moi.
13:32Dites-moi deux de ces phrases, je vous en nommerai l'auteur.
13:35Madame, il ne s'agit pas de chansons, mais de poisons.
13:39Que vous allez recevoir.
13:41Qu'on va vous envoyer. Dans une enveloppe.
13:44Car j'ai suivi les deux traîtres jusqu'à la grand-poste
13:46où ils ont jeté leur paquet.
13:48Si cela est vrai, monsieur, vous aurez senté que...
13:51Non, madame.
13:53Votre protection, votre amitié,
13:56c'est le seul prix que je réclame.
13:58Comme ça?
14:00Oui, comme ça.
14:02J'avais gagné, je le voyais, je le sentais.
14:05Et les deux traîtres, on les a pris?
14:09Non.
14:12Enfin, oui.
14:15C'était moi.
14:18Il n'avait existé que dans mon imagination.
14:22Malheureusement, j'avais affaire à trop fin de mouche.
14:25Comme j'allais sortir,
14:27elle me demande d'inscrire mon nom et mon adresse sur un papier.
14:31Tout ébloui de ma réussite.
14:34J'inscris mon nom, sans même penser à déguiser mon écriture.
14:38Le lendemain, la lettre empoisonnée arrive.
14:46Oh, monsieur, du poison?
14:49Non, un peu de poudre à perruques avec du soufre.
14:52Je fis essayer la poudre sur deux ou trois animaux et une fille de cuisine.
14:57Inoffensive, mais la comparaison des écritures
15:01me livrait l'identité du coupable.
15:04Il voulait séduire, madame.
15:06Depuis deux ans, il n'a connu que les cachots, les prisons, Bastille, Vincennes,
15:10un geste de vous.
15:12Il m'a moqué, Berrier.
15:14Mais son dévouement vous serait total.
15:17Il est intelligent, adroit, inoffensif.
15:20Comme sa poudre.
15:22Vous plaidez bien, mon ami.
15:24Oui, oui, je vous vois bien.
15:29Pour si peu de choses, monsieur, maintenant, je vous croise.
15:33C'est sûr, nous sortons dans un mois.
15:36Deux semaines, Thomas. Berrier me l'assurait.
15:40La marquise est dans ses bons jours.
15:42Il a peut-être déjà obtenu mon pardon.
15:44Deux semaines, c'est beaucoup.
15:46Disons dix jours.
15:47Huit jours.
15:48Cinq, peut-être.
15:49Jamais.
15:52Vous êtes un fou.
15:54Je vous abandonne.
15:55Lisez.
15:56Allons liser.
15:57C'est de votre encre.
15:59Sans esprit et sans agrément.
16:02Sans être belle ni neuve.
16:05En France, on peut avoir le premier des avants.
16:08La Pompadour en est la preuve.
16:12Alors, j'enlève?
16:14Allez.
16:17M'expliquerez-vous.
16:19Je touchais aux buts.
16:20Vous étiez libre.
16:23Cet écrit remonta des semaines.
16:25À Vincennes, je crois.
16:27J'enrageais.
16:28Je laissais courir ma bile.
16:30Il faudra six mois.
16:31Un an, peut-être.
16:33Pour qu'elle accepte que je lui reparle de vous.
16:35Un an?
16:37Un an.
16:41Et tout ça pour un quatrain?
16:44Assez mauvais, d'ailleurs.
16:46Et qui a pu me dénoncer?
16:48Vous savez comme tout est scrupuleusement inspecté.
16:51C'est un certain Jean Lebel.
16:53Porte-clé.
16:57Il ne faudra pas m'en vouloir, monsieur.
17:00Vous ne me garderez pas un an.
17:03Et même la moitié.
17:33Mon cher Marie.
17:58Nous sommes bien heureux de savoir que tu vas au mieux.
18:03Et que ça ne sera plus très long pour toi.
18:12Et que ton maître est un bon jeune homme.
18:19Avec les gages, j'ai habillé les enfants de neuf.
