La tête de liste des Ecologistes Marie Toussaint est l'invité de la matinale spéciale sur France Inter, à une dizaine de jours des élections européennes. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-mercredi-29-mai-2024-9856220
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00:00 C'est la deuxième matinale grand format que vous propose France Inter à 11 jours maintenant des Européennes.
00:07 Six têtes de liste, six émissions et une heure d'entretien avec Yael Ghose, questions sur le programme et l'actualité,
00:14 puis des focus sur l'écologie, l'international, l'économie.
00:18 Après 9 heures, deux jeunes électeurs qui s'apprêtent à voter pour la première fois aux Européennes
00:24 débattront avec la tête de liste, amis auditeurs, j'attends évidemment vos questions,
00:29 au 01 45 24 7000 et sur l'application de France Inter, parce que vous aurez la parole.
00:35 Marie Toussaint, bonjour !
00:37 Bonjour, merci de m'accueillir.
00:38 Et merci d'avoir accepté notre invitation, vous êtes la tête de liste, les écologistes,
00:43 Europe Écologie, les Verts, eurodéputées sortantes.
00:47 Après l'entretien avec Yael Ghose, place donc aux journalistes et aux éditorialistes de la matinale,
00:53 Célia Kirey vous interrogera sur le nucléaire, Pierre Aski sur le Proche-Orient,
00:59 Dominique Seux sur le bilan carbone de l'Europe, mais d'abord, question rituelle que nous posons
01:05 dans ces matinales à toutes les têtes de liste pour essayer au fond de situer l'enjeu
01:11 de ces élections.
01:13 Entre la guerre en Ukraine et la présidentielle de novembre prochain aux États-Unis qui peut
01:19 produire des effets géopolitiques majeurs sur l'Europe, diriez-vous que ces Européennes
01:25 du 9 juin sont les plus importantes de l'histoire de ce scrutin ?
01:29 Absolument, ces élections européennes sont extrêmement importantes.
01:33 Mais la raison pour laquelle elles sont importantes, c'est parce que se joue le 9 juin la capacité
01:38 de l'Europe de continuer à agir pour le climat à l'heure du dérèglement climatique.
01:43 Vous savez, on connaît l'extrême droite pour les atteintes qu'il porte aux droits
01:48 humains, aux droits des femmes, à nos démocraties.
01:50 Ce que vos auditeurs et vos auditrices savent peut-être un peu moins, c'est que les extrêmes
01:54 droites, les nationaux populistes mènent une guerre permanente contre la nature, contre
01:58 toutes les législations de protection de l'environnement.
02:00 Et donc le 9 juin se pose la question de si nous allons vers un pacte brun fait de climato-scepticisme
02:07 et de fascisme, même revisité, ou un pacte vert, c'est-à-dire la poursuite de la transition
02:11 écologique dans la justice sociale.
02:13 Je crois que vu l'état de l'urgence climatique, de l'urgence environnementale, de l'urgence
02:18 pour la santé, et bien c'est le pacte vert qu'il faut choisir.
02:21 Et pourtant dans cette campagne, Marie-Toussaint, les thèmes qui dominent sont le pouvoir d'achat,
02:25 l'immigration, la sécurité, l'Ukraine, Gaza.
02:27 Comment vous expliquez que l'enjeu écologique soit passé au second plan ? Comment analysez-vous
02:32 cet éclipse ?
02:33 Je crois que dans les préoccupations des Françaises et des Français, le dérèglement
02:37 climatique reste présent.
02:38 La réalité c'est effectivement qu'on a des soucis sociaux, on a vécu des crises,
02:43 une crise sanitaire majeure, qui a d'ailleurs démontré la capacité de l'Europe à réagir,
02:48 à se reprendre en main.
02:49 On a évidemment une guerre en Ukraine qui cause une crise économique, qui a fait exploser
02:54 la précarité.
02:55 Et c'est l'esprit avec lequel je mène cette campagne, et c'est d'ailleurs la
02:58 philosophie des écologistes que de dire "nous devons agir et pour le climat et pour la justice,
03:03 et pour la nature et pour l'économie".
03:05 Finalement, économie, écologie, ça va ensemble, on peut mener ces combats ensemble, et c'est
03:10 bien ce que je propose quand je dis le 9 juin, le pacte vert, transition écologique et justice
03:14 sociale.
03:15 Vous connaissez sans doute les mots du philosophe Bruno Latour, grand écologiste, qui déclarait
03:19 en 2021 l'écologie "ennuie ou prêche".
03:22 Elle est imbibée de moralisme, elle n'enthousiasme pas assez, elle ne mobilise pas.
03:27 Il disait aussi "pour le moment l'écologie politique réussit l'exploit de paniquer
03:31 les esprits et de les faire bailler d'ennui, d'où la paralysie de l'action qu'elle
03:36 suscite trop souvent".
03:37 C'est ce qui vous arrive aujourd'hui, est-ce que vous faites votre mea culpa comme mouvement
03:43 politique sur le sujet ?
03:44 D'abord je suis sûre que vous avez retenu d'autres éléments de Bruno Latour, parce
03:49 que c'est un grand penseur de l'écologie.
03:50 C'est ce que j'ai dit, il est un grand philosophe de l'écologie.
03:53 Mais quand on l'interrogeait très souvent dans ce studio sur l'écologie politique,
03:58 c'est ce type de réponse qu'il donnait.
03:59 Non mais il nous invitait notamment, je pense que c'est important de le souligner, à
04:03 inventer un monde en harmonie avec le vivant.
04:05 Parce que vous savez, nous faisons partie du vivant et nous devons changer de modèle.
04:08 Bon.
04:09 Alors politiquement, c'était ça le sens de ma question.
04:13 Qu'est-ce qui cale là, dans cette élection ?
04:17 Êtes-vous au moins sûr de franchir la barre fatidique des 5% ?
04:21 Vous voyez bien que les mouvements écologistes reculent en Europe, c'est pas simplement
04:28 en France.
04:29 Quelle analyse faites-vous de ça ?
04:31 Eh bien nous sommes à un moment charnière, je l'ai dit.
04:34 Un moment charnière de notre histoire.
04:35 Et c'est vrai que les sondages ne sont pas bons, ni en France ni en Europe.
04:38 C'est pour ça que j'appelle à la mobilisation des auditrices et des auditeurs.
04:41 Vous savez, la disparition de l'écologie politique, c'est ce dont rêvent nos détracteurs.
04:45 Ce dont rêvent les pollueurs qui veulent continuer à agir.
04:48 Nous avons été pendant 5 ans le rempart, la digue, face aux entreprises pétro-gazières
04:53 comme Total Energy qui veulent continuer à détruire la planète, face à Bayer Monsanto,
04:57 face à Tefal ou à Seb qui veulent continuer à mettre des polluants éternels partout.
05:01 Imaginez le 9 juin.
