Les agriculteurs des Pyrénées-Orientales se rassemblent une nouvelle fois ce jeudi matin au marché Saint-Charles de Perpignan pour ensuite rejoindre le péage sud de l'A9. Ils envisagent de "contrôler" les camions marocains pour dénoncer une "concurrence déloyale".
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00:00 La flamme olympique est partie, mais ça ne va pas forcément rouler normalement pour autant.
00:04 Aujourd'hui, dans les Pyrénées-Orientales, les agriculteurs se mobilisent de nouveau.
00:08 Ce matin, ça se passe à Perpignan.
00:10 À partir de 9h, au marché Saint-Charles, les agriculteurs ont prévu ensuite de rejoindre le péage de Perpignan Sud.
00:17 Pourquoi ? Pourquoi faire au niveau du péage ?
00:20 On va poser toutes ces questions à votre invitée, Suzanne Chaudjaille.
00:23 Nous sommes avec le président du syndicat agricole FDSA, ici en Pays-Catalogne.
00:27 Bonjour Bruno Villa.
00:28 Bonjour.
00:29 Alors, vous vous mobilisez aujourd'hui contre la concurrence marocaine.
00:33 Vous dites que les importations de fruits et légumes en provenance du Maroc ont augmenté ces dernières années,
00:38 avec des prix de vente bien moins élevés que les produits français.
00:42 Est-ce qu'il y a vraiment une forte augmentation des importations ?
00:46 Oui, bien sûr.
00:47 Alors, permettez-moi déjà de vous remercier de m'accueillir ce matin avant l'action syndicale,
00:50 et de saluer aussi les auditeurs de France Bleu Roussillon,
00:54 que nous allons pour certains un peu déranger aujourd'hui.
00:57 Mais comme je sais qu'ils soutiennent beaucoup les agriculteurs,
00:59 je sais qu'ils vont être compréhensifs.
01:01 Donc clairement, aujourd'hui, notre cible c'est les importations extra communautaires,
01:07 et notamment les importations venant du Maroc.
01:11 On a aujourd'hui des réglementations qui sont pas remises au goût du jour,
01:18 qui génèrent des distorsions de concurrence pour les producteurs français et européens,
01:23 et permettent de faire rentrer des volumes conséquents.
01:26 Mais il y a vraiment beaucoup plus de frais et légumes marocains en ce moment sur les étals ?
01:31 Oui, écoutez, si on prend l'exemple de la tomate,
01:34 à l'espace de 4 ans, les volumes d'importation de tomates marocaines ont augmenté de 40%.
01:40 C'est significatif, alors qu'on veut défendre notre souveraineté alimentaire,
01:44 et clairement, c'est parce qu'il y a des règles d'introduction qui sont trop permissives,
01:48 et qui ne protègent pas suffisamment les producteurs français et européens.
01:51 Donc vers 9h30, vous serez au péage sud de Perpignan.
01:54 Vous prévoyez quoi ? De stopper les camions marocains ?
01:58 Alors aujourd'hui, on prévoit de contrôler les camions marocains,
02:02 pour montrer justement ce que nous dénonçons sur les règles d'importation,
02:06 qui ne sont pas aujourd'hui suffisamment protectrices pour les producteurs français et européens,
02:12 et également pour dénoncer les problématiques d'étiquetage et d'information du consommateur,
02:19 qui dépendent aussi de règles européennes,
02:21 dans lesquelles, pour nous, il nous paraît indispensable que toutes les barquettes
02:25 et les unités de vente aux consommateurs soient clairement identifiées avec l'origine du produit.
02:30 Parce qu'aujourd'hui, on a des consommateurs qui achètent des produits d'importation sans s'en rendre compte.
02:35 Et vous allez faire quoi ? Vous allez vider les camions ?
02:37 Comme on a pu voir au début de l'année, certaines images lors de la mobilisation partout en France ?
02:41 Alors pas du tout, ce n'est pas notre objectif.
02:42 Sachez que lors des événements agricoles dans le département, comme ça a été le cas en France,
02:46 nous n'avons détruit et vidé aucun camion.
02:49 Ce n'est pas l'image qu'on veut donner de l'agriculture.
02:51 On a vu du vin quand même sur la route au niveau du péage.
