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00:00 - Bonjour Philippe Breton, politologue, professeur à l'université de Strasbourg.
00:04 On a tous été surpris et c'est un euphémisme de l'annonce du président.
00:08 On va essayer de comprendre avec vous, quelle est sa stratégie à votre avis en faisant ça ?
00:13 - En tout cas quelle soirée pour annoncer cette nouvelle stratégie ?
00:16 - On a eu des sueurs froides, ça a été un petit peu l'ascenseur émotionnel, oui effectivement.
00:21 - Je crois que la question qui se posait à l'Elysée était celle de savoir
00:24 s'il était encore possible de gouverner avec ces résultats.
00:28 Et donc c'est à partir de cette question là, je crois que Macron et ses conseillers ont pris cette décision
00:34 pour éviter peut-être que le pays ne sombre dans une sorte d'anarchie,
00:38 que la crise sociale se réveille au détour de ces résultats
00:43 où la majorité n'est plus du tout une majorité
00:45 et où le pouvoir n'a pratiquement plus aucune légitimité populaire.
00:49 Donc je crois que c'est un choix de stratégie qui évite d'une certaine façon à la France
00:53 de basculer dans une crise sociale de très grande ampleur.
00:58 - Oui mais c'est dangereux comme pari pour Emmanuel Macron quand même.
01:01 Il prend le risque d'avoir dans trois semaines Jordan Bardella comme Premier ministre.
01:06 - Alors dès qu'il est question du futur en politique, on prend des risques.
01:09 Évidemment il prend un risque, encore une fois le risque c'était une crise sociale de très grande ampleur
01:13 que le pouvoir n'arrive pas à contrôler.
01:15 Rappelons le mouvement des gilets jaunes, rappelons les émeutes de l'an dernier.
01:19 Je crois que c'est dans cette perspective là que le Président de la République a pris un risque.
01:24 Quel risque prend-il exactement de faire éventuellement venir le Rassemblement National au pouvoir ?
01:31 Au pouvoir du gouvernement dans une cohabitation
01:36 où c'est toujours le Président de la République qui tient les rênes du pays.
01:40 Par rapport à une situation de pourrissement social
01:44 où le Rassemblement National risquait de venir au pouvoir dans le cadre des présidentielles
01:49 et là il aurait eu tous les pouvoirs.
01:51 - Donc selon vous le calcul d'Emmanuel Macron c'est peut-être d'avoir le Rassemblement National au gouvernement là maintenant
01:58 plutôt que de l'avoir totalement en 2027 ?
02:02 - Oui avec encore une fois l'option possible qu'au législatif dans moins d'un mois je crois,
02:08 qu'au législatif ce ne soit pas le Rassemblement National qui soit majoritaire,
02:14 que l'opinion s'effraye de cette possibilité du Rassemblement National au gouvernement,
02:20 que les électeurs du Rassemblement National soient pour une partie d'entre eux uniquement des électeurs contestataires
02:25 qui ne souhaitent pas porter au pouvoir des députés Rassemblement National.
02:30 Donc c'est un pari finalement qui est un pari assez audacieux
02:33 mais qui est un pari qui minimise les risques pour le pays.
02:36 - Et est-ce que le RN de son côté est prêt à gouverner ?
02:39 Parce que Jordan Bardella il a demandé la dissolution de l'Assemblée Nationale
02:43 mais pas sûr qu'il s'attendait quand même à ce qu'Emmanuel Macron lui dise "Fiche !"
02:47 - Alors là il faut faire un peu de sociologie politique,
02:50 Rassemblement National on le dit depuis longtemps, moi je le dis depuis longtemps,
02:53 c'est un colosse au pied d'argile, c'est un colosse électoral
02:56 puisque il y a une masse d'électeurs effectivement qui se portent de plus en plus sur lui,
03:01 mais c'est un parti qui a finalement peu de cadres, peu d'élus, peu d'expérience du pouvoir,
03:07 à part ces derniers temps dans un certain nombre de municipalités.
03:11 Donc c'est un parti qui institutionnellement risque d'être en difficulté
03:14 pour trouver les cadres nécessaires pour faire fonctionner les institutions.
03:18 - Juste un mot sur l'Alsace, Philippe Breton,
03:21 si on regarde plus particulièrement notre territoire,
03:24 on se rend compte que l'extrême droite fait une poussée comme partout en France
03:27 et notamment, et ça c'est assez inédit, dans des grandes villes comme,
03:32 voilà, il y a Colmar, Ilkir, Chaguenau, Célestat, comment on l'explique ?
03:36 - Alors sur le fond l'Alsace a toujours été une terre de droite,
03:40 il ne faut pas l'oublier, même si un certain nombre de villes comme Strasbourg, Mulhouse,
03:45 ont joué à gauche.
03:47 Mais il est clair qu'en Alsace, les campagnes débordent maintenant sur les petites villes,
03:53 pas encore sur les grandes villes, puisque Strasbourg échappe évidemment à la vague Rassemblement National.
03:59 - Et Mulhouse également. - Et Mulhouse également.
04:00 Mais Strasbourg a toujours été une terre de droite,
04:03 et ce à quoi on assiste aujourd'hui, c'est une recomposition de la droite
04:06 dans laquelle le Rassemblement National occupe maintenant une place hégémonique.
04:09 - Merci beaucoup Philippe Breton, professeur à l'Université de Strasbourg.
04:13 Merci de votre analyse ce matin avec nous sur France Bleu Alsace.

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