Gendarme tué, futur Premier ministre... L'interview en intégralité de François Bayrou

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François Bayrou, président du Modem et haut-commissaire au Plan, était l'invité d'Apolline de Malherbe dans "Face-à-Face" sur BFMTV et RMC, ce mercredi 28 août 2024.

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Transcript
00:00BFM TV face à face, Apolline de Malherbe.
00:08Il est 8h32 et vous êtes bien sur RMC et BFM TV. Bonjour François Bayrou.
00:13Bonjour.
00:14Merci d'être venu ce matin tenter de nous éclairer.
00:16Vous êtes le président du Modem, vous êtes maire de Pau, vous êtes haut-commissaire au plan.
00:21Crise politique majeure que traverse la France.
00:24Les consultations se poursuivent pour tenter de trouver un Premier ministre.
00:27Vous aviez vu le président vendredi, vous avez à nouveau déjeuné avec lui hier en tête à tête.
00:33On va y revenir.
00:34Mais je voudrais vous poser d'abord une question sur ce que disait hier matin,
00:38ici même le ministre de l'Intérieur, ministre démissionnaire de l'Intérieur, Gérald Darmanin,
00:43à propos du profil du chauffard qui a tué ce gendarme.
00:46Est-il normal que cet homme qui a été connu pour violence en 2006,
00:51pour outrage en 2009, pour violence à nouveau en 2010,
00:54pour délit de fuite en 2012, pour conduite sans permis en 2014,
00:58pour violence et outrage sur personne dépositaire de l'autorité en 2016,
01:03pour rébellion, violence à nouveau en 2016, ait obtenu une carte de séjour en 2022 ?
01:10Non.
01:14Depuis des années, on a voulu mettre au point un certain nombre de garde-fous et de précautions
01:23sur le profil et sur les moyens qu'on pouvait mettre pour choisir les profils
01:30ou accepter les profils de ceux qui viennent s'installer en France.
01:35Et donc ça n'est pas normal.
01:37Je ne connais pas les détails de la procédure parce que, comme vous le savez,
01:41ce n'est pas la politique qui décide de ces sujets.
01:46C'est la justice, au moins autant.
01:48La famille du gendarme est évidemment bouleversée et on le comprend.
01:51Mais c'est le moins qu'on puisse dire bouleversée.
01:53Malgré tous ses outrages, il avait d'ailleurs toujours 9 points sur 12 dans son permis,
01:58donc il roulait de manière parfaitement régulière et officielle.
02:02Est-ce que ces défaillances, est-ce que ce type de défaillances
02:06que l'on découvre régulièrement, n'est-ce pas cela qui a mené aussi à la situation politique ?
02:11C'est une grande partie de l'indignation du pays.
02:16Les Français sont absolument de bon sens et ils disent simplement
02:24vous ne pouvez pas faire, lorsqu'il y a accumulation de fautes,
02:29de condamnations, de décisions de justice et d'intervention des forces de l'ordre,
02:38vous ne pouvez pas faire comme si rien ne se passait.
02:41Et donc le sentiment, pas le sentiment, la réalité qui est créée par le fait que
02:47les mécanismes administratifs, les mécanismes de justice s'additionnant les uns aux autres
02:54font que l'impunité apparaît comme une réalité de tous les jours.
03:00Cette impunité, elle est purement et simplement inacceptable aux yeux de nos concitoyens
03:07et elle doit l'être aux yeux des responsables du pays.
03:10Et donc ce garçon, cet homme qui a été fauché, arraché de la vie et des siens,
03:20on ne peut pas faire comme si de rien n'était.
03:24Et on ne peut pas dire que c'est seulement un sentiment de quelque chose.
03:28C'est une réalité, cette réalité elle commande, elle s'impose à tous les responsables publics.
03:35Je ne ferai pas de mauvaise transition François Bayrou
03:39mais vous venez de dire qu'on ne peut pas faire comme si de rien n'était,
03:42les actes doivent avoir des conséquences.
03:44Au fond, plus largement, c'est un peu la question que les Français se posent ce matin.