02:55 Parfois, il y a des excès qui sont liés quand même à la colère des agriculteurs,
02:58 qu'on peut comprendre quand ils voient qu'ils n'arrivent pas à vivre de leur métier,
03:02 des produits qui arrivent à des prix très bas et qui les concurrencent.
03:06 Mais clairement, c'est parce que nous, on revendique ce qu'on souhaite faire comme action,
03:10 parce qu'on veut montrer qu'on est aussi responsable,
03:14 qu'on revendique des choses et qu'on n'est pas là pour détruire de l'alimentation,
03:17 d'à la mesure où on respecte notre réglementation.
03:20 - Vous attendez beaucoup d'agriculteurs ce matin ?
03:22 - Alors, on a la chance et l'honneur de recevoir dans notre département
03:27 déjà une soixantaine de producteurs qui viennent de la France entière pour cette action,
03:32 donc de Bretagne, de la région Nouvelle-Aquitaine et PACA,
03:36 qui vont être rejoints par les producteurs locaux.
03:39 Donc, on a 60 producteurs qui viennent de l'extérieur
03:42 et on devra avoir une centaine de producteurs aussi locaux
03:45 qui vont se mobiliser avec des tracteurs pour cette action aujourd'hui.
03:50 - Donc aujourd'hui, c'est contre la concurrence marocaine,
03:53 mais la concurrence espagnole, elle vous dérange plus ?
03:56 - Alors, chaque fois, on a des sujets qui sont particuliers.
04:00 Là, on est sur un sujet européen et c'est peut-être assez inédit pour le dire,
04:05 parce que notre action aujourd'hui a le soutien des organisations de producteurs espagnols.
04:11 - Donc là, vous êtes main dans la main, aujourd'hui ?
04:14 - Sur cette action, effectivement, on a des revendications
04:17 qui sont liées à des réglementations européennes,
04:20 qui concernent également les producteurs espagnols,
04:23 qui sont aussi très concurrencés par la problématique
04:26 de la production et des importations marocaines,
04:29 pour la bonne et simple raison qu'une heure de travail au Maroc
04:33 coûte moins d'un euro de l'heure.
04:36 En France, c'est 14 euros, en Espagne, c'est 8 euros.
04:39 Donc, en termes de concurrence, on est tous concernés,
04:41 en termes de producteurs européens, par cette concurrence déloyale
04:45 liée à des coûts de production qui sont bien inférieurs aux nôtres.
04:48 Et c'est, pour une première fois, il faut le dire, inédit.
04:51 Alors, ils ne seront pas là parce qu'ils n'ont pas pu venir,
04:53 mais ils nous ont envoyé un courrier de soutien dans l'action commune,
04:57 parce qu'ils ont les mêmes revendications que nous
04:59 vis-à-vis des importations extra-communautaires.
05:01 - Il est 7h52 sur France Bleu, Roussillon.
05:03 Suzanne Chojaï, notre invitée.
05:05 Bruno Villa, président du syndicat agricole FDSEA dans les Pyrénées-Orientales.
05:09 - Est-ce que ce n'est pas aux distributeurs, aux supermarchés,
05:11 de vendre moins de produits et légumes, de fruits et légumes marocains ?
05:15 - Bien entendu. Chacun a sa part de responsabilité.
05:19 Si les distributeurs ne mettaient pas ces produits dans les rayons,
05:22 on n'aurait pas ces importations.
05:25 Clairement, aujourd'hui, pourquoi on trouve ces produits dans les rayons ?
05:28 Parce que les distributeurs les importent car ils sont moins chers
05:31 et qu'ils réalisent plus de marge sur la vente de ces produits.
05:34 Si on rajoute le fait qu'ils sont difficilement identifiables dans le rayon
05:38 parce que l'origine n'est pas claire sur le produit,
05:40 clairement, on met en erreur le consommateur qui, lui, souhaite acheter des produits
05:45 plutôt français et qui va acheter des produits d'importation sans le savoir.
05:49 Donc la part de responsabilité des distributeurs, elle est significative.
05:53 - On vote dans un peu plus de trois semaines pour les élections européennes.
05:56 Est-ce qu'aujourd'hui, il y a un parti, un candidat, une tête de liste
06:00 qui semble répondre aux attentes des agriculteurs ?
06:03 Ou est-ce qu'au contraire, l'agriculture, on n'en parle pas assez dans cette campagne, selon vous ?