18:28Et moi-même, un peu.
18:31Quand tu les reverras, tu ne reconnaîtras plus petit Pierre.
18:43On s'est perdu là-dedans, compagnon.
18:45Le seul compte de Berlurel.
18:47Tu peux nous dire où il est logé?
18:49On lui apporte un heure.
18:51Ça serait dans la Tour de la Liberté.
18:54Ah oui?
18:56C'est loin, la Liberté.
18:59Vous demanderez plus bas.
19:01Merci.
19:04Vous venez du dehors?
19:05Oui.
19:07Comment c'est en ce moment, dehors?
19:09Tout blanc, garçon.
19:11Tout blanc de neige.
19:14De neige?
19:25De neige.
19:34De neige.
19:38On l'a retrouvé ce matin.
19:45Vous dites mort.
19:48Ah, Thomas.
19:51Mon Thomas.
19:55C'est l'ennui qui l'a tué.
19:57L'ennui.
19:58Les murs.
20:02Il n'y a pas tenu trois mois.
20:04Même pas cent jours.
20:08Et moi, je résisterai, madame.
20:10Je vivrai.
20:12Cent ans, s'il le faut.
20:14Et je sortirai.
20:22Chaque année, c'est la même histoire.
20:24On monte de la cave, j'ai croix perdue,
20:26grillée par l'hiver.
20:27Aide-moi.
20:28Et dans deux semaines, elles sont toutes en feuilles.
20:31Vertes comme des salades.
20:33Ça tient à quoi, d'après toi?
20:35La confiance.
20:36La confiance dans le soleil.
20:38Elles sortiennent tout l'hiver.
20:40Et elles sont prêtes pour ouvrir le bal du printemps.
20:43Le même jour que la marquise.
20:46Tiens.
20:47Il est à sa figure de mendiant, aujourd'hui.
20:49Il vient nous émouvoir.
20:50Madame, vous me rendrez justice
20:52que ma dernière requête remonte à fort loin.
20:54C'est vrai.
20:55Nous allons essayer d'être gentils, hiverniers.
20:57Goûtez.
20:59Je suis encore ma reine, je n'arrête pas.
21:01Et lui est parrain, vous savez.
21:03Enfin, si vous préférez, intercessé,
21:06pour ce qu'il y a de pire en Bastille.
21:08Eh bien, il n'y a rien de pire.
21:10Il n'y a rien de pire.
21:12Il n'y a rien de pire.
21:15Eh bien, oui, madame.
21:16Je viens intercéder, solliciter, pour deux malheureux.
21:19Deux ? Et malheureux ?
21:20Vous savez que Marmontel a séjourné là-bas
21:22pour j'en sais qu'un sottise.
21:24Il m'a raconté, ça n'était pas si terrible.
21:26Je mens ?
21:27Sur un ordre de vous, madame,
21:28j'y retournerai bien volontiers.
21:30Volontiers ou pas, vous y retourneriez, c'est un fait.
21:35Moi, j'espère de vous un ordre pour quelqu'un
21:38qui n'a pas une expérience de trois jours,
21:40mais qui, depuis trois ans, dans la solitude...
21:42Quelle solitude ? J'ai permis le domestique.
21:44Il est mort.
21:47Pourquoi faut-il donc toujours ce désagrément de la mort
21:49autour de cet insolent latude ?
21:51Il trouvera un autre valet.
21:53Il n'en veut plus. Rendez-le libre.
21:55Il vous en sera éternellement reconnaissant.
21:57Non, vous me gâchez ma fête.
22:01L'autre, protégé, est de la même patte ?
22:03Il s'agit du jeune d'allègre.
22:05D'allègre, je ne vois pas. Qu'a-t-il fait ?
22:07Si ça fout de vous, échappe, madame.
22:08Si, si, ça me revient très bien.
22:10Encore un insolent. De Carpentras, je crois.
22:13Décidément, ces gens du midi ont la tête bien prondeuse.
22:18Berrier, il me vient une idée charmante.