03:49Est-ce que les élections aussi auront des conséquences ?
03:52Les consultations sont à nouveau en cours.
03:55François Hollande, l'ancien président, désormais député, dit ce matin dans le journal Le Point
04:01ce n'était pas au président de censurer un gouvernement Castex,
04:06mais à l'Assemblée éventuellement, il dit en tout cas qu'il a été en quelque sorte censuré
04:13de manière préventive par Emmanuel Macron ce gouvernement.
04:16Ça ne vous fait rien ?
04:17Cette phrase c'est n'importe quoi.
04:19François Hollande, que je sache, a été président de la République,
04:22il devrait s'en souvenir aussi.
04:24S'il a été président de la République, il doit connaître la Constitution.
04:28La Constitution, l'article consacré au pouvoir du président de la République,
04:34en matière de gouvernement, c'est l'article 8.
04:38Et la première phrase de l'article 8, c'est « le président de la République nomme le Premier ministre. »
04:45Il nomme le Premier ministre sur désignation par un parti minoritaire.
04:54Mais comment est-ce qu'il justifie Emmanuel Macron de ne pas nommer Lucie Castex ?
04:57Il dit parce qu'il y aurait une instabilité.
04:59Donc c'est de manière préventive.
05:00Il censure de manière préventive ce gouvernement en disant qu'il le sera.
05:04Mais en étiez-vous sûr ? En était-il sûr ?
05:07Vous voulez rire.
05:09Vous plaidez le faux pour entendre le vrai.
05:13Il n'y a strictement aucun doute.
05:15L'autre phrase, c'est « le président de la République veille au fonctionnement régulier des pouvoirs publics. »
05:21Il y a sur les réseaux sociaux, si vous cherchez, ces jours-ci,
05:25qui circulent un extrait d'une interview de François Mitterrand,
05:30qui connaissait vaguement la Constitution,
05:33dans laquelle, devant Jean-Pierre Elkabbach et Alain Duhamel,
05:38il dit « mais c'est le président de la République qui nomme le Premier ministre. »
05:43Et il parlait pour son camp.
05:46Et nul ne peut l'y forcer.
05:49Et il n'est en rien obligé de choisir.
05:52Je cite à peu près exactement les mots de François Mitterrand,
05:56mais j'imagine que sur vos antennes, vous les retrouverez.
05:59Et nul ne peut l'obliger de choisir, même pas dans le parti le plus nombreux.
06:06Le président de la République, c'est la Constitution.
06:09Et c'est pour des raisons très profondes que je vais vous rappeler.
06:12Pourquoi ?
06:13Vous voulez dire qu'il sait S-A-I-T ?
06:15Vous ne dites pas « le président de la République, c'est la Constitution »
06:18au sens « la République, c'est moi » ?
06:20Non, non, en rien.
06:22Il sait, du verbe savoir, pertinemment, François Hollande.
06:28Non, non, mais il y avait un doute.
06:31Ce n'est pas parce qu'il fait semblant
06:34que l'on peut croire qu'il ignore tout ça.
06:37Il le sait parfaitement.
06:39Mais vous voyez bien que dans le jeu politique aujourd'hui,
06:42les jeux de rôle,
06:44tous ceux qui font semblant d'adopter une attitude
06:50qui, en réalité, ne correspond pas à ce qu'ils pensent profondément.
06:54Et donc, je reviens à cette affaire.
06:58Pourquoi ?
07:00Pourquoi est-ce que la Ve République a décidé ça ?
07:04Parce qu'on a connu 15 ans
07:07où les gouvernements tombaient tous les 3 mois
07:10avec des gens de bonne volonté.
07:12Quelquefois, Pierre Mendès-France, par exemple.
07:15Les gouvernements tombaient.
07:17Et le président de la République,
07:19et le général de Gaulle,
07:21avant même d'être président de la République,
07:23ayant fait l'expérience de cette instabilité,
07:26il a dit quelque chose de très simple.
07:28Il a dit « nous allons arracher l'exécutif, le gouvernement,
07:33aux manœuvres parlementaires ».
