• il y a 6 mois
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Astrid Panosyan, députée Renaissance de Paris et Pierre Dharréville, député PCF des Bouches-du-Rhône, répondent aux questions de Dimitri Pavlenko.
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Transcription
00:00Il est 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko vous recevez ce matin, la députée Renaissance de Paris Astrid Panossian et le député communiste des Bouches-du-Rhône Pierre Darréville.
00:13Bonjour Astrid Panossian, Bouvet pardon, je donne votre nom d'épouse également.
00:17Bonjour Pierre Darréville, bienvenue à tous les deux sur Europe 1.
00:21Est-ce qu'il faut dépénaliser l'euthanasie et le suicide assisté ? Est-ce que c'est le modèle français de fin de vie souhaité par les français ?
00:28Vous vous côtoyez tous les deux à l'Assemblée Nationale, vous appartenez à des familles politiques qui tombent assez rarement d'accord on va le dire,
00:35mais en ce moment vous vous retrouvez l'un et l'autre dans l'opposition au projet de loi qui est actuellement en discussion
00:41et disons que dans vos groupes respectifs aussi, tout le monde n'est pas d'accord avec les positions que vous défendez.
00:49N'est-ce pas Astrid Panossian-Bouvet, je commence peut-être par vous.
00:52C'est un projet de loi qui fracture les groupes à l'intérieur.
00:56Oui, on se retrouve au-delà des lignes politiques.
01:02Je pense que ça a été très bien dit lors des déclarations à l'introduction du débat,
01:10rien de ce qui est humain ne m'est étranger.
01:13Et la fin de vie on touche à la fois à l'intime, à l'universel, métaphysique, à l'existentiel
01:20et les lignes de crête entre l'éthique de l'autonomie et l'éthique de la vulnérabilité
01:26peuvent prendre des chemins différents en fonction des sensibilités de chacun.
01:31Alors Pierre Darréville, vous vous avez siégé dans la commission spéciale,
01:34cette commission qui a transformé totalement le projet de loi initial,
01:38celui qui avait été présenté en Conseil des ministres au début du mois d'avril.
01:42Vous avez pris la parole au début de l'examen du texte lundi,
01:45c'était un beau discours, j'en citerai d'ailleurs quelques passages.
01:48Mais d'abord, est-ce que vous pouvez nous raconter ce qui s'est passé dans cette fameuse commission
01:52qui a, comme on l'a beaucoup dit, levé tous les garde-fous qui avaient été imaginés au début pour le projet de loi ?
01:58Comment ça s'est passé, Pierre Darréville ?
02:01Ce qui s'est passé, c'était presque prévisible de mon point de vue.
02:05C'est-à-dire qu'en réalité, une fois qu'on a franchi la barrière,
02:08et pour moi il y a un basculement éthique qui est au cœur de ce texte,
02:13une fois qu'on a franchi la barrière, on ne sait plus où s'arrêter.
02:16Quand on ouvre une porte telle que celle-ci, inévitablement vous trouverez des gens qui voudront aller plus loin ?
02:22En tout cas, je trouve que la démonstration a déjà été faite.
02:25Je ne sais pas, au final, comment le texte terminera.
02:30Mais il est évident que ce qui s'est passé en commission, à mon avis, est assez révélateur, assez symptomatique.
02:36Parce qu'au bout du compte, on se dit, si on accorde cette possibilité à certains,
02:43pourquoi ne pas l'accorder à d'autres ? Et de fil en aiguille, on élargit au maximum.
02:48C'est ça qui s'est passé en réalité en commission.
02:50C'est un débat très difficile.
02:53Moi, ce que j'essaie de faire, c'est de porter mes interrogations.
02:57Je sais que c'est un débat qui vient parfois nous chercher dans nos histoires, etc.
03:03Mais je pense que nous, notre rôle, c'est d'essayer d'aller au-delà de nos histoires personnelles
03:09et d'essayer de faire en sorte de prendre des positions politiques.
03:11Alors justement, rentrons dans le sujet. Astrid Pannot, si on pouvait, pourquoi vous êtes opposée, vous, au projet de loi Fin de vie ?
03:17Est-ce que vous êtes opposée au projet de loi initial ?