05:03 Imaginez le 9 juin.
05:04 Un Parlement européen avec le Rassemblement National, l'extrême droite, majoritaire
05:08 et pas de députés écologistes au Parlement européen.
05:10 Ce serait un cauchemar.
05:11 Et donc on a besoin de se mobiliser pour faire mentir les sondages, pour déjouer les sondages
05:16 et emmener le maximum de députés écologistes au Parlement européen.
05:19 Je cite cette étude de Europe Elect.
05:22 C'est une plateforme de compilation de données électorales en Europe.
05:24 Les projections donneraient 48 eurodéputés écologistes le 9 juin au lieu de 72 aujourd'hui.
05:30 Donc une grosse perte.
05:31 Vous n'avez pas votre part de responsabilité.
05:34 Vous parlez des détracteurs du pacte brun, mais vous-même, promoteur du pacte vert.
05:38 Est-ce que vous avez raté quelque chose ?
05:39 Alors on n'est sûrement pas parfait.
05:41 Je ne vais pas vous dire le contraire.
05:42 Par contre, ce que je constate, c'est que du matin, midi et soir, on a l'extrême droite
05:47 qui demande à abroger le pacte vert, à revenir en arrière, à tout détruire, avec main dans
05:52 la main, avec les lobbies bien évidemment.
05:54 Et que la majorité politique actuelle, elle cède.
05:56 Les conservateurs, les libéraux, les socialistes, ils cèdent au niveau européen.
06:00 C'est ce qu'on a constaté ces derniers mois.
06:01 On a besoin d'un groupe écologiste puissant, sinon le pacte vert est condamné.
06:05 Sinon on arrête la transition écologique.
06:07 Venons-en à votre programme, Marie Toussaint, intitulé « Pour un État-providence écologique
06:12 européen », je cite, qui passe, vous l'écrivez et vous l'assumez, qui passe par un saut
06:16 fédéral.
06:17 Ce mot fédéral qui a globalement disparu de la campagne, sauf chez vous notamment.
06:21 Le fédéralisme, il n'y a plus grand monde qui le porte en bandoulière.
06:25 À un moment, c'est plutôt la souveraineté qui est revendiquée.
06:26 En quoi le fédéralisme est-il une chance pour l'Europe aujourd'hui selon vous ?
06:30 D'abord, pour moi, la souveraineté de la France est d'autant plus grande que l'Europe
06:34 est souveraine.
06:35 Je vous prends un exemple, les médicaments.
06:36 Souveraine ou fédérale ?
06:37 Souveraine et fédérale.
06:38 Parce qu'on a besoin du fédéralisme pour défendre la souveraineté.
06:42 Je vous prends un exemple, les médicaments.
06:44 On importe 60 à 80% des substances actives pour produire nos médicaments de Chine et
06:49 d'Inde.
06:50 C'est évidemment au niveau européen qu'on peut investir de manière à pouvoir produire
06:53 ces médicaments génériques essentiels dont nous avons absolument besoin.
06:57 Mais pour ça, il faut effectivement un saut fédéral.
06:59 Et moi, je vois bien que les circonstances, elles ne sont pas là.
07:03 Le contexte, c'est un contexte dans lequel les nationalistes l'emportent.
07:06 Mais moi, je veux que les fédéralistes relèvent la tête.
07:09 Je veux que les fédéralistes relèvent la tête et qu'on parte du principe que quand
07:13 on agit ensemble, nous sommes plus puissants.
07:15 Nous sommes plus puissants pour emprunter l'argent dont nous avons besoin pour investir
07:20 et financer cette transition écologique qui n'a pas reçu de financement dans les
07:24 années 1930.
07:25 Fédéral, le mot "effort", ça veut dire abdiquer une partie de sa souveraineté ?
07:26 Non, ça veut dire la partager.
07:28 Je vous l'ai dit et je peux reprendre les mots de Mireille Delmas-Marty, il faut passer
07:32 d'une souveraineté solitaire à une souveraineté solidaire.
07:35 Mais on parlait de géopolitique tout à l'heure.
07:37 Quand on fait face à la Russie de Vladimir Poutine, face à la Chine de Xi Jinping, peut-être
07:42 demain aux États-Unis de Donald Trump, on a besoin d'être ensemble, on a besoin d'être
07:46 puissant.
07:47 Ça marche dans tous les domaines et surtout sur les questions environnementales.
07:50 Je le rappelle, le dérèglement climatique, il est sur nous.
07:52 C'est les inondations à répétition.
07:54 Ce sont les feux de forêt sur nos territoires.
07:56 Ce sont les maisons qui se fissurent.
07:58 On perd sa maison, son commerce, parfois son gagne-pain, le labeur de toute une vie à
08:03 cause du dérèglement climatique.
08:04 On ne peut pas rester immobile et on peut encore moins revenir en arrière.
08:08 Marie Toussaint, dans votre programme et au chapitre de ce saut fédéral, on trouve votre
08:15 volonté de créer une armée européenne.
08:18 C'est un changement de logiciel, on peut dire, par rapport aux valeurs fondatrices
08:25 des écologistes.
08:27 Cette armée, elle serait où ? Elle pourrait se déployer par exemple, si elle existait,
08:34 elle pourrait se déployer en Ukraine, elle pourrait se déployer à Taïwan ? Vous la
08:38 voyez comment ? C'est quoi son champ d'action si j'ose dire ?
08:42 Alors si vous me permettez, je vais répondre à votre question, mais je commence par le
08:45 début.
08:46 Vous dites que c'est en contradiction avec les valeurs de l'écologie.
08:48 Ah bah oui, la non-violence et le pacifisme, 1984, les Verts quand même.
08:51 Oui, mais vous savez, l'idée d'une armée européenne, elle naît dans les années
08:54 50.
08:55 On a fait quoi pour dire que si nous voulons mettre fin à la guerre entre les Etats européens,
08:59 posséder une armée commune c'est peut-être l'une des meilleures réponses ? On ne
09:02 l'a pas fait.
09:03 On ne l'a pas fait tout de suite et pourtant, il y a quelques mois, face notamment à la
09:06 guerre en Ukraine, on a mis en place une force de réaction rapide de 5000 hommes qui
09:10 devraient voir naissance l'année prochaine.
09:12 C'est ça l'armée européenne.
09:13 Évidemment, ce n'est pas une armée complète aussi forte que les armées nationales, mais
09:17 en tout cas c'est un début qui dit que nous partageons notre souveraineté.
09:19 Et cette armée européenne, l'enjeu ce n'est pas de la déployer partout à travers
09:25 la planète, c'est de nous mettre en capacité de nous défendre tout seul.
09:28 On reparle des Etats-Unis si on veut.
09:30 Donald Trump, il a été très clair sur sa volonté d'abandonner l'OTAN, d'abandonner
09:35 ses alliés de l'OTAN.
