• il y a 2 mois
Dans son livre "Femmes criminelles" aux éditions Mareuil , Gilbert Thiel évoque les femmes criminelles qui sont souvent peu fragiles et très difficiles, voire fort dangereuses. Dans cet ouvrage-référence, qui recense une cinquantaine de portraits féminins, l'ancien magistrat évoque le parcours de tueuses en série, de femmes qui, sous l'Allemagne nazie, ont apporté un concours actif à la solution finale, des femmes activistes de la bande à Baader, des Brigades rouges et d'Action directe, d'empoisonneuses comme Marie Lafarge, de mafieuses, d'écorcheuses ou encore des veuves noires de Daech. Gilbert Thiek est l'invité de Amandine Bégot.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot avec Amandine Bégot du 30 août 2024.

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Transcription
00:00RTL Matin, Thomas Soto et Amandine Bégaud.
00:04Il est 8h19, c'est l'interview d'Amandine Bégaud.
00:06Amandine, après avoir dévoré son livre sur les femmes criminelles,
00:09vous avez eu envie ce matin de recevoir Gilles Bertil, ancien magistrat et juge antiterroriste.
00:14Entre autres, bonjour et bienvenue à vous.
00:16Bonjour Gilles Bertil, bienvenue sur RTL.
00:18Ce livre, en effet, est formidable.
00:20Je l'ai dévoré, Thomas le disait, et on va y revenir dans un instant.
00:23Mais d'abord, vous avez sans doute, comme nous tous,
00:26été touché, bouleversé par les mots d'harmonie commune.
00:29L'harmonie commune, c'est la veuve de ce gendarme
00:31qui a été tué à Mougins lundi soir lors d'un contrôle routier.
00:35La France a-t-elle dit, par son laxisme, par son insuffisance
00:38et sans doute par son excès de tolérance,
00:41à tuer mon mari.
00:43Alors, bien sûr, Gilles Bertil, ces mots,
00:45ce sont ceux d'une femme qui est en colère,
00:48dans la douleur.
00:50Mais vous qui avez été juge pendant plus de 40 ans,
00:53est-ce que vous diriez que notre justice est parfois un peu trop lactice ?
00:57La justice a des problèmes, et il ne date pas d'hier, malheureusement,
01:01et on entend toujours un peu les mêmes choses après les catastrophes
01:05qui s'avèrent, quelque part,
01:07et c'est ça le problème un peu inéluctable.
01:10Lorsqu'on dit que la justice n'a pas les moyens suffisants
01:14pour remplir le rôle que les citoyens attendent d'elle,
01:19et à juste titre,
01:21et bien, effectivement, là on voit quelles sont les conséquences.
01:24Déjà il y a 30 ans, voire 40 ans,
01:28on parlait des peines non exécutées,
01:30ces 100 000 peines qui sont en attente d'exécution.
01:34On en parlait déjà il y a 30 ou 40 ans ?
01:36Mais oui, tout à fait.
01:37Donc ça n'est pas nouveau ?
01:38De la même façon qu'on parlait il y a 30 ou 40 ans
01:41de l'insuffisance des structures carcérales,
01:43même si la prison n'est pas la réponse à tout,
01:46mais on est toujours
01:48quelques dizaines de milliers de places en dessous
01:51de pays comparables en termes de capacité d'accueil carcéral.
01:56Donc on atteint plus vite la surpopulation que les autres.
02:00Mais quand on voit ce matin que cet homme multirécidiviste
02:03qui avait quand même 10 notifications à son casier judiciaire,
02:06qui avait été condamné à 4 mois de suspension de permis
02:09en septembre 2023,
02:11donc il y a presque un an,
02:12mais cette peine n'avait pas été exécutée.
02:13Il avait rendez-vous ces prochains jours justement
02:16pour qu'elle soit exécutée.
02:17Un an pour faire exécuter une peine ?
02:19Ça paraît fou non ?
02:20C'est inacceptable.
02:21Et ça démontre les dysfonctionnements de l'Institut.
02:24Mais c'est un problème de moyens d'après vous ?
02:26C'est un problème de moyens.
02:28Il y a peut-être également un problème de philosophie pénale
02:32qui n'est plus adaptée aux circonstances absolument rudes du temps.
02:37Mais en premier lieu, c'est un problème de moyens.
