• il y a 6 mois
88 milliards d'euros !!
C'est ce qu'auraient coûté les moustiques à notre planète entre 1975 et 2020. C'est le résultat d'une étude que viennent de réaliser des scientifiques montpellierains qui ont collecté et réuni les données de 166 pays sur 45 ans.
Frédéric Simard, directeur de recherche à l'IRD de Montpellier a dirigé cette étude.

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Transcription
00:00Je fais la sieste moustique, arrête un peu ta musique, ne sois pas antipathique, ne me pique pas.
00:12Voilà, petit extrait d'une chanson, pour évoquer les moustiques, sans l'honneur.
00:15Il y a le moustique du Cotoner aussi, vous connaissez la chanson ?
00:17Ah non, je ne la connais pas celle-là.
00:18Vous regarderez.
00:19Frédéric Simard, directeur de recherche à l'IRD de Montpellier, est notre invité ce matin, Guillaume.
00:23Bonjour Frédéric Simard.
00:24Bonjour.
00:25Merci d'être venu nous rejoindre.
00:26Alors, l'IRD, à ne pas confondre avec l'EID, on va expliquer la différence.
00:29Vous, l'IRD, c'est l'Institut de Recherche pour le Développement.
00:32Absolument.
00:33C'est à Montpellier.
00:34L'EID, c'est l'Entente Interdépartementale pour la Démoustication.
00:38Absolument.
00:39Nous sommes des collègues, on travaille ensemble.
00:40Oui, vous travaillez ensemble, notamment quand il s'agit de moustiques, évidemment.
00:43Absolument.
00:44Et à l'IRD, vous venez de publier une étude très intéressante qui évalue le coût du moustique,
00:49alors du moustique, de deux espèces de moustiques bien particulières sur la planète,
00:55coût sanitaire, coût économique depuis 1975.
00:58Et les chiffres donnent le vertige.
01:01C'est ça.
01:02Et il s'agit d'un minimum.
01:03C'est les coûts, effectivement, rapportés.
01:05C'est une fouille de données qu'on a faite sur ce que ces deux moustiques particuliers,
01:10donc le moustique tigre qu'on a ici dans les rots depuis une quinzaine d'années maintenant,
01:14et son cousin, l'Aedes égyptique, qui est en zone intertropicale uniquement,
01:19ces deux moustiques transmettent des virus qui provoquent des maladies.
01:24La dengue, le chikungunya, le zika, ces maladies sont en expansion dans le monde.
01:29Et on a essayé de savoir un petit peu ce que ça avait coûté jusqu'à présent.
01:33Et on arrive à une somme astronomique de 95 milliards de dollars sur la période de 1975-2020.
01:40Ça, c'est pour la planète.
01:42Et pour la France, le chiffre, alors il est moins important que ça,
01:46mais il est quand même assez considérable.
01:48549 millions d'euros.
01:50C'est ça.
01:51Alors France, pas que métropolitaine, outre-mer aussi beaucoup j'imagine, essentiellement outre-mer.
01:57Surtout puisque la plupart de ces coûts qui sont rapportés,
02:00ça touche les dommages et les pertes liées à la transmission des maladies.
02:05On a le moustique ici, on n'a pas encore la maladie de façon endémique,
02:09mais les coûts rapportés pour la France, c'est 550 millions d'euros essentiellement dans les DOM.
02:16La Réunion, la Caraïbe, la Guyane.
02:19Donc ça, ce coût, il est rapporté à quoi ? Il est rapporté aux pertes humaines, à la prévention aussi,
02:25qu'on essaie de mettre en place pour lutter contre ces deux espèces très invasives ?
02:29Exactement. Et au total, on s'aperçoit que c'est essentiellement des dommages et des pertes
02:34liées aux soins, à la prise en charge des cas, aux arrêts de travail.
02:38Quand vous êtes malade, vous n'allez pas travailler.
02:41Donc tout ça, ça a été chiffré à différents endroits.
02:44C'est ça qu'on a pu retrouver.
02:47Et puis également, ce qui est investi dans la prévention.
02:49Les gens vont acheter des répulsifs, par exemple,
02:52et puis les communautés vont financer de la recherche, par exemple.
02:55Et on s'aperçoit, au total, qu'on a moins de 10% de ces coûts globaux
03:01qui sont investis dans la prévention.