09:36 Nous allons être tout seul et donc il faut se mettre en capacité de répondre aux grands
09:40 enjeux de notre siècle.
09:41 Venons-en à l'immigration, l'autre priorité des Français dans cette élection, le moins
09:44 qu'on puisse dire, c'est que ce n'est pas un thème majeur chez vous.
09:47 Dans la synthèse de votre programme qui fait 29 pages, le mot « immigration » n'est
09:51 pas mentionné.
09:52 Vous avez longé dans la version longue 170 pages pour trouver une fois le mot « immigration
09:57 » page 149.
09:58 Pourquoi ?
09:59 Bien tout simplement parce que nous ne sommes pas sous la domination de l'extrême droite.
10:02 Et je le répète, nous ne pensons pas que l'autre, que l'étranger serait la cause
10:06 de tous les malheurs du monde et donc que l'immigration devrait être le sujet de
10:10 cette élection.
10:11 J'aimerais en convaincre vos auditeurs et vos auditrices, le sujet c'est le dérèglement
10:14 climatique.
10:15 Et l'inquiétude face à l'immigration illégale, vous la zappez ?
10:22 Non, je ne la zappe pas.
10:24 Et d'ailleurs nous avons des propositions.
10:26 Mais ces propositions, elles visent à quoi ?
10:27 Elles visent à respecter les valeurs de l'Europe.
10:30 C'est-à-dire la dignité.
10:31 C'est-à-dire le refus de traitement dégradant infligé à d'autres êtres humains.
10:34 Nos propositions, je vais vous en donner trois.
10:35 Un, le co-développement.
10:38 Parce qu'il faut tarir les sources de l'immigration.
10:40 Personne ne part de chez lui sans raison, surtout pas au péril de sa vie.
10:43 Deux, la solidarité entre les États membres.
10:46 On ne peut pas laisser la Grèce et l'Italie seules face à l'arrivée des réfugiés.
10:51 Et puis, la troisième proposition, c'est l'intégration.
10:57 En fait, on a vu avec l'accueil des réfugiés ukrainiennes et ukrainiens, que quand on
11:01 mettait à disposition un travail, un logement, ça se passait bien.
11:04 Et d'ailleurs que parfois les gens rentraient chez eux.
11:06 Il reste encore onze jours, Marie Toussaint.
11:08 Est-ce qu'on peut déjà poser un regard rétrospectif sur votre campagne, lancée
11:12 en décembre dernier avec le mot d'ordre de la douceur.
11:15 La douceur est politique, disiez-vous, parce qu'elle refuse que la force fasse la loi.
11:20 Mais depuis décembre, on a eu la crise agricole partout en Europe, la guerre à Gaza, les
11:24 menaces sur l'Ukraine.
11:25 Est-ce que vous avez mal senti le moment politique que nous vivions en France ?
11:28 Absolument pas et au contraire.
11:30 Bien sûr, j'ai parlé de douceur et je continuerai à défendre la douceur.
11:34 Pourquoi ? Parce que quand on vit dans un monde si plein de chaos, si plein de fracas,
11:38 et bien oui, dresser la douceur comme un autre horizon, c'est absolument indispensable.
11:43 Et ce n'est pas une faiblesse, c'est effectivement une résistance.
11:46 C'est un combat.
11:47 Et vous, Mme Nédoût, avec vous dans cette élection, je pense aux insoumis, à Manon
11:50 Aubry qui appelle clairement vos électeurs à la rejoindre actant votre disparition du
11:54 Parlement européen, vous trouvez ça doux, vous ?
11:56 Vos amis de la gauche, là, avec vous ?
11:58 Non, je ne trouve pas ça doux et je ne trouve pas ça digne.
12:01 Et d'ailleurs, la meilleure manière de défendre l'écologie au Parlement européen,
12:05 c'est de voter pour les écologistes.
12:06 Et je pourrais démultiplier les exemples de gens qui, à gauche, dans d'autres pays,
12:11 votent contre l'écologie.
12:12 Le seul choix cohérent, constant, déterminant, c'est le vote écologiste.
12:16 Mais pour en revenir à la douceur, on a absolument besoin, face à ces personnes âgées qui
12:23 meurent dans nos EHPAD, pas toujours dans des conditions acceptables, face aux violences
12:28 policières, face au matraquage des chômeurs, des personnes modestes par le gouvernement,
12:32 bien sûr qu'on a besoin de poser un horizon de douceur.
12:35 Et évidemment, c'est ce à quoi j'invite aussi la gauche.
12:38 Parce que c'est le rôle de la gauche, je crois, que de sortir de ce monde brutal, de
12:44 cette brutalité, et de construire, au contraire, les conditions d'un débat politique digne
12:48 et victorieux.
12:49 Sandrine Rousseau, votre collègue députée écologiste, a eu des mots très durs lundi.
12:54 Appelant un sursaut, elle a déclaré « Certains de nos électeurs iront à la pêche le 9
13:00 juin parce qu'ils en ont ras-le-bol, que la gauche arrive désunie, qu'elle se tape
13:05 dessus, que les éléments de langage soient pour taper les copains à un moment où l'extrême
13:09 droite est aux portes du pouvoir ».
13:11 C'est une écologiste comme vous qui le dit, vous partagez chacun de ses mots.
13:17 Écoutez, moi j'ai toujours dit que je refusais la guerre des gauches.
13:20 Pourquoi ? Parce que quand la gauche est désunie, quand elle se tape dessus, et bien on perd.
13:24 Et que oui, quand on a l'extrême droite qui gangrène la France, qui gangrène le
13:27 continent, je vous l'ai dit, en menant une guerre sans merci aux législations environnementales,
13:32 à l'heure du dérèglement climatique, on se doit d'être fort, on se doit d'agir
13:36 ensemble.
13:37 Et donc là, la priorité, c'est le 9 juin.
13:39 C'est le sort de l'Europe.
13:40 Et sachez bien que tout le monde veut en faire une élection nationale.
13:42 Moi je dis, la question c'est est-ce que l'Europe continue à agir ensemble, pour
13:47 les droits humains, pour la démocratie, pour le climat.
13:49 Vous écoutez une matinale grand format.
13:52 Notre invité ce matin est Marie Toussaint, tête de liste Les écologistes aux Européennes.
13:59 Il est 8h36.
14:01 Et la parole maintenant au journaliste expert, éditorialiste du 7-10.
14:06 Et c'est vous Célia Kirey qui démarrez.
14:12 Vous vous interrogez Marie Toussaint sur le nucléaire.
14:17 Oui bonjour Marie Toussaint.
14:18 Bonjour.
14:19 Quand on lit votre programme, vous proposez notamment, on l'a dit, un pacte social et
14:22 écologique, un état à providence écologique.
