Présidentielle américaine : ce qu’il faut retenir de la convention démocrate

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C’est dans une ambiance survoltée que les démocrates ont conclu jeudi soir leur convention à Chicago. Une convention placée avant tout sous le signe de l’unité derrière Kamala Harris et son colistier Tim Walz, désormais officiellement lancés dans cette dernière phase de la campagne présidentielle.

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00:00C'est dans une ambiance survoltée que les démocrates ont conclu hier leur convention à Chicago,
00:04une convention placée sous le signe de l'unité derrière la candidate Kamala Harris
00:08et son colistier Tim Walz, désormais bien lancée dans cette dernière phase de la campagne présidentielle.
00:19Et pour revenir sur les moments forts de cette convention démocrate,
00:22on retrouve notre correspondant sur place, Maurin Picard. Bonjour Maurin.
00:27Bonjour.
00:28Vous avez suivi la convention démocrate qui s'est tenue à Chicago cette semaine,
00:32une convention placée, comme je le disais, sous le signe de l'unité,
00:36et qui a démarré avec le discours de Joe Biden,
00:39qui ressemblait finalement plutôt à des adieux au monde politique et à sa famille de cœur.
00:47Oui, Joe Biden s'attendait à faire la clôture de la convention nationale démocrate
00:52et tout ce qui lui reste, c'était le discours inaugural,
00:56celui à travers lequel il passait le flambeau à Kamala Harris.
01:00Personne n'aurait pu se douter d'un tel scénario il y a encore un mois et demi,
01:05mais il a fallu qu'un débat télévisé le 27 juin face à Donald Trump se passe extrêmement mal.
01:10On voit Joe Biden diminué, fragilisé physiquement, mentalement,
01:14pour que le choc de la réalité s'impose à toute partie démocrate,
01:18qu'une pression énorme se mette en place à travers les rangs,
01:21et parmi les classiques, à commencer par Barack Obama,
01:24même l'acteur George Clooney, qui se sont mis à tenter de convaincre Joe Biden
01:29de jeter l'éponge, et c'est ce qui s'est passé.
01:31Ça a beaucoup coincé, ça a beaucoup grimassé dans les rangs.
01:37Joe Biden ne voulait pas lâcher prise et il a fini par accepter,
01:41de manière assez magnanime, de faire ce discours inaugural à la convention.
01:47C'était lundi soir et il a reçu une ovation de la part de la foule.
01:51Les démocrates lui sont extrêmement reconnaissants,
01:53premièrement d'avoir effectué un excellent mandat présidentiel,
01:57il sera peut-être même considéré comme un des meilleurs mandats présidentiels
02:01de l'histoire contemporaine des États-Unis, avec beaucoup d'accomplissements législatifs,
02:05et puis aussi d'avoir cette grandeur d'âme, de comprendre qu'il faut passer le bâton
02:11et que quelqu'un de plus jeune et de plus dynamique,
02:13tel que Kamala Harris, sa vice-présidente, pouvait porter la candidature démocrate
02:18jusqu'à l'élection du 5 novembre.
02:20C'est ce qui s'est passé et il y a beaucoup de reconnaissance,
02:24de gratitude envers Joe Biden, qui n'est pas resté, qui s'est éloigné,
02:27qui est parti prendre des vacances avec sa famille en Californie,
02:30juste après avoir livré ce discours dans la nuit de lundi à mardi.
02:34Joe Biden n'était pas la seule figure forte démocrate à monter sur scène
02:38et à vanter les mérites de Kamala Harris et de sa candidature.
02:41Il y a eu aussi notamment Bill Clinton ou encore Alexandria Ocasio-Cortez,
02:46et bien sûr Barack et Michelle Obama qui ont tout simplement électrisé la foule.
02:53Quand on a besoin d'électriser la foule, on fait appel à Michelle et Barack Obama.
02:56On peut même dire que Michelle a éclipsé son mari Barack.
03:00Elle est, comme le disent les médias américains,
03:03le meilleur président que les États-Unis n'auront jamais,
03:06c'est-à-dire que tout le monde rêverait qu'elle se présente.
03:09Mais comme le dit Barack Obama, il y a deux ou trois choses certaines dans la vie,
03:13payer ses impôts, mourir et Michelle qui ne sera jamais présidente des États-Unis.
03:17Ça s'est encore confirmé, elle est brillante, elle est charismatique,
03:20elle est capable de soulever les foules, de déplacer les montagnes,
03:24de mobiliser sur sa seule figure et ses seules paroles des milliers de gens,
03:31de réveiller la communauté noire qui a souvent aux États-Unis beaucoup de doutes
03:35sur ce que le monde politique peut lui apporter, que ce soit de démocrate ou républicain.