03:03Et les 90 autres pourcents, c'est essentiellement des dommages et des pertes.
03:06C'est-à-dire que si on faisait plus de prévention et si on y accordait plus d'argent,
03:10ça ne coûterait pas aussi cher, en fait ?
03:12Il y a un vrai effet levier qu'il va falloir pouvoir balancer,
03:16c'est-à-dire investir plus dans la prévention
03:20pour éviter d'avoir à payer les dommages après.
03:22Parce que tout cet argent qui est payé dans les dommages
03:26est perdu quelque part.
03:28Comment vous avez réussi à arriver à un résultat comme celui-là ?
03:31En fait, vous avez recuni les données.
03:33Alors je crois que j'ai 166 pays, c'est ça ?
03:35C'est ça.
03:36Qui vous ont fourni leurs données,
03:38par rapport à la propre estimation de leurs coûts à eux, c'est ça ?
03:41Alors c'est un travail plus vaste,
03:43qui se met en place dans l'initiative Invacost,
03:47qui est pilotée par l'université de Paris,
03:50par Franck Courchamp, qui est un des auteurs du papier.
03:53Et le but, c'était d'estimer les coûts des espèces envahissantes.
03:57Donc il y a eu un gros, gros travail, justement,
04:00de pêche aux données, dans les articles scientifiques,
04:03d'aller vérifier ces données, vérifier les sources,
04:06de remonter jusqu'aux sources,
04:08de dédoublonner.
04:09Ça vous a pris combien de temps, cette étude, du coup ?
04:11Ça fait plus de 5 ans qu'on est dessus, sur l'aspect global,
04:14et en regardant ça, on s'est aperçu que
04:17les espèces envahissantes qui nous coûtaient le plus cher,
04:19c'était ces deux moustiques-là.
04:21Et avec ce papier, on est allé plus loin dans le détail,
04:24pour aller chiffrer ces coûts.
04:27Alors sur ces deux espèces,
04:29il y en a une qui est présente ici, dans notre région,
04:31c'est ce qu'on appelle le moustique-tigre,
04:33le Aedes albopictus.
04:35Très bien.
04:37C'est écrit, j'ai aucun mérite.
04:39C'est une réalité,
04:41dans notre région,
04:44sur notre territoire,
04:45donc l'idée, c'est de dire que, attention,
04:47elle est encore minoritaire, cette espèce.
04:50Elle est bien présente,
04:52en ville et dans les villages.
04:54Donc ça veut dire que pour éviter que ça coûte trop cher,
04:56encore une fois, il faut essayer de s'en prémunir.
04:58Il n'y aura pas de transmission de virus
05:00s'il n'y a pas ce moustique.
05:01Là, on est en train de construire un risque
05:04de transmission de virus sur notre territoire.
05:06Et ça arrive.
05:07Chaque année.
05:08En 2022, il y a eu 65 cas
05:10de dengue autochtone.
05:12C'est des gens qui n'ont pas bougé,
05:13mais qui ont attrapé la dengue.
05:15Où ça ?
05:16Au National.
05:17Au National, en France ?
05:18Au National, en France.
05:19Métropolitaine ?
05:20En France, hexagonale métropolitaine.
05:22Donc ça veut dire que ça arrive.
05:24L'année dernière, on avait 45 cas.
05:26Chaque année, on importe des cas.
05:28Les gens se font infecter en zone tropicale.
05:31Une fois qu'on est infecté, qu'on est piqué par un moustique,
05:34qui a le virus,
05:36on a le virus dans le sang pendant une semaine.
05:38Pendant cette semaine-là,
05:39si vous vous faites piquer par un autre moustique,
05:41vous allez infecter le moustique.
05:43Et lui, ensuite, va pouvoir retransmettre.
05:45C'est ce qui se passe ici.
05:48Maintenant qu'on a le moustique,
05:49les gens qui arrivent en zone tropicale avec le virus,
05:52s'ils se font piquer par un moustique,
05:54ils peuvent infecter ce moustique
05:56qui va pouvoir retransmettre.
05:57Ça veut dire que la dengue, la fièvre jaune,
05:59tout ça, c'est plus seulement l'affaire des Outre-mer ?