07:35J'ai quand même un peu l'impression que vous l'y replongez.
07:39Enfin, vous l'y replongez, je veux dire Emmanuel Macron, vous.
07:42Ce sont les partis, désormais, qui décident, qui voient...
07:46Eh bien, ceci est inacceptable.
07:48Oui, mais qui a invité les partis ?
07:50Et depuis des semaines, comme vous le savez,
07:53je plaide pour qu'on oublie cet impasse,
07:59pour qu'on sorte de cet impasse.
08:01Et cet impasse, elle est très simple.
08:03Vous ne pouvez pas demander, vous ne devez pas demander,
08:06il est inconstitutionnel de demander à des partis
08:09de désigner un Premier ministre.
08:11Mais là, c'est du président dont vous êtes en train de parler.
08:12Vous êtes en train de dire qu'il fait quelque chose d'inconstitutionnel.
08:14C'est bien les chefs de partis qu'il a invités d'abord
08:17à venir discuter avec lui.
08:18Mais ça, c'est normal.
08:19Pour des consultations, c'est normal.
08:21Pour savoir qui désigne et quelle est la meilleure désignation possible,
08:24tout ça est absolument simple.
08:26Quand vous dites qu'il y a une crise politique, moi je ne crois pas.
08:30Je ne crois pas qu'on ait entré dans une nouvelle séquence
08:33avec un nouveau paysage politique,
08:35que ce paysage politique est plus difficile à gérer
08:38que quand vous avez une majorité tout seul.
08:40Mais que c'est l'expression des Français.
08:43Expression biaisée, expression déviée par ceux qui disent
08:47qu'on a gagné une élection alors qu'en chiffre,
08:50ils ont à peine le tiers des sièges.
08:54Et que deuxièmement, personne n'a voté ni pour leur programme
08:58ni pour une candidate que personne ne connaissait
09:01et dont personne n'avait jamais entendu le nom, même pas eux.
09:04François Bayrou, il y a eu cette expression hier
09:06qui a été prononcée par Brice Saint-Urier, je l'entendais,
09:08qui disait que le fait de dire d'entrée de jeu,
09:12comme dirait François Hollande,
09:14qu'Emmanuel Macron a anticipé la censure de Lucy Castex,
09:19c'est une machine à mécontentement.
09:21Est-ce que vous avez conscience de ça ?
09:22Appel à la mobilisation, appel à destitution,
09:25son projet de manifestation dès le 7 septembre.
09:28N'avez-vous pas l'impression que vous allez mettre le feu ?
09:31D'abord, le « vous allez mettre le feu » est excessif
09:35et tous ses propos sont excessifs.
09:38On est devant une situation qui est une situation
09:42simplement mensongère.
09:45Et il faut que des gens, étant un peu équilibrés, rappellent ça.
09:51Personne n'a gagné cette élection.
09:54D'une certaine manière, tout le monde les a perdus.
09:57Non, il n'y a pas eu de premier.
10:00Au premier tour, le premier, c'est le Rassemblement national,
10:03qui a d'ailleurs le groupe le plus nombreux à l'Assemblée nationale.
10:06Et au deuxième tour, le premier, c'est tous ceux qui ont dit
10:08« nous ne voulons pas du Rassemblement national ».
10:11Donc c'est le Front républicain qui a gagné ?
10:13Absolument. Personne qui a gagné.
10:15En tout cas, qui a empêché quelque chose qu'il considérait
10:19et que nous considérions tous comme un danger pour la France.
10:23Et donc, cet ensemble, dans lequel les électeurs n'ont pas trié,
10:29ils n'ont pas dit, et vous non plus, et aucun de ceux qui nous écoutent,
10:33quand il était placé devant ce choix,
10:36Rassemblement national ou Front républicain,
10:39aucun d'entre eux n'a dit « je vais voter pour le NFP »
10:44ou « je vais voter pour le Centre ».
10:46Vous voulez dire qu'ils ont dit « on va voter contre le RN ».
