Au-delà de l’écologie, le réemploi solidaire est aussi une source d’emplois locaux, durables et inclusifs, avec notamment de nombreux contrats d’insertion. Catherine Mechkour-Di Maria, secrétaire générale du Réseau national des ressourceries et recycleries, revient sur le rôle sociétal de ces structures, dans un contexte de montée en puissance du réemploi lucratif, incarné par exemple par Vinted.
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00:00 *Générique*
00:06 La guerre est-elle déclarée entre les acteurs du réemploi solidaire et ceux du réemploi lucratif ?
00:11 Une chose est sûre, les premiers s'arment pour continuer de peser dans la filière.
00:15 Fédérer les acteurs du réemploi solidaire, c'est l'objectif derrière la création de l'Union pour le réemploi solidaire,
00:20 cofondée fin février par six structures de l'ESS.
00:23 C'est le cas du Réseau national des ressourceries et recycleries.
00:27 Nous recevons pour en parler sa secrétaire générale, Catherine Mechcourdi. Maria nous accompagne, bonjour.
00:32 *- Bonjour.
00:32 - Bienvenue dans ce Martin Pack. Catherine, merci beaucoup d'être avec nous.
00:35 La genèse de ce projet fédérateur, je crois que c'est la loi AGEC, anti-gaspillage pour une économie solidaire,
00:40 qui date de 2018. C'est ça, pourquoi ? Qu'est-ce que cette loi a créé ?
00:44 - Alors, la loi AGEC, elle a eu plein de conséquences, mais pour le réemploi, elle a eu le mérite de poser le réemploi en débat public.
00:53 Les gens parlent beaucoup de recyclage, ils ne savent pas que le réemploi est prioritaire sur le recyclage.
00:58 L'autre impact très important pour le réemploi, c'est la création des fonds réemploi,
01:02 qui obligent les éco-organismes qui collectent des éco-contributions.
01:06 Quand vous achetez un vêtement, il y a une éco-contribution qui va dans un éco-organisme,
01:10 qui est chargé de gérer la fin de vie de son produit, donc de le financer.
01:14 On a fait du plaidoyer avec la société civile pour que les éco-organismes consacrent 5% de leurs éco-contributions
01:21 aux acteurs du réemploi solidaire, aux acteurs de l'ESS qui font du réemploi.
01:25 Donc ça, c'est une grande avancée pour le réemploi solidaire, qui permet de solvabiliser l'activité de nos adhérents,
01:31 des ressources récyclerées et acteurs, qui est un vrai sujet aujourd'hui.
01:34 - Ce qui n'est pas simple, cette question de la rentabilité, pour vous ?
01:36 - Ce n'est pas simple. Il faut comprendre la différence. Il y a plein de différences entre le réemploi solidaire et le réemploi créatif.
01:41 Une différence fondamentale, c'est quand les gens nous apportent leurs objets, nous, on prend tout.
01:45 On prend les fourchettes, les assiettes, le canipé, un peu d'effraîchis, et on s'en occupe.
01:49 On le trie, on le nettoie, on le remet en vente.
01:52 Si on ne s'en occupait pas, ces objets finiraient dans les incinérateurs, dans les centres d'enfouissement.
01:56 - Vous dites aujourd'hui que le réemploi lucratif ne prend pas tout ?
01:59 - Ah non, le réemploi lucratif, il est crème, les gisements.
02:01 Sa vocation, à lui, c'est de faire du bénéfice, du profit, de rémunérer ses actionnaires.
02:05 Donc tout ça, ça ne l'intéresse pas.
02:06 Or, pour équilibrer nos modèles économiques, on a besoin de tout.
02:09 On a besoin de la fourchette, mais on a aussi besoin du bel objet, là, qui coûte un peu cher,
02:13 qu'on va pouvoir vendre à juste prix, qui permet d'équilibrer l'ensemble.
02:16 Ce que je veux dire par là, c'est que, nous, c'est l'intérêt général qui nous guide.
02:21 Donc cette mission d'intérêt général, qui fait économiser de l'argent au pouvoir public,
02:25 il n'est pas une anomalie qu'on demande que les pouvoirs publics solvabilisent notre modèle.
02:28 Alors aujourd'hui, les acteurs lucratifs sont dopés à la levée de fonds par des investisseurs.
02:33 Ils cherchent leur modèle économique, ils ne l'ont pas encore trouvé.
02:36 Et nous, on ne peut pas faire appel à ça, mais on a besoin d'un soutien de la puissance publique.
02:40 - Mais quand on voit, pour citer Vinted, parce que c'est celui qu'on connaît le plus,
02:44 la plateforme, elle réalise en 2023 un chiffre d'affaires de presque 600 millions d'euros.
02:48 C'est une hausse de 60% par rapport à l'année précédente.