22:22Puisque chacun d'eux des périls d'ennui dans sa cage,
22:25réunissez-les, j'en donne la permission.
22:28Mais ne me reparlez plus ni de l'un, ni de l'autre.
22:31Jamais.
23:10La commission.
23:41Non, c'est impossible, Latude. On ne peut même pas y songer.
23:44Très possible, d'allègre. Je l'ai fait cent fois.
23:47Entre le rêve et la réalité, il y a toute l'épaisseur de ces murs.
23:50Et nos bourreaux le savent bien.
23:52Et c'est notre chance.
23:54Ils dorment, nous rêvons. J'ai mon plan. Allez, allez.
23:56Asseyez-vous, mon ami, mangez, prenez des forces, vous en aurez besoin.
23:59Non, croyez-moi. J'ai des amis qui travaillent pour moi dehors.
24:02Et puis, d'un autre côté, votre père se démène.
24:05Tôt ou tard, l'un de nous sortira. Faisons le serment.
24:08Que ce premier favorisé emploiera sa vie à la libération de l'autre.
24:12C'est plus sûr, croyez-moi, c'est plus sage.
24:16Et c'est moi le naïf, hein ?
24:19C'est moi le rêveur.
24:22Vous me reportez trois ans en arrière, lors de mon arrivée ici.
24:26On m'affirme avec un charmant garçon nommé Abusaglo.
24:30C'était un juif portugais qui travaillait secrètement,
24:33du moins le croyait-il, pour le roi d'Angleterre.
24:36Nous faisons le même serment que celui que vous me proposez.
24:39Le premier sorti mettrait tout en oeuvre pour la liberté de l'autre.
24:43Alors ?
24:44Et alors, les affaires allaient bien pour lui,
24:46le prince de Contille lui-même s'employait à le sauver.
24:49Dans huit jours, il serait libre et le serment jouerait pour moi.
24:52Surprise ! Un matin, c'est moi qu'on vient chercher, qu'on libère.
24:57Le premier ?
24:58Eh oui.
24:59Mais attendez !
25:01On me précipite dans un fiacre, où je fais la connaissance de Saint-Marc.
25:08Bref, voyage de la Bastille à Vincennes, où on me jette un cachot.
25:14Le tour était bien joué, hein, d'allègre.
25:16Mais alors Abusaglo ?
25:18Convaincu que j'étais libre, il n'avait plus assez souci de moi.
25:22Ah !
25:24Les geôliers connaissent leur métier d'allègre, et moi le mien.
25:26Je me suis évalué de Vincennes et je me valorai d'ici.
25:28Mais pas sans vous.
25:29Votre plan ?
25:36Ben voilà.
25:37Tiens.
25:38Imagine.
25:42Attends.
25:43Tiens.
25:44Imagine que ceci soit une des tours de la prison où nous sommes affermés.
25:49Ah oui.
25:50Ça, c'est le seul point où je veux bien essayer de vous suivre en imagination.
25:52Oui.
25:53Bon.
25:54Cinq étages, hein.
25:55Nous sommes ici.
25:56Le gouverneur a tout prévu contre l'évasion, hein.
25:58Les huit tours.
25:59Voici la nôtre.
26:05Le fossé général.
26:07Le parapet.
26:08Bon.
26:09Les gros murs.
26:10L'écho intérieur.
26:11Bon.
26:12C'est ça.
26:13Cent hommes de garnison.
26:15Des sentinelles sur le parapet.
26:18Des doubles grilles.
26:19Des porte-clés somnolants dans les couloirs.
26:22Mais c'est impossible.
26:23Vous ne pourriez même pas descendre dix marches.
26:25Vous n'arriveriez pas dans les cours intérieurs.
26:28C'est un jeu stupide, l'intude.
26:31Parce que tu raisonnes en gouverneur d'allègre comme je voulais.
26:34Là.
26:35Tu me confirmes dans mon plan.
26:36Moi, je raisonne en l'intude.