10:48Exactement. Et c'est la seule dominante de cette élection.
10:52Et faire passer ce vote qui était un vote de salubrité
10:59ou de précaution ou de prudence nationale,
11:02pour un vote de choix à l'intérieur du Front républicain,
11:06c'est une tentative de dévoiement de cette élection.
11:12Et maintenant on fait quoi ?
11:13C'est très simple.
11:15Le Président de la République a la responsabilité de nommer un Premier ministre.
11:19Vous savez ce que je plaide depuis le début.
11:22Je pense qu'il est vain de demander aux partis politiques de s'entendre.
11:25Ils ne veulent même pas s'asseoir autour de la même table.
11:28Et c'est normal parce que leur ADN,
11:30ce n'est pas le rassemblement, c'est la division.
11:33Leur ADN, ce n'est pas le rassemblement, c'est l'opposition entre eux.
11:36Et je dis ça alors que j'aime les partis politiques et que j'en préside un.
11:40Mais vous en connaissez les limites.
11:41Et j'en connais intégralement les limites.
11:43Et ce n'est pas comme ça qu'on y arrivera.
11:46C'est la responsabilité dans les institutions françaises
11:50du Président de la République française,
11:52à la différence des pays qui nous entourent,
11:54de choisir le Premier ministre parce que nous avons,
11:58je parle pour les constitutionnalistes,
12:01la Constitution de la Ve République, c'est la séparation des pouvoirs.
12:07Il y a d'un côté le pouvoir exécutif et de l'autre le pouvoir législatif.
12:12Et pour reprendre les mots du Président de la République,
12:14et de reprendre les mots du général de Gaulle,
12:16il anticipe effectivement la censure.
12:19Au fond, c'est une manière de nier la séparation des pouvoirs.
12:23C'est une manière, ne fallait-il pas, encore une fois,
12:25laisser faire l'Assemblée nationale, quitte à reprendre les choses ensuite.
12:29Pardonnez-moi, peut-être je serai le dernier défenseur de la Ve République,
12:33y compris contre ceux qui ont eu la charge de la présider.
12:37Il se trouve que le pouvoir exécutif n'a pas sa source
12:43dans le pouvoir législatif.
12:45Il a sa source dans l'expression du peuple,
12:48au travers de l'élection du Président de la République pendant 5 ans.
12:51Sauf, dans le cas, on en est très très loin,
12:54où il y a une majorité nette qui s'est exprimée,
12:57et quand il y a, c'est-à-dire une majorité absolue à l'Assemblée nationale,
13:01ou une majorité relative très très large,
13:04quand une majorité s'exprime, le Président de la République
13:07nomme le Premier ministre, je cite de Gaulle,
13:11en tenant compte des nuances de l'Assemblée nationale.
13:14– François Bayrou ?
13:15– Cette mise, cette accusation, est une accusation absolument hors sujet,
13:22hors institution, hors bon sens,
13:25et j'ajoute, hors de la certitude même de François Hollande,
13:28qui sait exactement que ce que je dis est vrai.
13:30– C'est une dupré, lui-même.
13:32– Non, il fait une déclaration politicienne ou politique,
13:36mettons, à l'intérieur du camp, sous l'éthique éthicale, il a été élu.
13:42– François Bayrou, qui et pour quoi faire ?
13:44Qui d'abord ? Vous avez vous-même dressé un portrait robot
13:47de celui qui devrait rejoindre Matignon,
13:50vous parlez de quelqu'un d'expérience,
13:53que les Français créditent assez largement de bonne foi,
13:57capable de discuter avec des gens qui ne sont pas de son avis
14:00ou de sa couleur politique.
14:03– Rassembleur.
14:04– Rassembleur, bon, ça pourrait être vous.
14:07Vous avez été votre propre portrait robot,
14:10je veux dire, on ne va pas se mentir ici.
14:12– Non, ce n'est pas vrai.
14:13– Il n'y a pas que vous qui correspond à ça,
14:15enfin vous correspondez à ce portrait-là.