14:25 Dans le détail, il y a peu de différence finalement avec le programme de Raphaël
14:28 Glucksmann, de place publique sur l'environnement.
14:30 Sauf deux majeurs.
14:32 Le nucléaire d'abord.
14:33 Vous êtes favorable à une sortie.
14:35 Aujourd'hui c'est 25% de l'électricité produite en Europe.
14:38 Comment parvenez-vous à supprimer totalement cette énergie ? Et surtout, comment sauver
14:43 le climat, comme vous dites, atteindre la neutralité carbone en 2040 sans le nucléaire ?
14:47 Bah écoutez c'est simple.
14:50 Si on veut tenir les objectifs de l'accord de Paris, il faut réduire de 95% nos émissions
14:54 de gaz à effet de serre d'ici 2040.
14:56 Ça veut dire qu'il faut chasser les énergies fossiles.
14:58 La seule énergie avec laquelle nous pouvons aller suffisamment vite pour nous délivrer
15:02 des énergies fossiles, ce sont les énergies renouvelables.
15:06 Prenez l'exemple de l'EPR de Flermontville.
15:08 Ça a pris des années, plus d'une décennie.
15:10 Ça a coûté des milliards d'euros.
15:12 On n'est pas en capacité de produire suffisamment d'EPR dans le temps imparti pour sauver le
15:18 climat et tenir les objectifs de l'accord de Paris.
15:20 Mais comment on se passe du nucléaire ? Comment on se passe de ces 25% d'électricité ?
15:23 La question est assez franco-française.
15:24 Le nucléaire qui est là, il est là.
15:26 Avec tous ses défauts.
15:27 Je rappelle.
15:28 Mais il est là.
15:30 L'enjeu c'est comment est-ce qu'on remplace les énergies fossiles suffisamment vite.
15:34 Eh bien oui, l'éolien, le solaire, mais aussi l'hydroélectrique, la géothermie,
15:38 qui sont des énergies pilotables, puisque c'est le reproche qu'on fait aux énergies
15:42 renouvelables.
15:43 Eh bien oui, nous pouvons les déployer de manière suffisamment rapide pour y arriver.
15:46 Le temps de l'EPR de Flermontville, on estime qu'on a construit l'équivalent de 7 EPR
15:52 en termes de production d'énergie avec les énergies renouvelables.
15:55 Moi, je vous le dis, il n'y a pas d'autre solution pour tenir nos objectifs de l'accord
15:58 de Paris pour 2040 que de déployer les énergies renouvelables.
16:01 Et dans la transition, il faut importer plus de gaz.
16:03 Est-ce qu'il y aura aussi un risque d'avoir plus de charbon si on se passe totalement
16:06 de nucléaire ?
16:07 Bien sûr que non.
16:08 Bien sûr que non.
16:09 Je rappelle d'ailleurs à ce titre que je me suis battue pendant les cinq dernières
16:12 années pour que l'Europe se fixe un horizon de sortie du gaz.
16:15 Le gaz est une énergie fossile.
16:17 Et le gouvernement, en s'alliant avec Victor Orban, a désigné le gaz comme une énergie
16:22 de transition.
16:23 Mais de qui se moque-t-on ? Le gaz, il faudrait en sortir d'ici 2035 en Europe.
16:26 Et ça demande des grands changements.
16:28 Et ces grands changements, il faut les conduire, il faut les mener.
16:32 Il faut par exemple le financement du pacte vert, ce qui n'a pas eu lieu dans la législature
16:36 qui vient de se passer.
16:37 Il faut aussi s'opposer aux firmes pétrogasières comme Total Energy avec un Patrick Pouyanné
16:43 qui nous annonce bien tranquillement que dans la vie réelle, on va continuer à investir
16:47 et investir toujours plus dans le gaz parce que c'est une énergie d'avenir.
16:50 Alors justement, c'est la deuxième différence avec le programme de Raphaël Glucksmann.
16:53 Vous proposez de nationaliser Total Energy.
16:58 Vous dites "un fonds de souveraineté écologique doit permettre de reprendre le contrôle des
17:02 entreprises fossiles les plus polluantes".
17:04 Mais en quoi acheter des actions Total Energy est une priorité aujourd'hui, maintenant
17:09 pour l'État ?
17:10 Justement parce que ces firmes pétrogasières, Total mais aussi Enie et quelques autres,
17:15 continuent à investir dans des puits de charbon, de pétrole et de gaz.
17:18 Tous les scientifiques nous disent qu'il faut arrêter, qu'il ne faut plus ouvrir
17:22 un seul puits.
17:23 Et pourtant elles le font.
17:24 Elles le font parce que ça ramène de l'argent.
17:26 Eh bien, il faut que nous reprenions notre destin en main.
17:28 Et oui, l'Union Européenne doit devenir actionnaire majoritaire dans ses entreprises
17:32 pour rediriger l'ensemble des investissements aujourd'hui effectués dans les énergies
17:36 fossiles vers les énergies renouvelables.
17:39 C'est indispensable pour le climat.
17:40 Ça nous permet de relocaliser notre production.
17:43 Donc c'est bon pour l'emploi et c'est aussi bon pour nous libérer de notre dépendance
17:46 toxique à des régimes comme celui de Vladimir Poutine.
17:48 Mais cette nationalisation a un coût, vous allez nous le dire.
17:52 Cet argent public, est-ce qu'il ne serait pas plus utile pour financer la transition,
17:55 des transports propres, des rénovations de bâtiments ?
17:57 Est-ce que vous avez chiffré le coût ?
17:58 Bien sûr, on a chiffré le coût et il faut faire les deux, Madame Kihiré.
18:02 On a aujourd'hui un système dans lequel l'Union Européenne et ses Etats membres
18:06 donnent 300 milliards par an en subvention aux énergies fossiles.
18:10 C'est vraiment dingue.
18:11 Il faut que ça s'arrête.
18:13 Et le fonds que nous proposons de mettre en place, il aurait une capitalisation de 100
18:17 milliards.
18:18 100 milliards une fois.
18:19 Pour sauver la planète, tout simplement.
18:20 Et donc on a besoin de le faire.
18:22 On a aussi besoin de financer les transformations sur notre territoire.
18:26 Et pour ça, je veux le dire, l'austérité telle qu'elle a été remise en place par
18:31 la majorité politique au premier trimestre 2024, n'a aucun sens quand nous avons besoin
18:36 de dégager des investissements pour la transition écologique.
18:39 Cette austérité qui a été remise en place par les conservateurs, par les libéraux,
18:42 par les socialistes européens, elle entrave toute capacité d'investissement dans la
18:46 transition écologique.
18:47 Et même des économistes comme Pizani-Ferry, qui ne sont pas des proches des écologistes,
18:52 le soulignent.
18:53 Nous avons besoin d'investir.
18:54 Dernière question, plus politique peut-être, depuis quelques mois, on l'a dit, l'environnement
18:58 est clairement vu comme un problème.