26:38Donc, je rêve.
26:39Je ne descends pas.
26:40Je monte.
26:41Je m'élève.
26:42Par cette cheminée.
26:43Et une fois là-haut, je n'ai plus à me soucier de tes cent apportons de garde.
26:46Je les oublie.
26:47Je les méprise.
26:48J'oublie la bastille.
26:49J'abolie les murs.
26:50Je la transmue en une immense falaise de soixante-dix pieds de haut.
26:55Tu sautes peut-être.
26:56Non.
26:57Je descends par mon échelle de cordes.
27:00Je suis dans le fossé.
27:01Je franchis le parapet.
27:02Vingt pieds.
27:03Alors là, tu voles.
27:04Non.
27:05Je monte par mon échelle de bois.
27:07Je passe entre deux sentinelles.
27:09Et je suis libre.
27:10Vivant et libre.
27:11Fou, fou.
27:12Pauvre fou.
27:14Tu m'as fait rêver.
27:16Tu m'as fait espérer.
27:17Mais bien sûr.
27:20C'est aussi le rêve.
27:21Sinon, il faut mourir d'allègre.
27:25Il ne nous laisse rien d'autre.
27:26Et moi, je veux vivre.
27:29Nous allons commencer par les outils.
27:36Des tranchoirs.
27:38Des rabeaux.
27:39C'est l'histoire de quelques semaines.
27:41Il faudra les cacher.
27:42Eh bien, nous soulèverons cette dalle.
27:44Il y a là-dessous un espace d'une hauteur d'un homme.
27:47Nous nous dissimulerons tout.
27:50J'ai fait venir des douzaines de chemises.
27:52Nous les effilocherons.
27:54Et nous les tresserons.
27:56Bien solides pour faire une grande corde.
27:59Qui nous soutiendra dans la cheminée
28:01lorsque nous arracherons les barreaux qui l'obstruent.
28:04En prenant soin de les replacer chaque jour.
28:07Car nous bourrons l'oeil.
28:20On n'en sortira pas.
28:45J'ai prévu six mois pour cette opération.
28:48Ce sera l'hiver.
28:50Nous apporterons le bois pour notre échelle.
28:54Deux mois.
29:03Et maintenant, la grande échelle de corde.
29:07Il en faudra plus de mille pieds.
29:13Des mois pour les tresser.
29:17Des mois pour les échelons.
29:27Eh bien, qu'est-ce que tu as d'allègre ?
29:30Je commence à y croire.
29:31Ah, monsieur l'indormi.
29:33Il vous aura fallu 18 mois pour vous réveiller.
29:47Vous mesurez exactement cette pièce.
29:53Auriez-vous l'intention, monsieur l'officier,
29:57de nous donner un nouveau compagnon ?
30:00Ou de changer de chambre, peut-être ?
30:0214 pieds.
30:03Monsieur l'officier...
30:04Je n'ai pas de compte à vous rendre.
30:06Vous craignez donc tellement de déménager ?
30:08Non, nous craignons seulement d'être mis dans une autre chambre
30:11sans l'avoir mérité.
30:1219.
30:16Qu'ils nous ont devinés.
30:19Presque deux années perdues.
30:23Tu rêvais, imbécile, tu rêvais.
30:26Allez, dors, va.
30:30La nuit porte conseil.
30:35C'est quelqu'un qui a déménagé ?
30:37Oui.
30:38Quelqu'un qui va sûrement nous remplacer.
30:43Ah !
30:44Ah !
30:45Ah !
30:46Ah !
30:47Ah !
30:48Ah !
30:49Ah !
30:50Ah !
30:51Ah !
30:52Ah !
30:53Ah !
30:54Ah !
30:55Ah !
30:56Ah !
30:57Ah !
30:58Ah !
30:59Ah !
31:00Ah !
31:01Ah !
31:02Ah !
31:03Ah !
31:04Ah !
31:05Ah !
31:06Ah !
31:07Ah !
31:08Ah !
31:09Ah !