14:17– Si nous prenons la question par cet angle-là,
14:20c'est-à-dire des responsables politiques au sens plein du terme,
14:24c'est-à-dire qui répondent devant les Français
14:27de leurs déclarations, de leurs choix, de leurs orientations.
14:33Si les responsables politiques,
14:35chaque fois qu'ils sont devant une question,
14:37se demandent comment de cette question
14:39ils peuvent tirer un avantage personnel,
14:41un avantage ou une charge.
14:43– Je n'ai pas du tout dit ça.
14:44– Un avantage ou une charge,
14:45parce que celui qui va accepter Matignon,
14:47ce n'est pas rien.
14:48– Je lis ce portrait robot que vous avez fait,
14:51cette fiche de poste en quelque sorte,
14:53et en effet, ça pourrait être vous.
14:56Selon cette définition, vous ne me direz pas le contraire,
15:00vous êtes quelqu'un d'expérience.
15:01– Un peu peut-être.
15:02– Vous-même, et peut-être les Français en tout cas,
15:04vous considérez que vous avez de la bonne foi,
15:06vous n'avez jamais refusé de discuter avec des gens
15:08qui n'étaient pas forcément de votre avis
15:11ou de votre couleur politique,
15:12donc on est d'accord que ça coche toutes les cases.
15:14– Non, oui, enfin…
15:15– Oui, enfin non, peut-être.
15:17– Oui, ce que j'ai dit là,
15:19je l'avais dit au mois de janvier
15:21lors de la nomination du Premier ministre précédent,
15:23je l'avais dit lors de la nomination
15:25de la Première ministre antéprécédente,
15:28parce que je crois que c'est ce dont on a besoin.
15:31Vous savez, il y a deux visions,
15:33il y a ceux qui croient que le Premier ministre
15:35est un exécutant aux ordres du Président de la République.
15:38– Ce n'est pas votre cas.
15:39– Je n'ai jamais cru cela,
15:41je m'y suis opposé sous Nicolas Sarkozy,
15:44sous ses successeurs, jusqu'à le plus récent.
15:48Je n'ai jamais cru cela,
15:50j'ai pensé que la responsabilité de chef du gouvernement
15:53est une responsabilité à part entière,
15:55et c'est une responsabilité vis-à-vis du pays
15:59que de définir pour lui une politique
16:02et d'être capable, cette politique,
16:05de la défendre devant les assemblées,
16:08devant l'Assemblée nationale et le Sénat,
16:10y compris en discutant, en dialoguant,
16:13je ne veux pas employer le terme de négocier
16:15parce qu'il rappelle autre chose,
16:17mais avec les forces politiques,
16:20y compris celles qui ne sont pas de votre avis.
16:22– Bernard Cazeneuve ?
16:23– Oui, je pense qu'il répond à ce portrait robot.
16:26– Didier Migaud ?
16:28– Je le connais moins, mais il a une expérience.
16:30– Président de la Cour des comptes, Xavier Bertrand ?
16:34– Xavier Bertrand, est-ce qu'il aurait le soutien de son parti ?
16:37C'est ça la seule question.
16:39– Christine Lagarde ?
16:40– Bon, elle a une expérience,
16:42mais je ne veux pas entrer dans ce jeu-là.
16:46Peut-être que vous vous rendez compte,
16:48on est devant une explosion continue,
16:52non pas de la politique, mais de la société.
16:56Vous savez ce très brillant sociologue
17:01qui a dit qu'on était devant une archipélisation de la société.
17:05– Jérôme Fourquet ?
17:06– Jérôme Fourquet.
17:07Qu'on était devant, au fond, l'éclatement.
17:10Chacun s'isole dans son camp.
17:12C'est ça qu'on est en train de vivre, en politique.
17:15C'est pourquoi ce n'est pas une crise de la politique,
17:17c'est une crise de la société.
17:18– Mais il y a des moments où on l'a bien vu,
17:19on l'est capable à nouveau de vivre tous ensemble.
17:22– C'est pourquoi je ne signe pas votre expression de crise politique.