18:59 L'ennemi numéro un, même pour l'extrême droite.
19:02 Vous êtes la tête de liste écologiste.
19:03 Est-ce que vous seriez prête à une coalition, par exemple avec le PPE, la droite européenne,
19:08 pour sauver quelques textes sur la biodiversité, par exemple, ou sur des thèmes qui vous sont
19:12 chers ?
19:13 Ecoutez, c'est un débat au sein des écologistes européens.
19:15 Je vous l'ai dit, l'enjeu c'est pacte brun contre pacte vert.
19:18 Je pense qu'en France, on suit assez mal les tractations qu'il y a.
19:23 Et moi, je peux vous dire, dans les partis européens de Marion Maréchal et de Jordan
19:26 Bardella, c'est le bazar.
19:28 Et dans le parti de François-Xavier Bellamy, c'est le bazar.
19:30 Parce que tout ça se demande comment est-ce qu'ils vont pouvoir agir ensemble, demain,
19:34 contre la nature, contre le climat.
19:35 Eh bien, si les écologistes sont suffisamment puissants, nous pouvons réorienter les choses.
19:40 Nous pouvons obtenir de nouvelles victoires pour le climat, pour la biodiversité.
19:43 Je vous ai dit, c'est l'enjeu de notre siècle.
19:45 Et donc, si l'enjeu c'est d'éviter le pacte brun, nous y prendrons notre part.
19:49 Merci Célia Kigré.
19:51 Et on retrouve maintenant Pierre Haski qui vous interroge, Marie Toussaint, pour commencer
19:56 sur la guerre à Gaza.
19:58 Bonjour.
19:59 Bonjour.
20:00 Après le drame de Rafah, le bombardement par les Israéliens d'un camp de déplacés
20:03 qui a fait des dizaines de morts, quelle doit être selon vous la réponse de la France
20:07 et de l'Europe ? Est-ce qu'il faut sanctionner Israël ?
20:09 Bien sûr, il faut sanctionner Israël.
20:12 Il faut surtout faire cesser la stratégie actuelle du gouvernement d'extrême droite,
20:17 je le rappelle, de Benjamin Netanyahou.
20:19 Il faut continuer à condamner les attaques du 7 octobre.
20:22 Il faut continuer à demander la libération des otages.
20:24 Mais la répression en cours à Gaza est absolument inacceptable.
20:28 Elle est ignoble et la voix de la France et de l'Europe doivent être la voix de la
20:31 paix.
20:32 On doit réagir.
20:33 On doit interpeller Israël sur, enfin le gouvernement de Netanyahou, sur l'irrespect
20:37 des recommandations de la Cour de justice internationale.
20:39 Quel type de sanctions ?
20:40 Eh bien, on doit d'abord, diplomatiquement, demander un cessez-le-feu immédiat et permanent.
20:46 On entend trop peu la voix de la France et de l'Europe.
20:48 On a ensuite des accords commerciaux, un accord d'association par exemple avec Israël.
20:53 Mais écoutez, cet accord d'association a été mis en place après les accords d'Oslo
20:57 pour tenir cette paix obtenue, certes de courte durée, mais sur le territoire et la solution
21:04 à deux États.
21:05 Puisque aujourd'hui, les conditions ne sont pas réunies.
21:08 Puisque le gouvernement d'extrême droite de Netanyahou sort totalement du respect du
21:13 droit international et fait s'abattre sur les Palestiniennes et les Palestiniens une
21:18 répression qui est, encore une fois, inacceptable.
21:20 Eh bien oui, il faut suspendre l'accord d'association avec Israël.
21:23 Il faut aussi arrêter notre exportation d'armes.
21:25 Et est-ce qu'il faut reconnaître l'État palestinien aujourd'hui ? Emmanuel Macron
21:28 dit "on le fera quand ça sera utile".
21:29 Ce n'est pas le moment.
21:30 Non mais il faut le faire aujourd'hui et ça aurait dû être fait depuis longtemps.
21:32 Est-ce qu'il peut y avoir un consensus européen sur le sujet ? Et en particulier, est-ce que
21:37 vous êtes en phase avec les vers allemands qui sont au gouvernement dans la coalition
21:42 et qui sont, on le sait, beaucoup plus réservés sur l'idée de sanctionner Israël ?
21:46 Oui, monsieur Aski, vous le savez, en Allemagne, on a un lien très particulier à Israël
21:51 du fait de l'histoire, évidemment.
21:53 Pour autant, les vers allemands ont voté avec nous pendant toutes les dernières sessions
21:58 au Parlement européen pour le cesser le feu immédiat et permanent, pour prévenir le
22:03 génocide à Gaza.
22:05 Et donc, quand on est face à des enjeux aussi forts, face à la guerre, face à la
22:11 paix, face aux pertes de vie humaines massives, eh bien oui, les vers allemands sont aussi
22:15 avec nous.
22:16 Et sur l'autre gros sujet du moment, la guerre en Ukraine, Emmanuel Macron vient de
22:20 donner son feu vert à ce que les armes françaises puissent frapper en territoire russe selon
22:26 certaines conditions.
22:27 Est-ce que vous êtes favorable à ce nouveau pas ?
22:30 Tant qu'il s'agit d'infrastructures militaires russes qui visent l'Ukraine.
22:34 Mais vous savez, moi j'appelle Emmanuel Macron à cesser de financer la guerre de
22:39 Vladimir Poutine.
22:40 Il est même en train de parler d'envoyer des troupes au sol face à une armée qu'on
22:44 finance.
22:45 En un an et demi, jusqu'en septembre dernier, nous avons envoyé deux fois plus d'argent
22:48 à Vladimir Poutine pour ses énergies fossiles qu'à l'Ukraine pour sa défense.
22:52 Et au premier trimestre 2024, la France a encore acheté pour 600 millions de GNL russes.
22:58 Il faut que ça cesse, il faut qu'on tape Poutine au porte-monnaie, qu'on l'empêche
23:02 de continuer à financer cette guerre.
23:04 Je me suis battue pour ça au Parlement européen pendant toutes les dernières années.
23:07 On a obtenu en début d'année le fait que l'Union européenne autorise les Etats
23:12 membres à interdire l'importation de gaz russe.
23:14 Je dis à Emmanuel Macron, il faut que cela cesse.
23:17 Est-ce que l'unité de la gauche qui a volé en éclat sur les questions de politique
23:22 étrangère, l'Ukraine et plus récemment Gaza, est-ce qu'elle peut se reconstituer
23:27 ou est-ce que selon vous, elle est fiée d'aller trop loin ?
23:29 Marie Toussaint.
23:30 Il faut absolument reconstituer cette union de la gauche.
23:34 Pourquoi ? Parce que je l'ai dit tout à l'heure, quand la gauche est divisée,
23:37 elle perd.