31:10Ah !
31:11Ah !
31:12Ah !
31:13Ah !
31:14Ah !
31:15Ah !
31:16Ah !
31:17Ah !
31:18Ah !
31:19Ah !
31:20Ah !
31:21Ah !
31:22Ah !
31:23Ah !
31:24Ah !
31:25Ah !
31:26Ah !
31:27Ah !
31:28Ah !
31:29Ah !
31:30Ah !
31:31Ah !
31:33Eh !
31:34Tenez, prenez.
31:36C'est du vent ?
31:37Ah, du meilleur, du meilleur.
31:38Et offert du meilleur cœur.
31:49Ah !
31:50Ah !
31:51Ah !
31:52Est-ce bien utile de nous enfoncer de ce bagage ?
32:02Utile.
32:03Quand nous aurons rampé de la cheminée, nous serons noir comme des savoyards.
32:05Tant mieux, nous ne serons que moins visibles.
32:06Ouais mais le fossé.
32:07Sinon nous y resterons peut-être des heures, trempés jusqu'à l'os.
32:10Mais la liberté, au moins, je la veux propre et chaude.
32:14C'est jeudi gras.
32:15Les Sardinèles touchent double ration de vin, et tripleront à la cantine.
32:20Et moi, dans six heures, le premier, je disparaîtrai là !
32:27Musique de l'Odyssée de Noël
32:42...
33:08...
33:37Musique de l'Odyssée de Noël
33:46Musique de l'Odyssée de Noël
33:55Les sentinelles sont là.
33:59Nous descendrons par la tour du trésor.
34:03Oui, j'ai peur, si j'ai le cassé.
34:06Si elle casse, c'est qu'on ne s'évade pas de la Bastille.
34:09Mais elle tiendra.
34:32...
34:56...
35:26...
35:37Il faut que j'en remue, mon Dieu !
35:40C'est la vie, ce qui nous glace jusqu'au sang.
35:42...
36:12...
36:17...
36:20...
36:26...
36:37...
36:42...
36:52...
37:01...
37:12...
37:23...
37:42...
38:04...
38:28Dans l'ivresse de leur liberté toute neuve, leur course les conduisit jusqu'en Belgique.
38:32Dans le même temps, la Bastille ronflait comme un poil.
38:36...
38:50Si vraiment il y en a deux qui ont pu se sauver.
38:53C'est bien qu'il neige, ça couvrira leur pas.
38:56Oui, mais combien de temps, Charlotte ?
38:58Pour d'allègres, ce fut vite réglé.
39:02Dès Bruxelles, il était repris par l'obstiné Saint-Marc.
39:06Plus habile, l'attude avait pu atteindre la Hollande.
39:09Respirant à plein poumon l'air salubre de la mer,
39:12il rêvait des Indes où la marquise n'aurait pas le bras si long pour l'atteindre.
39:16Il avait appris la méfiance.
39:18Mais il lui manquait l'argent pour payer le voyage.
39:21Aussi, son père, auquel il avait écrit,
39:23transféra-t-il les fonds nécessaires sur une banque d'Amsterdam.
39:26...
39:34...
39:46Mais oui, mais oui.
39:48Et pourquoi pas au peuple ?
39:50Il vous prêterait une meilleure oreille.
39:53Mais, par contre, sachez-le,
39:54il ne faut plus compter vous plaindre au lieu de tant de police.
39:57Qui n'est plus votre ami, M. Perrier,
40:01mais M. de Sartines,
40:04qui est des nôtres aujourd'hui.
40:07Alors, M. Lecomte, puisque vous connaissez la minceur de la faute
40:10que j'expie depuis six ans, intercédée pour qu'on me juge,
40:13je rendrai compte de tous mes actes,
40:15mais du moins, je connaîtrai la durée de mon châtiment.
40:17Quant et moi, monsieur, pour un défenseur scrupuleux de la justice.
40:21Vous aurez ce qui vous est dû dès aujourd'hui.
40:25...