02:40Si vous avez des magistrats,
02:41si vous avez des structures,
02:42qu'elles soient éducatives ou répressives
02:44pour traiter le flux des affaires qui arrivent,
02:47on n'est pas à 100 000 affaires non exécutées.
02:49Il y a toujours le temps, bien sûr,
02:51de mettre en place les différentes décisions qui ont été prises.
02:56Mais comme on est à 100 000 depuis des décennies et des décennies,
03:00ça démontre bien le dysfonctionnement de cette institution judiciaire.
03:03Mais les moyens, ils ont été mis.
03:05Le budget du ministère de la Justice,
03:07il a été quasiment doublé.
03:09Éric Dupond-Moretti dit souvent
03:11qu'il n'y a jamais eu un aussi gros budget.
03:13Oui, mais Amandine Bégaud,
03:14lorsque vous doublez quelque chose qui est particulièrement médiocre,
03:18ça ne fait pas beaucoup en termes de résultats.
03:21Alors, je sais que les gardes d'ESO et le dernier n'échappent pas.
03:24Ils sont toujours très satisfaits de ce qu'ils font,
03:26mais ils parlent toujours de philosophie pénale en quelque sorte.
03:29Ils parlent assez rarement,
03:31même s'il y a eu des efforts de fait
03:34ces deux, trois dernières années.
03:37On n'est pas au bout du compte.
03:39Et quand le président de la République
03:41avait annoncé qu'il couvrirait 15 000 places de prison,
03:44une nouvelle fois,
03:45si ce n'est pas la panacée universelle,
03:49on s'aperçoit qu'en fin de compte,
03:51il y en aura eu 2 000
03:54depuis qu'il est arrivé au pouvoir.
03:56Alors, on va nous expliquer que c'est difficile
03:58de convaincre les élus locaux.
04:00On a toujours les mêmes réponses,
04:02mais qui sont des réponses insatisfactoires,
04:05puisqu'on voit très bien quels sont les résultats,
04:07à travers cette affaire comme à travers d'autres,
04:10d'une insuffisance,
04:12d'une justice suffisamment forte
04:14dans toute sa dimension
04:16pour que les gens aient un minimum de confiance en elle.
04:20Et je pense que de ce côté-là,
04:22on est sur la pente descendante.
04:24Ça vous met en colère, justement, ça ?
04:26Oui, ça m'interroge,
04:28parce que pour moi, la messe est dite.
04:30Quand je dis la messe,
04:32c'est un concept tout à fait laïque.
04:34Mais la messe est dite.
04:36Mais j'ai des enfants, j'ai des petits-enfants.
04:38Donc, l'avenir est en train de se dessiner en ce moment.
04:42Venons-en, Gilbert, à ce livre,
04:44Femmes criminelles,
04:46qui est sorti hier, c'est aux éditions Mareuille.
04:48Vous dressez une série de portraits
04:50de grandes criminelles, plus ou moins connues.
04:52Des tueuses en série, des mafieuses, des empoisonneuses.
04:54Alors, des femmes criminelles,
04:56ça aussi, il en existe depuis des siècles.
04:58Pourtant, on en parle assez peu souvent.
05:00Ça reste tabou ?
05:02Je vous retourne la question.
05:04Pourquoi n'en parlez-vous pas ?
05:06Puisqu'il y a maintenant, en ce moment,
05:08des organisations féministes.
05:10Pas des féministes, mais des féministes radicales.
05:12Qui, à travers le concept de féminicide,
05:14ont justement essayé
05:16de dire, quelque part,
05:18que l'homme était le prédateur universel
05:20et la femme était l'éternelle victime.
05:22C'est d'ailleurs pour ça que
05:24l'introduction du terme féminicide
05:28comme incrimination
05:30dans le code pénal
05:32a été rejetée en 2020.
05:34La commission consultative
05:36ayant dit
05:38que ça risquait de porter
05:40si on créait
05:42cette incrimination
05:44atteinte au principe d'universalité
05:46du droit et d'égalité devant la loi.
05:48Parce que c'est quoi un féminicide ?
05:50C'est un homme qui tue une femme,
05:52et on sait malheureusement qu'il y en a
05:54beaucoup trop.
05:56C'est un homme qui tue une femme
05:58parce que c'est une femme.
