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00:00Ces Jeux comme événement planétaire, le monde entier regarde vers la France, l'enjeu géopolitique aussi de cet événement.
00:07On en parle avec vous Pascal Boniface, bonjour à vous.
00:09Vous êtes le directeur et fondateur de l'IRIS, l'Institut de Recherche Internationale et Stratégique et l'auteur de cet ouvrage « Géostratégix, un monde de jeux » écrit avec Tommy.
00:19Pascal Boniface, ces Jeux Olympiques, est-ce qu'ils sont, est-ce qu'on peut considérer qu'ils sont aussi le reflet des enjeux politiques de notre époque contemporaine ?
00:28Oui, bien sûr, parce que les nations sont représentées et en fait, là, on le voit plusieurs fois.
00:33C'est un vrai succès pour la France parce que les plus beaux monuments de Paris sont montrés, l'ambiance est extraordinaire, donc c'est une très belle publicité pour la destination France.
00:42Et puis, on voit tant avec la Russie, la Biélorussie d'un côté, avec Israël de l'autre, que les enjeux politiques ne sont jamais loin.
00:49On peut également dire que la rivalité entre la Chine et les États-Unis passe également par ces Jeux et que chacun sera très attentif.
00:58Au nombre de médailles d'or qu'il aura en fin de tournoi pour montrer la supériorité de sa nation ou de son régime, dans le cas notamment du duel sino-américain.
01:09Alors, est-ce qu'on peut aller jusqu'à considérer que le nombre de médailles détenues par une nation peut renverser le jeu et peut peut-être placer une nation ou l'autre en rapport de force, en dominateur ?
01:20Sur le temps d'image, certainement. Bien sûr, ça n'a pas changé le PIB d'un pays, ni la taille de son armée, ni l'état de voix.
01:27Mais par contre, en termes d'image, c'est très important. C'était déjà le cas pendant la guerre froide.
01:32Si l'URSS avait plus de médailles d'or que les États-Unis, elle pouvait dire que le système communiste était plus performant que le système capitaliste.
01:39Si, par contre, les États-Unis l'emportaient, ils pouvaient dire que la jeunesse américaine était plus saine, mieux formée, plus dynamique.
01:46Et regardez comment nous, Français, nous sommes fiers du nombre de médailles surprenant, étonnant et une bonne surprise que nous avons.
01:53Cela redonne un peu de fierté. Cela permet un peu une sorte de patriotisme de bon alloi.
01:58Et donc, effectivement, une réussite sur le plan sportif contribue beaucoup à ce qu'on appelle le soft power, l'image d'un pays.
02:05Ça ne change pas, une fois encore, l'économie. Ça ne change pas la place du pays, mais ça change son image.
02:11Alors, justement, vous évoquez à l'instant la ferveur des Français qu'on a constaté au fil de ces jours.
02:17Le président français est apparu plusieurs fois hier aux côtés des athlètes, venu les encourager, venu en consoler certains.
02:24Quelle analyse vous faites de cette mise en avant aussi du président de la République dans tout le contexte de cette crise politique qu'on connaît en France ?
02:31Elle est un peu à double tranchant. Bon, d'une part, c'est vrai que Kamel Macron, il faut le reconnaître, est un vrai amoureux du sport.
02:37Il a vraiment la passion du sport. Il s'est beaucoup engagé sur les Jeux de 2024 et donc il vient féliciter les vainqueurs de médailles.
02:43Évidemment, on voit bien qu'il essaye, à travers des figures très populaires, Teddy Rayner, Léo Marchand, de récupérer un peu de leur popularité,
02:52comme s'il y avait une sorte de transfert de popularité.
02:55Et donc, il veut coller aux exploits de nos sportifs, un peu pour lui aussi bénéficier d'un surcroît d'image.
03:03Je pense que ceux qui sont partisans du président en seront satisfaits.
03:07Ceux qui n'en sont pas partisans ne changeront pas d'avis en fonction du nombre de médailles que l'on obtiendra.
03:12Donc, rien ne changera à passer la parenthèse des Jeux, si je vous suis bien ?
03:16Non, effectivement. Disons que les Français ne sont pas des idiots. Ils ont leur conviction.
03:21Certains sont favorables au président Macron, d'autres ne le sont pas favorable.
03:24Et ce n'est pas le nombre de médailles qui va changer cela. Ça peut changer l'image de la France, mais pas directement.
03:29Et ensuite, dès que la parenthèse des Jeux sera terminée, la France retrouvera ses problèmes politiques.
03:35C'est une parenthèse enchantée que nous vivons, que nous vivons bien, qui nous fait du bien.