17:26Je pense qu'il y a un moment de mutation,
17:30il y a un changement très important
17:32dans lequel on ne peut plus se contenter
17:35d'avoir des exécutants qui, à l'Assemblée nationale,
17:41annoncent un programme et tous les députés votent la main pour voter oui.
17:46– Et maintenant pour faire quoi, François Bayrou ?
17:48Vous Premier ministre, est-ce que vous accepteriez par exemple
17:50de revoir la réforme des retraites ?
17:51Est-ce qu'elle est améliorable ? Est-ce qu'elle est réformable ?
17:53– J'ai dit que la réforme des retraites, pour moi, était améliorable.
17:56– Maintenant, la question du SMIC.
17:58– Et je ne l'ai pas dit depuis aujourd'hui.
18:01Je l'ai dit depuis le jour où elle a été proposée et adoptée.
18:05– Mais évidemment, ça a un sens plus particulier aujourd'hui,
18:07dans ce moment où il faut s'en rendre la main.
18:09Est-ce que le SMIC à 1 600 euros vous paraît quelque chose de faisable ?
18:12– Je pense que c'est une erreur.
18:14– C'est une erreur le SMIC à 1 600 euros ?
18:15– Je pense que… n'est-ce pas ? Mais vous allez…
18:18– Allez-y.
18:19– C'est extrêmement simple.
18:21Ceux qui gagnent 1 600 euros aujourd'hui,
18:24ils sont 200 euros au-dessus du SMIC.
18:28Ils ont dû travailler parfois dur pour y arriver.
18:31Et vous vous trouvez dans une situation
18:33où ils vont être rattrapés par le SMIC.
18:35– Sauf si eux aussi leur salaire monte.
18:37– Oui. J'ai un ami qui est un chef d'entreprise
18:42dans le domaine du nettoyage.
18:45Beaucoup de mérite, remarquable réussite.
18:50Il a 3000 personnes qui travaillent dans son entreprise.
18:54Les prix qu'il a fixés dans les contrats
18:57avec les collectivités locales ou avec les entreprises
19:00ou avec les hôpitaux, parce qu'il les nettoie,
19:03ces prix sont fixés quelquefois pour 3 ans.
19:05Et vous allez augmenter sa masse salariale de 15%, 20%.
19:12– Vous redoutez que son entreprise ne périclite.
19:14– Mais ce n'est pas moi qui le redoute, c'est lui.
19:20D'autant que dans le même programme, il y a le blocage des prix.
19:25J'ai souvent pris comme exemple un boulanger.
19:28Avec ses charges, ses charges salariales, ses charges d'énergie,
19:33il vend la baguette, mettons, 1 euro.
19:37C'est un exemple.
19:39Si vous augmentez sa masse salariale de 15% ou 20%,
19:43qu'est-ce qui va lui arriver ?
19:45Il ne fabriquera plus de baguette, il fera des pains fantaisie.
19:49Et encore, s'il reste ouvert.
19:53Parce que ne croyez pas que beaucoup de ces entreprises
19:56soient en situation garantie pour l'avenir.
19:59En réalité, on articule des promesses électorales
20:02qui sont dangereuses et intenables.
20:05Et vous voulez que le président de la République, par exemple,
20:09reste indifférent à ses choix.
20:12Je rappelle, il a en charge le fonctionnement régulier
20:16des pouvoirs publics.
20:18Et c'est dans cet esprit-là qu'il dit, il faut chercher
20:21d'autres solutions que celles qu'on a voulu nous imposer.
20:25– Merci François Bayrou, président du MoDem,
20:27haut-commissaire au plan maire de Pau.
20:29Ça peut se régler vite ?
20:31– Oui, je pense que ça pourrait se régler vite.
20:34Il suffit de trouver l'oiseau rare.
20:37L'oiseau masculin ou féminin.
20:39– On a bien compris.
20:40François Bayrou, merci d'avoir été mon invité ce matin.
20:42Vous qui ne croyez pas à une crise politique,
20:44mais à un moment de mutation majeure.
20:45Il est 8h53 sur RMC-BFM TV.

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