06:00Or, la plupart des hommes
06:02qui tuent une femme
06:04ne la tuent pas parce que c'est une femme,
06:06mais parce qu'ils vont
06:08péter un plomb si vous me permettez
06:10l'expression. Ou alors,
06:12on dit que le crime passionnel
06:14parce que c'était comme ça que ça s'appelait avant,
06:16c'est un crime
06:18d'amour propre. C'est d'une part
06:20un sentiment de possession
06:22de l'un et
06:26un sentiment de possession
06:28de l'un et un sentiment
06:30de négation de l'autre.
06:32Donc, à partir du moment
06:34où on ne s'interroge pas
06:36sur le passage à l'acte,
06:40ce qu'avait fait notamment
06:42le docteur Zaguri
06:44qui a écrit il y a quelques années un bouquin
06:46qui s'appelait
06:48La barbarie des hommes ordinaires.
06:50Effectivement, toutes les portes
06:52sont ouvertes et elles sont
06:54ouvertes notamment à la simplification.
06:56Je ne sais pas si vous avez remarqué
06:58dans les organisations
07:00féministes
07:02radicales, on nie
07:04complètement les violences
07:06intraconjugales
07:08qui sont commises sur des hommes.
07:10Il y a quand même 149 000 hommes
07:12qui sont à peu près
07:14une victime sur trois des violences
07:16intraconjugales
07:18qui ont beaucoup de difficultés
07:20bien évidemment.
07:22Vous rappelez quand même
07:24ce chiffre, parmi les crimes et les personnes
07:26impliquées dans les crimes, les femmes en représentent
07:283,5%, donc ça reste quand même
07:30une petite minorité.
07:32Sauf dans le domaine du terrorisme.
07:34Et ça c'est nouveau, 10%.
07:36Il y a donc une montée en puissance que l'on doit malheureusement
07:38à Daesh qui a
07:40concrétisé le statut de djihadiste
07:42des femmes
07:44qui n'étaient plus uniquement
07:46là pour le repos du guerrier
07:48et pour la reproduction
07:50un peu à la manière des Lebensborn
07:52nazis.
07:54Donc voilà, elles ont un statut
07:56de djihadiste. Alors on
07:58s'étonne, moi je ne suis pas là
08:00pour défendre qui que ce soit, ni
08:02minimiser le rôle bien sûr
08:04malheureusement éminent
08:06des hommes, mais on ne
08:08fait pas de justice genrée parce que
08:10ça ce serait une véritable
08:12catastrophe. Et pourtant c'est vers
08:14cela qu'on pousse un certain
08:16nombre d'organisations. Et donc
08:18il convenait de le dire et puis de rappeler le passé
08:20puisque ce n'est pas un roman, c'est 50
08:22personnes entre les écorcheuses,
08:24les tronçonneuses,
08:26les déchiqueteuses,
08:28les sulfureuses et
08:30les empoisonneuses.
08:32Et c'est vraiment passionnant, vraiment je le dis
08:34et puis on n'est pas obligé de lire tout d'ailleurs au fur et à
08:36mesure, on peut piocher dans...
08:38Aucun me dit, mon éditeur.
08:40C'est quoi juste d'un mot
08:42la différence entre un crime de femme et un crime
08:44d'homme ? Il y a une différence ?
08:46Vous disiez il ne faut pas de justice sur le genré, on est d'accord ?
08:48Un homme n'est pas exactement
08:50fait, ça ne surprendra personne
08:52qu'une femme, mais après sur
08:54les passages à l'acte, vous savez, la
08:56jalousie n'est pas genrée, ce n'est pas les
08:58hommes qui sont forcément jaloux
09:00du succès de leur femme.
09:02Donc quand on dit que les femmes sont des empoisonneuses,
09:04ça existe dans les deux sens ?
09:06Les empoisonneuses au sens premier
09:08du terme, d'ailleurs c'est là où
09:10on a des difficultés lorsqu'on essaye
09:12d'évaluer un peu
09:14la criminalité féminine,
09:16c'est que les empoisonnements à l'arsenic,
09:18puisque c'était l'arme favorite des femmes,
09:20il n'y a pas de sang, il n'y a pas de contact
09:22direct avec
09:24la victime, et bien pendant tout
09:26le 18e siècle,
09:28le 19e siècle et encore au début du 20e
09:30siècle, les empoisonnements à l'arsenic,
09:32les victimes présentaient les
09:34mêmes symptômes que
09:36les personnes qui étaient atteintes du choléra.
09:38Donc ça passait pour des morts naturelles.
09:40Donc on disait que les femmes
09:42étaient moins violentes que les bonhommes.
09:44Voilà, merci beaucoup.

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