Peut-on mettre sur un même un plan le gouvernement de Israël et le Hamas ? Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) demande des mandats d'arrêts à la fois envers des dirigeants terroristes et Benjamin Netanyahu. Le Premier ministre israélien exprime son dégout, Joe Biden le soutient et qualifie ces réquisitions de "scandaleuses". En revanche, la France "soutient l'indépendance de la CPI", et l'Union européenne "prend note". Pourquoi la France soutient-elle l'indépendance de la CPI ? Pour en parler, Gérard Araud, grand diplomate, encien ambassadeur de France en Israël et aux Etats-Unis.
Regardez L'invité de RTL Soir avec Julien Sellier du 21 mai 2024
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00:00 Bonsoir, Julia Selye, Isabelle Choquet et Cyprien Simi.
00:04 Allez RTL, bonsoir, votre émission se poursuit.
00:07 On va accueillir maintenant notre invitée face à l'événement avec cette question
00:10 qui agite toutes les diplomaties aujourd'hui.
00:13 Est-ce qu'on peut mettre sur un même plan le gouvernement israélien et le Hamas ?
00:17 Le procureur de la CPI, la Cour pénale internationale,
00:20 demande des mandats d'arrêt visant à la fois des dirigeants terroristes
00:24 et le Premier ministre Netanyahou.
00:26 Netanyahou exprime son dégoût.
00:28 Joe Biden le soutient et qualifie ses réquisitions de scandaleuses.
00:31 En revanche, la France, dans un communiqué, soutient l'indépendance de la CPI
00:36 et l'Union européenne prend note.
00:38 Bonsoir Gérard Haraud.
00:39 Bonsoir.
00:40 Grand diplomate, ancien ambassadeur de France,
00:42 justement en Israël et aux Etats-Unis, on a besoin ce soir de votre expertise.
00:46 Pourquoi la France soutient l'indépendance de la CPI
00:49 là où Washington, Berlin, Rome dénoncent une équivalence entre le Hamas et Israël ?
00:55 Pourquoi ces positions différentes ?
00:57 D'abord, je pense qu'il n'y a pas d'équivalence entre le Hamas et le gouvernement israélien.
01:03 Il y a concomitance des deux inculpations,
01:06 mais elles se font d'ailleurs sur des bases différentes.
01:10 Imaginez que si la CPI n'avait inculpé que les Israéliens,
01:16 aussitôt vous imaginez le camp pro-israélien aurait hurlé.
01:20 Et inversement si on avait inculpé que les Palestiniens.
01:23 Donc il y a eu une concomitance, mais de nouveau je ne vois pas d'équivalence entre les deux.
01:30 Et du côté français, la France ne se prononce absolument pas sur les inculpations elles-mêmes.
01:36 Elle se contente de dire "nous prenons note et nous rappelons la nécessité de défendre l'indépendance de la Cour".
01:44 Mais de dire "soutenir l'indépendance de la Cour pénale internationale" avec des guillemets,
01:49 c'est pas une façon déguisée aussi de dire à Israël "vous allez trop loin" ?
01:52 C'est une façon déguisée de dire à tous ceux qui veulent faire pression sur la Cour,
01:57 et en particulier les Etats-Unis, de leur dire "vous allez trop loin".
02:02 Parce que vous savez, les Etats-Unis sous Trump, déjà,
02:05 ils avaient sanctionné les agents de la Cour pénale internationale
02:09 parce que ceux-ci avaient lancé une enquête sur la conduite des troupes américaines d'Afghanistan.
02:15 Mais quand Joe Biden s'insurgit, il brise quand même une certaine neutralité vis-à-vis de la CPI, c'est pas courant ça ?
02:20 Les Etats-Unis ne sont pas membres de la Cour pénale internationale.
02:25 Avec Joe Biden et Israël, on est toujours dans la même situation.
02:30 Joe Biden est un peu piégé entre d'un côté une partie de sa gauche qui est pro-palestinienne,
02:37 et de l'autre la majorité de l'électorat qui reste pro-israélienne.
02:41 Et il essaye de concilier la chèvre et le chou.
02:45 Donc, un coup, il soutient Israël, comme on le voit face à la Cour pénale internationale.
02:51 Et un coup, comme vous le savez, il bloque les livraisons d'armes et il critique Israël.
02:57 Biden est en campagne électorale.
02:59 Les juges de la CPI qui vont devoir suivre ou non ces réquisitions,
03:03 et demander ou non les mandats d'arrêt,
03:06 ils sont déjà et en Israël et aux Etats-Unis pointés du doigt.
03:10 On ne peut pas douter de leur neutralité à ces juges.
03:12 Vous savez, ce sont des êtres humains.
03:14 Ils ont été sélectionnés.
03:17 Ce sont des juges qui viennent du monde entier.
03:21 On pense qu'ils sont impartiaux.