23:38 Et que face à la montée de l'extrême droite, nous ne pouvons pas nous permettre
23:41 de perdre.
23:42 Voilà.
23:43 Et donc j'appelle chacune et chacun à la responsabilité.
23:46 Je constate que dans sa dernière note de blog, Jean-Luc Mélenchon a dit que l'union
23:49 de la gauche n'était plus possible.
23:51 J'entends aussi Raphaël Glucksmann dire qu'il est hors de question de travailler
23:55 avec la France insoumise.
23:56 Et moi je dis, reprenez-vous, nous avons la responsabilité de construire une alternative
24:00 et à l'extrême droite et aux politiques de libéralisme naïf, d'inconséquences
24:05 écologiques, de destruction des protections sociales, qu'est la politique d'Emmanuel
24:08 Macron.
24:09 Mais quand vous voyez ce qui s'est passé hier à l'Assemblée, le drapeau palestinien,
24:12 etc.
24:13 Est-ce que vous vous participez ou vous suivez ce genre de comportement ?
24:17 Non, parce que vous savez, la cause palestinienne, elle est juste, elle est noble et elle ne
24:22 peut pas faire l'objet d'une politique intérieure.
24:25 Elle refuse d'importer ce conflit.
24:26 D'ailleurs, importer ce conflit, c'est rendre plus difficile la vie de nos compatriotes
24:30 juifs et musulmans.
24:31 Donc évidemment, on a des désaccords sur la façon de faire.
24:35 Moi, je crois que cet enjeu de la reconnaissance de la Palestine, de mettre fin aux violences,
24:41 eh bien c'est un enjeu sur lequel la France doit parler d'une voix forte en tant que
24:45 France.
24:46 Mais cette responsabilité-là, c'est aussi celle d'Emmanuel Macron.
24:49 Mais sur quelle base vous pouvez reconstituer cette unité de la gauche ? Parce qu'on
24:52 voit aujourd'hui un grand écart quand même entre les différentes forces.
24:55 Je vous l'ai dit, il faut y travailler.
24:57 Est-ce que ça veut dire mettre de côté les sujets de politique étrangère, Kifhach ?
25:01 Non, ça ne veut pas dire les mettre de côté.
25:03 Après, monsieur Aski, vous me posez des tas de questions sur la vie politique française.
25:06 Je suis là pour parler des élections européennes.
25:08 Oui, tout à fait.
25:09 Mais elles sont des questions qui ont un impact européen fondamental.
25:12 C'est aussi au Parlement européen que ça se joue.
25:14 Que se joue quoi ? La question de la capacité de l'Europe à agir pour la paix ?
25:19 Oui, et nous nous sortons et nous nous battrons.
25:21 Merci Pierre.
25:22 Et à vous Dominique Seux, économie, écologie.
25:26 Voilà le programme.
25:27 Oui, bonjour Marie Toussaint.
25:28 Depuis 1990, les émissions de gaz à effet de serre, on va parler vraiment de l'Europe,
25:33 rassurez-vous, ont baissé de 35%.
25:36 Et de notre côté, et ce n'est pas lié principalement à la désindustrialisation
25:41 comme on le dit beaucoup.
25:43 Et en même temps, la croissance économique a considérablement augmenté pour financer
25:48 la décarbonation qu'on a constatée en Europe.
25:52 Est-ce qu'au fond, vous croyez toujours qu'il y a une forme de décroissance qui
25:55 est nécessaire ?
25:56 Non mais, Monsieur Seux, merci de votre question.
26:01 Vous savez, on a aujourd'hui une économie qui continue à détruire.
26:04 On pourrait parler du découplage et débattre pendant des heures, mais on a aujourd'hui
26:07 une économie qui continue à détruire les écosystèmes et la cohésion sociale.
26:11 Demain, on doit aller vers une économie qui répare.
26:13 Et donc oui, il faut…
26:15 Je vous parle vraiment des émissions de gaz à effet de serre.
26:18 On peut effectivement parler de beaucoup de sujets, la pauvreté, les inégalités, et
26:23 ce serait formidable.
26:24 Mais ça va ensemble.
26:25 Ça va à côté d'ensemble.
26:26 Bien sûr, ce sont les plus modestes qui sont les premières victimes du dérèglement
26:28 climatique et les plus riches qui détruisent le climat.
26:30 Et une des priorités, évidemment, vous en êtes d'accord, c'est les émissions
26:34 de gaz à effet de serre.
26:35 Oui, bien sûr.
26:36 Alors, en quoi la décroissance serait une bonne chose pour les émissions de gaz à
26:41 effet de serre qui, en Europe, ont baissé de 35% depuis 1990.
26:46 Et c'est pas assez, il n'y a pas de souci.
26:48 Monsieur Seux, on doit passer d'une économie qui détruit à une économie qui répare.
26:51 Ça veut dire faire décroître ce qui détruit.
26:54 Par exemple, les énergies fossiles.
26:55 Et ça veut dire faire croître ce qui répare.
26:57 Évidemment, les énergies renouvelables, si on parle d'émissions de gaz à effet
27:00 de serre.
27:01 D'accord, donc c'est très intéressant.
27:02 On n'est pas sur une décroissance générale, on est sur une décroissance des activités
27:06 carbonées.
27:07 Des activités carbonées, des produits toxiques, dont on parle trop peu, qui ont été répartis
27:11 et répandus partout pendant si longtemps en toute impunité, qu'on continue à répandre
27:15 partout au détriment de notre santé, pour le bien de quelques firmes.
27:19 Donc oui, tout ce qui détruit, on doit y mettre fin.
27:23 D'accord, ce n'est pas une décroissance générale.
27:24 Est-ce que vous diriez que l'Europe, vous pourriez dire, ou c'est difficile à dire
27:28 que l'Europe est d'assez loin le meilleur élève de la classe mondiale sur la question
27:34 de la lutte contre le réchauffement, contre le dérèglement climatique ?
27:38 Je pose la question parce qu'il y a El Ghos tout à l'heure, vous a posé une question
27:42 en sens.
27:43 Est-ce qu'au fond, les difficultés dans les sondages de l'ensemble des écologistes
27:46 en Europe, on verra évidemment le scrutin, ne s'expliquent pas par le fait tout simplement
27:51 que vous dites sans cesse "Rien ne va, ça n'avance jamais, c'est la catastrophe
27:55 et on n'y peut rien".
27:56 Est-ce que vous n'êtes pas décourageant ?
27:58 Non mais on est en période de recul là, monsieur Seux.
28:01 Dans ces derniers mois, on le voit encore avec la loi d'orientation agricole du gouvernement,
28:06 on l'a vu au Parlement européen, par exemple on remet sur la route des méga camions de
28:10 60 tonnes, ce n'est pas ça qui va sauver le climat, on est en période de recul.
28:13 Et donc il faut continuer à avancer.