06:02Ça se passe ici, maintenant.
06:04Et de plus en plus.
06:05Et le moyen de mieux prévenir ça,
06:08c'est justement d'empêcher les moustiques
06:10de pulluler tel qu'ils le font.
06:12On les connaît, les conseils ?
06:14L'idée, justement,
06:16ou Altopictus également,
06:18qui interviennent dans la région,
06:22donnent des directives par rapport à ça.
06:24Vous connaissez, vider vos coupelles, tout ça.
06:26C'est pas de la blague.
06:27Il faut le faire.
06:28Il y a un vrai risque, déjà, de nuisance.
06:30Si vous ne le faites pas,
06:31vous allez vous en apercevoir vite fait.
06:33Le moustique, quand il est là, il vous pique,
06:34il fait mal.
06:35Là, pour l'instant.
06:36Et alors, vous me disiez,
06:37avant qu'on rentre dans ce studio,
06:38on discutait un peu,
06:39vous me disiez, en plus,
06:40le fameux moustique-tigre,
06:41le Aedes albopictus,
06:42il aime particulièrement l'homme,
06:44contrairement à d'autres espèces
06:45moins invasives de moustiques.
06:47Absolument.
06:48Il est invasif.
06:49Pourquoi ?
06:50Parce qu'il a suivi l'homme.
06:51C'est nous qui l'avons importé.
06:52On a importé les moustiques,
06:54on importe les virus,
06:56on fait n'importe quoi,
06:57en quelque sorte.
06:58Et il faut peut-être percuter à un moment
07:00que tout ça, c'est de notre faute.
07:02Dernière chose,
07:03qui n'est pas très rassurante,
07:04Frédéric Simard,
07:05vous me disiez aussi tout à l'heure,
07:06il a beaucoup plu, là,
07:07pendant le printemps,
07:08on a eu un printemps absolument pourri.
07:09Donc là, toutes les conditions sont réunies
07:11pour qu'il y ait vraiment
07:12beaucoup de moustiques-tigres cet été.
07:13Vous avez dit, là, les...
07:14Je ne sais plus l'expression que vous avez,
07:15enfin, il m'est dit,
07:16il y a du lourd.
07:17Il y a des munitions derrière.
07:18Il y a des munitions qui sont là,
07:19absolument.
07:21Absolument.
07:22Il y a eu beaucoup d'eau.
07:24Il faisait encore un peu frais,
07:26pour l'instant,
07:27mais les températures augmentent,
07:28comme vous l'avez rappelé tout à l'heure,
07:30et on va...
07:32Voilà, ça va,
07:33il va y avoir du moustique cet été,
07:34ça, c'est sûr.
07:36Absolument.
07:39Pour se protéger,
07:40mais ça, c'est une fois que le mal est fait.
07:41Et puis, invitez-moi,
07:42parce qu'en général,
07:43je me fais piquer à la place des autres.
07:44C'est vrai ?
07:45Oui, j'attire les moustiques.
07:46Donc, il aime bien les hommes,
07:47mais certains, plus que d'autres, quand même.
07:48Ah ben, moi, je suis tranquille.
07:49On attire...
07:50Peut-être que vous les sentez moins,
07:51parce que c'est une réaction,
07:53c'est une réaction aussi à la salive
07:55qui vous injecte pendant qu'il vous pique.
07:57Ah oui ?
07:58Donc, il y a des gens qui répondent
07:59plus ou moins à la piqure,
08:00elle est plus ou moins douloureuse.
08:02Ça veut dire que Vivian,
08:03il gaspille trop de salive, alors,
08:04si j'ai bien compris, non ?
08:05C'est pas sa salive à lui,
08:06c'est la salive de la femelle moustique
08:08qui est en train de le piquer.
08:09Et vous réagissez,
08:11et vous attirez plus ou moins, effectivement.
08:13Ça dépend aussi de votre état physiologique.
08:15Merci.
08:16Merci Frédéric Simard,
08:17directeur de recherche
08:18à l'Institut Recherche pour le Développement
08:20de Montpellier,
08:21d'être venu nous parler de votre étude
08:23très intéressante ce matin.
08:24Merci.
08:25Merci à vous, bonne journée.
08:26Vous pouvez réécouter l'interview
08:27en allant sur France Blog.

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