03:23 Je note d'ailleurs que le procureur, qui est très critiqué par Israël,
03:27 qui est un britannique d'origine pakistanaise,
03:29 et qu'on critique sous le prétexte qu'il est musulman,
03:32 l'état d'Israël, lorsqu'il a été désigné, s'en était félicité.
03:37 – Alors justement, ce procureur, sur le plan du droit,
03:40 sa décision, est-ce qu'elle vous semble motivée, logique ?
03:43 Je rappelle qu'il implique des faits tels que le fait d'affamer délibéramment des civils,
03:49 homicide intentionnel, extermination ou meurtre.
03:51 Tout ça, ça vous paraît motivé, logique ?
03:53 – Alors du côté, il a aussi, comme de nouveau,
03:56 il accuse aussi trois responsables du Hamas.
03:59 En ce qui concerne affamer la population israélienne,
04:03 la population de Gaza, c'est une évidence.
04:06 C'est tellement une évidence que les Israéliens s'opposent
04:10 à la livraison de nourriture à la population palestinienne,
04:14 que les Français, les Américains et d'autres,
04:17 se sont vus obligés de parachuter de l'aide aux Palestiniens.
04:22 Toutes les organisations non-gouvernementales,
04:24 les Nations Unies, ne cessent de crier à la crise humanitaire majeure,
04:30 en termes à la fois alimentaire et sanitaire.
04:34 Donc, je dirais de nouveau, il faut qu'il y ait une enquête,
04:38 et je ne peux pas me prononcer, mais il est évident
04:41 que la bande de Gaza est en train de subir une crise humanitaire grave.
04:45 Et l'accès, c'est quand même les Israéliens qui l'ont.
04:49 – Vous qui connaissez parfaitement la société israélienne,
04:51 est-ce que ces réquisitions du procureur de la CPI,
04:54 elles fragilisent le Premier ministre Netanyahou ?
04:57 Ou au contraire, est-ce que vous pensez que la population
05:01 peut être choquée par ce parallèle sous hasard du calendrier
05:04 avec le Hamas, à faire bloc derrière lui ?
05:06 – Moi je pense qu'hélas, c'est la seconde hypothèse.
05:11 Je pense qu'en réalité, on voit d'ailleurs déjà un résultat positif,
05:16 paradoxalement, pour Netanyahou, c'est que les États-Unis,
05:21 qui devenaient de plus en plus critiques, se rangent derrière lui.
05:26 Je connais assez bien Israël, je sais que ce pays vit,
05:29 je dirais, dans une atmosphère volontiers obsidionale,
05:33 se sent volontiers victime de la communauté internationale,
05:37 et j'aurais tendance à penser que cela va, en réalité,
05:41 paradoxalement, conforter Benjamin Netanyahou.
05:44 – Il est quand même sous pression en ce moment,
05:46 le Premier ministre israélien, parce que la guerre continue,
05:49 mais le Hamas est toujours là, les otages ne sont pas libérés,
05:52 les membres du cabinet de guerre s'interrogent,
05:54 on ne sait pas quelle stratégie il va trouver pour l'après.
05:58 Il n'est pas quand même un peu dans une impasse ?
06:00 – Oui, et je dirais que c'est ça la vraie question.
06:03 Je dirais qu'au-delà de l'indignation sur l'inculpation,
06:07 qui durera peut-être 48 heures ou 72 heures,
06:11 le vrai problème, c'est l'impasse dans laquelle se trouve
06:14 la stratégie militaire de Benjamin Netanyahou.
06:17 Benjamin Netanyahou a annoncé qu'il voulait éradiquer le Hamas,
06:21 c'est impossible militairement, on le voit bien,
06:24 et l'opposition commence à dire "il faut une solution politique".
06:29 Si vous voulez vous débarrasser du Hamas dans la bande de Gassin,
06:32 il faut lui donner un remplaçant,
06:34 et cela Benjamin Netanyahou refuse absolument de le concevoir,
06:39 parce que ce serait tôt ou tard parler de la solution des deux États.
06:43 – Merci beaucoup Gérard, au ancien ambassadeur de France en Israël
06:46 et aux États-Unis d'avoir été ce soir notre invité face à l'événement.
06:50 Merci pour votre expertise dans RTL, bonsoir.
06:52 – Bonsoir.
06:53 [Générique]
06:54 – RTL, bonsoir.
06:55 – Et dans quelques secondes, tout autre chose,
06:57 RTL Inside dans le Sud-Ouest.
06:59 – Le chantage des chasseurs dans les Landes,
07:01 on ne peut plus chasser la louette,
07:03 eh bien on arrête de chasser les sangliers, débrouillez-vous.
07:05 – Et puis la misoconférence qui arrive, le programme Alex.
07:08 – Eva Longoria est revenue sur sa passion pour Limoges.
07:11 – Oh, tout de suite.
07:13 [Générique]
07:14 – RTL, bonsoir, jusqu'à 20h.