06:07 - Nous, on ne fait pas de politique et je me garderais bien de dire
06:12 qui pourra faire la meilleure politique parce qu'on sait bien qu'au niveau européen,
06:16 il est particulièrement compliqué quand on réunit l'ensemble des élus
06:20 de tous les pays européens pour décider des réglementations européennes.
06:24 La complexité que l'on retrouve est encore plus quand on discute des sujets agricoles.
06:29 Néanmoins, l'avenir de l'agriculture européenne comme l'avenir de l'agriculture française,
06:34 c'est essentiel pour notre avenir demain, pour notre alimentation
06:38 et pour la souveraineté alimentaire européenne.
06:40 Et l'agriculture, c'est un sujet qui doit être central
06:43 et qui doit être fort au niveau des orientations et des décisions européennes.
06:48 - D'ailleurs, les députés français ont commencé à examiner hier le projet de loi agricole,
06:52 le projet qui a été revu d'ailleurs au début de l'année
06:55 après la forte mobilisation des agriculteurs.
06:58 Est-ce que vous êtes convaincu par ce projet ?
07:00 - Alors convaincu, on va dire, pas complètement évidemment.
07:04 On attend plus encore sur le projet de loi d'orientation agricole.
07:08 Il faut savoir que c'est quand même un sujet dans lequel on attend
07:13 beaucoup de réponses par rapport à la crise agricole
07:16 et des orientations et des décisions fortes qui donnent une trajectoire
07:19 et des perspectives à l'agriculture,
07:21 comme la reconnaissance d'agriculture comme étant d'intérêt majeur pour la nation.
07:25 - C'est le cas justement ?
07:25 - Oui, tout à fait.
07:26 Ça fait partie des solutions qui sont inscrites et proposées.
07:30 Bon, il faut quand même que tout soit voté et accepté
07:33 une fois que tout sera débattu à l'Assemblée nationale.
07:36 Il faut aussi qu'on ait des décisions fortes sur le renouvellement des générations
07:40 parce que clairement c'est l'enjeu aussi majeur de l'agriculture.
07:43 - Là aussi, il est prévu de faciliter la transmission des exploitations.
07:46 Est-ce que c'est un bon point selon vous ?
07:49 - Bien sûr, c'est essentiel.
07:50 Aujourd'hui, on voit la difficulté qu'on a de renouvellement des agriculteurs,
07:54 d'installation pour des problématiques, il faut le dire aussi,
07:57 de revenus et de difficultés que l'on rencontre à exercer ce métier.
08:02 Et clairement, la loi d'orientation agricole doit permettre
08:05 de faciliter le travail des agriculteurs et d'améliorer leur rémunération.
08:08 - Dernière question, très rapidement s'il vous plaît.
08:10 Il est prévu une autre mobilisation le 3 juin.
08:13 Et là, c'est les agriculteurs espagnols qui veulent bloquer toute la frontière franco-espagnole.
08:17 Est-ce que vous soutiendrez cette mobilisation ?
08:19 Est-ce qu'il y aura des agriculteurs catalans qui vont rejoindre ce mouvement ?
08:23 - Alors écoutez, on les a rencontrés puisqu'ils sont venus récemment
08:27 pour le meeting de Puigdemont à Argelès.
08:30 On a discuté avec eux, on n'a pas pris de décision par rapport à ce que nous allions faire.
08:34 Parce que c'est un mouvement qui est asyndical.
08:37 Nous, on est effectivement un syndicat, la FDSEA, FNSEA et les jeunes agriculteurs
08:43 avec qui on fait l'événement et la mobilisation aujourd'hui.
08:46 Et donc clairement, on n'a pas décidé de ce qu'allait être notre décision
08:52 sur le fait de les rejoindre ou pas.
08:54 On doit en discuter et on verra si effectivement on rallie éventuellement ce mouvement.
09:00 - Bruno Villa, président du syndicat FDSEA dans les Pyrénées-Orientales,
09:03 merci beaucoup d'être passé ce matin en studio,
09:05 juste avant votre rassemblement à 9h au marché Saint-Charles de Perpignan.
09:10 Et ensuite les agriculteurs prévoient de rejoindre le péage sud.
09:14 Merci, à bientôt ! - Merci à vous !