03:39Mais une fois encore, aussi bien par rapport aux images comme celles que vous montrez en ce moment,
03:43qu'aussi bien par rapport aux images qui sont diffusées dans le monde entier,
03:46que par le nombre de médailles et la ferveur de la population française.
03:49Ce qui compte aussi, c'est que les étrangers qui viennent sont bien reçus par les Français.
03:53Ils apprécient les transports en commun qui marchent très bien.
03:55Ils apprécient le travail des bénévoles.
03:58Et donc, c'est une très bonne publicité, une fois encore, pour la destination France.
04:03Pascal Bonifaz, vous faisiez tout à l'heure référence aux guerres toujours en cours dans le monde, au Proche-Orient.
04:08En Ukraine notamment, c'est que les athlètes russes et biélorusses ont dû apparaître sous bannière neutre.
04:14Ils ont dû prouver qu'ils ne soutenaient pas la guerre dans leur pays.
04:17À l'inverse, les athlètes ukrainiens ont été très exposés.
04:20Il y a eu une différence de traitement ?
04:23Ils se mettent en avant parce qu'effectivement, là aussi, ils communiquent.
04:26Pour les athlètes ukrainiens, participer au jeu, c'est un peu faire la guerre sur le plan symbolique.
04:31C'est parler de l'Ukraine, qu'on n'oublie pas l'Ukraine et de montrer que malgré la guerre, ils sont là.
04:36Ils auraient voulu qu'il n'y ait aucun athlète russe ou biélorusse.
04:38Il y a une sorte de compromis quand même très défavorable à la Russie, à la biélorussie.
04:43Et pour les Ukrainiens, en fait, combattre pour les Jeux olympiques, c'est aussi combattre pour leur pays.
04:48C'est une façon indirecte pour eux de faire la guerre.
04:51Et ils seront très attentifs au nombre de médailles parce que c'est une bonne exposition pour l'Ukraine.
04:56Je faisais allusion à l'instant aux athlètes russes.
04:58Il y a aussi les athlètes israéliens.
05:00Des voix se sont élevées en France pour demander aussi à ce que ces sportifs arrivent sous bannière neutre.
05:06Ça n'a pas été le cas.
05:08Est-ce que là aussi, il y a eu une différence de traitement d'une délégation à l'autre ?
05:12Oui, disons que les explications du CIO pour bannir la Russie et ne pas bannir Israël ont été un peu contradictoires.
05:18Il y a un problème de communication.
05:20Au départ, le CIO a dit qu'on exclut la Russie et la Biélorussie à cause de la guerre.
05:24Après, on dit non, c'est parce qu'ils ont annexé des entités ukrainiennes.
05:27Mais ce n'est pas le cas de la Biélorussie.
05:29Et par ailleurs, on a demandé aux athlètes russes qui participent
05:33de ne pas avoir pris position en faveur de la guerre.
05:37Donc, les critères qui ont servi pour la Russie ne sont pas les mêmes critères qui ont servi pour Israël.
05:42Mais il est vrai aussi que l'Ukraine a été très militante pour exclut la Russie,
05:45alors que le comité national olympique palestinien ne s'est réveillé que trois jours avant le début des Jeux
05:51pour demander l'exclusion d'Israël.
05:52C'était un peu tard.
05:54Il faudra voir si la guerre continue, comment les instances sportives vont juger par la suite la participation d'Israël.
06:00Un mot aussi, si vous le voulez bien, au sujet de cette délégation de réfugiés.
06:03Ils sont 37 athlètes.
06:05Quel message ils envoient à leur pays et au comité international olympique de manière générale ?
06:11Justement, ça existe depuis les Jeux de Rio.
06:15Et c'est une très belle initiative du CO.
06:17On critique souvent le CO d'être insensible aux affaires politiques.
06:19Là, en fait, des athlètes qui sont banniés dans leur pays, qui ont dû fuir leur pays
06:23parce qu'ils sont des opposants au régime ou qu'ils ont fui la guerre,
06:26ne sont pas privés des Jeux.
06:28Et donc, ils peuvent participer dans cette équipe de réfugiés qui est extrêmement bien accueillie.
06:33C'est difficile pour eux de se préparer.
06:36Mais en fait, c'est une sorte quand même d'asile politique sportif.
06:40Vous êtes exilé, vous êtes banni de votre pays.
06:42Et bien sûr, si vous êtes opposant syrien, la Syrie ne va pas vous sélectionner pour les Jeux.
06:47Mais vous pouvez quand même y participer grâce à cette équipe de réfugiés.
06:50Merci beaucoup, Pascal Boniface.
06:52Merci d'avoir pris le temps de répondre à nos questions sur France 24.