28:15 Et le dérèglement climatique, vous savez, la catastrophe, ce n'est pas les écolos
28:18 qui l'annoncent, c'est parce qu'il est là.
28:21 On a parlé des inondations, des fissures dans les maisons, des gens qui perdent leur
28:24 boulot, des agriculteurs qui perdent leur récolte à cause du dérèglement climatique.
28:28 Donc ce n'est pas nous qui l'inventons.
28:30 Il n'y a aucun doute là-dessus, mais ma question c'était un peu différente, pardon,
28:34 c'était est-ce que malgré tout, l'Europe va plus que les autres dans la bonne direction ?
28:39 L'Europe a avancé.
28:41 Elle a avancé parce qu'il y a eu des écologistes au Parlement européen.
28:44 Par exemple, en 2019, avec le plus gros groupe écologiste de l'histoire, nous avons arraché
28:49 le pacte vert des objectifs plus ambitieux pour le climat.
28:51 La question c'est en faisant-nous assez, monsieur Seux, c'est ça la question, en
28:55 faisant-nous assez.
28:56 Et à cette question, la réponse est non.
28:59 La réponse est non.
29:00 Nos objectifs ne sont toujours pas suffisants pour tenir les objectifs de l'accord de
29:04 Paris.
29:05 Mais est-ce que c'est difficile de reconnaître ce qui est avant ? Je pense par exemple, alors
29:07 pardon, un instant sur la France, ne citez pas l'organisme spécialisé annoncé il
29:12 y a quelques jours que les émissions de la France avaient baissé de 6% en 2023.
29:17 5,8.
29:18 5,8, vous avez raison, c'est une nuance importante.
29:21 Je n'ai pas vu ni communiqué ni déclaration en disant tant mieux, c'est déjà pas
29:26 mal.
29:27 Et vous savez pourquoi on avance sur ces enjeux-là, monsieur Seux ? C'est parce
29:30 que nous, les écologistes, nous avons mené des combats.
29:33 Et pas que EELV aussi, les scientifiques, les associations qui ont fait leur boulot,
29:37 les entreprises qui agissent.
29:38 Nous avons porté, emporté des combats.
29:40 Si le gouvernement agit, j'ose croire que c'est parce qu'il y a quelques années,
29:44 nous avons lancé l'affaire du siècle avec le soutien de 2,5 millions de citoyens,
29:48 fait condamner l'État français pour inaction climatique, et j'ose espérer, oui, que
29:51 ça a entraîné des actions plus importantes.
29:52 Est-ce que la France est meilleure que l'Allemagne par exemple dans ce domaine de la lutte contre
29:55 la réduction du fonds ?
29:56 La France a bien plus réduit ses émissions que la France.
29:59 Ils sont allés quasiment deux fois plus vite.
30:00 Ils partaient plus loin, c'est vrai.
30:01 Mais enfin, voilà.
30:02 Encore une fois, la question, monsieur Seux.
30:03 La France, le niveau d'émission, c'est en millions de tonnes de l'ordre ? C'est
30:09 quoi grosso modo ?
30:10 Ce qu'on doit atteindre, c'est une émission par tête, par française, par français,
30:16 de 2 tonnes.
30:17 Aujourd'hui, si on prend compte, si on tient compte des émissions importées, c'est
30:22 9 tonnes.
30:23 Donc vous voyez l'étendue du chemin qu'on a à parcourir.
30:26 La France, c'est 373 millions de tonnes.
30:28 L'Allemagne, c'est 673 millions.
30:30 Donc évidemment, il y a un grand écart.
30:32 J'ai dit monsieur Seux, on partait plus loin.
30:34 Je ne le nie pas.
30:35 Mais la question, encore une fois, c'est est-ce que nous allons assez vite ?
30:38 J'ai envie vraiment d'un instant de vous poser une question.
30:40 Mais elle est vraiment sincère, croyez-le.
30:42 L'Europe, c'est 6% des émissions.
30:45 C'était 12% il y a 20 ans.
30:49 Parce que les autres ont progressé.
30:51 Nous, on a plutôt baissé.
30:52 C'est du relatif, etc.
30:53 Comment est-ce qu'on peut, mais c'est une vraie question qu'on se pose, comment
30:56 est-ce qu'on peut avoir une influence sur le monde entier avec 6% des émissions ?
31:00 Marie Toussaint.
31:01 Vous savez, le dérèglement climatique, ce n'est pas la cour de récré, ce n'est
31:05 pas moi, monsieur, c'est les autres.
31:06 L'Europe, elle doit agir.
31:07 Elle doit faire face à ses responsabilités.
31:09 On importe la moitié de nos émissions.
31:16 En bref, si on tient compte de nos émissions importées, notre empint de carbone, elle
31:20 est quasiment au double.
31:21 Et donc, on a une responsabilité.
31:23 Vous savez, quand l'Europe s'engage, et je me suis battue pour ça, à mettre fin
31:29 à la déforestation dans le monde.
31:31 L'Union Européenne était la première consommatrice de déforestation importée.
31:35 C'est-à-dire que par notre consommation, on décime des forêts à l'autre bout du
31:38 monde, on les empêche d'absorber le carbone et on porte atteinte à la biodiversité,
31:42 en plus des droits humains bien souvent.
31:43 Quand on a Total Energy qui développe des puits, on y revient, en Ouganda par exemple
31:48 avec le projet E-COP.
31:49 Quand on a des banques européennes qui continuent à subventionner toujours plus les énergies
31:54 fossiles.
31:55 Eh bien oui, l'Europe a une part de responsabilité et nous pouvons agir à la fois sur notre
31:58 territoire mais aussi à travers la planète.
32:00 Et merci Dominique Seux.
32:04 Désolé Monsieur Seux.
32:05 Merci pour Dominique, votre intervention.
32:09 Il est 8h54, cette matinale grand format en compagnie de Marie Toussaint, tête de liste
32:14 Les écologistes se poursuit avec les auditeurs de France Inter.
32:18 Et bonjour Robert, soyez le bienvenu, on vous écoute.
32:24 Oui, bonjour, bonjour à tous.
32:27 Oui, bien sûr, je ne doutais pas que Madame Toussaint allait encore cogner sur Total,
32:31 comme c'est l'habitude et souvent sur votre antenne.
32:33 Sachez Madame que lorsque vous accusez cette entreprise de tous les maux de la terre, ce
32:38 sont aussi ses salariés que vous montrez du doigt, que vous considérez comme complices
32:42 de guerre, voire des criminels déjà entendus par Monsieur Jadot.
32:45 Derrière ces salariés de Total, il y a aussi des familles qui n'ont rien demandé d'autre
32:50 que d'avoir un travail pour vivre tout simplement.
32:52 Alors cessez de les insulter, de les mépriser, de délivrer votre haine comme vous le faites.