40:27Le cachot du front.
40:29...
40:32Mon Aragon, vois-donc un peu qui je t'amène.
40:35C'est l'Arlène, vieux gars. Allez !
40:37...
40:42...
40:53...
40:56Trois mois, là-dedans, à cause de vous.
41:00C'est pas bien, ça.
41:02Monsieur Latune,
41:05il y en a qui crèvent au bout de trois semaines.
41:08Et moi, trois mois !
41:10Trois mois, à cause de lui !
41:14Trois mois !
41:16Trois mois !
41:17Trois mois !
41:19...
41:31...
41:35...
41:42...
41:50Votre rapport m'embarrasse, monsieur le chirurgien.
41:53Vous savez, je connais très bien l'oiseau sur lequel vous vous habituez.
41:57Pauvre oiseau, monsieur le gouverneur. Sans aile ni plume.
42:00Quant à mon rapport, il est strictement professionnel.
42:02Vous exagérez un peu, non ?
42:05À vous en croire, il devrait être mort.
42:09Il devrait l'être, s'il n'y avait en lui un entêtement à vivre,
42:12que l'on trouve généralement chez les animaux.
42:15Des dents raffendues au gel.
42:18Les deux derniers hivers ont été très rigoureux.
42:21J'ai dû tailler dans des boursouflures pourries de scorbute.
42:24Tout le corps est travaillé de rhumatisme et les yeux sont à demi éteints.
42:28Seul le cœur reste solide.
42:29Ah oui, le cœur.
42:35Je référerai, monsieur Dejean, je référerai.
42:38D'où ce chirurgien prétend qu'il doit sortir du cachot pour un logement plus salubre.
42:42Il recommande même l'air et l'exercice sur la plateforme.
42:45Évidemment, tout cela est assez fâcheux.
42:48Dans la bonne conscience, on nous demande d'oublier ce malfaiteur
42:51et non de le mettre à mort.
42:54Après tout, s'il est au point que vous me dites, nous n'avons plus à craindre,
42:57qu'il s'échappe.
42:59Mais, monsieur le lieutenant de police, sa nature est hors du commun.
43:03Si nous sortons d'où il est, je peux vous prédire que dans trois mois, par la nourriture,
43:07il aura recouvré ses forces.
43:09Et par l'exercice, dans un an, il n'y paraîtra plus de ses défaillances d'aujourd'hui.
43:13La folie d'intéresse sur le monde entier à sa cause le reprendra.
43:16Il écrira sans lettres.
43:19Prévé de papier.
43:21Mais il en fabriquera.
43:23J'aimerais savoir comment.
43:24Prévé de peint, humecté et travaillé en fine plaquette.
43:28S'il n'a pas de plume.
43:30De grosses arêtes de poisson feront l'affaire.
43:33De toute manière, pas d'encre.
43:36Et quand bien même il pourrait écrire, il lui manquera toujours l'entremetteur complice.
43:50L'abbé.
43:52Des commissions pour vous.
43:54Un mémoire pour sa majesté.
43:56Sur le moyen d'augmenter d'un vingtième la puissance au feu de ses armées en dotant les sous-officiers de fusils.
44:01Et un autre pour monsieur de Sartines.
44:04Sartines ? C'est de la dernière imprudence.
44:07Oui, on verra bien, donnez-lui toujours.
44:09Evidemment, la matière est assez dégoûtante.
44:12Mais l'esprit de saint n'est pas saud.
44:15Comment prévenir et supprimer la famine à l'aide de greniers de réserve ?
44:20S'il a d'autres idées de cet ordre, pourquoi ne pas lui procurer l'encre et le papier ?
44:25Monsieur le lieutenant de police, il inondera Paris de ses plaintes.
44:29Pas si vous le surveillez comme il doit l'être.
44:49C'est encore le petit homme ?
45:13Oui, je crois qu'il veut nous envoyer quelque chose.
45:16Ça y est !
45:23Fais pas chaud, je vais rentrer. Tu cherches la pièce demain.