03:39Mais Michelle Obama évidemment ne s'engagera pas en politique,
03:42elle est juste là pour accompagner les candidats,
03:45pour leur donner un énorme coup de pouce et c'est ce qui s'est passé mardi soir.
03:48On a vraiment ressenti une secousse tellurique quand Michelle Obama
03:51était sur scène au United Center, l'antre des Chicago Bulls à côté du centre de Chicago.
03:58Elle a livré un discours extraordinaire en disant qu'il était temps d'agir,
04:02de sortir de chez soi, que ça ne suffisait pas de se répandre en bonnes paroles
04:07dans l'intimité du foyer, mais qu'il fallait aller voir ses voisins,
04:11qu'il fallait discuter au salon de coiffure, partout où vous pouvez le faire,
04:16aller chercher des nouveaux électeurs, mobiliser ceux qui sont encore dubitatifs
04:20et leur dire que c'est l'avenir de l'Amérique qui se joue entre un projet démocratique
04:25et un autre projet beaucoup plus autoritaire qui est celui de Donald Trump.
04:28Et jusqu'à présent on n'avait pas trop vu Michelle Obama et Barack non plus
04:32se livrer un petit peu à ce combat de baffon, c'est-à-dire ce que disait Michelle en 2016,
04:40elle disait « When they go low, we go high ».
04:42Quand eux descendent très bas, nous on reste haut, on ne se mélange pas dans la fange.
04:48Ils ont décidé d'attaquer Donald Trump et de dire à quel point son projet était dangereux
04:56pour l'Amérique et que la seule solution, évidemment, c'était Kamala Harris
05:00et qu'elle portait un projet extrêmement enthousiasmant pour l'avenir des États-Unis.
05:07Cette convention a aussi été l'occasion de présenter officiellement le colistier de Kamala Harris,
05:11Tim Walz, qui a finalement dans son discours très peu évoqué sa carrière politique.
05:17Il a plutôt insisté sur son rôle de père de famille, d'entraîneur de foot américain
05:21ou encore de professeur. Est-ce qu'il y avait une volonté derrière de justement
05:25paraître proche du peuple ?
05:29Oui, la sélection de Tim Walz comme colistier de Kamala Harris répond à un impératif
05:35très spécifique pour le Parti démocrate. Il s'agit d'aller chercher les électeurs du Midwest,
05:40cette classe de population qui a plutôt une tendance à voter Donald Trump depuis 2016.
05:47On parle de l'électorat blanc, désœuvré, déclassé, qui a depuis 15 ans l'impression
05:55évidemment que Washington l'a laissé tomber depuis la grande récession de 2008.
06:01Tim Walz, évidemment, est blanc. Il a la soixantaine affable et bonhomme.
06:08Il a été coach de football américain. Il est lui-même originaire de ce Midwest
06:12un petit peu coincé entre les deux côtes. Il est né dans le Nebraska et il a fait
06:17l'essentiel de sa carrière de professeur de géographie et de coach sportif dans le Minnesota.
06:23Le Minnesota fait partie des Grands Lacs, cette ceinture de roue où il y a l'essentiel
06:27de l'industrie métallurgique et automobile américaine. Il faut aller chercher cet électorat
06:32perdu en route depuis 2016, qui avait un petit peu recommencé à voter Joe Biden
06:37suffisamment pour permettre à Biden d'emporter ce qu'on appelle le mur bleu,
06:41qui est donc cet ensemble d'États du nord des États-Unis. Mais il faut définitivement
06:47arrimer cet électorat, le rattraper au lasso. On parle beaucoup des ouvriers,
06:53des colles bleues, et Tim Walz peut le faire, alors que Kamala Harris, c'est pas certain.
06:58C'est une femme, elle est métissière, d'origine noire et sud-asiatique.
07:04C'est pas évident pour un électorat blanc du Midwest de voter pour quelqu'un
07:09tel que Kamala Harris. Évidemment, il faut faire pièce au tandem républicain
07:14incarné par Donald Trump et Jay Devance, le vice-président présomptif côté républicain
07:19qui sera l'adversaire direct de Tim Walz et qui lui est originaire de l'Ohio,
07:23qui fait partie lui-même de cette catégorie de population blanche et un petit peu machiste
07:29que Tim Walz va essayer d'aller chercher. Évidemment, le fait de parler de son passé
07:33de coach de football américain, c'est peut-être le meilleur argument de vente
07:37auprès de cette population.
07:39Kamala Harris a logiquement conclu cette convention avec un discours qui était
07:43probablement le plus important de sa vie et qui s'est voulu très personnel.