32:58 Vous êtes salarié vous-même, Robert, de cette entreprise ?
33:02 Oui, pendant 30 ans et actuellement je suis donc retraité de Total.
33:07 Alors Marie Toussaint va vous répondre.
33:09 Marie Toussaint vous répond.
33:10 Merci, merci pour votre intervention.
33:12 Merci beaucoup Robert et je veux d'abord vous dire que je suis bien désolée que vous
33:17 ressentiez un mépris de ma part, de la part des écologistes pour les salariés.
33:22 Ce n'est absolument pas le cas.
33:24 Ce que nous décrions c'est une stratégie qui est décidée au plus haut de l'entreprise,
33:28 qui est portée par des actionnaires, des actionnaires qui sont en partie salariés
33:31 chez Total, je sais bien, mais des actionnaires qui recherchent le profit.
33:34 C'est normal vu les règles économiques actuelles.
33:36 C'est pour ça que les règles économiques actuelles, il faut les changer.
33:38 Et si je peux me permettre de faire un parallèle avec la crise agricole, la mobilisation du
33:43 monde agricole.
33:44 Pendant la crise agricole, on a aussi beaucoup entendu de la part de la FNSE1, d'Arnaud
33:48 Rousseau, du groupe Avril, un groupe d'agro-business dans les biocarburants, ou de la part du gouvernement
33:52 que la faute du malheur agricole, c'était les écologistes, c'était le pacte vert,
33:59 les mesures écolo qui d'ailleurs n'existent pas dans le pacte vert, mais peu importe.
34:03 La réalité c'est que nous menons la même bataille que les agriculteurs contre un modèle
34:08 économique qui les appauvrit, qui les empêche littéralement de vivre dignement de leur
34:13 travail et qui ne rend pas accessible l'alimentation et une alimentation saine à toutes et à
34:18 tous.
34:19 Et donc ce modèle-là, il faut le changer.
34:20 Il faut le changer et vous savez, le dérèglement climatique, la perte de biodiversité liée
34:25 en partie aux pesticides, elles sont sur nous, elles vont porter atteinte à nos conditions
34:29 de vie et elles portent d'abord atteinte aux conditions de travail des salariés.
34:32 Ce qu'il faut qu'on change, c'est tout le modèle économique et ça se fait avec
34:37 les salariés.
34:38 - Sur l'agriculture, Ulysse est au standard.
34:40 Bonjour, bienvenue !
34:41 - Oui, bonjour à tous, bonjour Madame Toussaint.
34:44 Moi je vous souhaitais réagir par rapport à sortir au nucléaire.
34:47 Je suis éleveur et producteur de fromage dans l'Aude.
34:51 De plus en plus, on nous propose de mettre des panneaux photovoltaïques dans les champs
34:57 au lieu de faire pousser des céréales ou de l'herbe pour les brebis.
35:01 Et ce qui m'en triste aujourd'hui, c'est que je gagnerais plus d'argent à produire
35:05 de l'énergie verte plutôt que de faire mon métier.
35:08 Je voulais savoir quelle était votre réaction, qu'en pensez-vous ?
35:10 - Ce sont des cloches qu'on entend derrière vous ?
35:12 - Oui, je finis de traire les brebis.
35:15 - Ah bah magnifique ! En écoutant France Inter donc !
35:19 - Bah merci !
35:20 - C'est ce qui fait la qualité de votre fromage sans doute !
35:22 - Sans doute !
35:23 - Merci infiniment Ulysse.
35:26 Question importante que soulève notre auditeur, Marie Toussaint.
35:30 - Oui, merci beaucoup Ulysse.
35:31 D'abord, je serais ravie de goûter votre fromage.
35:33 Je ne sais pas si vous pouvez m'en faire parvenir un peu.
35:35 Non, je vous remercie pour votre question.
35:37 J'ai envie de vous répondre que vous avez raison.
35:39 C'est pour ça qu'on veut une autre politique agricole commune.
35:41 C'est d'ailleurs pour ça qu'il faut voter écologiste pour envoyer Benoît Biteau,
35:44 paysan de Charente, se battre pour transformer cette politique agricole commune et qu'elle
35:49 permette de soutenir plutôt que l'hectare, l'emploi et les bonnes pratiques écologiques
35:53 pour que vous Ulysse, vous puissiez vivre dignement de votre travail dans le respect
35:58 des bonnes pratiques écologiques.
36:00 Maintenant, on a aussi effectivement besoin de produire des énergies renouvelables.
36:03 Il y en aura une part qui peut être alliée avec l'agriculture, mais il faut le faire
36:09 en toute rationalité.
36:10 Et encore une fois, je le répète, ce qui se fait sans les gens se fait contre les gens.
36:13 Et donc, il faut que ces mesures, ce modèle, il soit construit avec les paysannes et les
36:17 paysans.
36:18 - Allez, une dernière question rapide au standard.
36:20 Bonjour Fanny.
36:21 - Oui, bonjour.
36:22 - On vous écoute.
36:23 - Oui, question.
36:24 Je ne comprends pas pourquoi, à l'échelle européenne, le parti de gauche qui est
36:29 représenté par M.
36:30 Glucksmann et le parti écologiste dont vous êtes la tête de liste, Mme Toussaint, ne
36:34 s'entendent pas, ne fassent pas de coalition pour ne représenter qu'une seule liste et
36:38 ainsi être plus fort, fort comme vous l'avez indiqué à 8h36.
36:41 - 8h36, vous êtes précise.
36:43 Merci Fanny pour cette question.
36:46 Marie Toussaint, réponse rapide s'il vous plaît.
36:47 - Merci Fanny.
36:48 Alors, vous dites, vous dites, à l'échelle européenne, pourquoi est-ce que vous ne vous
36:53 alliez pas ? Bon, vous avez bien compris cette élection, c'est-à-dire que c'est une élection
36:59 proportionnelle qui conduise à envoyer des gens siégés dans des groupes politiques.
37:02 Il se trouve, Fanny, je suis désolée, mais que le groupe socialiste au Parlement européen
37:06 ne porte pas la même chose que le groupe écologiste.
37:09 Les socialistes européens ont voté pour l'austérité, que j'ai dénoncé tout à
37:12 l'heure parce qu'elle empêchait l'investissement dans la transition écologique, votent pour
37:15 Moitier pour les OGM, ont voté pour remettre des méga-camions sur les routes ou pour le
37:19 détricotage environnemental de la politique agricole commune.
37:22 Donc la seule manière de porter l'écologie, Fanny, je vous invite à le faire vraiment,
37:26 c'est de voter écologiste.
37:27 - Parlez, et de voter écologiste, ce sont vos mots.
37:29 Marie Toussaint, on vous retrouve juste après le flash avec deux jeunes électeurs qui votent
37:34 pour la première fois à ces européennes et qui ont envie de débattre avec vous.