45:35Cela fait donc treize ans que j'expie sans autre espoir de voir cesser ma torture qu'un miracle de la providence.
45:44Pauvre garçon !
45:46S'il y a seulement la moitié de vrai...
45:48La moitié ?
45:50Mais un centième, Mathilde, nous oblige à faire ce qu'il demande.
45:53J'irai voir ses amis, la baumelle, le chevalier de Migan et tous les autres.
45:57Tous ? On peut faire mes boutiques alors.
46:00Monsieur de Sartines a été très intéressé par votre mémoire sur les greniers d'abondance.
46:05Il offre quinze cents francs de pension si vous vous décidez en sa faveur.
46:10Et la liberté ?
46:11Et la liberté ?
46:13N'exigez pas trop.
46:15Mais tout, monsieur, tout ! J'exige tout !
46:17Pension, liberté, réparation.
46:19D'ailleurs, je vais le lui dire sans tarder.
46:22Quatre-vingt-douzième lettre.
46:24Et sur quel ton, cette fois ?
46:26Sans compter les supplics, les plaidoyers, les narrations de sa vie,
46:29qu'il a réussi à faire passer dehors par je ne sais quel canal.
46:33J'ai interrogé l'abbé Griffith, ce n'est pas lui.
46:37Je passe mon temps à le discréditer auprès de ses intercesseurs.
46:41A la vérité, il m'exaspère.
46:44Et je veux...
46:49Eh bien, Sama,
46:52c'est fini.
46:59Messieurs,
47:02cette nouvelle doit demeurer secrète dans l'enceinte de la Bastille.
47:06C'est effrayant, Mathilde.
47:08La pantamine aussi nous abandonne.
47:09Quelqu'un fait le tour des amis de M. Delatude
47:12et le présente comme un criminel endurci.
47:14Mais une nouvelle ne t'arrête pas de chanter.
47:16C'est que moi, j'en ai une de nouvelle
47:18et qui va faire chanter Paris et Tom Latude.
47:20Viens.
47:40La pauvre Badour est morte.
47:42M. Deluger, la démoniague, elle est morte.
47:45M. Delatude, votre ennemi l'a prostituée.
47:48Elle est morte.
47:50Badour est mort.
47:52M. Deludier, elle est morte.
47:54Nous allons vivre.
48:00Par cette proclamation d'une nouvelle secrète,
48:02vous avez corrompu la Bastille.
48:04Mais M. le lieutenant de police, je n'ai plus d'ennemi.
48:06J'ai commis une faute bien légère il y a 14 ans.
48:07Maintenant que la rancune qui me condamnait s'est éteinte.
48:09Comment pouvez-vous à ce point trahir la vérité ?
48:11Je dis moi que pour avoir été tenu 14 ans prisonnier,
48:13il fallait que vous eussiez commis un étonnant forfait.
48:16C'est une cruauté.
48:18C'est une logique.
48:20Les murs, M. Henry, garantissent l'ordre,
48:24la paix de la cité,
48:26la vertu publique.
48:28Non !
48:30Le mensonge et la corruption, vous les caressez
48:32parce qu'ils vous protègent, mais ils crouleront sur vous.
48:34Ils crouleront sur vous.
48:35Ils crouleront sur vous.
48:37Ils crouleront sur vous.
48:39Je ne veux plus le voir ici.
48:41Ils crouleront sur vous.
48:43Qu'il retourne au donjon de Vincennes
48:45et qu'on y oublie définitivement.
48:55Voici vos chemises, M. l'exemple.
48:57Merci.
49:00Vous avez parlé à votre soeur ?
49:02Oui, elle veut rester fille.
49:04Sa santé n'est plus si bonne d'ailleurs
49:06depuis que nous avons perdu un ami
49:08pour lequel elle se dévouait beaucoup
49:10il y a plus d'un an.
49:12Oui, je sais.
49:14Elle m'en a parlé.
49:16Ironie du destin.
