Regardez Lenglet-Co avec François Lenglet du 05 juillet 2024.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00RTL Matin
00:03Langue Léco avec vous François Langley.
00:05Bonjour à tous.
00:06François, la carte électorale de ces législatives 2024 est largement déterminée par des phénomènes économiques.
00:12C'est vrai et ce qui est frappant lors du résultat du premier tour et ceux des européennes toutes récentes du 9 juin dernier,
00:19c'est l'opposition entre les villes et les campagnes.
00:22Deux France se font face, celle des métropoles où le Rassemblement National n'a pas véritablement pris
00:28et puis l'autre composé des périphéries lointaines et des zones rurales où il est plus puissant que jamais.
00:34Et ce clivage est, selon vous, économique ?
00:36En large partie, à cause de ce qu'on appelle la métropolisation de la croissance.
00:41Le fait qu'une part croissante de l'activité est désormais le fait des grands pôles urbains
00:47qui se taillent la part du lion, ne laissant que des millettes ailleurs.
00:50Les trois quarts des emplois créés en France, par exemple, naissent dans les 13 grandes agglomérations du pays.
00:57Et c'est corrélé avec le vote ?
00:59Ah mais de façon étroite !
01:01Quand vous partez du centre d'une grande ville, il n'y a quasiment pas de vote Rennes.
01:05L'exemple de Paris est d'ailleurs le plus frappant.
01:08Et plus vous vous éloignez du centre, 10 km, 20 km, 50 km, plus le vote pour le parti de Marine Le Pen est puissant.
01:16Ce déterminant géographique recoupe évidemment une différence de niveau de vie, une différence de diplôme.
01:22Prenons une étude de la Fondation Jean Jaurès.
01:24Les 100 diplômes sont 44% à avoir voté pour la liste bordel à hausse européenne.
01:29C'est 13 points de plus qu'en 2019.
01:32Alors que chez les plus diplômés, la proportion ne passe que de 11 à 15%.
01:37En fait, la poussée Rennes de 2024 a eu lieu chez les exclus de la croissance, vivant loin des centres.
01:44Mais il y a quand même des campagnes riches dans notre pays.
01:47Oui, c'est vrai, mais ces campagnes riches, elles sont justement collectées aux villes.
01:52Parce qu'elles sont peuplées de résidences secondaires, peuplées de touristes aussi.
01:56Et on y note Macron, pas Le Pen.
01:58Par exemple, le long des côtes Atlantiques.
02:00Le démographe Jérôme Fourquet a fait une analyse passionnante des vignobles français.
02:05En Bourgogne, où les propriétaires de grands crus sont riches parce qu'ils sont collectés aussi aux villes du monde entier grâce à l'export,
02:11Macron cartonne.
02:13J'ai plus de 40% à Chassaigne-Montrachet et à Vaune-Romanée.
02:17Mais toutes les appellations prestigieuses votent pour le Président.
02:21Dans le Sancerroi, c'est Macron qui tient le cœur de l'appellation, alors que Le Pen l'emporte sur les marges.
02:27Dans le Bordelais, il y a une bizarrerie, c'est le RN qui l'emporte.
02:30Mais l'anomalie a son explication.
02:32Les grands crus de Bordeaux appartiennent à de grands groupes mondialisés, comme LBMH, et ce sont les salariés qui votent.
02:38Donc la clé de l'opposition entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, c'est le niveau de vie ?
02:43Oui, et plus encore, c'est le prix du mètre carré des logements.
02:48Bon, ça recoupe en partie le niveau de vie, bien sûr, mais plus le prix du mètre carré est élevé, plus la propension à voter Macron est forte,
02:55plus il est faible, plus on est Le Peniste.
02:57À la nuance près, quand même, que bon nombre d'habitants des centres-villes où les prix sont élevés ne sont que locataires et pas propriétaires,
03:04ben ceux-là votent plutôt à gauche.
03:06Dites-moi, ces différences, elles ont toujours existé ?
03:08Oui, à ceci près que la différence entre les deux Frances s'est accrue et qu'il est beaucoup plus difficile de passer l'une à l'autre que la guerre.
03:15Notamment à cause de la disparition des emplois industriels qui offraient à l'autre France des promotions sociales.
03:21Dans ces législatives, c'est aussi une forme moderne de la lutte des classes qui se joue.
03:26Tout cela est passionnant, merci infiniment François.