03:19Est-ce que c'est l'évolution qui a été la sienne pendant la commission spéciale qui vous heurte aujourd'hui ?
03:26Vous en êtes où à l'égard de ce texte ?
03:28Je pense que plus on creuse, plus on a des questions et plus on a des doutes.
03:31Je pense que la première réticence que j'ai par rapport à ce projet,
03:37c'est d'inscrire un continuum entre soins palliatifs et aides à mourir.
03:43Je pense qu'il y a un consensus aujourd'hui sur les soins palliatifs
03:48et les expériences étrangères montrent que quand il y a des soins palliatifs,
03:51il y a une baisse des demandes de morts administrées, ça c'est un premier point.
03:55Et surtout, sur les soins palliatifs, on n'a pas besoin de nouvelles lois, on a besoin de moyens, on a besoin de volonté politique.
04:01Mais les moyens, on ne les a pas. Malheureusement, ça on le sait bien maintenant.
04:04On ne les a pas, ça fait depuis 25 ans qu'on ne les a pas
04:07et ça peut être effectivement l'occasion de l'accélération du déploiement.
04:11Mais ce qui introduit la question du décalage dans le temps entre le déploiement de ces soins palliatifs
04:16qui vont continuer à prendre du temps parce qu'on est aussi sur des questions de personnel
04:21et pas simplement de moyens financiers,
04:23et l'accession de l'aide active à mourir qui elle sera immédiate.
04:29Et en ce qui concerne l'aide active à mourir, on est effectivement dans une rupture culturelle, anthropologique
04:36qui contrevient un interdit universel de ne pas tuer.
04:43Et après, je pense qu'il faut aussi quand même prendre en compte le fait que les soins palliatifs
04:49et que la sédation profonde et continue jusqu'au décès tel qu'elle est permise dans la loi Claes Leonetti
04:55n'est pas une réponse à toutes les souffrances.
04:58Qu'il existe des souffrances réfractaires.
05:00Souffrances réfractaires, c'est des souffrances qu'on ne peut pas altérer.
05:04Notamment sur ce qui concerne les maladies incurables dégénératives
05:10dans lesquelles il y a des souffrances avant que les fonctions vitales ne puissent être altérées
05:15et qui permettraient une éligibilité à la sédation profonde et continue.
05:18Ça, il faut aussi l'entendre. C'est pour ça que le débat est complexe.
05:22Pierre Dravil, vous allez même encore plus loin.
05:25Vous dites que c'est un peu une imposture, cette idée qu'il y aurait une sorte de continuum
05:30entre les soins palliatifs et, si vraiment on n'y parvient pas, la fin de vie.
05:34Vous dites non, en fait c'est contradictoire.
05:36Les soins palliatifs, je reprends encore une fois le discours que vous avez prononcé lundi devant l'Assemblée nationale,
05:42c'est l'alibi. Les soins palliatifs sont l'alibi pour faire passer la fin de vie.
05:48C'est fort quand même ce que vous dites.
05:50Ça donne l'impression d'une espèce de hold-up démocratique quand même.
05:54Je l'ai peut-être dit avec un peu moins de tranchant,
05:57mais je crois qu'effectivement le gouvernement, en voulant porter ce projet,
06:02enfin les promoteurs de ce projet plus exactement, se sont dit
06:05on ne peut pas y aller si on ne règle pas la question des soins palliatifs
06:08parce que ça va dans le débat, ça va revenir forcément.
06:11Donc ils se sont dit on va faire un premier volet sur les soins palliatifs
06:14qui va nous permettre ensuite de passer à l'étape d'après.
06:17Avec la promesse d'augmenter fortement les moyens.
06:19C'est pour ça que je pointe ce risque d'alibi.
06:21Mais moi je pense qu'il faut effectivement développer massivement les soins palliatifs,
06:26ça devrait être un droit absolu d'avoir accès aux soins palliatifs,
06:29c'est-à-dire d'être accompagné, soulagé de ses souffrances physiquement,
06:32mais accompagné humainement.
06:34Et ça fait 25 ans effectivement que cette question est posée
06:37et qu'on ne répond pas à cette demande.
06:40Et je pense qu'il y a deux logiques qui sont contradictoires.