49:18Ils sont protégés d'Henry.
49:20Le marquis de la Tude ?
49:22Oui, si vous voulez.
49:24Il est mort.
49:27Quelques jours après la marquise.
49:34Il fait froid.
49:40Il y a du brouillard aujourd'hui.
49:42Oui, c'est vrai.
49:44C'est un mauvais temps pour la promenade.
49:47Pour la promenade, oui.
49:49Mais pour l'évasion, c'est magnifique.
49:52À moi ! À la garde !
49:54Aide aux prisonniers !
49:56À la garde !
49:58Les prisonniers se baladent !
50:00À la garde !
50:01À la garde !
50:03Les prisonniers se baladent !
50:05À la garde !
50:07Par ici !
50:09Où ?
50:11Par ici !
50:13Avec moi !
50:16Là-bas !
50:18Je le vois, il est là-bas !
50:21Qu'est-ce qu'il a fait ?
50:23Rien !
50:25Par ici !
50:27Je l'ai !
50:31Par ici !
50:37Ouvrez !
50:39Monsieur, à cette heure, mais qui êtes-vous ?
50:42Un ami de M. Latude.
50:48Ou plutôt, mesdames, Latude lui-même.
50:51C'est impossible, monsieur. Le malheureux est mort.
50:54Vous connaissez son écriture ?
50:56Vous allez me reconnaître.
51:02C'est une question de patience, monsieur le comte.
51:05Il écrira,
51:07et je le prendrai.
51:13Est-ce qu'elle y est libre ? Elle a réussi ?
51:17N'ayez crainte, ils n'oseront pas.
51:20Le duc de Choiseul m'a accordé une audience.
51:23C'est un ministre. On n'arrête pas contre la volonté d'un ministre.
51:26On n'y allait pas, je vous en supplie.
51:28Si, je dois être réhabilité.
51:29Pour vous remercier, comme il convient,
51:32de tant de bienfaits.
51:37Restez !
51:39Ils n'oseront pas !
51:40Ils n'oseront pas !
51:58Marquis de Latude, pour le ministre du duc de Choiseul.
52:02En effet, monsieur.
52:04Lâchez-moi ! C'est une trahison !
52:07Lâchez-moi !
52:10Lâchez-moi !
52:17Ramassez-moi tout ça !
52:24Écrivez à qui vous plaira.
52:26Et donnez bien votre adresse, ça fera rire.
52:30Où m'emmenez-vous, cette fois ?
52:33Rassurez-vous, monsieur Henry.
52:35Nous avons enfin compris votre personnage.
52:37Vous êtes un fou.
52:39Alors, ni Vincennes, ni la Bastille.
52:42Charenton.
52:47Par un raffinement de cruauté,
52:49Saint-Marc devait aller plus loin pour briser Latude.
53:02Vous le connaissez ?
53:04Il s'appelait Dallègre.
53:09Dallègre.
53:12Dallègre, c'est moi, Latude.
53:14Ton compagnon de la Bastille.
53:16Tu te souviens ? La nuit de février.
53:20Je suis Dieu.
53:22Va-t'en, pêcheur.
53:32C'est un blasphème, bien sûr.
53:34Mais du moins, c'est inévadé d'entre les hommes.
53:39La folie ou la mort, hein ?
53:42C'est là-dessus que comptent mes bourreaux.
53:45Je vivrai, moi. Je vivrai.
53:48Latude ne devait plus s'évader.
53:50Après le Charenton des fous,
53:52il connut le bicêtre des bagnards,
53:54il ne devait quitter libre qu'en 1783.
53:57Tout cela, pour une inconséquence de jeunesse
54:00qu'il paye de 33 ans de captivité.
54:05Mais fidèle à sa promesse,
54:06il fit encore tant de bruits,
54:08mais là, ses cris à tant d'autres
54:10s'acharnaient si fort à vivre
54:12et hurlaient si longtemps contre elle
54:14qu'un jour, c'est vrai,
54:16les murailles tombèrent.
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