02:51 Ce n'est pas quand même une bonne nouvelle pour vous, pour le secteur du réemploi ?
02:55 Comment vous analysez ces chiffres ?
02:58 - Bah écoutez, c'est une bonne et une mauvaise nouvelle.
03:00 Alors une bonne nouvelle que les gens se disent, il faut acheter du réemploi,
03:04 c'est tant et que ce soit pour les bonnes raisons.
03:06 Le problème, c'est l'effet rebond du réemploi.
03:08 Aujourd'hui, si les gens revendent de façon compulsive leurs objets,
03:11 si c'est pour acheter du neuf, puisque c'est le cas dans 70% des cas,
03:15 70% des gens qui revendent les objets sur ces plateformes vont acheter du neuf.
03:19 Donc on a le réemploi qui stimule l'achat de neuf.
03:22 On n'est pas dans la sobriété là.
03:23 On n'est pas dans la préservation des ressources naturelles à la réduction des chèques,
03:26 qui est notre objectif à nous.
03:28 Donc il y a des effets de bord tout à fait pervers au développement de ces plateformes,
03:33 au-delà du fait que ça érode la culture du don,
03:37 c'est-à-dire que les gens, au lieu d'aller nous donner leurs objets et les revendre,
03:40 ça participe à une grande marchandisation généralisée de la société.
03:43 Est-ce très positif d'envisager de vendre tout le temps et d'être obsédé par ça ?
03:47 Des chercheurs ont objectivé le fait que ces plateformes, dont Vinted,
03:51 stimulent la turbo-consommation.
03:53 Donc le bilan est très mitigé là-dessus.
03:56 La question de fond, c'est la sensibilisation des personnes.
04:00 Voilà, si j'achète du renfort...
04:01 - Et les changements de comportement ?
04:02 Et selon vous, avec des plateformes comme celle-là, ce n'est pas vraiment encore le cas ?
04:06 - Non seulement ça ne change pas, mais ça a l'effet dévié dans le mauvais sens.
04:08 Mais puisqu'on parle de changement de comportement des consommateurs,
04:12 moi je voudrais quand même, parce qu'on lance une campagne avec Zéro Ouest,
04:15 les Amis de la Terre, sur la phase déco, après la phase fashion, la phase déco,
04:19 la mer de toutes les batailles, c'est la lutte contre la surproduction.
04:22 Il faut réduire les mises de marché de produits en accord avec les accords de Paris.
04:27 Voilà, et moi j'aimerais bien lancer un autre concept,
04:29 c'est le changement de comportement des législateurs,
04:31 qui prendrait la mesure du problème et qui se mettraient à interdire un certain nombre de choses.
04:36 Je vous donne un exemple.
04:37 J'ai eu un échange très croustillant avec une journaliste, là, cette semaine,
04:41 puisqu'on parlait de ça, et elle me dit "mais on ne peut pas interdire aux entreprises de produire".
04:46 Alors là je lui réponds "effectivement, mais c'est la liberté d'entreprendre,
04:49 elle est précieuse, ça fait partie des libertés fondamentales,
04:52 mais la liberté de vivre sur une planète habitable, ce n'est pas important aussi".
04:56 Donc on a tellement baigné depuis 40 ans dans la liberté, le marché,
05:00 les entreprises doivent entreprendre, on ne peut rien faire,
05:04 qu'on a oublié que la liberté principale de tout être humain,
05:07 c'est de pouvoir respirer de l'air pur, avoir de l'herbe qui pousse,
05:10 je sais que c'est le sujet suivant, et avoir des ressources...
05:12 Non mais franchement, je pense qu'il faut qu'on sorte de la boîte, là,
05:15 et qu'on se mette à interdire certaines mises sur le marché.
05:19 Nous, on est le déversoir de la société de consommation,
05:22 il n'y a pas besoin d'aller au Ghana pour voir des montagnes de textile.
05:25 Moi j'ai dirigé un groupe Emmaüs dans une autre ville,
05:28 il y avait des pyramides de sacs de vêtements, c'est dément, il faut que ça s'arrête.
05:32 - Pour parler du législateur, il va dans votre sens aujourd'hui, vous trouvez ?
05:37 - Alors il y a des choses positives,
05:39 nous on considère que les politiques publiques de soutien au réemploi solidaire
05:42 ne sont pas au niveau aujourd'hui,
05:45 on a besoin d'avoir des investissements,
05:48 notamment sur des projets collectifs, des villages du réemploi solidaire.
05:51 Alors il y a des choses, on a besoin que les éco-organismes financent beaucoup plus,
05:55 les éco-organismes et le principe pollueur-payeur,
05:57 aujourd'hui, c'est quelques pourcents du financement des ressources survie,
06:01 ça devrait être beaucoup plus.