07:49Oui, il fallait qu'elle se présente à l'Amérique. Jusqu'à présent, on a eu des sondages
07:54qui disaient que 4, 5, 6 Américains sur 10 n'étaient pas vraiment sûrs de savoir
07:58qui elle était et encore moins quel était son projet. C'est un peu sa faute
08:02puisque depuis quelques années, surtout en 2019, quand elle avait lancé
08:07une éphémère candidature aux primaires démocrates, elle s'était vraiment rangée
08:11à gauche de la gauche à l'époque, c'est-à-dire elle était sur les plates-bandes
08:15de Bernie Sanders et d'Alexandria Ocasio-Cortez et ça ne collait pas exactement
08:19avec son passé, avec son curriculum puisque Kamala Harris est une procureure
08:23assez dame de fer originaire de Californie qui a fait ses armes en combattant
08:30le crime et la délinquance à San Francisco et dans toute la Californie.
08:35Donc, ça ne collait pas exactement quand elle s'est présentée vraiment
08:38sur un programme très libéral au sens américain en 2019.
08:42Là, elle a rétabli la balance, elle se présente sous des traits un petit peu plus centristes
08:48parce que toutes les élections américaines se jouent toujours au centre et rarement
08:52et jamais aux extrêmes du prisme politique. Il fallait qu'elle se présente,
08:57donc elle a parlé d'elle, elle a parlé de sa famille, on en avait déjà un petit peu
09:00entendu parler depuis un mois, mais tout ça évidemment se fait de manière précipitée
09:03parce que jamais une élection présidentielle n'a été menée de manière aussi brève.
09:08Kamala Harris n'a plus qu'à peine un peu plus de 75 jours pour l'emporter face à Donald Trump
09:15avant l'ouverture des bureaux de vote le 5 novembre. C'est très très court,
09:19c'est inédit dans l'histoire des États-Unis, donc elle doit brûler les étapes,
09:22elle doit remporter la bataille des esprits et des cœurs.
09:27Et l'autre objectif de son discours hier soir, c'était de présenter le programme
09:32parce que jusqu'à présent, on n'en avait que les lignes principales et maintenant,
09:35on sait qu'elle veut évidemment insister sur les droits europroductifs pour les femmes,
09:41de faire adopter dès qu'elle sera élue présidente deux grandes lois sur les droits civiques
09:47en termes d'élections, de droits de vote.
09:50Et ça, c'est très important parce que ça parle énormément aux minorités
09:53et surtout à la communauté noire dont elle va avoir besoin en termes de mobilisation
09:58pour l'emporter dans les urnes.
10:01Son discours a évidemment été scruté par Donald Trump et ses équipes
10:04qui n'ont pas manqué d'en critiquer chaque ligne, sans surprise.
10:07Des critiques de plus en plus virulentes qui cachent peut-être une certaine inquiétude,
10:12surtout quand on voit les sondages à 75 jours de l'élection.
10:18Oui, l'inquiétude, la fébrilité.
10:20Donald Trump ne sait pas comment s'y prendre pour l'instant
10:23pour faire pièce à la nouvelle menace incarnée par Kamala Harris.
10:27Il savait très bien comment faire face à Joe Biden.
10:29Joe Biden, c'était le vieil homme à moitié sénile que Donald Trump s'amusait à moquer
10:35à longueur de meetings et d'interviews télévisés.
10:38Maintenant, c'est très compliqué.
10:39Kamala Harris est une jeune, elle a 59 ans, elle est originaire des minorités,
10:44elle est dynamique, elle est un peu pitbull aussi,
10:48c'est-à-dire qu'elle sait très bien se débrouiller, et on va bientôt le voir
10:51puisqu'il y a le prochain débat télévisé entre elle et Donald Trump le 10 septembre.
10:54Et Donald Trump ne sait absolument pas comment s'y prendre.
10:58Il a tout tenté, il dénonce son côté gauchiste,
11:01il dénonce le danger de Kamala Harris pour les problèmes d'immigration clandestine
11:06parce que c'est un dossier qu'elle n'a peut-être pas très bien géré
11:09quand elle était au tout début de sa vice-présidence.
11:11Mais ça ne marche pas, l'enthousiasme est dans le camp démocrate.
11:14Kamala Harris a fait un excellent début de campagne,
11:17elle a transformé l'essai hier avec ce discours un petit peu introductif
11:22et qui présentait son programme un petit peu en détail.
11:25Pour l'instant, Donald Trump n'y arrive pas.
11:27Il vrille, il pète les plombs en interview télévisée,
11:33il sort de son script lors des rassemblements populaires,
11:36ses conseillers sont inquiets, ils n'ont pas encore trouvé la clé face à Kamala Harris.
11:41Merci beaucoup, Maurent, pour cette analyse et bon retour à New York.
11:45On continuera de suivre avec vous cette dernière phase de la campagne avec attention.
11:50Merci à notre réalisateur Luca Alou.
11:53Vous pouvez retrouver d'autres vidéos concernant la présidentielle américaine
11:56sur notre site et notre application.
11:58Merci de nous avoir suivis et à bientôt.

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