06:42Parce que demander, y compris aux mêmes personnes, dans les mêmes endroits,
06:47de pratiquer les deux choses, je ne sais pas comment ils vont faire.
06:53Vous parlez des médecins ?
06:55Les médecins, les personnels, tous ceux qui accompagnent.
06:58Très majoritairement hostiles, on a vu, tout le camp médical.
07:01Oui, parce qu'en fait ils ne se sont pas aussi engagés pour ça.
07:05Ce n'est pas le sens qu'ils donnent à leur métier.
07:07C'est quand même une question qui est un peu importante.
07:09Parce qu'il faut créer une nouvelle profession qui ne s'appelle pas médecin, peut-être.
07:12Parce que le médecin, il est là pour soigner.
07:14Donner la mort, c'est autre chose.
07:16Oui, c'est cette confusion entre la main qui soigne et la main qui tue.
07:19On en est où là du texte ?
07:21Est-ce que vous pensez que les jeux sont faits à l'Assemblée nationale ?
07:24L'un et l'autre, ça fait une semaine que vous en débattez.
07:26Avec vos collègues, vous allez encore s'y jeter toute la journée pour en parler.
07:29Est-ce que le texte qui sortira de l'Assemblée
07:32sera le même que celui qui est arrivé lundi ?
07:34C'est-à-dire fortement déformé par rapport au projet de loi initial.
07:38Alors moi j'ai une réticence quand même par rapport à ce texte,
07:41même dans sa version initiale.
07:43Autant je peux entre-choisir le mal et le moindre mal,
07:46il y a toujours le mal.
07:52On a toujours des doutes, mais j'ai quand même une conviction
07:55qui est que les soins palliatifs aujourd'hui,
07:57et la sédation profonde et continue jusqu'au décès,
07:59ne répond pas à toutes les souffrances.
08:01Et qu'est-ce qu'on fait de ça ?
08:02Et je sais aussi que quand, en particulier sur les maladies neurodégénératives,
08:06il existe euthanasie d'exception, pourquoi pas ?
08:08Alors justement, moi j'étais pour effectivement peut-être
08:11une dose létale auto-administrée,
08:16mais je refuse l'exception d'euthanasie.
08:18Je refuse.
08:19Je pense que c'est quelque chose qui induit une confusion
08:22pour le rôle des médecins,
08:24et on ne doit pas déléguer à autrui sa propre volonté de mort.
08:28Donc ça c'est vraiment quelque chose qui me semble,
08:31d'autant plus que dans les pays auxquels on offre ce choix,
08:35c'est souvent l'euthanasie qui supplante le suicide assisté,
08:39parce que ça semble plus socialement acceptable.
08:42Mais l'exemple de la commission spéciale, comme les exemples étrangers,
08:45ont effectivement montré que quand on entr'ouvre la porte,
08:48elle devient grande ouverte.
08:50Donc la question que je me pose aujourd'hui,
08:52c'est vraiment de vouloir contribuer à entr'ouvrir cette porte,
08:56pour que, à l'issue de ce texte ou dans quelques années,
09:01elle soit élargie.
09:02Pierre Darraville, même question, pour terminer.
09:04C'est difficile à prévoir.
09:06Je pense qu'il y en a certains qui veulent revenir à la version initiale,
09:10pour essayer d'arriver au bout avec le moins d'encombre possible.
09:15Mais je pense que certains veulent effectivement inscrire
09:18un droit opposable, universel.
09:20Et à l'heure où effectivement,
09:22moins d'une personne sur deux a accès aux soins palliatifs,
09:24il sera plus facile d'avoir accès à une dose létale,
09:26plus rapide d'avoir accès à une dose létale,
09:28que d'avoir accès à un centre antidouleur,
09:30pour lequel il faut six mois d'attente pour avoir un rendez-vous.
09:32Merci à tous les deux d'être venus au micro d'Europe 1,
09:34Astrid Panossian-Bouvet, députée Renaissance de Paris,
09:36et donc Pierre Darraville, député communiste des Bouches-du-Rhône.
09:39Votre discours d'ailleurs, dont j'ai parlé,
09:41à retrouver sur le site internet de la revue La Vie.
09:43Merci à tous les deux, bonne journée.
09:457h22 sur Europe 1.

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