06:02 Alors il y a, Elisabeth Borne avant de partir à lancer une inspection de Bercy
06:07 sur le fonctionnement des éco-organismes,
06:09 on espère que ça va vraiment faire bouger les lignes,
06:11 mais aujourd'hui on n'est pas au niveau de l'enjeu,
06:14 sur la filière meubles on est à 5% de réemploi.
06:17 Et le réemploi solidaire pour nous,
06:19 c'est aussi un formidable levier de mobilisation de l'associé civil,
06:22 voilà, c'est ça qui est important,
06:23 c'est-à-dire que ça permet aux citoyens de s'emparer de ces sujets-là,
06:27 d'agir, de délibérer, de se dire qu'ils sont concernés.
06:30 C'est pour ça que le tissu associatif du réemploi solidaire,
06:33 il est hyper précieux pour faire la transition écologique et sociale.
06:36 - On n'en a pas parlé, ça crée de l'emploi aussi au niveau local,
06:38 le réemploi solidaire ?
06:39 - Absolument, des emplois non délocalisables,
06:41 7000 salariés, 5000 bénévoles, ça pourrait être beaucoup plus.
06:45 Donc oui, ce sont des emplois aussi pour des personnes en insertion,
06:48 qui ont quitté le marché de l'emploi depuis longtemps,
06:51 qui sont accompagnées vers une reprise d'activité.
06:53 C'est aussi tout, on a autant de bénévoles, 5000 bénévoles,
06:57 ce sont des personnes âgées qui reviennent dans les ressourceries et recycleries,
07:00 qui disent "je reprends goût à la vie".
07:02 Parce qu'il y en a qui trient les livres,
07:04 d'autres qui apprennent à tricoter à des jeunes,
07:06 d'autres qui s'occupent des jouets des enfants.
07:08 C'est aussi, on a un enjeu collectif de changer de projet de société quand même.
07:13 Société de consommation, de surproduction,
07:15 et c'est quoi la suite en fait ?
07:17 Alors nous, la suite qu'on propose, c'est moins de bien, plus de bien.
07:20 - Cette union des acteurs du secteur,
07:22 elle peut vous aider à atteindre ces objectifs-là ?
07:25 - Absolument, alors elle nous aide déjà à dire au grand public,
07:28 s'il vous plaît ne faites pas la confusion.
07:30 Le réemploi solidaire, ce n'est pas le réemploi lucratif.
07:33 Il faut expliquer les différences.
07:34 On n'a pas d'actionnaire, on est en circuit court,
07:36 nous on n'achète pas nos téléphones aux Etats-Unis,
07:38 on ne les fait pas reconditionner en Pologne pour les vendre à Sarcelles.
07:41 Tout est fait localement.
07:42 On a aussi une gouvernance partagée,
07:44 on en a de bénévoles, on peut finir président.
07:46 Quand vous entrez au 7ème étage de la Samaritaine avec son rayon vintage,
07:49 vous ne finirez pas PDG de la Samaritaine.
07:51 Donc voilà, c'est de dire, c'est différent,
07:54 donc ça c'est le grand public.
07:55 Pour les pouvoirs publics, c'est de leur dire,
07:57 nous considérons que le réemploi solidaire est un modèle d'avenir.
08:00 Parce qu'il est ancré localement,
08:02 parce qu'il mobilise la société civile,
08:04 parce qu'il prône la sobriété,
08:06 parce qu'il propose aussi de gérer le partage.
08:08 Et ça c'est l'avenir.
08:10 L'avenir, ce n'est pas Elon Musk qui nous envoie tous sur Mars
08:14 parce que la Terre est détruite.
08:16 Non seulement on considère qu'on a fait nos preuves par le passé,
08:19 mais que si on nous donnait les moyens de développer nos activités,
08:23 on pourrait changer l'ambiance du pays.
08:25 - Les enjeux sont différents pour parler de vous,
08:27 plus précisément les enjeux aujourd'hui pour les ressourceries et ressources.
08:30 Et vous, vous avez dit que vous n'avez pas de problème
08:33 avec les ressources,
08:34 mais vous avez dit que vous n'avez pas de problème
08:36 avec les ressources,
08:37 mais vous avez dit que vous n'avez pas de problème
08:39 avec les ressources,
08:40 mais vous avez dit que vous n'avez pas de problème
08:42 avec les ressources,
08:43 mais vous avez dit que vous n'avez pas de problème
08:45 avec les ressources,
08:46 mais vous avez dit que vous n'avez pas de problème
08:48 avec les ressources,
08:49 mais vous avez dit que vous n'avez pas de problème
08:51 avec les ressources,
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08:54 avec les ressources,
08:55 mais vous avez dit que vous n'avez pas de problème
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